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CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE

1.2 Le contexte général des inégalités filles-garçons en éducation

1.2.2 Le contexte général des inégalités filles-garçons dans les pays en développement

La question des inégalités de genre reste encore préoccupante dans les pays en développement (ISU/UNESCO, 2012). En faisant remarquer que la majorité des enfants non scolarisés au primaire sont des filles et que près des deux tiers des 860 millions d’analphabètes dans le monde sont des femmes, Colclough (2004) montre bien que l’éducation des filles a été

négligée dans de nombreuses sociétés. En effet, les inégalités de genre en éducation ne se présentent pas de façon homogène à travers le monde. Au niveau planétaire, 57 % des 104 millions d’enfants non scolarisés sont des filles alors que 80 % des filles sont encore analphabètes dans des pays comme l’Afghanistan, le Bangladesh, le Mali (Banque mondiale, 2011; Duru-Bellat, 2004). De nombreux documents et études scientifiques (Baudelot et Establet, 2007; Duru-Bellat, 2004; Felouzis, 2009; Grisay, 2003; ISU/UNESCO, 2012; Lewandowski, 2011; MEN, 2013, 2015; UNESCO, 2016; Wilson, 2004) font de la pauvreté l’une des principales explications à cette situation. Il s’agit de l’incapacité, d’une part, des pays à mettre à disposition des ressources éducatives suffisantes, et d’autre part, de celle des parents à prendre en charge la scolarisation de leurs enfants. Il en résulte que dans un grand nombre de ces pays, la réalisation de l’égalité des chances entre les filles et les garçons dans le domaine de l’éducation pose encore de gros problèmes.

Dans le cadre de la poursuite de l’objectif 32 de l’EPT, l’UNESCO a défini comme indice de parité des sexes (IPS) le ratio d’inscription des filles par rapport à celui des garçons qui permet, lorsqu’il est compris entre 0.97 et 1.03 (ISU/UNESCO, 2012), de considérer qu’il y a parité entre les filles et les garçons.

Les données de la figure 1, tirée du rapport 2013 de l’évaluation de la réalisation de l’objectif 3 de l’EPT sur 130 pays et mettant en comparaison le profil de l’indice de parité entre les sexes (IPS) en 1990 et 2011, nous permettent de faire plusieurs constats. Le premier est que l’indice moyen de parité des régions en développement est décroissant entre le primaire et le secondaire avec : 0.97 et 0.96. Pour le supérieur, l’évolution de l’indice de parité entre les sexes est plus contrastée et en général décroissante dans la plupart des régions, notamment celle d’Afrique subsaharienne. Cela suggère que dans ces régions, les disparités de genre vont en s’aggravant à mesure que l’on monte dans les cycles supérieurs d’enseignement. Comme deuxième constat, nous notons une plus grande homogénéité de l’IPS au primaire et une plus grande hétérogénéité de celui-ci au supérieur, quelle que soit l’année considérée. Cela traduit d’une part, le fait que

2 Objectif 3 de l’EPT :

Répondre aux besoins éducatifs de tous les jeunes et de tous les adultes en assurant un accès équitable à des programmes adéquats ayant pour objet l’acquisition de connaissances ainsi que de compétences nécessaires dans la vie courante.

la parité entre les sexes est atteinte ou, tout au moins, est plus proche d’être atteinte par tous les pays dans le cycle primaire ; et d’autre part, que les contrastes dans l’atteinte de cette parité sont plus marqués dans l’enseignement secondaire et supérieur entre les pays et les régions de l’étude.

Figure 1. Les indices de parité entre les sexes dans les pays en développement

À partir de ces contrastes, nous pouvons classifier les pays en trois groupes. Dans le premier groupe, la parité est atteinte à tous les niveaux du système éducatif. Ce groupe est composé des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, du Caucase et de l’Asie centrale. Le deuxième groupe comprend les pays de l’Asie du Sud-Est, de l’Asie de l’Ouest, de l’Afrique du Nord et de l’Océanie. Ces pays présentent tous une situation intermédiaire avec des indices de parité de l’enseignement primaire à l’enseignement supérieur dépassant 0.90 en 2011. Le troisième groupe est constitué des pays dont les indices de parité, même s’ils sont proches, voire supérieurs à 0.90 au primaire, sont extrêmement faibles au supérieur en 2011 (inférieurs à 0.89), avec une progression lente entre 1990 et 2011. De ces pays figurent les pays d’Asie du Sud, de l’Ouest, de l’Est et ceux de la région d’Afrique subsaharienne. Cette dernière présente, globalement, les disparités de genre les plus importantes. Dans ce groupe, certains pays semblent cependant se démarquer du lot. C’est le cas de la Gambie, du Ghana, du Malawi et du Sénégal. Ceux-ci ont réalisé des progrès similaires à ceux de l’Asie du Sud entre 1990 et 2011 (UNESCO, 2013). Finalement, de cette analyse nous pouvons retenir deux observations. La première porte sur le fait que l’indice de parité entre les sexes (IPS) des pays semble varier selon le niveau de développement de ceux-ci et met en opposition les pays développés où la parité est atteinte, et les pays en développement où la parité est parfois loin d’être réalisée. Le groupe des pays en développement est toutefois plus hétérogène. D’abord, dans certains de ces pays, les filles ne sont pas toujours désavantagées dans l’accès à l’école. Par exemple certains pays des Caraïbes qui ont fortement encouragé les politiques de discrimination positive en faveur des filles sont maintenant confrontés à un phénomène inverse d’exclusion des garçons du système éducatif. C’est par exemple le cas de la Jamaïque. Ensuite, il y a, les pays dont l’IPS est compris entre 0.97 et 1.03 pour l’enseignement élémentaire et où l’évolution de l’indice de parité entre les sexes dans les autres cycles est assez rapide entre 1990 et 2011. Dans ce groupe nous avons les pays d’Asie du Sud Est. Puis, les pays où la parité même dans l’enseignement élémentaire n’est pas toujours réalisée et dont l’évolution de l’IPS dans les autres cycles reste très lente sur cette période. Parmi ces pays nous retrouvons ceux d’Afrique subsaharienne.

La deuxième observation est que dans ces pays l’indice de parité varie selon le cycle d’enseignement. Il est extrêmement bas au supérieur, plus particulièrement dans la région d’Afrique subsaharienne (ISU/UNESCO, 2016; Zoundi, 2008).

Face à cette situation insatisfaisante sur l’éducation des filles dans la plupart des pays en développement, l’UNESCO en partenariat avec la Banque mondiale a mis sur pied l’initiative FastTrackGirls/FTI-EPT. Le Sénégal, comme certains pays d’Afrique subsaharienne, a adhéré à cette initiative. Cela aurait contribué à l’évolution relativement rapide de l’IPS à partir de 2006 et permis d’améliorer le taux brut de scolarisation des filles (Banque mondiale, 2011).

Tableau I.Évolution du TBS filles dans les pays FTI de l’année N0 à 2008

Source : Rapport d’avancement de Fast Track Girls Initiative, données 2008, dans (Banque mondiale, 2011, p. 7)

Le Sénégal, avec quelques autres pays comme le Mali, présente une évolution rapide du taux brut de scolarisation des filles à partir de leur année d’entrée dans le programme. Pour le Sénégal par exemple, ce taux brut de scolarisation des filles se serait amélioré de 7 points en 2 ans, soit de 2006 à 2008. Dans la troisième partie de notre présentation du contexte, nous nous intéressons plus spécifiquement au système éducatif sénégalais. Si les pays en développement et plus particulièrement ceux d’Afrique subsaharienne présentent de nombreuses similarités en ce qui concerne la situation de l’égalité scolaire entre les filles et les garçons, le système éducatif sénégalais regorge de spécificités qui justifient l’intérêt d’une recherche dans ce contexte.

Pays/année Année d'entrée FTI 1999 1re année FTI 2008

Djibouti 2006 28 40 43 Gambie 2006 85 90 89 Kirghizstan 2003 97 95 94 Libéria 2007 83 93 86 Moldavie 2005 100 97 93 Mali 2006 47 74 83 Sénégal 2006 60 78 85 Yémen 2003 51 67 76

1.3 La situation des inégalités filles-garçons dans le système éducatif sénégalais