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I.A.4.1/DEFINITION

La stéatose hépatique se définit par l’accumulation de lipides au sein du cytoplasme des hépatocytes. Elle doit représenter au moins 5 % de la masse totale du foie pour être considérée comme telle (4). Il existe plusieurs types de stéatoses hépatiques déterminés en fonction de l’étiologie, de la topographie ainsi qu’en fonction de l’histologie.

En fonction de la topographie, trois types de stéatoses sont répertoriées: la stéatose focale, multifocale et diffuse. En fonction de l’étiologie, il existe deux grandes familles de stéatose: La stéatose alcoolique due à une consommation excessive d’alcool et la stéatose non-alcoolique (non-alcoholic fatty liver disease ; NAFLD selon la terminologie anglo-saxonne) due à d’autres causes que l’éthylisme. Parmi tous les types de stéatose décrits, l’histologie permet de réaliser la distinction entre une stéatose seule, appelée stéatose pure et une stéatose accompagnée d’une inflammation, de nécrose et de fibrose appelée stéato-hépatite (Non-Alcoholic Steato-Hepatitis; NASH selon la terminologie anglo-saxonne) (Fig. I-15). Cette dernière est décrite histologiquement par une dégénérescence ballonnisante des hépatocytes avec une inclusion quasi constante de corps de Mallory composés d’agrégats intracytoplasmiques, de filaments intermédiaires, de cytokératine mais aussi de mitochondries géantes. Un infiltrat lobulaire constitué de polynucléaires neutrophiles ou de cellules mononuclées, la présence d’une fibrose puis une surcharge ferrique peuvent également être observée (35-40) (Fig. I-16).

L’histologie permet aussi de classifier la stéatose selon la morphologie des vacuoles et le type de lipide envahissant l’hépatocyte selon deux types :

ƒ La stéatose macrovacuolaire: les vacuoles ont une taille supérieure à celle du noyau cellulaire et il est déplacé vers la périphérie cellulaire.

ƒ La stéatose microvacuolaire: beaucoup plus rare que la macrovacuolaire en stéatose pure, les vacuoles ont une taille inférieure à celle du noyau cellulaire et ne le déplacent pas en périphérie. Un dysfonctionnement aigu des mitochondries, lié dans certains cas à une délétion de l'ADN mitochondrial a été observé.

Chapitre 1: Contexte clinique et scientifique

Les hépatopathies chroniques et la méthode de référence pour le diagnostic - La steatose hépatique

42 Fig. I-15: Coupes histologiques présentant une stéatose non-alcoolique pure de type macrovacuolaire

avec une coloration à l’hématoxyline-éosine (à gauche) et une stéato-hépatite non alcoolique de type macrovacuolaire avec la présence d’une fibrose péricellulaire mis en évidence au trichrome de

Masson (à droite). Les coupes sont présentées avec un grossissement original × 20.

Fig. I-16: Coupe histologique présentant des ballonisations hépatocytaires avec des corps de Mallory

(à gauche) puis mise en évidence d’une inflammation riche en polymorphonucléaires neutrophiles (à droite) au cours d’une stéato-hépatite non alcoolique.

I.A.4.2/EPIDEMIOLOGIE

Faute de tests suffisamment non-invasifs, sensibles et spécifiques, la prévalence de la stéatose est encore mal connue. Il en demeure pas moins que son incidence est en hausse constante en rapport avec l’augmentation de l’incidence de ses étiologies comme le diabète de type 2 et l’obésité. Dans les pays occidentaux, la stéatose hépatique est considérée comme la première cause d’hépatopathies chroniques (5). Fondée sur des séries issues d’explorations utilisant l’échographie ou la spectroscopie par résonance magnétique comme méthode de diagnostique, la prévalence de la stéatose non-alcoolique est estimée entre 20 et 30 % en Europe (1,2). Une étude américaine estimait la prévalence de la stéatose hépatique à 34 % de la population générale (3). Elle serait de l’ordre de 20 % chez les

adultes jeunes en bonne santé (41) et de 56 à 78 % chez les sujets obèses (42-45). La stéato-hépatite est retrouvée chez 2,1 à 2,4 % des sujets en bonne santé (46) et chez 56 à 20 % des sujets obèses (42-45).

Facteurs de risques

Plusieurs facteurs de risques ont été isolés (47) :

ƒ le surpoids (Indice de masse corporelle supérieur à 25 kg.m-2), ƒ l'hyperglycémie à jeun (supérieure à 6,1 mmol.L-1),

ƒ l'hypertriglycéridémie (supérieure à 1,7 mmol.L-1),

ƒ l'adiposité centrale (tour de taille supérieur à 88 pour les femmes et supérieur à 102 cm pour les hommes),

ƒ un taux d'HDL-cholestérol bas (inférieur à 0,5 g/l pour les femmes et inférieur à 0,4 g/l pour les hommes).

I.A.4.3/ETIOLOGIES

Les étiologies sont nombreuses et à distinguer en fonction du type de stéatose (48,49).

Pour la stéatose macro-vésiculaire des causes comme l’alcoolisme, l’excès calorique (notamment via une alimentation riche en hydrates de carbone à résorption courte), les corticothérapies, le foie cardiaque retrouvé dans l’insuffisance cardiaque droite, une alimentation parentérale mal contrôlée, le diabète non insulino-requérant, le by-pass jéjuno-intestinal, les carences protidiques et les dénutritions (alimentaire ou suite à une maladie digestive) ont été observées.

Pour la stéatose micro-vésiculaire, des causes comme, la stéatose aiguë gravidique, le syndrome de Reye et de nombreuses origines médicamenteuses telles que le traitement antiépileptique à l’acide valproïque, certains Anti-Inflammatoires Non Stéroïdiens (AINS) comme l’ibuprofène, des antibiotiques du groupe des tétracyclines, des anti-angineux comme l’amiodarone, des antidépresseurs tricycliques ainsi que des antirétroviraux utilisée dans le traitement contre le Syndrome de l’Immunodéficience Humaine (SIDA) ont été rapportées.

I.A.4.4/PHYSIOPATHOLOGIE

La physiopathologie de la stéatose hépatique demeure encore mal connue. En premier lieu, la stéatose résulte d’un déséquilibre entre la synthèse des lipides et leur oxydation. Le contenu hépatique en triglycérides est déterminé par la concentration d’acides gras libres circulants, leur beta-oxydation, la lipogenèse de novo (synthèse de triglycérides à partir des glucides) et la sécrétion des VLDL-triglycérides. Pour expliquer ce déséquilibre et donc la genèse de la stéatose hépatique puis de la stéato-hépatite non-alcoolique, le modèle classique a d’abord été fondé sur la « 2-hit hypothesis » décrite par Day et al en 1998 (50).

Chapitre 1: Contexte clinique et scientifique

Les hépatopathies chroniques et la méthode de référence pour le diagnostic - La steatose hépatique

44 Cette hypothèse suppose que dans un premier temps une dégénérescence graisseuse des hépatocytes touche le foie suivi d’une seconde de stress oxydatif mettant en jeu les cytokines responsable par la suite du processus inflammatoire et de la fibrose.

L’accumulation de graisse intra-hépatique serait due à une augmentation des acides gras circulant d’une part et à une inhibition sévère de la bêta-oxydation mitochondriale des acides gras d’autre part. La bêta-oxydation mitochondriale consiste à dégrader les acides gras en acétyl-CoA et en équivalent réduits, le NADH et le FADH2. Ce processus fait intervenir de nombreuses enzymes et des cofacteurs tels que le coenzyme A et la L-Carnitine essentielle à la pénétration des acides gras à chaine longue dans la mitochondrie.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer l’afflux excessif d’acide gras libres comme l’apport alimentaire excessif mais aussi l’insulino-résistance. Chez le sujet obèse, le flux d’acides gras parvenant au foie est accru, en raison de l’augmentation de masse de tissu adipeux mais également du fait d’une diminution de l’effet antilipolytique de l’insuline. L’augmentation de la masse du tissu adipeux entraine une augmentation du TNFD qui conjuguée à l’insulino-résistance diminue la synthèse de l’apolipoprotéine B-100 entrainant alors une déplétion de l’exportation des acides gras sous formes de VLDL.

L’hyperinsulinémie induit l’expression de SREBP1c responsable de la transcription des enzymes impliquées dans la lipogenèse de novo contribuant à l’augmentation de la quantité d’acide gras intra-hépatique, notamment d’acide oléique.

L’inhibition de la bêta-oxydation peut être expliquée par la lipotoxicité des lipides. En effet, en quantité anormalement élevée, les lipides deviennent toxiques pour les cellules et les mitochondries, siège de le beta-oxydation, et peuvent entrainer:

Un déficit ou une inhibition de l’action d’enzyme mitochondriales impliquée dans la bêta-oxydation. Une déplétion en cofacteurs permettant la pénétration des acides gras dans la mitochondrie (L-carnitine) ou l’oxydation des acides gras (coenzyme A).

Une augmentation de NADH par excès de production entrainant secondairement une inhibition de certaines enzymes nécessaires à la bêta-oxydation.

Une altération du génome mitochondrial qui, à partir de l’ADN mitochondrial (l’ADNmt), code treize protéines impliquées dans la phosphorylation oxydative. Ceci entraine des dysfonctionnements de la chaine respiratoire permettant notamment la réoxydation en NAD+ et FAD des équivalents réduits de la bêta-oxydation (NADH et FADH2) afin de les rendre réutilisables pour de nouvelle réaction. Ceci a pour effet d’augmenter la quantité de NADH et de bloquer les réactions de beta-oxydation.

Le passage de la stéatose hépatique non-alcoolique à la stéato-hépatite non-alcoolique n’est pas encore clairement établi et constitue la seconde étape de l’hypothèse utilisée pour modéliser la physiopathologie de la stéatose non-alcoolique.

Les facteurs responsables de ce passage seraient en particulier le stress oxydatif, la peroxydation lipidique et la mise en jeu de cytokines aussi bien d’origine adipeuse qu’intra-hépatique en particulier le TNF-D.

Les radicaux libres issus de la peroxydation des acides gras causent des altérations aux membranes cellulaires. La peroxydation lipidique entraine la production de métabolites réactifs comme le malondialdehyde (MDA), ou le 4-hydroxynonenal (HNE), responsables d’altération du métabolisme cellulaire.

Les espèces réactives de l’oxygène (Reative Oxygene Species, ROS en anglais) sont également des substances pro-inflammatoires capables d’activer directement les cellules étoilées hépatique fortement impliquées dans la fibrogénèse hépatique comme décrit précédemment dans le paragraphe (I.A.2.2). Au cours de la stéatose non alcoolique, des dépôts hépatiques de fer ont été constatés. Or le fer, qui est un pro-oxydant, pourrait jouer un rôle important dans ce processus. En effet, il majore la peroxydation des acides gras polyinsaturés à chaine longues par l’intermédiaire de la réaction de Fenton.

Le système des endocannabinoïdes serait également mis en jeu. Dans le foie physiologique, les récepteurs CB1 et CB2 sont peu exprimés alors qu’au cours de la stéatose hépatique non alcoolique, le récepteur CB1 est surexprimé. L’activation des récepteurs CB1 des myofibroblastes hépatiques entraîne une augmentation de la fibrose.

L’hypothèse est donc que le stress oxydatif induise des lésions intra-cellulaires et le déclenchement de la réaction inflammatoire, responsables d’une activation des mécanismes de réparation cellulaire et de cicatrisation (fibrose) menant à la constitution d’une stéato-hépatite non-alcoolique.

Chapitre 1: Contexte clinique et scientifique

L'imagerie par résonance magnétique- La résonance magntique nucléaire

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