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Stabilité des couches limites verticales

6.6 Stabilité des couches limites horizontales et verticales

6.6.2 Stabilité des couches limites verticales

Lorsque l’on considère un cylindre dans lequel un fluide, initialement en rotation solide, est ralenti ou stoppé, un premier type d’instabilité apparaît et est caractérisé par la formation de vortex au niveau des parois verticales du cylindre. Cette instabilité est l’instabilité centrifuge discutée en Annexe B.1.

Un second type d’instabilité apparaît lorsque, cette fois, l’on considère les ex-périences de “split-disk”, ou de cylindres concentriques. Cette première configuration consiste en un cylindre en rotation, dans lequel est placé, en son centre un disque, lui aussi en rotation mais à une vitesse angulaire différente (cf Hide & Titman,1967;

Niino & Misawa, 1984). Ces types de configuration voient l’apparition de couches de Stewartson axisymétriques dont la stabilité a été étudiée d’un point de vue ex-périmental par Hide & Titman (1967), Niino & Misawa (1984), et Früh & Read (1999). Les résultats expérimentaux montrent que la couche d’épaisseur OpE1{4q de-vient instable lorsque le nombre de Rossby dépasse une certaine valeur critique, et

sont expliqués, pour l’essentiel, par l’analyse asymptotique de Busse (1968). Cette instabilité linéaire et non-axisymétrique résulte, comme pour l’instabilité de classe A dans les couches d’Ekman, de la présence d’un point d’inflexion dans le profil de vitesse radiale-cylindrique et quasi-géostrophique dans la couche d’épaisseurOpE1{4q.

Il existe cependant une différence majeure entre les expériences de Hide & Titman (1967) etFrüh & Read (1999). En effet, pourFrüh & Read(1999), le signe de la rota-tion différentielle ∆Ω n’a pas d’effet sur le nombre d’onde azimutal associé au mode non-axisymétrique le plus instable, qui croît avec le nombre d’Ekman. Pour Hide &

Titman(1967), en revanche, lorsque le disque au centre du cylindre tourne moins vite que le cylindre, alors le nombre d’onde azimutal associé au mode non-axisymétrique le plus instable n’est plus fonction du nombre d’Ekman, et reste constant à m “1.

Les prédictions analytiques de Busse (1968) ne prédisent pas une telle différence de comportement entre spin-up et spin-down, et R. Hollerbach tente d’expliquer cette différence de comportement dans deux papiers (Hollerbach, 2003; Hollerbach et al., 2004) où il montre l’importance du rôle de la géométrie du système, et en particulier de la profondeur, variable ou non, du conteneur (voir aussi Busse, 1968). De ce fait, l’instabilité de la couche de Stewartson, dans une configuration en coquilles sphé-riques n’est plus associée au cisaillement, mais est une instabilité oscillatoire qui suit la relation de dispersion des ondes de Rossby (e.g.,Kuo,1949;Busse,1968; Schaeffer

& Cardin, 2005).

6.7 Résumé

Nous concluons ce chapitre en résumant brièvement les notions de dynamique des fluides en rotation qui y ont été présentées. Après avoir exposé les équations du mouvement dans un repère en rotation, nous avons présenté le théorème de Taylor-Proudman, fondamental pour l’étude des fluides non visqueux en rotation, et l’écou-lement géostrophique qui y est associé. Nous avons ensuite montré le rôle fonda-mental des couches limites d’Ekman, et dérivé l’expression de l’écoulement de pom-page/succion d’Ekman associé, en géométries plane et sphérique. Nous avons ensuite montré que la singularité équatoriale des couches limites d’Ekman sphériques résulte en la formation de couches de cisaillement parallèles à l’axe de rotation, appelées couches de Stewartson, dans lesquelles le fluide est transféré d’une couche d’Ekman à l’autre. Nous avons montré que les couches de Stewartson sont en fait composées de plusieurs couches imbriquées, et avons dérivé leur épaisseur ainsi que l’amplitude de la vitesse dans chacune de ces couches. Nous avons ensuite présenté l’instabilité de cisaillement, parfois considérée comme la principale source de transport d’éléments chimiques et de moment cinétique dans l’enveloppe radiative des étoiles massives. En

Figure 6.13: Photographie, prise au dessus du cylindre, des vortex associés à l’in-stabilité de cisaillement non-axisymétrique de la couche de Stewartson d’épaisseur OpE1{4q dans le cas où la vitesse angulaire du disque est légèrement plus élevée que celle du cylindre. Source : Hide & Titman (1967).

particulier, nous avons dérivé le critère d’instabilité linéaire des écoulements cisaillés, pour plusieurs degrés de sophistication (fluides visqueux et non visqueux, homogènes et stratifiés, et diffusifs et non diffusifs). Enfin, nous avons discuté la stabilité des couches limites d’Ekman, et de la couche de Stewartson.

Écoulement de spin-down généré par un vent radiatif

Outre l’importance de la perte de masse et de la perte de moment cinétique sur l’évolution séculaire des étoiles massives, présentée en chapitre 5, il est intéressant de questionner l’effet du couplage entre leur vent radiatif et la dynamique de leur enveloppe radiative.

Il est bien connu que l’écoulement de spin-down d’un fluide incompressible dans un conteneur rigide avec des conditions de non-glissement, se produit sur une échelle de temps Prot{?

E, où Protest la période de rotation du fluide, etEest le nombre d’Ek-man défini dans le chapitre précédent (voirGreenspan,1968). Lorsque l’on s’intéresse aux fluides geo- ou astrophysiques, alors E ! 1, et l’échelle de temps de spin-down est bien plus courte que l’échelle de temps de diffusion visqueuse Prot{E. Cependant, les conditions aux limites dans les étoiles ne sont pas rigides, en particulier les vents radiatifs extraient du moment cinétique à la surface des étoiles massives, imposant un couple sur les couches sous-jacentes. Le fluide est ainsi ralenti par une contrainte vis-queuse horizontale (et potentiellement turbulente) à la surface de l’étoile. Dans ce cas, et comme pour le cas où l’on impose des conditions aux limites de non-glissement, il en découle une rotation différentielle et une circulation méridienne (Friedlander, 1976) qui supplémente l’écoulement barocline, et qui contribue donc potentiellement au transport des produits de réactions nucléaires, du cœur convectif aux régions plus externes, et éventuellement jusqu’à à la surface de l’étoile. L’enrichissement en mé-taux des couches superficielles renforce alors les flux de masse et de moment cinétique associés aux vents radiatifs (voir Sect. 4.4 etKudritzkiet al., 1987;Puls et al., 2000, 2008).

Tandis que le chapitre 5 montre l’importance des vents radiatifs sur l’évolution

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séculaire des étoiles massives en rotation de par les pertes de masse et de moment cinétique associées, nous chercherons, dans ce chapitre, à déterminer si l’écoulement de spin-down induit par le couplage vent-enveloppe est, ou non, d’une importance tout aussi cruciale. Bien sûr, la modélisation complète du mélange rotationnel est un problème compliqué. Il est ainsi utile, pour en comprendre les différentes facettes, d’étudier des configurations simplifiées qui intègrent, étape par étape, les différents phénomènes physiques qui contribuent à l’ensemble du modèle réaliste. Pour cela, nous considérerons la configuration simple d’un fluide incompressible piégé dans une coquille sphérique soumise à une contrainte horizontale, et nous augmenterons son degré de sophistication en considérant le rôle de la stratification thermique et de la stratification en densité. L’essentiel des travaux présentés dans ce chapitre ont été publiés dans Gagnier & Rieutord (2020), à l’exception de la Sect. 7.6.

Dans ce chapitre, nous indiquerons les variables dimensionnées par le symbole ˚.

7.1 Formulation générale

Un fluide ayant une viscosité cinématique constante ν est enfermé entre deux coquilles sphériques. La coquille interne est en rotation solide avec une vitesse angu-laire constante Ωc, tandis que la coquille externe supporte une contrainte de surface tangentielle prescrite τ˚pθq. R et ηR sont les rayons des sphères externe et interne, respectivement. Nous schématisons ce modèle en Fig. 7.1. Nous considérons que la contrainte générant l’écoulement est suffisamment faible pour que la vitesse typique de l’écoulement dans ce référentiel en rotation soit petite comparée à la vitesse propre du référentiel (voir Sect.6.1). Nous considérons donc que les termes non linéaires sont négligeables, ce que nous justifions a posteriori dans l’annexe E. Dans le cas géné-ral où nous permettons une stratification radiale en densité, le système d’équations linéaires dans le référentiel en rotation avec la coquille interne, et dans le cas d’un écoulement “anélastique”, s’écrit

$

’’

’&

’’

’% ρBu˚

Bt˚

`2Ωcezˆρu˚ “ ´∇p˚`Fvisc

∇¨ρ˚u˚“0 ,

(7.1)

oùp˚ est la pression, ρ˚ est la densité du fluide (prescrite),

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Figure 7.1: Vue schématique du système. La coquille interne de rayon ηR a pour vitesse angulaire Ωc, et la coquille externe, de rayon R, tourne à la vitesse angulaire Ωspθq. La rotation différentielle est générée par une contrainte prescrite, tangente à la coquille externe. Les traits pointillés correspondent aux bords du cylindre C tangent à la coquille interne. Source : Gagnier & Rieutord (2020).

Fvisc “µ˚

ˆ

∆u˚`1

3∇divu˚

˙

`2p∇µ˚¨∇qu˚`∇µ˚ˆ p∇ˆu˚q ´ 2

3∇pµ˚divu˚q (7.2) est la force visqueuse dimensionnée, et µ˚ “ ρ˚pr˚qν est la viscosité dynamique du fluide. Cette expression de la force visqueuse représente le cas où l’enveloppe contient de la turbulence à petite échelle avec des propriétés diffusives constantes, comme souvent considéré en physique stellaire (Brandenburget al.,1996;Käpyläet al.,2012).

Les effets centrifuges sont quant à eux négligés.

Nous adimensionnalisons maintenant ces équations en choisissant des échelles de temps et de longueur caractéristiques. L’échelle de temps naturelle est imposée par l’inverse de la fréquence de Coriolis p2Ωcq´1 , le rayon de la coquille externe R sera choisi comme échelle de longueur, et la densité à la surface de la coquille interne ρc

sera prise comme échelle de densité. L’échelle de vitesse est ainsi simplement égale à 2RΩc. Finalement, nous prenons le rotationnel de l’équation du mouvement afin de faire disparaître le terme de pression, et le système d’équations que nous souhaitons résoudre devient

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est le nombre d’Ekman introduit dans le chapitre précédent. Ce système d’équations est ensuite complété par des conditions aux limites. Nous imposons une contrainte horizontale sur la coquille externe, qui représente le couple résultant de la perte de moment cinétique associée au vent radiatif. L’expression la plus simple pour une telle contrainte symétrique par rapport à l’équateur est celle associée à une perte de masse isotrope (voir Annexe E.2), c’est-à-dire

τpθq “σ{ρ“ ´A c 3

4πsinθ,

où rσs est le tenseur des contraintes sans dimension et A est une constante positive contrôlant l’amplitude de la contrainte, et donc l’intensité du freinage induit. Bien qu’un vent implique nécessairement une vitesse radiale, faible mais non nulle, à la surface, nous l’ignorons et imposons une condition de non pénétration des parois.

Enfin, nous imposons une condition de non-glissement sur la coquille interne.

Ces conditions aux limites s’écrivent alors

ur “uθ “uφ“0 `a r“η (7.6a)

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