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Chapitre 5. Article : Human Epididymis Protein 4 (HE4) and Ovarian Cancer Prognosis

5.6. Financial Support and Acknowledgments

6.1.1. Revue systématique de la littérature

Le thé vert est de plus en plus étudié pour ses effets potentiellement bénéfiques dans de nombreux types de cancer, incluant le carcinome de l’ovaire. Différents types de données sont disponibles dans la littérature, allant de l’étude in vitro aux études épidémiologiques. Les effets in vitro du thé vert et de ses composantes, principalement de l’EGCG, sont vastes. Lors d’une revue systématique de la littérature (dernière mise à jour en juillet 2011), 22 articles étudiant les effets du thé vert ou de ses composantes sur le cancer épithélial de l’ovaire ont été répertoriés. Depuis cette publication, une nouvelle étude est parue dans Cancer Epidemiology (Lee, Su et al. 2013). En compilant les données issues de ces articles et les données issues de notre essai clinique, plusieurs réflexions émergent.

6.1.1.1. Inhibition de la croissance cellulaire

L’inhibition de la croissance des cellules ovariennes néoplasiques par l’EGCG est constamment observée dans différents laboratoires. Toutefois, les concentrations inhibitrices médianes (IC50) de la croissance

cellulaire obtenues par différentes équipes sur différentes lignées cellulaires varient beaucoup, quoiqu’elles restent en deçà de 20 µM pour la plupart des lignées cellulaires (Huh, Bae et al. 2004; Kim, Bae et al. 2004; Chan, Soprano et al. 2006; Kweon, Adhami et al. 2006; Ravindranath, Saravanan et al. 2006; Spinella, Rosano et al. 2006b; Rao and Pagidas 2010; Yunos, Beale et al. 2011; Yan, Yang et al. 2012). Par ailleurs, des doses allant jusqu’à 50 µM mais pour une durée d’exposition de 20 heures n’ont pas été efficaces pour inhiber la croissance des cellules SKOV3 (Yin, Henry et al. 2009). Ces données nous suggèrent que chaque femme pourrait répondre différemment à une même quantité d’EGCG. Il est à noter que différents laboratoires ont testé les IC50 de l’EGCG sur les cellules SKOV3 et A2780 et que les IC50 pour chaque lignée cellulaire sont

comparables d’un laboratoire à l’autre (Chan, Soprano et al. 2006; Kweon, Adhami et al. 2006; Yunos, Beale et al. 2011).

Les effets des autres composantes du thé vert et du thé vert entier sur le carcinome de l’ovaire restent peu connus. Outre l’EGCG, l’ECG aurait aussi la capacité d’inhiber la croissance des cellules ovariennes néoplasiques (Ravindranath, Saravanan et al. 2006). La seule étude disponible sur le thé vert entier comporte toutefois une méthodologie décrite trop sommairement pour pouvoir juger de la validité de ces résultats (Mahboub and Khorshid 2010). Dans le cancer du poumon, il est suggéré qu’un mélange de catéchines du thé vert inhibe plus efficacement la croissance cellulaire que l’EGCG seul (Bode and Dong 2009). Il pourrait donc

être intéressant d’obtenir des données similaires pour le carcinome de l’ovaire, pour guider la formulation éventuelle d’un traitement à base de thé vert ou d’extraits de thé vert.

6.1.1.2. Mécanismes sous-jacents à l’activité du thé vert et de ses extraits

Les différentes études disponibles ne nous permettent pas de déterminer clairement le mécanisme sous- jacent à cette inhibition de croissance. Certaines données suggèrent que l’inhibition de la croissance cellulaire par l’EGCG pourrait être due à une induction de l’apoptose (Trudel, Labbé et al. 2012). Plusieurs protéines et leurs ARNm semblent aussi être modulés par le thé vert ou ses composantes. Parmi celles-ci, on retrouve notamment l’ET-1, une protéine surexprimée dans les cancers de l’ovaire de stade avancé (Bagnato and Rosano 2008; Bhalla, Haque et al. 2009). L’expression de l’ET-1 et de son récepteur ETAR est diminuée par le

thé vert et l’EGCG, à la fois au niveau de l’ARNm et de la protéine (Spinella, Rosano et al. 2006a; Spinella, Rosano et al. 2006b). Cette diminution de l’expression est associée notamment à une diminution de l’activité des MMP2, -9 et -14 (Spinella, Rosano et al. 2006b). De même, l’EGCG diminue l’expression basale de la MMP2 (Roomi, Monterrey et al. 2010). Bien que l’EGCG et le thé vert aient de nombreuses autres activités, ce mécanisme nous interpelle particulièrement étant donné la relation observée entre la MMP2 exprimée dans les implants métastatiques de carcinome de l’ovaire et le pronostic du carcinome de l’ovaire (Périgny, Bairati et al. 2008). Plusieurs des cibles alléguées du thé vert et de ses composantes ont aussi déjà été trouvées associées au pronostic du carcinome de l’ovaire, notamment le VEGF (Masoumi Moghaddam, Amini et al. 2012). Étant donné le vaste spectre d’activité du thé vert et de ses composantes, il sera important d’identifier les cibles du thé vert pour optimiser une éventuelle intervention clinique.

6.1.1.3. Doses optimales

Pour être cliniquement significatifs, les effets in vitro du thé vert et de ses composantes doivent être obtenus à des concentrations similaires à ce qui peut être atteint chez l’humain. Chez les sujets à jeun, la concentration plasmatique maximale a été mesurée à 8,70 µM d’EGCG (Chow, Hakim et al. 2005). La plupart des effets du thé vert sur des lignées cellulaires de carcinome de l’ovaire sont observés à des doses d’environ 10 µM (Figure 2–1 et Table 2–3). Par ailleurs, les doses maximales tolérées d’extraits de thé vert sont de 3,0 g/m2

(Pisters, Newman et al. 2001; Laurie, Miller et al. 2005), soit l’équivalent de 365 µmol par jour pour un adulte de 1,65 m et de 60 kg. Il n’est donc pas invraisemblable que le thé vert puisse avoir des effets chez l’humain. Les doses optimales pour prévenir ou traiter le carcinome de l’ovaire à l’aide du thé vert n’ont toujours pas été déterminées. Dans le cancer de la prostate, un essai clinique randomisé à double insu a démontré une réduction de l’incidence du cancer de la prostate en utilisant 600 mg/jour d’extraits de thé vert contenant 51,88% d’EGCG (Bettuzzi, Brausi et al. 2006).

Parmi les études épidémiologiques disponibles, les deux études suggérant une réduction de l’incidence du carcinome de l’ovaire rapportent des effets avec la consommation de moins d’une tasse par semaine (250 mL ou 350 mL), infusée à partir de thé en feuilles (Zhang, Binns et al. 2002; Nagle, Olsen et al. 2010). L’étude rapportant une amélioration du pronostic du carcinome de l’ovaire indique quant à elle des effets avec une consommation post-diagnostic d’une tasse par jour (Zhang, Lee et al. 2004). Ces quantités sont nettement inférieures à ce qui est utilisé dans les études expérimentales, mais il faut noter que les sujets sont généralement exposés au thé vert durant plusieurs années. Alors que l’obtention de données cliniques sur les doses optimales dans le carcinome de l’ovaire s’avérerait nécessaire, la faible toxicité du thé vert permet d’utiliser des quantités plus élevées que ce qui est rapporté dans les études épidémiologiques.

6.1.1.4. Moment et durée d’administration

Outre les effets, les cibles et les doses utilisées, le moment auquel le thé vert est administré par rapport au diagnostic du carcinome de l’ovaire est aussi un élément à prendre en compte. Les études épidémiologiques ont principalement évalué l’effet du thé vert en prévention du carcinome de l’ovaire, alors que les études expérimentales menées sur des lignées cellulaires et des souris ont plutôt évalué l’effet du thé vert comme traitement du carcinome de l’ovaire. Une seule étude épidémiologique s’est intéressée au pronostic du carcinome de l’ovaire en relation avec l’apport en thé vert post-diagnostic (Zhang, Lee et al. 2004). Les effets du thé vert pourraient donc s’observer à plusieurs moments de l’évolution de la maladie.

Le traitement du carcinome de l’ovaire comporte plusieurs étapes pendant lesquelles le thé vert pourrait être administré : pendant la chimiothérapie de première ligne, pendant la période de maintien et lors de la récidive/progression. Dans les lignées cellulaires, on observe une potentialisation des effets du cisplatin par l’EGCG dans certaines conditions seulement, par exemple lorsque l’EGCG est ajouté après le traitement au cisplatin (Chan, Soprano et al. 2006; Yunos, Beale et al. 2011). Ces données sont les seules portant spécifiquement sur le moment d’administration du thé vert par rapport à la chimiothérapie. Ces résultats n’ont que peu d’implications cliniques puisque le cisplatin n’est administré aux femmes atteintes de carcinome de l’ovaire que dans certaines conditions (du Bois, Quinn et al. 2005). Certaines combinaisons avec le cisplatin avaient toutefois un effet délétère, par exemple lorsque l’EGCG était ajouté avant le traitement au cisplatin (Yunos, Beale et al. 2011). Il serait donc important de vérifier les effets du thé vert sur l’effet de la chimiothérapie avant d’envisager une intervention combinant les deux modalités.

Une étude in vivo a démontré une réduction de la taille des tumeurs injectées à des souris nues avec un apport en thé vert débuté une fois les tumeurs implantées (7 jours après l’injection) (Spinella, Rosano et al. 2006b). Ces souris n’ont reçu aucune chimiothérapie et n’ont pas été opérées, ce qui rend les résultats difficilement applicables à la clinique (Spinella, Rosano et al. 2006b).

Beaucoup de conditions restent donc à être explorées pour optimiser l’utilisation du thé vert soit dans la prévention du carcinome de l’ovaire, soit dans le traitement des femmes atteintes.

6.1.2. Résultats de l’essai clinique évaluant l’efficacité potentielle du thé vert