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6. Résultats

6.1. Le travail (homo faber)

6.1.1. Les conditions de travail

6.1.1.1. Le statut de travailleuse

De prime abord, il est clair que les éducatrices sont employées et salariées par un CPE. Or, la situation pour les RSG est différente. Selon le gouvernement du Québec, les RSG seraient des travailleuses autonomes hybrides. Une RSG éclaircit ce concept nébuleux « Il nous considère travailleuse autonome parce qu’on est à la maison, on n’est pas régie directement on n’est pas employé salarié comme dans un CPE. Il nous considère autonome parce que c’est nous qui choisissons notre clientèle, nos heures, mais on est tellement régie par le ministère, c’est pu vrai qu’on est autonome. C’est pour ça qu’il a dit hybride, à cause de la syndicalisation […] on est autonome, mais pas trop. Autonome quand ça fait leur affaire » (RSG9).

Ce double statut autonome/hybride qui leur est octroyé apporte certaines confusions chez les travailleuses qui relatent l’ambiguïté du terme. À la base, un travailleur autonome est son propre patron et peut organiser l’horaire et le fonctionnement interne de son entreprise comme bon lui semble, mais cette situation

compte de leurs activités de façon régulière et se soumettre à un ensemble de règles et de procédures délivré par le MFA par l’entremise du BC de leur région (RSG 9).

À un autre niveau, ce statut a des avantages tout comme des inconvénients. Pour commencer, une RSG avance que, depuis qu’elles se sont vues attribuer le complément « hybride », elles ont un peu plus d’avantages sociaux. Toutefois, elle relate les inconvénients reliés à leur statut de travailleuse, tel que le manque de protection sociale :

Travailleur autonome t’as pas de protection sociale vraiment, puis tu es un petit peu laissé à toi- même t’as pas une équipe qui te soutient derrière toi, parce que tu es toute seule, donc si t’es travailleur autonome, si y’a un parent par exemple qui déménage, bien c’est toi qui faut qui s’organise pour trouver quelqu’un d’autre pour combler la place, sinon c’est ton salaire à toi qui diminue. Tu es malade une journée, bien t’es obligé de fermer, bien t’es pas payé. [C’est] peut- être tout le côté responsabilité qui vient avec qui fait qu’on n’a pas beaucoup d’avantages sociaux (RSG 7).

De surcroît, parce que leur service de garde est dans leur domicile, il est clair que leur travail occasionne certains désagréments pour les membres de la famille. Une RSG décrit cette situation : « C’est pas évident pour les autres qui habitent dans la maison avec nous des fois, ils ont comme l’impression de subir. Faut être conforme, faut répondre aux normes, mais des fois ils viennent peut-être tannés des barrières, des jouets, mais ça fait partie de la ‘‘game’’ » (RSG12).

Une autre RSG raconte comment son métier a pu nuire à la vie sociale d’un de ses enfants. Elle rapporte qu’il était impossible pour son jeune fils d’inviter des amis à jouer à la maison, car un règlement prescrit par la loi sur les services de garde dit qu’il est impossible pour les RSG d’accueillir des enfants de moins de 12 ans à son domicile lors d’une journée de travail. « Y’a jamais eu le droit d’avoir d’amis ici, donc maintenant il n’a pas d’amis, il a peu d’amis. Il n’est pas proche de personne parce qu’il n’a jamais eu le droit d’inviter d’amis. » (RSG13).

Pour cette RSG, une grande problématique associée à son travail est reliée aux espaces de vie commune dans la maison qui se font plus restreints, voir même inexistants :

Mon sous-sol, c’est une garderie, moi dans mon sous-sol, j’ai la chambre de mon plus vieux, mais j’ai pas de salle familiale en bas, c’est vraiment toute aménagé, ma garderie part de là et elle va là […] des fois, les gens voient pas toute le budget qui peut passer pour aménager une garderie, pis tout l’espace de la maison qui peut être alloué. […] moi j’ai un bébé qui dort dans un parc dans la chambre de mon plus vieux l’après-midi. Mon enfant faut qu’il accepte qu’il y aille un bébé qui dorme dans sa chambre (RSG7).

Dans une autre optique, il est clair que le fait d’être travailleur autonome à la maison procure des avantages. Cette même RSG (7), qui fut éducatrice en CPE par le passé, dit maintenant jouir d’une plus grande liberté dans l’exécution de son travail. Elle peut prévoir une sortie spéciale avec les enfants en avisant uniquement les parents, sans avoir à demander l’autorisation de la direction, comme c’est le cas en installation. De plus, elle dit avoir une plus grande latitude côté créativité en milieu familial qu’en CPE. Elle n’a pas de demande de matériel à faire, elle n’a qu’à l’acheter elle-même. Ensuite, chez elle, les animaux ont une place très importante et elle est très heureuse de pouvoir pratiquer la zoothérapie avec les enfants de son groupe.

Au surplus, certaines d’entre elles chérissent le fait de travailler à la maison, car cela leur évite de prendre leur automobile pour se rendre au travail. Une RSG le dit avec un brin d’humour : « C’est sûr que les avantages, je suis chez nous, moi je ne chauffe pas mon char, je chauffe mes pantoufles » (RSG9). Une autre abonde dans le même sens, en spécifiant que travailler à la maison facilite la conciliation travail/famille : « Mon emploi, j’ai pas, oui j’ai personnellement j’ai pas à prendre mon auto chaque matin. Donc, je n’ai pas à me déplacer. […] Personnellement, bien ça m’aide aussi d’être avec ma fille si à mettons, elle est malade je peux la garder avec moi une journée pis en prendre soin je ne suis pas obligée de l’envoyer à la garderie pis aller travailler. » (RSG14)