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THÉRAPIE COGNITIVE ET COMPORTEMENTALE

85sa tâche ; la durée du comportement, par exemple, durant combien de

temps la personne reste inactive ou, au contraire, durant combien de temps elle est hyperactive ; l’intensité du comportement fait référence à la sévé-rité et à l’amplitude du comportement inadapté. Par exemple, si la per-sonne est violente, on essaiera de mesurer de manière subjective l’inten-sité de cette violence. Si la personne éprouve de l’anxiété, le patient essaiera d’estimer l’intensité de cette émotion à l’aide d’une échelle de 0 à 10 ; la latence est le temps parcouru entre le comportement du patient et le signal qui l’a déclenché. Par exemple, l’ergothérapeute demande au patient de ranger sa place. La latence est le temps écoulé entre le moment de la demande de l’ergothérapeute et le moment où le patient commence à le faire. Enfin, la qualité du comportement qui est quelque chose de descriptif et non pas quantitatif comme les autres indices, par exemple,

« il regarde les autres en plissant les yeux » ou « il ne prononce pas les

‹ r › lorsqu’il parle ».

La gestion des ressources est également abordée durant l’observation en établissant avec l’aide du patient un inventaire de ses ressources.

Si cela n’est pas possible, l’ergothérapeute lui fait des propositions. Les ressources sont généralement identifiées dans la sphère personnelle du patient (compétences acquises ou potentielles de la personne), intérêts et motivations et dans son environnement ou sa sphère contextuelle (apports de son entourage). De manière générale, les ressources person-nelles permettent au patient d’accéder plus facilement à des activités qui procurent du plaisir, de la satisfaction et un sentiment de maîtrise de l’ac-tivité. Les ressources environnementales sont en lien avec la famille, l’en-vironnement social, la sphère professionnelle ou associative, les ressources économiques, de logement.

EXEMPLE DE MICHELINE

Micheline, 35 ans, est mère de trois enfants (deux filles de 12 et 4 ans et un garçon de 8 ans).

Elle habite à la campagne. Depuis la naissance du second, elle a des périodes où elle ne par-vient plus à dormir et entreprend des dizaines d’activités qu’elle ne termine pas. Après quelques semaines, elle devient totalement prostrée et passe sa journée au lit. Elle ne peut plus faire son ménage. Elle a été hospitalisée depuis une semaine dans un état dépressif important sans risques suicidaires. Elle a déjà fait quatre séjours à l’hôpital. Sa belle-mère s’occupe de ses enfants durant son hospitalisation. Micheline pense toujours à ses enfants et elle veut se hâter de guérir pour pouvoir s’occuper d’eux. Elle se sent mieux quand elle peut leur cuisiner des petits plats et leur confectionner des habits. Son mari lui rend visite tous les jours à l’hôpital et il est très attaché à elle. Vous la recevez à l’atelier de l’hôpital.

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La prescription du médecin est de préparer son retour à domicile qui aura lieu dans quelques semaines.

Lorsque Micheline arrive à l’atelier, l’ergothérapeute lui présente les différentes activités.

Micheline dit ne rien avoir envie de faire. Les raisons évoquées sont qu’elle se sent fatiguée et qu’elle n’arrive pas à se concentrer. Elle dit également qu’elle ne pense pas qu’elle arrivera à s’occuper à nouveau de ses enfants. L’ergothérapeute apprend qu’elle a fait beaucoup d’ha-bits à ses enfants. Elle accepte de confectionner une petite couverture en tissu pour la pou-pée de sa fille de 4 ans, mais comme elle n’est pas certaine d’y arriver, elle demande que l’er-gothérapeute la guide.

L’observation directe montre que Micheline a une bonne technique d’exécution. Elle sollicite l’ergothérapeute uniquement lorsqu’elle a terminé une tâche et qu’elle n’arrive pas à prendre l’initiative de passer à la suivante (nœuds de l’analyse structurale de l’activité). Elle travaille très lentement. Une autre observation montre que Micheline s’isole des autres patients et ne lève jamais la tête de son ouvrage. Durant la pause, elle sort de l’atelier pour fumer une cigarette et ne reste pas avec le groupe des patients.

Après deux jours, l’ergothérapeute demande à Micheline de faire deux auto-observations.

Elle accepte. L’auto-observation consiste à noter sur une échelle l’intensité de la fatigue éprouvée en début de séance et en fin de séance, et de noter sur la même échelle en une autre couleur sa capacité subjective de concentration durant l’activité.

Les ressources de Micheline sont établies lors d’un entretien après une semaine. Il s’avère que la patiente est très décompensée, elle estime ne pas avoir de ressources. À nouveau, l’ergothérapeute lui fait des propositions et demande à la patiente d’estimer si ce qui lui est présenté est considéré par Micheline comme une ressource. Concernant l’analyse des res-sources de Micheline, l’ergothérapeute différencie les resres-sources personnelles de celles issues de son environnement.

Un travail ultérieur, qui se fera durant le traitement, sera de demander à la patiente de caracté-riser comment elle envisage d’utiliser ou réactiver les ressources à moyen ou long terme.

PROBLÉMATIQUE

La problématique dans l’approche TCC consiste à déterminer le compor-tement cible problématique en identifiant ses antécédents, à comprendre comment il se déclenche et quelles sont les conséquences pour la personne et pour son entourage et à estimer, parallèlement, la motivation person-nelle du patient pour le changement. Il s’agit d’une analyse comporte-mentale ou fonctionnelle dans laquelle l’ergothérapeute essaie d’articuler les différents éléments pour en faire une compréhension dynamique du problème du patient. Elle permet d’identifier les leviers thérapeutiques pour amorcer le changement de l’état de détresse dans lequel se trouve le patient. L’analyse comportementale et fonctionnelle est à la fois concrète et synthétique, elle permet de comprendre en profondeur le problème

87 du patient. L’analyse fonctionnelle est à la clinique ce que l’hypothèse est à la recherche. L’analyse fonctionnelle est une manière de dessiner sur le papier le problème du patient, il est évident que toute la compré-hension clinique ne peut pas être représentée sur le papier, mais les lignes de force devraient y figurer.

La collecte de l’ensemble de l’information permet d’établir l’analyse fonctionnelle. L’information est contenue dans le dossier du patient (s’il est hospitalisé) et elle provient également de l’observation directe et indi-recte telle qu’elle a été présentée dans le sous-chapitre de l’évaluation formative.

Le schéma ci-dessous (figure 7) représente l’analyse fonctionnelle du comportement problématique. Il s’agit du cercle vicieux adapté de Cungi (2001) ou de l’analyse en chaîne (Linehan, 1993, 2000).

Les comportements problématiques de Micheline: A «Rester sans rien faire à l’atelier » et B « Éviter tout contact avec ses pairs » seront illustrés par le cercle vicieux ou l’analyse fonctionnelle présentés à la figure 7.

Comportement

Figure 7 : Le cercle vicieux ou l’analyse fonctionnelle (adapté de Cungi, 2001).

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Nous illustrons le cercle vicieux ou l’analyse fonctionnelle de la figure 7 par les problématiques de Micheline.

COMPORTEMENT PROBLÉMATIQUE A :

« RESTER SANS RIEN FAIRE À L’ATELIER : ABSENCE DE COMPORTEMENT »

Situation déclenchante :

À l’atelier, en présence d’autres patients, l’ergothérapeute lui propose de faire quelque chose : elle décide de faire une couverture pour sa fille.

Pensées (auto-observations) :

« Je ne sais pas faire, même si je fais ça ne sera pas bien, je suis une mauvaise mère. » Émotions (auto-observations) :

« Je me sens fatiguée, triste, confuse, j’ai peur. » Conséquence sur soi :

C– Confirmation des pensées négatives sur elle-même, C– Estime de soi très basse, C+ Elle peut ainsi jouer un rôle de victime et se faire aider.

Conséquence sur les autres :

C+ l’ergothérapeute s’occupe d’elle, C+ les autres patients la laissent tranquille.

Toute situation dans laquelle je dois agir m’est insupportable, ça me paralyse. Je me dis que je ne suis pas capable de la faire.

COMPORTEMENT PROBLÉMATIQUE B :

« ÉVITE TOUT CONTACT AVEC LES AUTRES PATIENTS »

Situation déclenchante :

À l’atelier, en présence d’autres patients, au moment de la pause de 10h.

Pensées (auto-observations) :

« Je suis nulle, je ne vois pas comment quelqu’un pourrait s’intéresser à moi. Je ne sais pas quoi leur dire, aux autres. »

Émotions (auto-observations) :

« J’ai peur des autres en général (70 %) ; j’ai peur des autres au moment de boire le café (50 %). »

Conséquence sur soi :

C– Elle est isolée des autres, C– Estime de soi très basse, C+ Elle contrôle la relation aux autres.

Conséquence sur les autres :

C+ l’ergothérapeute s’occupe d’elle, C+ les autres patients la laissent tranquille.

« J’ai peur de ce que les autres vont me dire, je crois que je ne saurais pas quoi leur dire. »

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