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sur les politiques nationales forestières tropicales

Les arènes internationales ont eu un rôle déterminant dans l’adoption et/ou la révision des politiques forestières nationales dans les pays tropicaux. Pour comprendre ce processus de modification des politiques nationales forestières, il est donc nécessaire d’étudier ce qui s’est passé au niveau international à travers la promotion successive des plans d’action forestiers tropicaux (PAFt) et des programmes forestiers nationaux (PFN), la constitution du Groupe intergouvernemental sur les forêts (GIF) puis du Forum des Nations unies sur les forêts (FNuF), pour avoir finalement une vision générale de la prise en compte des forêts dans les divers accords internationaux d’environnement.

2.1.1.

2.1.1. L’échec du PAFT L’échec du PAFT

La destruction et la dégradation des écosystèmes tropicaux ont commencé à alerter l’opinion mondiale au cours des années 1980. Malgré des financements internationaux destinés à enrayer ces phénomènes en diminution (FAO, 1985), la nécessité d’agir fut reconnue lors de la sixième session du Comité de la mise en valeur des forêts

dans les tropiques[[1100]], en 1983. Il fut alors proposé au Comité des forêts (COFO) de

la FAO, conjointement avec la Banque mondiale, le World research Institute (WrI) et le PNuD, d’établir au plus vite une série de programmes et d’actions à l’échelle

régionale et mondiale pour y répondre. C’est ainsi qu’émergea le PAFt[[1111]] en 1985,

suite au IXe Congrès forestier mondial de Mexico. Ce Plan fut lancé officiellement

2 ans plus tard, en 1987, lors d’une conférence organisée à Bellagio sous l’égide de la FAO, rassemblant bailleurs de fonds, OIG, ONG, états, afin d’établir la stratégie d’action future pour les forêts tropicales. Les états membres présents adoptèrent le PAFt, qui devait être décliné au niveau national en plans d’action forestiers nationaux (PAFN). Pour tous les participants de l’époque, le PAFt constituait alors un cadre d’action stratégique visant à améliorer le développement du secteur forestier à l’échelle nationale, tout en répondant aux besoins des populations locales (smouts, ibid.). La coor-dination entre les bailleurs de fonds et les états en était la « clé de voûte » (FAO, 1992) et cinq domaines d’action y étaient identifiés : la foresterie dans l’utilisation des terres, le développement des industries forestières, le bois de feu et l’énergie, la conservation des écosystèmes forestiers tropicaux et le développement institutionnel (FAO, ibid.). La réforme des politiques nationales forestières tropicales en constituait un volet essentiel. Même si de nombreux pays en disposaient alors (parfois anciennes), le

manque de cohérence[[1122]] et l’insuffisance des considérations environnementales

dans les politiques de l’époque poussèrent le PAFt à devenir l’instrument phare en matière de stratégies nationales de développement forestier (smouts, ibid.). Les opportunités qu’offrait le PAFt en tant que cadre de référence pour le développement du secteur forestier ont alors favorisé l’aide multilatérale et bilatérale dans les pays tropicaux. Comme l’écrit le président de la Banque mondiale de l’époque, Conable (1988) : « Ce plan stimule les engagements financiers des dirigeants des pays en dévelop-pement et des pays industrialisés, des organisations d’aide au dévelopdévelop-pement et du secteur privé aux fins de promouvoir un effort collectif vaste et coordonné pour la sauvegarde des ressources forestières tropicales ».

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[1100]] Organe statutaire de l’Organisation des Nations unies (ONu).

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[1111]] Le Plan d’action forestier tropical sera rebaptisé Programme d’action forestier tropical en 1991.

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La déclinaison du PAFt en PAFN fut effective pour plus de 90 pays à travers le monde, principalement dans les trois bassins tropicaux (FAO, 1992). La mise en œuvre des PAFN fut, quant à elle, plus ou moins rapide selon les contextes nationaux. en 1994, 39 pays étaient en phase de planification, 19 avaient un plan d’action élaboré et 34 se situaient à un stade avancé de mise en œuvre (FAO, 1994b).

Malgré son objectif de s’attaquer aux éléments moteurs de la déforestation (du moins identifiés comme tels à l’époque), principalement l’agriculture itinérante et le défrichement illégal, le processus s’est délité au début des années 1990 à la suite des nombreuses critiques des ONG (smouts, 2001). Les premières évaluations du PAFt par les ONG révélèrent en effet diverses failles dans le processus. Les critiques principales dénonçaient notamment la reproduction du schéma technocratique forestier qui, au lieu de s’attaquer aux composantes défaillantes des secteurs forestiers nationaux, institutionnalisait et renforçait la logique productiviste et industrielle dans la gestion (singer, 2003 ; Guéneau, 2011). Par ailleurs, l’absence de participation des populations locales fut également souvent pointée du doigt, et ce y compris par les organisations fondatrices (FAO, 1994b). Les ONG, entrainant avec elles les bailleurs de fonds, décidèrent alors de retirer leur soutien à la FAO, désignée comme seule responsable. Bien que n’ayant pas réussi son pari de changer structurellement les politiques forestières nationales, le PAFt a néanmoins eu l’avantage, à cette époque, de donner un éclairage sur les réformes nécessaires à mettre en œuvre pour traiter des problèmes de déforestation (Like et Fletcher, 1992).

2.1.2.

2.1.2. Du PAFT aux PFN Du PAFT aux PFN

Face à l’échec du PAFt, et compte tenu des nouveaux enjeux débattus à rio (comme la reconnaissance des enjeux environnementaux et sociaux), la communauté inter-nationale a poursuivi son processus de négociation sur les forêts qui s’est concrétisé, en 1995, par la formation du GIF. Il fut établi par la CNueD pour coordonner des propositions d’actions visant à mettre en œuvre les principes forestiers explicitement détaillés dans l’Agenda 21 (Nations unies, 1992a). Basé à New-York, le GIF était composé des membres de la CNueD, des états membres des Nations unies, des états non-membres, d’institutions spécialisées, d’OIG et d’ONG (CNueD, 1995). son mandat,

d’une durée de 2 ans, l’a conduit à se focaliser sur 12 composantes[[1133]] nécessitant des

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[1133]] 1) Plans nationaux en matière de forêts et d’utilisation des terres ; 2) causes sous-jacentes de la déforestation et de la dégradation ; 3) savoir traditionnel lié à la forêt ; 4) écosystèmes fragiles touchés par la désertification et impact de la pollution atmosphérique ; 5) besoins et exigences des pays à faible couvert forestier ; 6) coopération internationale et transfert technologique ; 7) évaluation des profits forestiers ; 8) évaluation forestière ; 9) critères et indicateurs ; 10) commerce et environnement ; 11) organisations internationales, institutions et instruments multilatéraux ; 12) mécanismes juridiques.

programmes d’actions, le tout devant faire l’objet de recommandations politiques

pour la 5e session de la Commission des Nations unies sur le développement durable

(CNuDD)[[1144]] prévue en 1997 (uNFF, 2002). Pas moins de 150 propositions d’actions ont

pu être établies au cours de son mandat. une fois ce dernier terminé, conformément à l’une des propositions du GIF, la CNueD créa le Forum intergouvernemental sur les forêts (FIF) en 1997 comme successeur du GIF. Composé des mêmes membres que le GIF et toujours basé à New-York (CNueD, 1997), le FIF fut chargé de suivre la mise en application des propositions d’actions du GIF, et de compléter ces dernières (le tout devant être réalisé avant la fin de son mandat en 2000). Au final, ce sont ainsi 270 propositions qui ont été formulées au travers de ces deux instances internationales. Parmi le large spectre des problématiques abordées par le GIF, les composantes 1 et 12 ont amené les acteurs concernés à s’intéresser plus précisément aux politiques

forestières nationales (söderlund et Pottinger, 2001). Les PFN qui en ont découlé[[1155]]

vont alors symboliser un nouveau départ pour l’intervention internationale en matière de forêts, l’objectif étant que les PFN devaient être élaborés selon une optique favorisant le partage des informations et la participation de tous les acteurs dépendants des forêts (cf. schéma 1), contrairement à l’approche top-down du PAFt qui avait fait l’objet de fortes critiques (singer, 2003).

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[1144]] La CNuDD a été établie par l’Assemblée générale des Nations unies lors de la CNueD de 1992, à rio. elle est responsable du suivi des actions mises en place dans le cadre de la déclaration de rio et de l’Agenda 21 aux niveaux international et national. elle est composée de 53 pays membres et se réunit annuellement pour établir et suivre des programmes multiannuels de travaux basés sur des thématiques spécifiques selon l’agenda voté.

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[1155]] rappelons que ces plans avaient été recommandés au sein du chapitre 11 de l’Agenda 21 défini en 1992 : « […] établir et appliquer, le cas échéant, des programmes d’action nationaux en matière de foresterie ou des plans de gestion, de préservation et de mise en valeur durable des forêts » (Nations unies, 1992a).

Les PFN sont censés s’inscrire dans une perspective de développement durable (FAO, 1996) en fournissant un cadre de planification générale pour le développement du secteur forestier des pays tropicaux. Conformément aux principes forestiers de 1992 (Nations unies, 1992b), ces cadres se sont étendus à tous les types de forêts incluant de fait les pays tempérés, leur préparation et leur mise en œuvre se fondant sur la base

de douze principes structurant[[1166]](FAO, 1996). Ces PFN sont devenus l’instrument

principal de révision des politiques forestières et rencontrent encore aujourd’hui un large succès, divers pays continuant à les mettre en place. Depuis la fin des années 1990, de nombreuses institutions et bailleurs ont soutenu (et continuent de soutenir) activement la définition et la mise en place de ces PFN dans les pays tropicaux via des