• Aucun résultat trouvé

TROISIÈME PARTIE : LES FLUX RÉSIDENTIELS DE SUISSE VERS

Pontarlier 1 Secteur de Pontarlier

21. RÔLE DE LA FRONTIÈRE

21.4. Signification du passage de la frontière

Pour la majorité des personnes, le passage de la frontière est vécu comme une formalité administrative qui accompagne le projet d’installation en France.

Toutefois, d’aucun exprime leurs regrets quant aux aménités et au caractère sécurisant de la Suisse :

Ça m’a fait mal au cœur ? Oui et pourtant je suis Française.. Et quand vous êtes allée vivre en Suisse ? J’étais heureuse comme tout, je trouvais que c’était un beau pays, plus de discipline, propre, oui j’aimais bien.et maintenant je regrette. [Compagne de Bernadette Cours-St-Maurice]

Et c’est aussi une question de sécurité……..si vous vous adressez à une autorité en Suisse on va répondre exactement à votre question on va vous aider prendre votre demande au sérieux. [Bruno Villers-le-Lac]

Ah la vie en suisse franchement c’est bien on a l’impression qu’il n’y a pas de voleur, il n’y a pas de méchant, on peut partir et laisser sa porte ouverte. [Gaëtane Métabief]

Pour d’autres, ce n’est pas tant le changement de pays qui est regrettable, que l’absence « de la ville » qui offre des lieux et des temps de rencontre, ainsi qu’une neutralité sociale liée à sa plus grande mixité :

Vous regrettez ? Oui et non car je ne pensais pas que c’était si dur la vie de frontalier, et puis d’un autre côté la ville nous manque... Quand on était en Suisse le soir on se disait « on va descendre sur l’artère principale on va aller boire un verre sur une terrasse. [Raymonde Charquemont]

Au début je pensais que cela ne me ferait rien du tout car je me suis dit il n’y a pas de raison que je ne m’adapte pas, je suis née en France, mais en fait mon mari c’est mieux adapté que moi... à Neuchâtel on le sent pas qu’on est étranger. [Clotilde Morteau]

21.5.

Figures de la frontière

Il s’agit ici de sonder la manière dont les ménages ont intégré la frontière dans le processus de décision, en faveur d’un projet résidentiel en France.

Pour ce qui a trait aux différentes figures de la frontière, nous en relèverons deux, la frontière perméable et la frontière barrière. La bi-nationalité et la proximité géographique des précédents lieux résidentiels des migrants, abondent dans le sens d’une frontière vécue, pour la majorité des migrants, comme perméable.

Pour les « migrants-frontaliers », la frontière s’efface et devient perméable : le changement s’apparente à celui occasionné par un déménagement au sein d’un même département, ou d’une même région :

Rien inexistant. [Bruno Villers-le-Lac]

Rien de spéciale, comme je suis tout près de la Suisse, pour moi c’est la même région, c’est globale c’est pas comme si j’allais dans le sud...je suis tout près de mon père, de ma sœur, on a les mêmes températures, il y a le même paysage, l’adaptation a été facile. [Viviane Maîche]

Pour nous ça fait rien, mais c’est pour la famille que cela fait beaucoup plus : eux ils l’ont mal vécu du fait qu’en France c’est loin. [Rachel Morteau]

Mais au niveau de dire « je rentre chez les français ben non », ils pourraient l’enlever cette frontière d’abord c’est une vraie passoire. [Françoise Villers-le-Lac]

Pour autant, l’exploitation du différentiel frontalier s’exprime au travers des salaires :

Rien de particulier, nous on est allés en Suisse pour gagner plus d’argent c’est tout. [Samy Thiébouhans]

Tout comme, l’exploitation du différentiel institutionnel a permis aux ménages qui sont devenus propriétaires d’une maison individuelle, d’évoluer au sein de leur parcours résidentiel :

Une maison, une famille plus grande, voilà. [Olga Villers-le-Lac] Ma maison, mon chez moi. [Françoise Villers-le-Lac] 

La frontière barrière n’est vécue en tant que telle, que par un seul ménage (Franco-français) et originaire d’un autre département que le Doubs. Lorsqu’il s’agit d’une migration de retour, le sentiment de rentrer chez soi paraît naturel :

Et de Suisse vers la France ? On revient chez nous [...] Et dans l’autre sens ? On est étranger. [Gaëtane Métabief]

22. SYNTHÈSE

Ce chapitre a présenté l’analyse des flux résidentiels et migratoires de la Suisse vers la France, à travers l’examen des six thèmes suivants : l’ampleur des flux frontaliers, le profil des migrants, leurs trajectoires, leurs motivations, le processus de choix et la récolte d’informations, ainsi que le rôle de la frontière. Les sources mobilisées sont constituées de statistiques officielles, ainsi que de vingt entretiens approfondis menés auprès d’un échantillon illustratif de personnes en provenance du canton de Neuchâtel, et installées en bordure frontalière du département du Doubs, entre 2007 et 2009.

Ampleur des flux

1. En France, au recensement 2006 de la population (INSEE), l’effectif des ressortissants suisses était de 33 353 ménages. En Franche-Comté, selon les mêmes sources, leur part est de 6 %, soit 2 018 ménages.

2. Le flux migratoire entre la Suisse et la France, de 2000 à 2008, se compose majoritairement de binationaux. L’effectif de ces derniers reste stable sur la période, et représente 83 % du flux, soit annuellement, 2 307 doubles nationaux supplémentaires.

En Franche-Comté, lors du recensement 2006 de la population, le nombre de binationaux était de 1 311 personnes.

3. La majorité des ménages migrant de Suisse vers la France, sont de jeunes parents biactifs. En Franche-Comté les couples biactifs représentent 40 % des ménages migrants.

4. Un tiers des migrants suisses du canton de Neuchâtel vers la France, s’est installé sur la bande frontalière du Doubs, entre Maîche et Morteau.

5. A l’échelle de l’arc jurassien, la majorité du flux des migrants provient des villes du Locle et de la Chaux-de-Fonds (53 %).

6. Une majorité de ménages, en provenance du Locle et de la Chaux-de-Fonds, s’est installée sur le secteur de Morteau-Villers-le-Lac.

Profil

7. Migrer de la Suisse vers la France est clairement influencé par la position dans le parcours de vie.