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Les risques du travail, de l’accident à la maladie professionnelle

Dans le document Gestion des risques (Page 101-104)

Très bref historique

Travailler comporte des risques. C’est une évidence, puisque le travail est une activité humaine, et que toute activité met en jeu des facteurs d’occurrence incertaine et de combinaisons inconnues.

Cependant, tant que l’humanité a été rurale, les accidents du travail touchaient rarement plus d’une personne à la fois, et ne frappaient donc pas les esprits.

Seuls les naufrages de navires et les guerres échappaient à cette règle, mais dans un cas comme dans l’autre, le lien entre accident et métier était très ténu. On notera néanmoins – pour la petite histoire – que le pharaon Ramsès II avait dès 1500 avant J.-C établi un système de soins pour les travailleurs d’Egypte, mais qu’il faudra attendre le XIXe siècle pour que des travaux tels ceux de Bernadino Ramazzini établissent le lien entre travail et désordres physiologiques, introdui-sant de fait le concept toujours moderne d’ergonomie.

Ce n’est vraiment qu’il y a deux siècles, avec le début de l’ère industrielle, qu’est née la notion de risque lié à l’activité professionnelle.

C’est à la fin du XIXe siècle que l’activité industrielle, fortement consommatrice de main d’œuvre peu qualifiée et mal protégée, a été la plus meurtrière. Dans les années 1880 à 1900, l’industrie américaine, alors en pleine expansion, causait chaque année la mort de 35.000 ouvriers et en blessait plus d’un demi million.

Dieu merci, cette époque est révolue, et l’industrie a su combiner productivité et sécurité, en grande partie grâce à des machines mieux conçues et plus sûres, mais aussi par une meilleure organisation du travail et du personnel mieux formé.

Les risques professionnels demeurent néanmoins, les affections à long terme devenant plus préoccupantes aujourd’hui que les accidents eux mêmes.

Les risques du travail, de l’accident à la maladie professionnelle

Article L 411-1 du Code de la Sécurité Sociale

« Est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident sur-venu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant à quel-que titre ou en quel-quelquel-que lieu quel-que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise »

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Chapitre

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On estime que deux millions de travailleurs meurent chaque année dans des accidents du travail ou par suite de maladies professionnelles.

Selon certaines estimations, il ne s’agit là que de la partie émergée de l’iceberg, puisque l’on peut estimer que, pour chaque accident mortel, on recense 500 à 2000 lésions professionnelles, selon le type de travail, et que, pour chaque mala-die professionnelle ayant entraîné la mort, on compte 100 autres malamala-dies qui obligent des travailleurs à s’absenter de leur travail.

Au total, on estime que le travail cause chaque année 250 millions d’accidents (330.000 décès) et 160 millions de maladies professionnelles.

Le fardeau social et économique des accidents du travail et des maladies profes-sionnelles n’est pas uniformément distribué. Les pays en voie de développement payent bien évidemment le plus lourd tribu, en particulier à cause de la forte concentration de main d’œuvre dans les industries d’exploitation des ressources naturelles (agriculture, pêche, mines), et la dangerosité des matériels utilisés.

Même parmi les pays développés, les taux d’accidents pour des activités identi-ques varient parfois du simple au double, et certains métiers causent jusqu’à 100 fois plus d’accidents que d’autres.

Par ailleurs, la mondialisation conduit les entreprises multinationales à transférer leurs usines vers des pays où la main d’œuvre est plus abondante et moins coû-teuse, qui sont aussi les pays où la structure sociale et les outils techniques de contrôle des risques professionnels sont les moins évolués.

Si dans les pays développés, le nombre d’accidents continue de décroître légè-rement, on assiste au contraire à une augmentation des troubles musculo sque-lettiques, des affections mentales liées en particulier au stress, et des désordres causés par les allergies et les substances carcinogènes.

En Europe, les statistiques font apparaître que si la fréquence des accidents reste orientée à la baisse, le taux moyen de l’incapacité permanente augmente, tou-chant surtout les ouvriers, les travailleurs étrangers et les salariés âgés qui, s’ils

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Nombre d'accidents du travail mortels par an et par million de salariés

Europe Amériques Asie Afrique Océanie Monde Source : OIT, statistiques 2002

2 000 par an et par million de salariés

Source : OIT, statistiques 2002

Europe Amériques Asie Afrique Océanie Monde 20 000

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ont moins d’accidents, ont des accidents plus invalidants. L’Union Européenne compte environ 8000 décès par an causés par des accidents du travail. La France, elle, recense plus de 650.000 accidents par an, dont 45.000 conduisent à une incapacité permanente et qui causent environ 700 décès et une perte supé-rieure à 25 millions de journées de travail.

Les maladies professionnelles quant à elles causent la perte de 1,2 millions de journées de travail et entraînent directement une centaine de décès reconnus par la Sécurité Sociale française.

Le travail tue donc encore au XXIe siècle. Il ne tue plus comme au siècle précédent ; les maladies insidieuses et des accidents plus rares mais plus graves – souvent survenant hors des conditions opératoires normales – ont remplacé le tribut quotidien autrefois payé au travail. Les expositions aux substances dange-reuses et les troubles musculo squelettiques et mentaux sont sans aucun doute les risques majeurs auxquels nous serons exposés au travail dans les années à venir. Selon certaines estimations, les cancers d’origine professionnelle tuent plus de 300.000 personnes dans le monde chaque année.

Ces accidents et maladie professionnelles ont des conséquences humaines et économiques considérables. Bien qu’il soit évidemment impossible de chiffrer la perte de la vie humaine, on estime que les accidents du travail et les maladies professionnelles représentent une perte de 4 % du Produit National Brut.

Les cotisations à la sécurité pour accidents du travail varient de 1,2 % à 12,9 % de la masse salariale des entreprises en France, mais bien peu de chefs d’entreprise – en particulier patrons de PME – connaissent leur taux, ce qui est symptomati-que de leur mansymptomati-que d’intérêt pour la sécurité !

L’INSEE évalue le coût réel des accidents à 3 fois le montant de la cotisation à la Sécurité Sociale. Quelques ordres de grandeur permettent de fixer rapidement les enjeux :

Le coût moyen d’un accident du travail en France est estimé à 20.000 € (intégrant les coûts directs et les coûts indirects : remplacement de la per-sonne blessée, formation, renforcement des dispositions techniques...).

Le coût moyen d’une lombalgie est lui considéré comme compris entre 20.000 et 50.000 €.

Enfin, le coût moyen d’une surdité d’origine professionnelle est évalué à 100.000 € pour l’entreprise qui en est responsable.

Face à ces conséquences, il est aujourd’hui indispensable d’agir, en faisant appel le cas échéant à des nouvelles ressources au sein des entreprises telles que l’ergonomie. La société ne peut tolérer que le citoyen meure de son travail. Les entreprises ne peuvent plus admettre de perdre leur réputation (et beaucoup d’argent) par une sécurité mal maîtrisée. La maîtrise des risques professionnels est à la fois un enjeu économique et sociétal.

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Dans le document Gestion des risques (Page 101-104)