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CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE

I.3.1 Présentation du pays

1.3.3 Analyse diachronique de la scolarisation des filles au Sénégal

1.3.3.2 La situation scolaire des filles et des garçons, des EGEF à Dakar 2000

À la suite des États généraux de l’éducation, le Sénégal a participé aux deux forums mondiaux sur l’éducation : celui de Jomtien en 1990, puis celui de Dakar 2000 qu’il a abrité dans sa capitale. La principale innovation politique de cette période a été l’introduction de la disposition sur l’enseignement obligatoire, avec la détermination d’un âge minimum de fin de scolarité. L’évolution de la situation des inégalités entre les filles et les garçons en éducation au Sénégal dans le cadre de « l’école nouvelle »15 a concerné surtout l’accès. En effet, l’accès à l’école était perçu par les autorités sénégalaises comme le premier défi à relever. L’une des principales conséquences des décisions politiques a été l’accroissement du taux d’inscription des filles à l’école, comme en témoigne le tableau III portant sur le taux brut d’admission (TBA) au cours d’initiation dans le groupe des garçons et dans celui des filles.

14 « L’École nouvelle » sera reprise en 1981 par les États généraux de l’éducation et de la formation (EGEF),

première grande réforme de l’Éducation après l‘indépendance

15 Objectif de la première « réforme nationaliste » de l’école sénégalaise dans le cadre les États généraux de

Il est peut-être important de préciser que les données statistiques nationales concernent à la fois les secteurs public et privé. Les effectifs sont recensés de façon globale, quelle que soit la région ou l’année des valeurs publiées. Après une brève description de la situation dans les deux premières périodes, nous essayons d’observer de manière plus détaillée le portrait des inégalités de genre dans la période actuelle. Nous utilisons dans notre analyse des données de l'annuaire statistique du ministère de l’Éducation nationale du Sénégal.

D’autre part, nous jugeons important de fixer un seuil quant à l’échelle que nous utilisons dans les comparaisons des taux, notamment sur les écarts entre les filles et les garçons. Nous décidons de manière tout à fait « arbitraire » que, lorsque la différence entre deux taux est supérieure ou égale à trois points (3%), nous retenons cela comme un écart significatif. En revanche, lorsque celle-ci inférieure à trois points (3%), cela signifie qu'il y a une légère différence entre les taux voire une quasi-égalité des taux. Nous retenons le principe pour l’ensemble des données que nous allons examiner.

Tableau III.TBA au cours d’initiation (CI) dans chaque groupe selon le sexe de 1990 à 1999

Source : MEN, données statistiques de 2001

Le taux brut d’admission (TBA) indique le nombre d’enfants nouvellement admis au CI en proportion à l’ensemble du même groupe ayant l’âge légal de fréquenter la première année de l’élémentaire. Ce tableau montre globalement des taux d’admission au cours d’initiation relativement faibles et un indice de parité favorable aux garçons sur toute la période. Si les taux bruts d’admission sont supérieurs à 50% chez les garçons sur toute la période, la moyenne nationale elle demeure en dessous de ce taux jusqu’en 1995, avant de commencer à croitre assez rapidement sur le reste de la période, jusqu’à avoisiner 70% au seuil de l’année 2000. Ce profil de la moyenne nationale peut s’expliquer par le taux brut d’admission (TBA) des filles qui, comparé à celui des garçons, reste faible (inférieur à 50%) jusqu’en 1995 et qui par la suite évolue en soubresauts. Il est resté stable autour de 40% de 1992 à 1995. Nous remarquons des

1990/91 1991/92 1992/93 1993/94 1994/95 1995/96 1996/97 1997/98 1998/99

Moyenne 48,1 45,2 48,2 47,3 48,9 59,8 61,3 57,0 66,9

Garçons 52,5 54,1 55,2 58,1 66,5 67,2 62,4 70,3

Filles 38,4 40,8 40,0 40,3 53,6 55,8 52,1 63,4

bonds importants de 40,3% à 53,6% entre 1995 et 1996, et un autre à de 52,1% à 63,4% de 1998 à 1999. L’État du Sénégal a introduit la disposition de la scolarisation obligatoire dans sa politique éducative depuis 1991. Ces bonds peuvent être mis en lien avec la libéralisation de l’école et l’encadrement de l’initiative privée en matière d’éducation. En effet, la demande d’éducation croissante a amené le président de l’époque, Diouf, à promulguer la loi n° 94.82 du 23 décembre 1994 qui définit le statut des établissements d’enseignement privés dont l’expansion était fortement limitée par des formalités administratives très strictes (Coly, 2014). Dans le même temps, toujours dans le but de satisfaire la forte demande d’éducation, mais aussi pour faire face à une sévère pénurie d’enseignants, l’État s’engage en 1995 dans une politique de recrutement de contractuels et de volontaires de l’éducation. Ces deux faits combinés ont assurément produit un effet d’explosion de la population scolaire. Le TBA s’améliore rapidement en faveur des filles surtout au seuil de l’année 2000 grâce à l’intervention du Comité national des enseignantes pour la promotion de la scolarisation des filles (CNEP/SCOFI) qui entreprend de vastes campagnes de sensibilisation pour l’inscription des filles au cours d’initiation, mais aussi grâce au contexte préélectoral dans lequel la problématique de l’égalité de genre a pris une place centrale. Cet élan de centralité de la question de l’égalité homme- femme aura en effet teinté16 le mandat du président Wade, successeur de Diouf en 2000. À partir du Forum mondial de l’Éducation pour tous (EPT) de Dakar 2000 et la mise en œuvre du Programme décennal de l’éducation et de la formation (PDEF, 2001-2011), puis du Programme d’amélioration de la qualité et de la transparence (PAQUET, 2011-2025) en cours, on constate une amélioration de la participation des filles (MEN, 2013). L’État du Sénégal, avec l’appui des partenaires au développement, met en œuvre ces programmes suivant une démarche participative qui s’accompagne d’une forte implication d’ONG et d’associations (notamment de femmes) œuvrant en faveur de l’éducation des filles.

16 Formulation de la Stratégie nationale pour l’équité et l’égalité de genre (SNEEG) en 2004; vote de la Loi sur la

Parité hommes-femmes par l’Assemblée nationale en 2010 (La loi n° 2010- 11 du 28 mai 2010 instituant la parité́ absolue Homme-Femme applicable au niveau de toutes les institutions totalement ou partiellement électives prescrit que les listes de candidature soient alternativement composées de personnes des deux sexes, sous peine d’irrecevabilité́); etc.