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Chapitre 4 : Non-Profit, For-Profit et organisations de quartier

2) SEBCO : du Non-Profit au for-Profit

-­‐ Le « Mini-Empire »281 de Father Gigante

Lorsqu’en 1968 Father Gigante, lance SEBCO, pour le South East Bronx Community

Organization, le South Bronx se trouve dans un état de déclin urbain tant la détérioration de

son parc immobilier est avancée. Assisté par le « Model Cities Program »282, SEBCO travaille avec des planificateurs urbains, des membres de l’administration Lindsay -maire de New York de 1966 à 1973, accusé d’être responsable de la crise financière de la ville par une politique trop favorable aux populations les plus pauvres283- afin de redévelopper l’infrastructure locale (immeubles en ruines, espaces verts abandonnés, etc.), avant de s’attaquer à la reconstitution du parc immobilier. Entre 1975 et 1978, SEBCO développe, avec l’accord du United States Department of Housing and Urban Development (HUD)284 la réhabilitation de plusieurs immeubles285 laissés à l’abandon et construit un premier immeuble (le Maria Estela Houses I, 236 appartements). Constitué légalement en tant que Not-for-Profit

organization, SEBCO Development Inc286, crée en 1980 deux filiales, la SEBCO Mangement et la SEBCO Security (ou SENTRY), rejointe en 1985 par la Tiffany Maintenance. Les 3 organisations sont des for-profit employées par SEBCO Development (toujours Non-Profit) pour déléguer ses taches de maintenance, de sécurité ou de gestion de ses immeubles. Interviewé en 2001 par la journaliste du New York Times, Amy Waldam, Father Gigante explique que les trois filiales for-profit ont permis à SEBCO de devenir plus autosuffisant, puisque moins de la moitié de son budget annuel ($800,000) proviendrait, en 2001, de fonds gouvernementaux287. Très critique vis-à-vis de l’administration Giuliani (1994-2001) et de sa

281 Waldman, Amy. “Mortality on the Mind, A Legacy on the Agenda; Father G. Is Out to Preserve Rebuilt

Bronx.” The New York Times, April 30, 2001, sec. N.Y. / Region.

http://www.nytimes.com/2001/04/30/nyregion/mortality-mind-legacy-agenda-father-g-preserve-rebuilt- bronx.html.

282 Programme expérimental mis en place par l’administration Johnson en 1966, faisant partie de la « guerre

contre la pauvreté », consistant en une approche transversale (ou intégrée) travaillant sur plusieurs dimensions (jeunesse, école, habitat…).

283 Cannato, Vincent J. “The Ungovernable City: John Lindsay and His Struggle to Save New York;” The New

York Times, July 15, 2001, sec. Books / Chapters. http://www.nytimes.com/2001/07/15/books/chapters/15- 1stcanna.html.

284 Le HUD est l’équivalent du ministère du logement en France.

285 SEBCO I et SEBCO II pour 360 appartements répartis sur 9 immeubles ; SEBCO III avec 200 appartements

(housing units) ; SEBCO IV avec 100 appartements ; et Aldus III avec 173 appartements

286 Il faut noter que, afin de devenir une Non profit, une organisation doit d’abord se constituer en société

commerciale, désignée par le sigle Inc. de Incorporated. Pour cela, l’organisation doit être légalement formée en tant que corporation.

287 Waldman, Amy. “Mortality on the Mind, A Legacy on the Agenda; Father G. Is Out to Preserve Rebuilt

politique de financement des organisations communautaires dans les quartiers populaires288, Father Gigante a tout de même réussi, entre 1968 et 2008, à obtenir des financements fédéraux (HUD), de l’État de New York (NYS Division of Housing and Community Renewal-DHCR ; NYS Housing Finance Agency-HFA), de la ville de New York (NYC Department of Housing Preservation and Development-HPD) et de deux importantes fondations (Entreprise Foundation ; Local Initiative Support Corp.-LISC). En 2008, Father Gigante, sur le point de prendre sa retraite, s’apprête à transmettre à son successeur un mini- empire constitué de 6,000 appartements nouveaux ou réhabilités dans approximativement 450 immeubles, deux shelters pour sans abris sous contrat avec le NYC Department of Homeless

Services (DHS) et deux centres pour personnes âgés sous contrat avec le NYC Department for the Aging (DFTA). Depuis 1995, SEBCO a été choisi par le NYC Housing Authority pour

privatiser la gestion de 90 immeubles appartenant à la ville. De son lieu d’origine, Hunts Point, SEBCO a développé des projets dans tout le South Bronx et, en 2001, l’organisation a repris en charge 25 immeubles gérés par la Banana Kelly Community Improvement

Association, une autre organisation communautaire, agrandissant peu à peu son emprise sur le

South Bronx.

-­‐ Le profit et la discipline

En 2011, malgré la crise économique dans laquelle est plongé le pays, pour répondre à l’expansion de SEBCO à Brooklyn dont l’ouverture de deux shelters pour sans abris, SENTRY, sa filiale sécurité, embauche 100 nouveaux employés289. Les shelters emploient 24h sur 24h, 7 jours sur 7, des gardes de sécurité. Mais SENTRY assure aussi la sécurité de centres médicaux, d’écoles et de bâtiments qui ne font pas partie des biens gérés par SEBCO. Lors de patrouilles de nuit auxquelles je participe290, Miguel, le second en chef qui dirige le staff de nuit, se rend, en voiture, de bâtiment en bâtiment. À l’intérieur de chaque résidence,

http://www.nytimes.com/2001/04/30/nyregion/mortality-mind-legacy-agenda-father-g-preserve-rebuilt- bronx.html.

288 Sur les différentes politiques en matière de gestion des populations sans-domicile dans le South Bronx, voir

infra.

289 Chaque employé à SENTRY est enregistré auprès du New York State Division of Licensing Services et doit

avoir validé un stage de formation d’une durée 8 à 16 heures. Les thèmes abordés lors des formations dispensées par SENTRY sont les suivants : l’éthique, le professionnalisme, les réponses d’urgences, le contrôle de la foule, la prévention des incendies et la façon d’agir lors de confrontations avec les gangs. Chaque employé doit écrire un rapport à la fin de son service.

290 Avec l’autorisation du directeur de SEBCO, j’ai pu participer plusieurs fois par semaine à des patrouilles, de

un garde est chargé de vérifier qui entre et qui sort et d’autoriser ou non les visites291. Contrôlées 24 heures par jour par SENTRY, les entrées de ces immeubles ont un air de gated

communities.

À l’approche de Noël, Miguel se rend sur le Southern Boulevard, discuter avec les commerçants. SENTRY, me dit-il, a été contacté pour s’occuper de la sécurité des magasins et des vitrines de la rue. De fait, SEBCO fait partie d’une Business Improvement District (BID), mis au service des commerçants de la zone afin d’assurer la croissance économique et la stabilité des boutiques partenaires. En engageant sa filiale SENTRY, SEBCO Development prend en charge l’aspect sécuritaire en lien avec la police new-yorkaise (NYPD)292. Cette dernière transmet un rapport à la BID donnant les informations sur ses stratégies autour de la prévention du crime. En collaboration avec le NYPD, la BID a installé une série de caméras vidéo, contrôlées par le precinct 41 du NYPD et financées par le budget propre de la BID. La BID a aussi lancé une vaste opération de nettoyage du boulevard, en finançant des ramasseurs et balayeurs de rue pour débarrasser régulièrement les trottoirs des détritus. De son côté, Miguel fait régulièrement des rondes de nuit avec son 4x4 noir, afin de vérifier que le boulevard est tranquille. Des trois filiales for-profit de SEBCO Development qui se sont agrandies, SENTRY est celle qui rapporte le plus à SEBCO, avec plus de 3 millions de dollars annuels pour 140 surveillants, payés entre 8 et 15 (pour les plus expérimentés) dollars de l’heure293.

En 2013, SEBCO gère quatre shelters pour sans domicile fixe dont deux sont exclusivement réservés aux hommes. L’organisation y emploie des travailleurs sociaux, des conseillers en emploi et des conseillers en addiction venant des diverses filiales. Sur une période de 3 mois, entre novembre 2011 et janvier 2012, j’ai arpenté le jour et la nuit les couloirs du shelter pour homme sans-abris Father Smith Residence, servant des déjeuners le midi, discutant avec la dizaine de gardes, passant du temps dans les bureaux de Mr. Paul, le directeur, ou avec les conseillers sociaux et le personnel de maintenance. Un matin, alors que je passe dans les couloirs de l’administration, situés en sous sol du Shelter, Mr Paul avec qui j’entretiens une relation cordiale, m’appelle.

291 Dans les shelters pour sans-abris, aucun domicilié n’a le droit de recevoir de visite. Dans les résidences de

SEBCO, les domiciliés peuvent avoir de la visite dans des horaires limités.

292 http://www.southernblvdbid.org/pdf/annual%20report%202013.pdf 293 Le salaire minimum aux Etats-Unis étant de 7,25 dollars de l’heure.

MR. PAUL : Martin, est-ce que tu pourrais m’aider ? Tu te rappelles du Canadien [depuis quelques semaines, le shelter accueille Jacques, un canadien français de 65 ans qui est arrivé sans papier et complétement déboussolé] ? Il faut que je règle sa situation et je

voudrais que tu appelles sa sœur là-bas, au Canada, pour lui expliquer où est son frère.

Martin : Si tu veux, mais je lui dis quoi ?

MR.PAUL : Tu lui dis que c’est très préoccupant. Je passe sur le fait que son frère est sale et ne

veut pas se laver, mais il n’a aucun argent, perd complétement ses esprits et ne veut pas chercher d’emploi. On a besoin de son passeport ou d’une pièce d’identité pour le renvoyer chez elle.

Martin : Mais c’est pas pour cela qu’il est là justement ? Pour que vous puissiez prendre soin de lui ?

MR.PAUL : ah non, on n’est pas les services sociaux. Je dois gérer un business moi. Si mes gars [les sans abris qui résident dans le shelter] restent plus de deux mois, je me fait engueuler par le directeur [de SEBCO]. Parce que dépassé ce délai, on n’a plus de subvention de la part du DHS.

(…) Et alors c’est la galère pour ceux qui restent. Une fois qu’ils dépassent ce temps là, ils sont renvoyés dans d’autres services. Et là, c’est l’enfer pour eux. Si Jacques rentre dans le système, ça ira de pire en pire et il n’en ressortira jamais. À la fin, les gars meurent dedans.

La conversation avec la sœur dure quelques minutes. Mal à l’aise, lui expliquant que je ne suis pas employé à SEBCO, j’essaye de lui fournir les informations nécessaires tout en la rassurant sur l’état de santé, tout de même préoccupant, d’un frère qui a disparu depuis plus de dix ans. Après que j’ai raccroché, Mr. Paul, fatigué de sa journée et affamé, me propose de sortir marcher dans le quartier.

MR.PAUL : C’est une industrie. Tout ça, j’en peux plus. Tu vois les mecs entrer, et tu te dis

qu’ils vont surement y rester. Ils arrivent directement de Bellevue294, et nous, on est censé les

294 Les hommes sans domicile accèdent à un shelter à travers le centre de Bellevue, sur la 30e rue à Manhattan

qui les redistribue ensuite aux autres shelters de la ville. À Bellevue, les personnes sans abris obtiennent un numéro, le HA Number, qui servira pendant tout le temps de leur passage dans le système de shelter. Une fois attribué un nouveau shelter, ils n’ont pas le droit d’en changer. Ils doivent y revenir chaque fois qu’ils ont besoin d’un lit et ne peuvent aller dans un autre shelter. Voir Siener, Christian D. “‘A Rock My Pillow and the Sidewalk My Bed’: Homeless Geographies of New York City,” 2011.

prendre. Et les boîtes de shelters, elles ne font que pomper du fric au Department of Homeland Services, au Department for the Aging (DFTA), au Housing Preservation and Development (HPD), ou je ne sais quel département. Les Non Profit font du profit sur les

shelters. C’est la nouvelle poule aux œufs d’or. Et moi, je dois passer mon temps à contrôler

les gars, ceux qui ne veulent pas chercher du travail, ceux qui dilapident leurs coupons en alcool, ceux qui sont accros à l’héro ou au crack.

Martin : Mais en même temps, tu permets d’aider ceux qui n’ont pas de domicile non ?

MR. PAUL : À court terme, oui. Mais après ? Tu te rappelles de Shequan qu’on a amené à

l’aéroport il y a une semaine [Une semaine auparavant, nous avions convoyé un jeune de 19

ans dans les 4x4 de SENTRY à l’aéroport La Guardia pour le mettre dans un avion le ramenant en Géorgie dans de sa famille] ? Et bien c’est la même chose avec Jacques. On a

appelé sa famille pour qu’ils le reprennent. Mais au final, c’est lui qui s’était barré de Géorgie. Problèmes familiaux, mais aussi manque d’emploi. C’était un jeune bien, juste sans boulot qui a cru que New York en regorgeait. Et puis, il y a aussi ceux qui viennent dans la ville parce que c’est un eldorado de shelters…

Coincé entre une direction qui le contraint à faire du chiffre, des pensionnaires parfois violents et toujours perdus dans les demandes constantes de l’administration et les attentes de la ville et de l’État de New York, Mr. Paul me dit étouffer dans son travail. Quelques mois après notre balade, il est déplacé dans un autre bâtiment de SEBCO, à Brooklyn.

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Quatre années après la fin officielle de la grande récession qui s’est abattue sur les Etats-Unis avec la crise de 2008, le taux de pauvreté et de personne sans abri295 reste constant à New

295 Par ailleurs, la situation de sans-abris excède la question des hommes seuls puisqu’un rapport du ICPH de

2012 indique que l’instabilité économique et les problèmes de logements –liés à une combinaison de facteurs dont la gentrification croissante remontant vers le Nord de Manhattan et le manque de logements pour faible revenus- poussent 37% des familles du South Bronx (le plus haut taux sur l’ensemble de New York) à déposer une demande de shelter. 56% des familles dépensant plus de 30% de leur revenu dans le loyer, le South Bronx a le plus haut taux (14%) de surpeuplement de la ville de New York et un manque sévère d’appartements disponibles à la location (4% vacant). Voir : http://www.icphusa.org/PDF/reports/ICPH_brief_ABronxTale.pdf et Citizens’ Committee for Children, Keeping Track of New York City’s Children, 2009; U.S. Cen- sus Bureau, 2010 American Community Survey 1-year Estimates; U.S. Department of Housing and Urban Development, The 2010 Annual Homeless Assessment Report to Congress; New York City Department of Homeless Services, Daily Census: Families with Children—December 12, 2011.

York. C’est dans le Bronx296 que le taux de pauvreté est le plus visible, puisque 30,2% de ses résidents vivent en-dessous du seuil de pauvreté297 et 13,4% vivent dans l’extrême pauvreté298. Plus particulièrement, le South Bronx est le district le plus pauvre des Etats- Unis299 et les familles du South Bronx sont trois fois plus susceptibles de devenir sans-abri que celles du reste de New York, et six fois plus qu’au niveau national.

En 2009, le Government Accountability Office (GAO) annonce que le gouvernement fédéral finance à la hauteur de 2,9 billion de dollars le Federal Homeless Programs300, et en 2011, le

New York City Department of Planning indique que la ville de New York détient parmi le

plus vaste réseau de shelters aux États-Unis, avec ses 244 homeless facilities. Or, la concentration et la gestion de ces shelters ont été montrées du doigt par des organisations new-yorkaises de défense des sans abris, comme Picture the Homeless, qui critique dans un rapport de 2011 le « complexe industriel de shelter » (shelter industrial complex)301. Picture

the Homeless note ainsi que l’argent alloué par la ville de New York (notamment par le Departement of Homeless Services-DHS avec un budget de 773 million de dollars) est mal

investi, alors que le financement de programmes d’aide au logement pour les plus pauvres est quasiment nul (en comparaison, le budget de la Housing Preservation and Development est de 489 million de dollar, 63% celui de DHS)302. Dans son rapport303, l’organisation indique que 199,981 personnes pourraient être logées (à savoir plus de la population totale des sans-abris) si la municipalité rendait accessibles les immeubles (3,551) et les lots (2,489) vacants (dont 10% appartiennent au gouvernement). Cela rendrait obsolète la solution des shelters. Picture the Homeless conclut ainsi qu’il ne s’agit pas d’une crise des sans abris mais d’une crise du

296 Voir ICPH :

http://www.icphusa.org/PDF/reports/ICPH_PolicyReport_OnTheBrink_HomelessnessARealityInTheSouthBron x.pdf

297 Avec moins de 18, 310 dollar par année pour une famille de trois personnes 298 Gagnant moins de 50% du niveau de pauvreté fédéral.

299 Le taux de pauvreté atteint dans le South Bronx les 36,9% et celui de pauvreté extrême les 16,6%299. Voir

ICPH :

http://www.icphusa.org/PDF/reports/ICPH_policybrief_TheProcessofPovertyDestabilization_(Revised)%20022 614.pdf

300 “Is The US Government Wasting Money on Homelessness? – Poverty Insights.” Accessed October 16, 2014.

http://www.povertyinsights.org/2011/03/28/is-the-us-government-wasting-money-on-homelessness/.

301 Le terme renvoie à celui de « prison-industrial complex », décrivant l’expansion rapide de la population

carcérale aux Etats-Unis et l’influence politique des compagnies privées dans l’industrie carcérale. C’est l’activiste Angela Davis qui utilisa la première le terme de prison-industrial complex, lors d’un discours enregistré en 1997. Voir : The Prison Industrial Complex. San Francisco, CA: AK Press Audio, 1999.

302 FY2010 Executive Budget Proposal Office of the Mayor, New York City, 2010.

http://www.nyc.gov/portal/site/nycgov/menuitem.c0935b9a57bb4ef3daf2f1c701c789a0/index.jsp?pageID=mayo r_press_release&catID=1194&doc_name=http%3A%2F%2Fwww.nyc.gov%2Fhtml%2Fom%2Fhtml%2F2009a %2Fpr193-09.html&cc=unused1978&rc=1194&ndi=1

303 Voir, Rapport de la Picture the Homeless : Banking on Vacancy. Homelessness and Real Estate Speculation :

logement liée à la spéculation immobilière, et qui trouve sa source dans une série de décisions politiques.

De fait, dans les années 1970, la ville de New York a été l’épicentre d’une crise fiscale majeure, survenant dans le sillage de la désindustrialisation et la suburbanisation des villes nord-américaines. Ces deux processus structurels ont donné lieu à l’augmentation du taux de chômage et de personne sans abri304. Les diverses administrations post-crise ont alors réorganisé leur politique économique et urbaine autour des principes de privatisation et d’austérité305. À partir des années 2002, sous l’administration Bloomberg (2002-2013), la ville de New York a progressivement néolibéralisé ses principes de gouvernance306, et la restructuration économique de la ville a été faite de façon à correspondre à l’idéal de ville globale, laissant de plus en plus de pouvoir au capital. Les efforts de la ville pour attirer sur le marché immobilier les classes supérieures ont donné lieu à une forte gentrification, incluant l’arrivée massive de commerce de luxe, de touristes et d’activités lucratives de loisir307. Dans le même temps, les hauts niveaux de chômage et de pauvreté ainsi que l’épidémie de cocaïne et de crack des années 1980 ont laissé certaines zones de la ville –dont le South Bronx- complétement décimées. Parallèlement, les aides sociales, pensions, programmes d’aides à la santé, accès aux logements abordables pour les classes les plus marginalisées ont été réduits de façon drastique308. La ville a enfin institué des loi anti-homeless ciblant, et criminalisant309, les sans abris afin de débarrasser le downtown de sa populations la plus pauvre310.

304 Wolch, Jennifer R, and M. J Dear. Malign Neglect: Homelessness in an American City. San Francisco:

Jossey-Bass Publishers, 1993, dans Siener, Christian D. “‘A Rock My Pillow and the Sidewalk My Bed’: Homeless Geographies of New York City,” 2011.

305 Voir Harvey, David. A Brief History of Neoliberalism. Oxford; New York: Oxford University Press, 2005. et

, 2005 et Mollenkopf, John H., and Russell Sage Foundation. Contentious City: The Politics of Recovery in New York City. New York: Russell Sage Foundation, 2005.

306 Brash, Julian. Bloomberg’s New York Class and Governance in the Luxury City. Athens: University of

Georgia Press, 2011, dans Siener, Christian D. “‘A Rock My Pillow and the Sidewalk My Bed’: Homeless Geographies of New York City,” 2011.

307 Smith, Neil. “Toward a Theory of Gentrification A Back to the City Movement by Capital, Not People.” Journal of the American Planning Association Journal of the American Planning Association 45, no. 4 (1979): 538–48, dans Siener, Christian D. “‘A Rock My Pillow and the Sidewalk My Bed’: Homeless Geographies of