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3. DES CHOIX MÉTHODOLOGIQUES ADAPTÉS À UN CONTEXTE PARTICULIER

3.2. Stratégie d’analyse : l’importance de visualiser les données

L’objet de recherche se « construit progressivement en lien avec le terrain, à partir de l’interaction des données recueillies et de l’analyse qui en est tirée […]. » (Deslauriers et Kérisit, 1997, p. 94). Riche d’une centaine de pages de transcription de comptes rendus, de plusieurs

productions artistiques, de six mini rapports ayant déjà fait l’objet de validation auprès des participants, d’un journal de bord bien documenté et de multiples fiches de lecture traitant des thématiques s’étant imposées en cours de collecte de données, dont les problématiques liées à l’attachement, j’étais maintenant prête procéder à cette nouvelle étape, soit l’analyse inductive du corpus. Franchir cette nouvelle étape allait permettre de finaliser la construction du corpus et de lui donner vie sous la forme de tableaux.

L’analyse inductive est ce processus qui consiste à organiser et à interpréter le corpus de données pour en découvrir le sens. Comme les données générées par les recherches qualitatives s’avèrent habituellement volumineuses et qu’elles sont organisées selon une séquence temporelle et pragmatique plutôt que par thèmes, leur interprétation requiert effectivement qu’elles soient bien organisées. Cette recherche n’y fait pas exception. C’est pourquoi la rigueur méthodologique et la systématisation du processus d’analyse se sont imposées, ainsi que la présence de balises dans le travail d’analyse, pour en assurer une meilleure efficacité (Mukamurera, Lacourse et Couturier, 2006). Cette partie expose comment j’y suis parvenue.

Mon choix s’est porté sur le modèle d’analyse interactif élaboré par Miles et Huberman (2003). Généralement bien connu dans la communauté scientifique, ce modèle comporte trois types d'activités analytiques, lesquelles forment un processus cyclique, itératif et circulaire, intégrant la collecte des données. Les multiples « allers-retours » sont ici considérés à deux niveaux, soit entre la chercheuse et les données, ainsi qu’entre la chercheuse et les participants au groupe durant le travail même d’analyse, offrant une dynamique plus féconde puisque le sens attribué au corpus de données est constamment corroboré par les participants eux-mêmes. La création de sens s’inscrit ainsi à l’intérieur d’une démarche faisant place à l’intercompréhension et à l’intersubjectivité de la chercheuse et des participants, et ce, au cours des différents moments de rencontre, en l’occurrence les quatre entretiens de groupe.

Les trois activités, la condensation des données, la présentation des données, l’élaboration et la vérification des conclusions sont reprises individuellement. Comme mentionnés précédemment, les entretiens de groupe avec les adolescents, constituant la principale activité de collecte de données, ont été enregistrés et transcrits intégralement. L’utilisation d’un logiciel d’analyse de données avait été considérée initialement, mais il s’est finalement avéré plus

avantageux de traiter les données manuellement considérant la présence des productions artistiques des jeunes.

3.2.1. Condensation des données : des mots-clés, des thèmes et des concepts récurrents Cette activité s’effectue de manière continue au cours de l’analyse et vise à réduire l’information sans que celle-ci ne perde sa valeur significative. « La condensation des données comprend la codification des données, l’élaboration des catégories, la codification thématique et la recherche de modèles de référence. » (Fortin, 2010, p. 460). Elle suppose l’établissement d’une méthode de classification pour trier les données recueillies et ainsi en faciliter l’accès. Elle fait référence au processus qui consiste à reconnaître les mots-clés, les thèmes ou les concepts récurrents émergents et à leur attribuer des symboles ou des marqueurs en vue de former des catégories. En résumé, la codification vise à classer, ordonner, résumer et repérer les données pour en faciliter l’accès et par la suite procéder à leur analyse proprement dite. Elle requiert de multiples et rigoureuses relectures des données recueillies (Deslauriers, 1991; Fortin, 2010; Miles et Huberman, 2003; Mukamurera, Lacourse et Couturier, 2006; Savoie-Zajc, 2011; Van der Maren, 1995).

3.2.2. Présentation des données sous la forme de tableaux

Cette activité signifie l'assemblage organisé des informations qui permettent le cas échéant d’en tirer des conclusions. Malgré le fait qu'elle prenne généralement la forme d’un texte narratif, Miles et Huberman (2003) soulignent l’importance de la stratégie de visualisation des données et suggèrent de les regrouper autour de matrices et de figures descriptives et explicatives, selon le but de leur analyse. « Le recours aux tableaux ou à la production d’images, de métaphores aide le chercheur à établir des liens entre les catégories d’analyse. » (Savoie-Zajc, 2011, p. 138). C’est ce qui a été préconisé dans le cadre de cette recherche.

3.2.3. L'élaboration-vérification des conclusions : la création de sens

Cette activité mène au fait de dégager des significations pour expliquer les données présentées, de décider du sens des choses, de relever des régularités, des irrégularités, de déceler des tendances, et ce, dès la collecte des données, puis au moment de leur réduction et de leur présentation. En définitive, « une fois que le chercheur a effectué les regroupements jugés

importants et constitué un schéma explicatif, il doit lui donner un sens. » (Savoie-Zajc, 2011, p. 139). À la phase d’interprétation, qui intervient au fur et à mesure de l’analyse, s’ajoute la vérification des conclusions quant à leur vraisemblance, leur rigueur et leur conformité, en un mot leur validité.

3.2.4. Miles et Huberman : un modèle d’analyse interactif et itératif 75

Quoique la méthode qualitative par une approche inductive admette un certain nombre de choix subjectifs à différentes étapes du processus de recherche, le constant retour aux participants pendant les activités de collecte des données aura sûrement permis d’objectiver la démarche de coconstruction des savoirs expérientiels. Les jeunes ont exprimé à plusieurs reprises leur satisfaction d’être ainsi consultés.