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A.3.2.1/ Les facteurs biaisant la quantification absolue de la graisse

ETAT DE L’ART

II. A.3.2.1/ Les facteurs biaisant la quantification absolue de la graisse

Tout d’abord, nous retrouvons la décroissance T2*, phénomène incontournable en écho de gradient. Avec une séquence Dixon 2 points classique, la différence de T2* entre les deux échos est d’environ 2,4 ms à 1.5T et l’écho en opposition de phase précède l’écho en phase. La décroissance T2* a pour effet de diminuer le signal du second écho, et atténue ainsi la chute relative du signal rencontrée en opposition de phase par rapport au signal en cohérence de phase. Ceci entraine une sous-estimation systématique de la quantité de graisse quantifiée. La proportion de cette sous-estimation dépend de la valeur du T2* et est d’autant plus importante que le T2* diminue. A partir de simulations, j’ai montré que l’erreur relative moyenne commise sur la quantité de graisse estimée en l’absence de prise en compte de la décroissance T2* à 1.5T était de 16, 28 et 36 % pour des T2* de 15, 10, 5 ms respectivement (107) (Fig. II-9). Cet effet peut donc devenir majeur en présence de surcharge ferrique, souvent associée à la stéatose. Ainsi, des stéatoses modérées peuvent être jugées à tort comme faibles. En l’absence de stéatose, en raison de la décroissance T2*, le signal mesuré à partir de l’écho en phase peut alors être inférieur au signal mesuré en opposition de phase, entrainant l’estimation d’une quantité de graisse négative comme rencontrée dans la littérature (

Fig. II-7 : Régressions entre les index de stéatose mesurés par Borra et al. (105) et la quantité de

graisse mesurée en spectroscopie. Nous retrouvons les valeurs négatives observées pour les faibles quantités de graisse due à l’absence de prise en compte de la décroissance T2*.

Fig. II-8 : Corrélation entre l’histologie et le rapport graisse/eau issue de l’étude de Menesson et al.

(106) montrant des quantités négatives quantifiée en IRM pour les faibles taux de graisse histologie due à l’absence de correction T2*.

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Quantification non-invasive de la stéatose hépatique - L'IRM pour la quantification de la stéatose

112 Un autre facteur biaisant la quantification absolue de la graisse intra-hépatique est l’effet lié au temps de relaxation longitudinal T1. Les protons de l’eau et de la graisse ne sont pas dans le même environnement chimique, ce qui entraine d’une part une modification de leur fréquence de résonance mais également une modification de leur temps de relaxation, particulièrement la relaxation spin-réseau. Le temps T1 de la graisse est en effet beaucoup plus court que celui de l’eau. A 1,5T, 340 et 590 ms pour le T1 de la graisse et du foie sain respectivement. Cette différence est accentuée à 3.0T avec respectivement des T1 de l’ordre de 380 et 810 ms pour la graisse et le foie sain (108).

Afin de proposer un bon rapport signal à bruit, les séquences Dixon 2 points classiques utilisent des angles de bascule élevés (aux alentours de 70°), ce qui leur confère une pondération T1. Cette pondération a pour effet de saturer le signal de l’eau par rapport à celui de la graisse. Ce phénomène est responsable d’une surestimation systématique de la quantité de graisse. L’importance de cette surestimation dépend du couple angle de bascule / TR et de la différence de T1 entre l’eau et la graisse. Elle est d’autant plus importante que la différence de T1 est importante et que l’angle de bascule augmente pour un TR donné. A partir de simulations (107), j’ai montré que la surestimation liée à l’effet T1 avec une séquence Dixon classique (angle de bascule à 70°) entraine une erreur relative moyenne de 22 % avec une différence de T1 eau-graisse de 300 ms (Fig. II-9). Ce problème peut devenir majeur à 3.0T où cette différence s’accentue.

Un autre problème réside dans l’impossibilité de quantifier des quantités de graisse supérieures à 50% due à l’ambigüité de composante dominante. Classiquement, le signal est recueilli en magnitude. En opposition de phase, si l’intensité du signal fournit par les protons de la graisse se retrouve supérieure à l’intensité du signal fournit par les protons de l’eau, le signal composite a une partie réelle négative. En magnitude, ce signal se retrouve positif, symétriquement au signal d’origine, par rapport à l'axe des abscisses. Si l’on considère que les protons de l’eau et de la graisse (-(CH2)n-) ont les même propriétés de relaxation (T1, T2* identiques) alors un taux de graisse réel de 75% serait quantifié comme 25 %. Ce phénomène n’est généralement pas gênant pour la quantification de la graisse intra-hépatique car les quantités de graisse supérieure à 50% dans le foie relèvent de l’exception. Pour illustration, nous pouvons citer l’exemple du foie gras alimentaire. Après gavage intensif, dont le seul but est d’engraisser au maximum le foie, ces palmipèdes de compétitions présentent une stéatose de 54,6 et 62,6 % pour l’oie et le canard de Barbarie respectivement (109). Plus sérieusement, l’étude de Szczepaniak et al en 2005, (3) sur la prévalence de la stéatose dans la population générale américaine menée sur 2349 sujets participant à la Dallas heart study rapportait une quantité maximale de graisse au sein de cette cohorte de 47,5%. La quantité de graisse était mesurée au moyen de la spectroscopie mono-voxel du proton (Fig. II-10). Toutefois, le cumul d’un taux de graisse élevé avec la non prise en compte des facteurs biaisant tels que les temps de relaxation peut entrainer des erreurs récurrentes importantes.

Fig. II-9 : (a) Simulations montrant l’effet de la décroissance T2* selon des valeurs différentes de T2* pour une quantification réalisée à partir d’une séquence Dixon (avec effet T1 minoré par l’angle de bascule à 15°). (b) Effet T1 sur la quantification en fonction de l’angle de bascule pour une différence de T1 de 300 ms (avec correction de la décroissance T2*). Ces deux simulations permettent également

de bien visualiser le phénomène d’ambigüité de composante dominante (107).

Fig. II-10 : Distribution de la quantité de triglycérides intra-hépatiques chez les sujets incorporée

dans la Dallas heart study (3).

Les aimantations de l’eau et les lipides ne sont jamais réellement en phase ou en opposition de phase. Il le serait si, comme les protons de l’eau, les protons des lipides se caractérisaient par une seule résonance ce qui n’est pas le cas. Les lipides ont un spectre complexe, composé de plusieurs résonances. Récemment, Hamilton et al. (110) ont démontrés que les protons des lipides produisaient six résonances visualisables in-vivo à 3,0 T (Fig. II-11) et résumées dans le tableau Tab. II-3.

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114 Tab. II-3 : Déplacements chimiques et raies observables due à la contribution des différents

groupements constituant les triglycérides (110).

Groupement Formule chimique Résonance

(ppm) Raie observée (ppm) Pourcentage du signal (%) Alcène -CH = CH- 5,29 5,3 4,7 Glycérol -CH-O-CO- 5,19 Glycérol -CH2-O-CO- 4,2 4,2 3,9 -CH=CH-CH2-CH=CH- 2,75 2,75 0,6 Acide α-carboxylique -C0-CH2-CH2- 2,24 2,1 12 α-alcène -CH2-CH=CH-CH2- 2,02 Acide β-carboxylique -CO-CH2-CH2- 1,6

1,3 70

Méthylène -(CH2)n- 1,3

Méthyle -(CH2)n-CH3 0,9 0,9 8,8

Fig. II-11 : Spectres obtenu à 3,0T in-vitro sur des émulsions de Microlipid (Nestle HealthCare

Nutrition, Inc., Minnetonka, MN, USA) (à gauche) et in-vivo à 3.0T (à droite) sur un sujet stéatosique présenté par Hamilton et al (110).

Avec une séquence dixon 2 points, les temps d’échos sont ajustés pour permettre une interférence entre l’eau et le méthylène (1,3 ppm) uniquement. Ainsi, seul 70 à 80 % du contingent lipidique est mesurable par cette technique. L’absence de prise en compte de la complexité spectrale des lipides dans la quantification entraine une sous-estimation systhématique de la quantité de graisse.

De nombreux travaux ont émergé afin de prendre en compte toutes les contributions en proposant des techniques quelques peu différentes pour les corriger mais toutes convergeant vers un objectif commun: quantifier la graisse le plus précisément possible.

II.A.3.2.2/ Les méthodes basées sur le déplacement chimique de second type et utilisant