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6.3 Couches limites horizontales et circulation d’Ekman

6.3.1 Couche limite plane

Pour apprécier les effets visqueux dans les couches limites horizontales plaçons nous, dans un premier temps et pour simplifier le problème, en géométrie cartésienne.

Considérons une paroi imperméable au dessus de laquelle repose un fluide non stratifié et très peu visqueux (ν !1). La figure6.5schématise le système. Nous avons vu dans la section précédente que l’équilibre géostrophique s’écrit

2Ωˆu“ ´1

ρ∇P (6.26)

où u est le champ de vitesses géostrophique. Nous avons aussi vu que ce champ de vitesses satisfait le théorème de Taylor-Proudman et qu’il est donc indépendant de la coordonnée parallèle à l’axe de rotation. Le champ de vitesses dans la couche limite, quant à lui, est influencé par les effets visqueux et ne dépend que de la coordonnéez, c’est-à-dire de la distance dans la direction perpendiculaire à la paroi. L’équation du mouvement dans la couche limite s’écrit alors

2Ωˆu“ ´1

ρ∇P `νd2u

dz2 . (6.27)

Multiplions maintenant la composante parallèle à x de (6.26) et de (6.27) par i, et ajoutons le résultat à la composante parallèle à y de ces deux équations. Il vient

δE2 d2

dz2Z “2ipZ´Zq , (6.28)

où nous avons considéré Ω “ Ωez avec Ω ą 0, δE “ a

ν{Ω, Z “ ux `iuy, et Z “ ux`iuy (Busseet al.,2007). Nous choisissons maintenant les conditions aux limites de non-glissement pour la vitesse tangentielle à la paroi, et la condition d’imperméabilité de cette dernière, c’est-à-dire1

nˆu“0, et n¨u “0 , (6.29)

1. Notons que ces conditions aux limites de non-glissement ne sont pas indispensables à la formation des couches limites d’Ekman, et qu’un fort saut de viscosité peut suffire (Rieutord,2006a).

à z “0. A ces conditions s’ajoute

zÑ8lim Z “Z , (6.30)

c’est-à-dire que loin de la couche limite, l’écoulement est géostrophique. Les conditions (6.29) et (6.30) nous permettent ainsi de résoudre (6.28) dont la solution s’écrit alors

Z “Z0

Ainsi, l’écoulement tangent à la paroi est uniquement fonction de la variableζ “ z{δE, ce qui indique que le mouvement communiqué par la paroi au fluide par effets visqueux se fait au travers d’une couche limite d’Ekman d’épaisseur δE “Op?

Eq. A partir de (6.31) nous déduisons le champ de vitesses

ux “ux

Considérons maintenant, que l’écoulement géostrophique est unidimensionnel, c’est d’ailleurs ce que nous avions dans le cas sphérique (6.23). Nous prenons u “ uxex. (6.32) se simplifie alors en oùu˜xetu˜ysont les corrections au champ de vitesse géostrophique, résultants des effets visqueux dans la couche d’Ekman. Nous illustrons cet écoulement en représentant les composantes horizontales de la vitesse dans la couche limite d’Ekman, en fonction de la profondeur réduite ζ en figure 6.4. Cette représentation est appelée spirale d’Ekman.

Nous avons donc déterminé le champ de vitesses tangent à la paroi, dans la couche limite d’Ekman. Or, par conservation de la masse, cet écoulement tangentiel engendre nécessairement l’existence d’un écoulement parallèle à l’axe de rotation (et donc perpendiculaire à la couche limite). En effet, l’équation de continuité s’écrit

Bu˜z

Bz “ ´B˜uy

By ´Bu˜x

Bx “0 . (6.34)

Figure 6.4: Spirale d’Ekman. La condition de non-glissement implique que u “ 0 à ζ “ 0, et l’imperméabilité de la paroi impose u “ u loin de la couche d’Ekman (ζ Ñ 8).

Nous intégrons cette équation, dans le cas général où uy ‰ 0, en utilisant la condition d’imperméabilité, et l’équation de continuité pour la solution géostrophique

∇¨u“0. Il vient

ζÑ8lim u˜z “ δE

2 ez¨ p∇ˆuq, (6.35)

pour Ω ą 0. Ainsi, lorsque ez ¨ p∇ˆuq est positif, le fluide est expulsé hors de la couche d’Ekman dans la direction z (pompage d’Ekman). Lorsqu’il est négatif, le fluide est absorbé par la couche d’Ekman (succion d’Ekman). Voir Fig. 6.5. L’écou-lement tangent à la paroi et d’ordre Op1q dans la couche d’Ekman génère donc un écoulement de pompage (ou succion) d’Ekman dont l’amplitude est de l’ordre de?

E.

Cette différence entre succion et pompage d’Ekman est souvent rencontrée lorsque l’on s’intéresse à la circulation dans les océans. En effet, la quantité de mouvement du vent soufflant à la surface des océans est transférée à l’eau par une contrainte horizontale surfacique. L’accélération de Coriolis associée à la rotation de la Terre va alors dépla-cer les parcelles d’eau perpendiculairement à la direction du vent. La direction de ce transport d’Ekman dépend de l’hémisphère : dans l’hémisphère nord, le transport se fait à 90˝ dans le sens des aiguilles d’une montre par rapport à la direction du vent, tandis que dans l’hémisphère sud, il se fait à90˝dans le sens inverse (e.g.Brownet al., 2011). La convergence du transport d’Ekman dans la couche d’Ekman à la surface de l’océan entraîne alors, par conservation de la masse, un écoulement de pompage

d’Ek-Figure 6.5: Vue schématique du système considéré. δE est l’épaisseur de la couche limite d’Ekman. Le sens de l’écoulement de pompage d’Ekman dépend du signe de n¨ p∇ˆu0q. Si cette quantité est positive, alors le phénomène est appelédownwelling et le fluide entre dans la couche d’Ekman. Si son signe est négatif, c’est l’upwelling et le fluide sort de la couche d’Ekman.

man (downwelling2). De la même manière, la divergence du transport d’Ekman dans la couche d’Ekman à la surface de l’océan entraîne, par conservation de la masse, un écoulement de succion d’Ekman (upwelling). Nous illustrons ce phénomène en Fig. 6.6 dans le cas d’une surface océanique dans l’hémisphère nord (Ω ą 0), pour une contrainte cyclonique et une contrainte anticyclonique. La Fig. 6.7 représente la direction de l’écoulement de pompage d’Ekman dans les océans.

Nous verrons, dans le chapitre suivant, que lorsque l’on s’intéresse aux écoule-ments dans une sphère, la circulation méridienne induite par ce phénomène contrôle exclusivement la dynamique méridienne interne hors couche de Stewartson (sauf pour les fluides fortement stratifiés, ce sera aussi discuté dans le chapitre suivant).