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Évaluation quantitative du bénévolat

Chapitre 2 – Bénévolat et retraite

1.2 Évaluation quantitative de la participation des retraités dans la vie associative et le

1.2.3 Évaluation quantitative du bénévolat

En 2010, la France comptabilise une proportion de bénévoles de plus de quinze ans de 23% de la population, soit une personne sur quatre, contre 26 % en 2002 (Bazin, Malet, 2011, Febvre, Muller, 2004). A l’inverse au Québec, en 2007 plus d’un tiers des habitants de plus de 15 ans font du bénévolat, soit 37 % de la population, ce qui représente une légère hausse par rapport aux 34 % en 2004 (Clarke, Lasby et al., 2010). Ainsi, au Québec les individus tendent plus à être bénévoles qu’en France.

En raison de la pluralité des sources statistiques françaises, nous pouvons apporter des connaissances plus détaillées que celles québécoises qui se centrent sur des informations précises, dans un cadre délimité. Nous allons ainsi prendre en considération le secteur d’activité vers lequel se dirigent les individus ainsi que des caractéristiques sociodémographiques. Certaines d’entre elles, telles que le genre, le sexe, le niveau de scolarité, semblent plus importantes que d’autres pour devenir bénévoles. Bien que nous allons surtout examiner ces déterminants séparément, il faut souligner qu’ils sont souvent liés, ce que nous remarquerons au cours de l’exploration concernant les données sur le bénévolat.

179 (1) Répartition par secteur d’activité

Selon la Classification internationale des organisations sans but lucratif (soit l’International Classification of Non-Profit Organizations), deux des trois principaux domaines d’intervention vers lesquels s’orientent aussi bien les français que les québécois sont similaires, il s’agit du secteur Culture and Recreation (Culture, loisir, sport) et de celui Social Services (Action sociale, sanitaire, humaine). Les français se répartissent respectivement par ordre de grandeur vers le secteur Culture and Recreation (58,8 % des français ont été bénévoles pour cette cause), viennent ensuite Law, advocacy and politics57 (18,5 %) et Social Services (15,5 %) (Tableau 8). Les québécois faisaient, eux, majoritairement du bénévolat dans des organismes qui œuvraient dans le secteur Education, Research and Health58 (14 %), Culture and Recreation (12 %) et Social Services (9 %) (Figure 1).

Tableau 8 : Taux de bénévolat par secteur d’activité en France en 2002 (en %)

Secteur d’activité %

Sport 26,2

Culture et loisirs 32,6

Education 13,8

Défense de droits 18,5

Action sociale, sanitaire et humanitaire 15,5

Religieux 7,5

Autres domaines 7,2

Source : Prouteau L., Wolff F.-C. (2004), « Donner son temps : les bénévoles dans la vie associative »,

Economie et Statistique, n°372, p. 3-39.

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Défense des droits, des intérêts et des causes.

180 Figure 1 : Taux de bénévolat par secteur d’activité au Québec en 2004 et 2007 (en %)

Source : Clarke B., Lasby D. et al. (2010), Le don et le bénévolat au Québec. Résultats de l’enquête canadienne

de 2007 sur le don, le bénévolat et la participation, Ottawa, Statistique Canada, p. 23.

Concernant l’orientation sectorielle du bénévolat des français de plus de soixante ans, nous remarquons une moindre fréquence à s’engager dans les domaines de l’éducation, de la religion et une plus grande dans les domaines du social et du caritatif, puis du loisir et de la culture (Prouteau, Wolff, 2007).

(2) Répartition par genre

Les hommes sont plus susceptibles de faire du bénévolat que les femmes. Cette affirmation est plus prégnante en France qu’au Québec, où 30 % des français étaient bénévoles contre 22 % des françaises en 2002 (Febvre, Muller, 2004), alors que ce sont 38 % des québécois qui se sont portés bénévoles comparativement à 37 % des québécoises (Clarke, Lasby et al., 2010).

181 L’enquête La France Bénévole de 200859

, portant sur un échantillon de près de 5 000 bénévoles associatifs, montrait des dominantes de genre selon les secteurs d’activité des associations (Tableau 9).

Tableau 9 : L’orientation du bénévolat par secteur et genre en France en 2008 (en %)

Secteur d’activité Hommes Femmes Ensemble

Sport 62 38 100

Loisirs 46 54 100

Education populaire et formation 50 50 100

Santé 52 48 100 Environnement 58 42 100 Culture 49 51 100 Social 46 54 100 Solidarité internationale 44 56 100 Parents d’élèves 23 77 100 Association professionnelle 61 39 100 Association de défense 67 33 100

Source : MALET J.(DIR.) (2008), La France Bénévole, CerPhi-France bénévolat, p. 12.

En France, les hommes sont proportionnellement plus nombreux dans les associations sportives, professionnelles, de défense et celles liées à l’environnement, tandis que les femmes ont plus tendance à s’investir dans les associations de parents d’élèves, de solidarité internationale, ainsi que dans le secteur social et loisir. La même recherche indique que de façon significative :

« Les femmes sont proportionnellement plus nombreuses dans les petites associations (moins de 50 adhérents et/ou un budget ne dépassant pas 10 000 euros) : 33 % des femmes bénévoles contre 21 % des hommes. A l’inverse, 56 % des hommes sont engagés dans une grande association (plus de 150 adhérents et/ou un budget supérieur à 75 000 euros), contre 44 % des femmes » (Malet, 2008, p. 13).

De plus, lorsque nous regardons le bénévolat en France en fonction des types d’activités occupés selon le genre, nous constatons une répartition sexuée. Les hommes sont proportionnellement plus nombreux dans les fonctions de transport, les questions juridiques,

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La France Bénévole est une enquête en ligne réalisée du 18 octobre 2007 au 4 février 2008 auprès de 6 969 personnes de 18 ans et plus. Échantillon représentatif des bénévoles français, réguliers ou occasionnels dans une association ou dans un autre cadre, et des anciens bénévoles. Enquête conduite selon la méthode des quotas appliquée aux variables sexe et âge pour les répondants et à la variable secteur d’intervention pour le tissu associatif.

182 la recherche de financement, et en matière de nouvelles technologies, alors que les femmes se dirigent majoritairement vers les fonctions d’écoute et de soutien individuel, de distribution, de tri et de restauration (au bénéfice des personnes en difficulté), d’accompagnement à la scolarité. D’autres fonctions sont occupées à parité, à cet égard la gestion, l’accueil et l’orientation, les actions de collecte, l’animation (Malet, 2008).

Nous notons en France que l’accès aux femmes à la fonction de présidente est difficile. Les hommes se retrouvent majoritairement plus nombreux dans les instances dirigeantes que les femmes, et principalement au poste de président, étant donné que seulement 31 % des fonctions de président d’association sont occupées par des femmes. Ces dernières accèdent plus facilement à des postes de trésorières (42 %) et de secrétaires (57 %). Les femmes évoluent davantage dans des associations orientées vers l’action humanitaire et sociale (47 %) ou vers la santé (44%). En dehors de ces deux pôles, celles-ci sont plus centrées vers les populations vulnérables, l’action de proximité et la culture, tandis que les hommes sont plus attirés par le sport et les associations militantes. Nous notons une légère progression avec une montée des femmes présidentes dans les associations récemment créées. Ce qui signifie qu’il s’avère plus facile pour elles d’accéder à des responsabilités au sein de jeunes associations, que de participer au renouvellement d’anciennes associations (Tchernonog, 2007).

(3) Répartition par âge

Le taux de bénévolat est relativement similaire en France et au Québec pour les personnes âgées de cinquante à soixante-dix ans. Or, si en France, l’engagement bénévole est tout à fait comparable quel que soit l’âge entre quinze et soixante-dix ans, il est très fluctuant au Québec selon l’âge. La probabilité de faire du bénévolat est la plus élevée chez les 15 – 24 ans (48 % de personnes de cette tranche d’âge ont fait du bénévolat en 2007), tandis que le taux de bénévolat chute chez les 25 – 34 ans (34 %), pour remonter chez les 35 – 44 ans (43 %), puis ensuite baisser régulièrement. En d’autres termes, la probabilité de faire du bénévolat décroit avec l’âge au Québec, tandis que le nombre d’heures de bénévolat suit un rapport inverse, soit augmente avec l’âge (Tableaux 10 et 11). Ce nombre d’heures annuel de bénévolat varie de 116 heures pour les personnes de 15 – 24 ans pour atteindre plus de 268 heures pour les personnes de plus de soixante-cinq ans (Clarke, Lasby, Vodarek, 2010). Cette situation d’une action bénévole deux fois plus nombreuse que celle française des 15 – 24 ans est un trait significatif de la population québécoise, qui indique que dès le plus jeune âge certains

183 principes sont inculqués tels que le don envers autrui et la complémentarité dans les temporalités sociales : le temps de bénévolat et le temps de formation, le temps de bénévolat et le temps de travail. Cet apprentissage reste intégré dans l’individu malgré la baisse du taux à travers les autres temps de la vie.

Tableau 10 : Taux de bénévolat par âge en France en 2002 (en %)

Age % 15-29 ans 25 30-39 ans 29 40-49 ans 29 50-59 ans 28 60-69 ans 29 70 ans ou plus 19

Source : FEBVRE M.,MULLER L. (2004), « La vie associative en 2002. 12 millions de bénévoles », INSEE Première, n°946.

Tableau 11 : Taux de bénévolat par âge au Québec en 2007 (en %)

Age % 15-24 ans 48 25-34 ans 34 35-44 ans 43 45-54 ans 40 55-64 ans 31 65 ans ou plus 26

Source : CLARKE B., LASBY D. ET AL. (2010), Le don et le bénévolat au Québec. Résultats de l’enquête

canadienne de 2007 sur le don, le bénévolat et la participation, Ottawa, Statistique Canada, p. 26.

Néanmoins, au regard de l’accroissement du temps libre que représente la retraite, nous pouvons estimer que les taux de bénévolat sont faibles, ce qui relativise l’impact du passage à la retraite du point de vue de la comparaison à un instant T. entre générations d’actifs et générations de nouveaux retraités. Prouteau et Wolff (2007) avancent deux hypothèses pour expliquer la relative insensibilité du taux de participation bénévole au seuil d’âge des soixante ans :

184 « Tout d’abord, il est possible que les nouvelles vocations bénévoles soient largement compensées par des abandons de pratiques de la part de personnes pour qui l’engagement antérieur était peu ou prou lié à l’activité professionnelle ou tout au moins incité par l’entourage professionnel. La seconde explication possible consiste à supposer que les participations bénévoles qui sont consécutives à la cessation de l’activité professionnelle prennent le relais de participations plus anciennes. Dans ces cas, les nouveaux engagements ne font pas de nouveaux bénévoles. Plusieurs travaux sur le sujet suggèrent ainsi que les individus commencent rarement leur ‘‘carrière’’ de bénévole sur le tard, les vieux bénévoles étant plus souvent ‘‘des bénévoles qui ont vieilli’’ (Chambre, 1987 ; Gallagher, 1994 ; Caro, Bass, 1997 ; Smith, 2004 ; Erlinghagen, Hank, 2005) » (Prouteau, Wolff, 2007, p. 181).

D’autres chercheurs en sociologie ont aussi mis en évidence l’accroissement du nombre de néo bénévoles avec l’émergence des préretraites dans les années 1980 (Legrand, Guillemard). Bien que nous ne soyons pas en présence d’une surreprésentation de la population des plus de 60 ans en tant que bénévoles, il reste que lorsqu’ils sont bénévoles, les sexagénaires sont, proportionnellement, ceux qui consacrent le plus de temps à leur engagement bénévole. Nous l’avons constaté pour le Québec, il en est de même pour la France, où ils y accordent en moyenne un peu plus de cinq heures par semaine (sur une base de quarante semaines par an), soit une heure de plus que le reste de la population (Prouteau, Wolff, 2007).

Il nous faut souligner que les bénévoles les plus âgés sont prépondérants à occuper des postes à responsabilité que ce soit en France ou au Québec. En France, 57 % des présidents d’association ont plus de cinquante-cinq ans, dont 32 % ont plus de soixante-cinq ans (Tchernonog, 2007). Au Canada, les personnes de plus de soixante-cinq ans étaient 46 % à siéger à des comités ou des conseils d’administration, soit à des postes de responsabilités (Bakker, Lasby, 2010). Au regard de leur nombre parmi les présidents d’associations, la part des retraités dans la prise de responsabilité associative est élevée, elle est beaucoup plus faible quand nous rapportons le nombre de personnes de plus de soixante ans exerçant des responsabilités au nombre d’adhérents de cette tranche d’âge : en France, 10,8 % ont une fonction de dirigeant, trésorier ou autre fonction élective contre 19,4 % chez les moins de soixante ans.

185 Si nous nous focalisons en France sur la partie des bénévoles dits réguliers (c'est-à-dire ceux qui agissent selon une fonction précise tout au long de l’année, contrairement au bénévole occasionnel qui intervient ponctuellement en fonction de sa disponibilité ou des besoins de l’association), nous remarquons que la proportion des hommes qui s’engage régulièrement atteint un point culminant entre 55 – 60 ans (45 %) puis diminue, tandis que celle féminine évolue de manière constante pour connaitre la même proportion que celle des hommes entre 55 – 60 ans (45 %) puis sans faiblir au-delà de soixante ans. Il en découle que les femmes françaises sembleraient dégager plus de temps en faveur du bénévolat que les hommes à partir de cinquante-cinq ans (Figure 2).

Figure 2 : Proportion de bénévoles réguliers en fonction du sexe et de l’âge en France en 2010 (en%)

Source : Bazin C., Malet J. (2010), La France bénévole, Recherches et Solidarités.

(4) Répartition selon les caractéristiques socio-économiques

Les tendances observées pour l’adhésion associative concernant des caractéristiques socio économiques se retrouvent également pour le bénévolat. La probabilité de faire du bénévolat augmente plus le niveau de scolarité et le niveau de vie sont élevés en France et au Québec. Les études de Shmotkin, Blumstein et al. (2003) et Van Willigan (2000) confirment cette association significative entre condition de vie socio-économique et bénévolat chez les retraités.

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Au total, nous avons appréhendé les profils des adhérents et des bénévoles dans les associations aussi bien en France qu’au Québec. Certaines tendances se recoupent, à cet égard un tiers des 55 – 70 ans font du bénévolat et plus nous avançons en âge, plus le nombre d’heures disponibles pour le bénévolat s’accroit ; les postes à responsabilité sont la plupart du temps occupés par cette tranche d’âge ; la probabilité de faire du bénévolat est corrélée à un niveau de scolarité et de vie élevés. A contrario, il y a divergence en matière d’investissement selon le genre dans le monde associatif. En France, un déséquilibre subsiste entre les femmes et les hommes, alors qu’au Québec une égalité est de mise.

Nous nous rendons compte que certaines données prennent en considération une catégorie agrégée de plus de soixante ans ou plus de soixante-cinq ans ce qui fait immanquablement apparaitre une moindre fréquence du bénévolat chez les plus âgés pour des raisons liées autant sans doute à des effets « purs » du vieillissement (santé déclinante) qu’à des effets de génération. Il est vrai qu’il existe une nette césure entre les sexagénaires et les septuagénaires, notamment chez les plus de soixante-quinze ans au niveau du taux de bénévolat global, comme au niveau de la fréquence de la prise de responsabilités des bénévoles. Cette situation a un impact direct sur l’explicitation du panorama associatif qui manque sûrement quelquefois de nuances et de précisions en fonction des âges. Afin d’être plus sensible aux enjeux de la participation des plus âgés à la société civile, il serait probablement favorable de raisonner vers une meilleure dichotomie des générations retraitées bénévoles.

2.

La gestion des bénévoles par les structures associatives :