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Chapitre 2 – Bénévolat et retraite

1.2 Évaluation quantitative de la participation des retraités dans la vie associative et le

1.2.1 Les sources

Nous constatons d’une part que les sources françaises sont mixtes, soit à la fois issues d’enquêtes publiques et privées, tandis que celles québécoises ne sont tirées que d’organismes publics, et d’autre part nous remarquons que l’exactitude des données interroge. Nous allons analyser ces deux points dans cette sous-partie.

En France, le problème de l’insuffisance de données fiables sur le secteur associatif et le bénévolat se pose depuis de nombreuses années. Au cours de ces dernières années, une

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[consulté le 20.08.2012] Accès Internet < URL : http://www.mess.gouv.qc.ca/sacais/action- communautaire/realisations/2010-2011.asp >

170 multiplication de rapports officiels (Langlais, 2008, Morange, 2008) a mis en exergue l’importance de mieux connaitre ce paysage associatif d’un point de vue statistique, financier et économique. Le rapport du groupe de travail « connaissance des associations » du Conseil national de l’information statistique (Accardo, Archambault et al., 2010) note cette absence :

« Les lacunes de l’information statistique sur les associations et les services qu’elles rendent à la société ont été soulignées depuis longtemps tant par le Conseil national de l’information statistique et le milieu associatif organisé (Conseil national de la vie associative, Conférence Permanente des Coordinations Associatives) que par certains rapports officiels récents, comme les rapports Langlais, Morange, Vercamer et Ferry principalement » (Accardo, Archambault et al., 2010, p. v).

Afin de pallier ce manque, le Conseil national de l’information statistique (2010) recommande vivement la réalisation d’enquêtes régulières et approfondies sur la vie associative, la participation et le bénévolat, chapeautées par un pôle en charge des opérations statistiques.

De nos jours, en raison de la proximité temporelle entre la parution du rapport et notre recherche, les préconisations proposées dans le rapport du Conseil national de l’information statistique n’ont pas encore trouvé un écho concret. Cependant, simultanément à ce rapport, le Ministère de l’Emploi et de la Solidarité faisait appel à l’institut BVA, afin de réaliser une enquête sur le panorama de la vie associative française et invitait des experts de ce secteur à analyser les résultats. Cette collaboration innovante entre instance publique et institut privé a permis de commencer à répondre aux demandes du Conseil national de l’information statistique en appliquant une méthodologie permettant d’obtenir des résultats plus rigoureux. Au total, nous inventorions ci-dessous six sources statistiques françaises disponibles, dont les trois premières sont issues de la statistique officielle, la quatrième de ce binôme public-privé et les deux dernières de groupes de recherche privés.

La première source, qui est celle de l’Enquête annuelle Emploi du Temps (Prouteau, Wolff, 2002) informe sur les activités pratiquées par les personnes interrogées. Le principal intérêt du questionnaire, qui comprend une rubrique associative, est de pouvoir resituer l’adhésion associative dans le cadre précis de l’emploi du temps, et donc de le positionner au regard des autres temporalités sociales. La dernière enquête a été réalisée en 2009 - 2010 et les résultats ne sont pas encore disponibles. Celles précédentes datent de 1998 - 1999.

171 Prouteau et Wolff (2002) font apparaitre pour l’Enquête Emploi du Temps une série de limites :

Le bénévolat n’est pas identifié, à part la catégorie des bénévoles responsables.

« [Dans l’enquête] il était demandé, dans l’ordre, si la personne faisait volontairement partie d’une association et, dans l’affirmative, à combien d’associations elle appartenait. Ensuite, pour les deux associations qui lui prenaient le plus de temps, elle devait indiquer le type de cette association (c’est-à-dire son domaine d’activité), son degré de participation (avec quatre modalités : adhésion sans participation, participation irrégulière, participation régulière, exercice de responsabilités) et enfin la fréquence de cette participation (nombre de fois par semaine, mois, etc.). C’est donc la participation qui est ici identifiée. Cette notion recouvre des réalités qui peuvent être fort diverses. Ainsi, dans une association sportive par exemple, elle renvoie tout aussi bien à l’exercice du sport en tant qu’adhérent-usager qu’à des activités bénévoles qui permettent de faire fonctionner et d’animer la structure. […] Les seuls bénévoles identifiables dans la présente enquête sont ceux qui assument des responsabilités » (Prouteau, Wolff, 2002, p. 59).

Les données de cette enquête ne sont pas comparables avec d’autres.

« S’agissant de cette participation associative, les données obtenues ne sont pas immédiatement comparables avec celles en provenance d’autres sources, notamment de l’Enquête permanente sur les conditions de vie des ménages (EPCV). Elles ne peuvent en particulier être utilisées pour connaître d’éventuelles évolutions temporelles des adhésions » (Prouteau, Wolff, 2002, p. 59).

Les informations sur la pluri-participation ne sont pas assez étayées.

« Le fait que les personnes ne soient interrogées que sur les deux premières associations qui leur prennent le plus de temps, limite l’information sur le monde des pluri-adhérents. Cela rend par là-même impossible une construction rigoureuse d’indicateurs tels que des taux de participation par type d’association » (Prouteau, Wolff, 2002, p. 59).

172 Des données ne sont pas du tout prises en compte dans l’enquête.

« Certaines informations sont complètement manquantes. Il s’agit essentiellement des durées consacrées aux activités associatives. Les questions relatives aux fréquences de participation ne permettent guère de renseigner ce sujet. En effet, déclarer participer une fois par semaine n’a évidemment pas la même réalité selon que l’individu passe seulement relever le courrier de l’association ou qu’il y consacre au contraire une journée entière pour assurer des tâches administratives ou de gestion » (Prouteau, Wolff, 2002, p. 59).

Néanmoins, ces auteurs considèrent également que l’Enquête Emploi du Temps se révèle d’un certain intérêt, intérêt qui n’est pas spécifique à la vie associative.

« L’enquête Emploi du temps de l’Insee est une précieuse source d’informations sur les activités pratiquées par les personnes interrogées, que ces activités soient rémunérées (emploi) ou non (travaux domestiques, loisirs), ainsi que sur les conditions dans lesquelles elles se déroulent. En collectant les renseignements pour tous les individus de 15 ans et plus appartenant à un même ménage, elle permet également d’étudier l’affectation, au sein de celui-ci, de certaines tâches et plus généralement les interactions qui peuvent exister entre les emplois du temps des différents membres de la famille » (Prouteau, Wolff, 2002, p. 59).

La seconde source est l'enquête statistique sur les ressources et conditions de vie (Dispositif SRCV) qui correspond à la partie française du système communautaire EU-SILC (European Union-Statistics on Income and Living Conditions) coordonnée par Eurostat et gérée en France par l’Institut national de la statistique et des études économiques. Ce dispositif est une enquête de cadrage général couvrant de nombreux thèmes sur les revenus, la situation financière et les conditions de vie des ménages. Des modules plus spécifiques ont été identifiés et posés en moyenne tous les trois ans, tels que la mobilité sociale et les contacts avec les proches, les sports et les loisirs. Le module auquel nous portons attention est celui dans lequel s’intègre la vie associative et la participation sociale, dont l’enquête a été effectuée en 2008 (Luczak, Nabli, 2010). Or, ses résultats ne sont pas directement comparables avec ceux des travaux des sources précédentes.

La troisième source est l’Enquête Permanente sur les Conditions de Vie (EPCV) (Prouteau, Wolff, 2004) des ménages réalisée trois fois par an, en janvier, en mai et en octobre. Chaque enquête comporte une partie fixe dans laquelle figure régulièrement une

173 rubrique sur la vie associative apportant un nombre restreint d’informations pour chaque enquêté : nombre d’associations d’appartenance, degré de participation (simple adhérent, participant régulier, exercice d’une responsabilité), fréquence de participation (mais non les durées qui y sont consacrées) et domaines d’activité des associations. Les données recueillies auprès de l’Institut national de la statistique et des études économiques indiquent trois vagues en 2000, 2004 et 2005. En octobre 2002, l’Institut national de la statistique et des études économiques a décidé de consacrer la partie variable de l’ l’Enquête Permanente sur les Conditions de Vie à la vie associative afin d’approfondir la connaissance sur la participation associative. Cette enquête avait interrogé de manière approfondie et large (5 800 ménages) sur le bénévolat. Toutefois, outre son caractère désormais ancien, cette enquête présente également certaines limites au niveau de son dispositif d’interrogation.

La distinction entre bénévoles réguliers et bénévoles occasionnels est opérée sur la base d’une question consistant à demander à toute personne ayant déclaré rendre des services non rémunérés à une association, si elle le faisait « régulièrement » ou « seulement à certaines périodes ». Pour Recherches et Solidarités, cette partition est insuffisante et ils exposent plusieurs catégorisations des bénévoles :

« Du point de vue des bénévoles, on peut également proposer une série de catégorisations qui souvent s’enchevêtrent :

– Les bénévoles adhérents et les bénévoles non adhérents ; – Les dirigeants bénévoles et les bénévoles de terrain ;

– Les bénévoles réguliers et les bénévoles occasionnels: c’est cette distinction, introduite en particulier par l’INSEE dans son enquête « dite 2002 », qui a fait le plus l’objet de débats. Nous avons décidé de ne pas prendre le temps passé comme critère de différenciation : en effet un bénévole qui va suivre un enfant toute l’année en accompagnement scolaire est régulier ; un autre qui va prendre huit jours de congés pour s’engager dans une association de solidarité internationale est occasionnel. La différence est parfois ténue : est-ce que le bénévole qui s’investit tous les ans dans la campagne du Téléthon est régulier ou occasionnel ? Est-ce que les milliers de bénévoles que le Secours Populaire peut mobiliser sur des campagnes exceptionnelles, et qui répondent « présent » deux fois sur trois sont réguliers ou occasionnels ? Parmi les bénévoles occasionnels apparaît ainsi une sous-catégorie spécifique que l’on pourrait qualifier de « bénévoles récurrents », c'est-à-dire des bénévoles qui sans être mobilisés régulièrement dans le Projet associatif, n’en sont pas moins fréquemment mobilisables, selon leur rythme de vie;

174 — Le « mécénat de compétences » (pour des salariés engagés sur leur temps de travail sur des projets appuyés par leur entreprise) et « le bénévolat d’expertise » (pour des salariés ou des retraités qui vont apporter une expertise pointue sur des missions de courte durée) ; — Les « missions ponctuelles dans l’association » et le « bénévolat à distance » (par Internet) (Malet, 2008, p. 3).

Concernant les multi-adhérents et ceux qui, adhérents ou non, s’adonnaient au bénévolat dans un organisme sans en être membres, l’information relative à la structure d’accueil est pauvre (nature de l’organisme, taille, et présence de salariés ne sont pas documentés). Le temps consacré à l’activité bénévole donne lieu à beaucoup d’approximations. Et pour finir, aucune indication n’est demandée sur l’état de santé des personnes interrogées.

A la demande de la Direction de la Recherche des Études, de l’Évaluation et des Statistiques du Ministère de l’Emploi et de la Solidarité, l’Enquête Permanente sur les Conditions de Vie (source 3) a été renouvelée en octobre-novembre 2010 afin de dresser un panorama des pratiques de la vie associative en France (Bazin, Malet, 2011). Cette étude sera la quatrième source. Le questionnaire a été administré par l’institut de sondages BVA auprès de 4 011 personnes âgées de 18 ans et plus. Les résultats de cette enquête ont pu être rapprochés et comparés à ceux de l’Enquête Permanente sur les Conditions de Vie de 2002, permettant de mesurer les évolutions sur certains critères à travers une profondeur temporelle de dix ans. L’analyse des résultats a été effectuée par Recherches et Solidarités en lien avec un groupe d’experts sur la vie associative.

L’enquête menée par le laboratoire Matisse du CNRS en 2005 (Tchernonog, 2007), cinquième source, sert très souvent de référence : pour contourner les difficultés entraînées par l’absence de répertoire national des associations vivantes, elle a sollicité un échantillon de 1725 municipalités pour adresser un questionnaire auprès de 9 625 associations réparties sur l’ensemble du territoire national.

La dernière et sixième source a été effectuée par Recherches et Solidarités, un réseau associatif qui explore tous les sujets touchant à la vie associative et aux différentes formes de dons, de solidarités et d’échanges non marchands. Ils éditent tous les ans depuis 2002 La France associative en mouvement, depuis 2003 La France bénévole (en collaboration avec

175 France bénévolat) et depuis 2007 Le Baromètre de l’opinion des bénévoles, à partir d’un panel d’associations partenaires et d’échantillons représentatifs de bénévoles et de responsables associatifs.

Dans ce panorama, nous privilégierons les références les plus récentes (sources 4, 5 et 6) vis-à-vis de données plus anciennes (sources 1 et 3) qui relèvent d’autres réalités sociales et sociologiques. Cependant, nous pourrons les utiliser (source 3) lorsque nous souhaiterons apporter une perspective diachronique à notre analyse. La source 2 ne sera pas utilisée en raison d’une exploitation pas encore assez détaillée à l’heure actuelle et d’une impossibilité de comparaison avec les autres recherches due à des caractéristiques méthodologiques spécifiques.

Autant les sources françaises sont diversifiées et proviennent de références à la fois publiques et privées, comme nous venons de le voir, autant celles québécoises sont bien délimitées et issues uniquement de la recherche publique. Les deux sources, dont nous nous servons, sont complémentaires : l’une se focalise sur les organismes et l’autre se polarise sur les bénévoles.

La première source est l’enquête canadienne sur le don, le bénévolat et la participation de 2007 (ECDBP), qui est la quatrième édition d’une série d’enquêtes ayant débuté en 1997 par l’enquête nationale sur le don, le bénévolat et la participation (ENDBP). Cette enquête, effectuée tous les trois ans par Statistique Canada, a porté en 2004 et 2007 sur un échantillon représentatif d’un peu plus de 20 000 canadiens âgés de plus de 15 ans (respectivement 20 832 et 20 520 personnes). Cette étude porte sur la contribution en argent et en temps des canadiens au profit d’organismes sans but lucratif et de bienfaisance. En 2001, le gouvernement fédéral a accordé des fonds à Statistique Canada en vue d’établir un programme d’enquêtes permanent sur les dons, le bénévolat et la participation. La mise en place de ce programme a été l’occasion de revoir la méthodologie utilisée dans les deux enquêtes précédentes et d’obtenir des résultats de qualité plus optimale. En raison des changements, il ne convient pas de comparer les résultats de l’enquête nationale sur le don, le bénévolat et la participation (1997 et 2000) et ceux de l’étude canadienne sur le don, le bénévolat et la participation (2004 et 2007).

176 La seconde source est l’enquête nationale sur les organismes à but non lucratif et bénévoles (ENOB), réalisée en 2003 par Statistique Canada à l’initiative de neuf organismes dont le centre canadien de la philanthropie, en tant que maitre d’œuvre. Les données ont été recueillies auprès de 13 000 organismes sans but lucratif. La recherche dresse un profil complet des organismes à but non lucratif et fournit des données sur le nombre et la répartition géographique de ces organismes, sur leur domaine d’activité, leurs ressources financières, leur clientèle…

Après avoir présenté les sources statistiques françaises et québécoises, nous allons dépeindre ce panorama de la vie associative et du bénévolat en termes quantitatifs.