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Les réseaux de détecteurs de particules Principes communs

1.3 Les techniques de détection

1.3.1 Les réseaux de détecteurs de particules Principes communs

L’idée de ce type de détecteur remonte à la fin des années 30 avec Pierre Auger et est basée sur la mesure en coïncidence de plusieurs détecteurs (les compteurs Geiger pour la première expérience réalisée par Pierre Auger) espacés d’une certaine distance que l’on appelle le pas du réseau de détecteurs. Grâce à ces détecteurs, Auger a réalisé les premières estimations de l’énergie des particules incidentes génératrices des gerbes détectées au sol. La première loi de puissance en E−3pour décrire le spectre en

énergie autour de 1015eV a pu être mise en évidence [28].

Les techniques ayant évidement évolué, les détecteurs pour créer les grands réseaux sont aujourd’hui tous équipés de photomultiplicateurs capables de mettre en évidence la lumière émise par le passage des particules secondaires de la gerbe dans un matériau. Deux types de matériaux sont utilisés :

– les scintillateurs plastiques transparents, où la lumière émise dans le plastique lors du passage des particules secondaires est due au phénomène de scintillation des composants du plastique.

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– les cuves à eau (principe utilisé pour l’expérience Auger), où la lumière émise par le passage des particules secondaires est due à l’effet Cerenkov.

La géométrie et la facture de chaque détecteur peut avoir une importance également sur la détection. Les cuves Auger par exemple, sont relativement hautes et permettent d’avoir un volume de détection assez grand (12 m3 d’eau), et ainsi de conserver une efficacité de détection plus grande pour les gerbes

inclinées par rapport à des plaques horizontales de scintillateurs plastique.

La géométrie du réseau de détecteurs (le pas du maillage), doit être choisi en fonction de divers paramètres. Le choix repose essentiellement sur :

– la gamme d’énergie à étudier,

– la statistique que l’on souhaite obtenir,

– la qualité de reconstruction (nombre de détecteurs touchés en moyenne à chaque évènement), – le coût.

Plus l’énergie des cosmiques est grande, plus le flux incident est faible (cf Fig.1.21), cependant la détection sera favorisée par des gerbes plus énergétiques avec un nombre de particules secondaires plus grand. Dans le cas de la détection de gerbes cosmiques d’ultra-haute énergie et pour un nombre de détecteurs donnés (= un coût donné), on pourra donc se "permettre" d’augmenter l’écart entre chaque détecteur pour augmenter la surface de détection totale du réseau. L’intervalle en énergie du spectre des rayons cosmiques couvert par le réseau de détecteur voit sa borne supérieure fixée par la surface totale de détection au sol et la statistique correspondante. La borne inférieure, le seuil de détection, est fixée par le pas du réseau. À partir d’un certain seuil inférieur en énergie, les gerbes ne seront plus suffisamment grandes et riches en particules secondaires pour être observées par un nombre minimum de cuves (3, non alignées) et permettre la reconstruction de l’évènement.

FIGURE1.33 –Schéma d’un front de gerbe touchant les détecteurs au sol. L’ordre temporel de déclenche- ment des détecteurs dépend de la direction d’arrivée.

Une fois l’évènement enregistré par les détecteurs, le dépouillement permet de remonter à différentes ob- servables :

– la direction d’arrivée des gerbes, reconstruite par triangulation à partir des temps d’arrivée estimés par tous les détecteurs qui ont vu l’évènement (voir Fig.1.33). Différentes formes d’ajustement peuvent être appliquées pour décrire le front de particules (un plan, une sphère une parabole...). – L’estimation du signal de chaque détecteur pour

remonter à l’énergie déposée dans chaque détec- teur par la gerbe. En analysant le signal, on peut remonter au nombre de particules observées dans chaque détecteur.

– La reconstruction du profil latéral de la densité de particules. Un ajustement d’une fonction de distri- bution latérale est réalisé pour estimer la taille de la gerbe et son énergie. Une fonction de type NKG est couramment utilisée (voir paragraphe sur l’ex- périence Auger).

– La position du pied de la gerbe, intersection entre l’axe de la gerbe et le sol.

La comparaison de ces observables avec l’outil de simulation permet ensuite de remonter aux caractéris- tiques de la particule primaire, notamment sa nature et son énergie.

Les principales expériences basées sur ce type de détection sont :

– Volcano Ranch au nouveau mexique [91]. Couvrant une surface d’environ 8 km2, cette expérience

a été en acquisition entre les années 60 et 80 et a été la première à détecter un évenement de plus de 1020eV.

– SUGAR (Sydney University Giant Airshower Recorder) en Australie [92] de 1968 à 1979 pour une surface de 77 km2.

– Haverah Park en Angleterre [93] de 1968 à 1987 couvrant 12 km2avec des cuves Cerenkov.

– AGASA (Akeno Giant Air Shower Array) au Japon [94] de 1990 à 2005. Cette expérience couvre une surface de plus de 100 km2avec plus de 110 scintillateurs et fut la plus grande expérience de

détection des rayons cosmiques de son époque.

– Auger depuis 2004 (prise de données). Nous allons avoir l’occasion d’y revenir plus en détail. – Telescope Array [95] depuis 2007 aux États-Unis est constitué d’un réseau de 700 km2de scin-

tillateurs.

Un des points forts de ce type de détection est d’avoir un cycle utile de détection proche de 100%. De plus, la technique est maintenant maîtrisée car elle a été éprouvée et testée progressivement depuis plus de 70 ans. Cependant, remonter aux caractéristiques de la particule primaire est très dépendant du modèle, car ce type de détection n’est sensible qu’à l’état de la gerbe au niveau du sol. La simulation qui montre encore des incertitudes à ces énergies, comme on a pu le voir dans les paragraphes précédents, est absolument nécessaire, ce qui est assez contraignant. La corrélation entre les caractéristiques de la particule primaire et les caractéristiques de la gerbes au sol n’est pas triviale. Cette détection nécessite de plus que la gerbe "touche" le sol, ce qui peut-être un désavantage pour des incidences de gerbes très in- clinées, car le développement de la gerbe peut-être déjà très avancé. Du point de vue technique, l’étendue de grands réseaux de détecteurs implique un coût de maintenance non négligeable et une logistique assez complexe. Pour ces raisons, d’autres techniques de détection ont vu le jour, permettant ainsi d’atténuer certaines contraintes liées à l’utilisation de ces réseaux de surfaces.