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4.4 Signature de l’excès de charge dans les données CODALEMA-II

4.4.1 SELFAS2 : influence de l’excès de charge

Pour cette étude nous utilisons le même lot de données simulées avec SELFAS2 que dans la section précédente : 432 gerbes initiées par des protons de 1017 eV, pour des directions d’arrivée avec θ allant

de 0° à 60° par pas de 5° et φ allant de 0° à 350° par pas de 10°. Nous exploiterons la polarisation E-O du signal radio mesuré au sol et pour correspondre aux données expérimentales, le signal simulé pleine bande observé sur chaque antenne du réseau est filtré dans la bande 24-80 MHz. Chacune des 432 gerbes simulées avec SELFAS2 est observée avec un réseau dense de 145 antennes disposées comme le montre la Fig.4.17 à gauche, centré systématiquement sur le cœur de la gerbe au sol (en (0,0), croix rouge sur la Fig.4.17 à gauche). La Fig.4.17 à droite, montre l’empreinte au sol théorique du signal radio déposée par une gerbe verticale initiée par un proton de 1017eV. Pour réaliser cette figure, la valeur absolue de

l’amplitude du signal filtré dans la bande 24-80 MHz est utilisée pour chaque antenne du réseau simulé. Pour la suite de notre étude, il est important de faire la différence entre le cœur particules de la gerbe mesuré au sol et le cœur radio de la gerbe mesuré au sol, car on le voit sur la Fig.4.17 à droite, ces deux positions ne semblent pas confondues : le cœur particules est en (0,0) et le cœur radio semble décalé vers l’est (nous définirons rigoureusement la notion de cœur un peu plus loin). Cette asymétrie, on le rappelle, est liée à l’existence de l’excès de charge dans le champ radio total émis par la gerbe. Selon la position au sol par rapport à l’axe de la gerbe, le champ électrique mesuré correspondant à la contribution liée à l’excès de charge n’est pas toujours orienté de la même manière que le champ électrique lié à la contribution courant transverse (ces deux contributions ont des propriétés de symétrie différentes, voir Fig.4.18). L’excès de charge et le courant transverse interfèrent de manière différente selon la position de l’observateur (ou l’antenne) par rapport à l’axe de la gerbe et au cœur particules de la gerbe au sol, comme le montre la Fig.4.18. Il en résulte l’existence d’une asymétrie E-O dans le signal radio total mesuré au sol.

FIGURE4.17 –Gauche : réseau de 145 antennes utilisé pour observer les 432 gerbes simulées avec SELFAS2. Ce réseau est centré systématiquement sur le cœur de la gerbe au sol (en (0,0), croix rouge). Droite : empreinte au sol du signal radio déposée par une gerbe verticale initiée par un proton de 1017eV. Pour réaliser cette figure, le signal pleine bande observé sur chaque antenne du réseau

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FIGURE4.18 –Orientation du champ électrique mesuré au sol (flèches) pour la contribution excès de charge (à gauche), courant transverse (au centre) et pour la somme des deux (à droite). Sur chaque figure, nous avons schématisé les amplitudes des signaux mesurées en polarisation E-O par quatre an- tennes situées à des distances équivalentes de l’axe de la gerbe mais à des positions différentes (croix noires sur les axes est, nord, ouest et sud). Ces signaux interfèrent différemment selon la position de l’antenne. Finalement, on constate une symétrie N-S et une asymétrie E-O.

Asymétrie variable

Selon le principe que nous venons de discuter, l’asymétrie E-O mesurée au sol doit dépendre de la proportion de l’excès de charge dans le signal radio total émis par la gerbe. Or, nous savons que la contribution courant transverse est dépendante de la direction d’arrivée, en raison de la dépendance au mécanisme de Lorentz, et que ce n’est pas le cas de la contribution excès de charge qui peut être considérée comme invariante avec la direction d’arrivée de la gerbe (du moins au premier ordre). La proportion excès de charge/courant transverse dans le champ radio total émis varie donc selon la direction d’arrivée de la gerbe. Cette caractéristique suggère que l’asymétrie E-O observée au sol varie en fonction de la direction d’arrivée des gerbes. Pour vérifier cette proposition nous montrons Fig.4.19 les empreintes radio mesurées au sol avec le code SELFAS2 pour des gerbes avec des directions d’arrivée différentes, contenues dans le plan décrit par le vecteur champ géomagnétique et le cœur de la gerbe en (0,0). Lorsque la gerbe arrive du nord (exemple avec θ = 40° et θ = 90°, en haut à gauche sur la Fig.4.19), la contribution courant transverse est largement dominante car la différence angulaire entre la direction d’arrivée de la gerbe et le champ magnétique est grande (67°), donc le mécanisme de Lorentz est important. Dans ce cas de figure, l’asymétrie E-O est relativement faible et le centre du motif radio au sol semble décalé vers l’est d’environ 10 à 20 m. Pour des directions d’arrivée de gerbes s’approchant de l’orientation du champ géomagnétique la contribution courant transverse décroît et la proportion de l’excès de charge dans le champ radio total émis augmente. Il en résulte que l’effet d’asymétrie augmente et le centre apparent du motif radio au sol se décale de plus en plus vers l’est. Lorsque la direction de la gerbe est quasi parallèle au champ géomagnétique (θ = 25° et θ = 270°, figure du centre à droite) la composante courant transverse devient inexistante et le champ mesuré ne provient que de la composante excès de charge. Dans ce cas, le motif radio au sol change de caractéristique en laissant apparaître deux lobes, propres à la contribution excès de charge (cette forme provient de l’orientation du champ lié à la contribution excès de charge qui est à symétrie cylindrique autour de l’axe de la gerbe comme on l’a vu Fig.4.18 à gauche ; une antenne en polarisation E-O ne mesure rien si elle est située le long de l’axe N-S). Dans le cas où la direction de la gerbe est proche de celle du champ géomagnétique mais qu’elle ne l’a pas encore "traversé" (θ < 27° et φ = 270°), le lobe le plus important est situé du coté est. Si nous regardons maintenant la figure correspondant à une direction d’arrivée plus basse que le champ géomagnétique (θ > 27° et φ = 270°), le lobe dominant est situé du coté ouest cette fois. Puis, lorsque la direction d’arrivée s’éloigne encore de l’orientation du champ magnétique (dernière figure), la contribution courant transverse redevient dominante laissant apparaître, cette fois, un décalage du centre du motif vers l’ouest

CHAPITRE 4. INTERPRÉT A TIONS DES DONNÉES EXPÉRIMENT ALES

FIGURE4.19 –Empreintes radio mesurées au sol pour des gerbes avec des directions d’arrivée différentes, contenues dans le plan décrit par le vecteur champ géomagnétique et le

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(la force de Lorentz a changé de sens).

On note au passage que lorsque la direction d’arrivée de la gerbe approche celle de l’orientation du champ géomagnétique, le motif au sol peut être déformé significativement, à tel point que la description du profil latéral à une dimension peut être très fortement biaisée et son ajustement par une fonction exponentielle décroissante (ou une gaussienne) n’apparaît plus adapté. Ce cas de figure reste rare, car les évènements avec une direction d’arrivée quasi parallèle au champ géomagnétique (différence angulaire < 10°) sont rares dans la statistique CODALEMA, à cause du seuil de détection (sur les 330 évènements, 1 seul est à moins de 10° du champ géomagnétique et seulement 4 sont à moins de 20°). Avec un réseau plus large comme CODALEMA-III ou AERA, il faudra cependant garder ce phénomène à l’esprit car la détection d’évènements de plus haute énergie que celle atteinte par CODALEMA-II peut permettre de détecter plus facilement ce type d’évènements.

Définition du coeur radio de la gerbe

Expérimentalement, la reconstruction d’un évènement radio indépendamment du réseau de scintilla- teurs, est réalisée, on l’a vu, en ajustant la profil latéral avec une fonction du type exponentielle :

ε(d) = ε0exp(−d/d0) (4.10)

d = q

(x − xrc)2+ (y − yrc)2− [(x − xrc) sin θ cos φ + (y − yrc) sin θ sin φ]2 (4.11) est la distance à l’axe de la gerbe, (x,y) la position d’une antenne au sol dans le référentiel du réseau d’antenne et θ et φ la direction d’arrivée de la gerbe. Cet ajustement est réalisé en laissant quatre para- mètres libres : le champ sur l’axe ε0, la pente du profil latérale d0et la position du cœur radio de la gerbe

au sol (xr

c, yrc) dans le référentiel associé au réseau d’antennes. Le cœur radio est alors défini comme la

position au sol, déduite de l’ajustement du profil, pour laquelle le signal radio est maximum.

La reconstruction du cœur particules de la gerbe au sol est réalisée sur un principe équivalent mais avec une fonction paramétrique NKG (voir chapitre 2, section 2.3.4) appliquée sur les données scin- tillateurs. Le cœur particules est alors défini comme la position au sol où le nombre de particules est maximum. Ces deux positions, cœur radio et cœur particules d’un même évènement, sont donc considé- rées, comme deux observables distinctes et indépendantes.

Pour quantifier l’effet que peut avoir l’excès de charge sur l’estimation de la position du cœur radio par rapport au cœur particules de la gerbe, nous proposons d’appliquer aux données simulées, la même procédure de reconstruction que celle des évènements expérimentaux.