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Panorama des risques aujourd’hui

Dans le document Gestion des risques (Page 23-27)

Les risques sont une composante incontournable de la vie. Sans risque, il n’y a pas de vie. Cependant, la vie moderne fait peser sur le citoyen des risques qu’il ne maîtrise pas, qui lui font peur, et qu’en règle générale il refuse en fonction de l’analyse intuitive qu’il fait entre risque et bénéfice, analyse qui dépend statisti-quement de nombreux facteurs, tels que l’âge, le sexe, le niveau d’éducation, etc.

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Il a conservé – réminiscence de son cerveau reptilien – la peur ancestrale des catastrophes naturelles (tempêtes, incendies, inondations, tremblements de terre...), d’autant plus qu’il sait que l’homme en est parfois partiellement respon-sable, mais il craint aussi les catastrophes industrielles.

Il craint aussi les effets secondaires néfastes du progrès : pollutions, bruit, intoxi-cations, rayonnements électromagnétiques, stress, « trou » de la couche d’ozone, réchauffement de la planète ...

Il veut que les produits et services que le monde moderne met à sa disposition soient sans risque ou effets secondaires : pour autant, les affections nosocomia-les, les risques thérapeutiques, les intoxications alimentaires, la légionellose, l’encéphalite spongiforme bovine (ESB ou « maladie de la vache folle »), le sang contaminé, etc... viennent contredire cette volonté.

Il ne supporte pas non plus que sa vie professionnelle lui fasse courir des risques d’accidents ou de maladie. En ce sens, le vieil adage syndical « ne pas perdre sa vie à la gagner » prend tout son sens.

Enfin, il a peur des guerres et du terrorisme...

En bref, l’homme moderne est schizophrène : il veut à la fois progrès et qualité de vie – si possible en travaillant le moins possible – et refuse les risques inhé-rents à l’innovation. Il veut avoir le niveau de vie le plus élevé, mais refuse l’ins-tabilité politique mondiale (fracture Nord/Sud) qui en est partiellement la conséquence. Cette schizophrénie est d’ailleurs double : l’homme accepte le ris-que qu’il prend lui-même (le tabac en est le meilleur exemple), mais refuse celui que d’autres lui font subir, oubliant qu’il est lui-même cet « autre » qu’il met en accusation.

Ainsi en est-on aujourd’hui arrivé au fameux « principe de précaution », issu du

« Vorsorge » allemand de la fin des années 60. Il s’agissait à l’époque de réduire la pollution atmosphérique et plus précisément le phénomène des pluies acides.

Le principe de précaution – inscrit dans le traité de Maastricht constitu-tif de l’Union Européenne – est une règle de décision politique en l’absence de certitudes scientifique-ment établies sur les conséquences d’une action nouvelle. Selon ce principe, des actions de prévention sont légitimes et doivent être prises sans délai lorsqu’il parait justifié de limiter, encadrer ou empêcher cer-taines actions potentiellement dan-gereuses, sans attendre que leur Les mots clés du principe de précaution :

Précocité : l’absence de certitudes ne doit pas retarder l’adoption de mesures

Efficacité : les mesures ne doivent pas seu-lement rassurer

Proportionnalité : il faut agir en proportion de la gravité des dommages anticipés

Cohérence : il ne faut pas faire pour un ris-que potentiel, plus ris-que pour un risris-que avéré de même gravité

Révisabilité : les mesures prises sont provi-soires et doivent pouvoir être révisées en fonction des progrès de la recherche

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danger éventuel soit scientifiquement établi de façon certaine. Il ne s’agit donc pas – comme certains le prétendent – de bloquer toute action, mais de prendre des actions préventives proportionnées à l’incertitude et aux risques que cette dernière peut générer. Il s’agit, en mettant en place les concertations nécessaires, de juger si le risque peut être assumé collectivement compte tenu des connaissances du moment et des bénéfices attendus de l’action considérée.

Il est cependant à craindre que la peur du risque, la démission des politiques, et l’activité – pas toujours aussi objective et désintéressée qu’elle paraît de prime abord – des ONG et autres groupes de pression, ne conduisent à une application stricte du principe de précaution qui conduit soit à l’immobilisme, soit au rejet de la faute sur celui qui aura pris le risque. Ainsi que nous l’avons vu en introduc-tion, rien ne fait plus peur aujourd’hui que de devoir prendre une décision ou assumer collectivement un risque : il nous faut toujours un coupable, ou tout au moins un responsable que l’on pourra accuser de tous nos maux et condamner à indemniser les victimes.

Le refus de la responsabilité collective et la démission du politique s’accompa-gnent en outre de la faillite du système d’assurances : les risques sont trop impor-tants (ou jugés tels), et trop spécifiques pour que les trois principes de l’assurance (risque aléatoire, quantifiable, mutualisable) s’appliquent encore.

Ainsi les risques d’atteinte à l’environnement, ou la responsabilité civile profes-sionnelle ne sont-ils plus que très difficilement assurables. On constate donc qu’après s’être opposés à la gestion technique des risques, les assureurs – et sur-tout les courtiers – encouragent désormais leurs clients à identifier et traiter leurs risques afin de mieux connaître et réduire la part qui leur est transférée.

La justice est elle-même victime de ces évolutions de nos sociétés : s’appuyant sur une évaluation a posteriori – et donc forcément négative – de l’événement passé, elle recherche de plus en plus la mutualisation des responsabilités.

L’application du principe de précaution est donc inéluctable. Elle est la consé-quence logique du « Troisième âge de la responsabilité » évoqué en introduc-tion. Les cataclysmes ne sont pas entièrement naturels par leur cause et l’homme est le principal auteur des maux qui l’affectent. Il faut cependant espérer que le politique n’adopte pas une application restrictive et frileuse de ce principe con-sistant à s’abstenir de toute action lorsque le mal est apparemment plus impor-tant que le bien.

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Risques :

Dans le document Gestion des risques (Page 23-27)