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Partie A : Acquis concernant les matériau

1.3. LE RESEAU POREU

Les matériaux cimentaires sont des matériaux poreux. Il est nécessaire de définir le réseau poreux pour caractériser ultérieurement la microstructure des mortiers étudiés.

Un milieu poreux se modélise par la superposition d’un corps solide et d’espaces vides, les pores, dispersés de manière plus ou moins homogène au sein de la matrice. Ces pores sont de dimensions très variables dans le cas des matériaux cimentaires puisque s’étalant de la nanoporosité (rayon de pores de l’ordre du nanomètre) à la macroporosité.

Ces pores se classent en différentes familles selon leur diamètre [Powers, 1958] :

• les cavernes : pouvant mesurer jusqu’à quelques millimètres, dues à des bulles d’air occluses lors du malaxage,

• les pores capillaires : de 10 à 500 nm, définis comme l’espace non comblé entre les grains de ciment par les hydrates. La porosité capillaire diminue avec l’avancement des réactions d’hydratation et le rapport E/C (figure I.A.3),

• les pores des hydrates, essentiellement ceux des silicates de calcium hydratés car les autres hydrates sont très peu poreux, varient entre le nanomètre et quelques dizaines de nanomètres. Ce sont des interstices moléculaires entre deux feuillets constitutifs de CSH (pores intracristallites, l’espace interfeuillet atteignant environ quelques dizaines d’Angström) ou entre les particules du gel (pores intercristallites). Ce type de porosité est intrinsèque aux hydrates, peu influencé par la morphologie des CSH et approximativement constante pour une pâte complètement hydratée ou presque, quel que soit le rapport E/C (environ 28% selon le modèle de Powers, applicable au cas des ciments ordinaires).

Si l’on considère le réseau poreux vis à vis de la perméation et du transport de matière, les pores peuvent être classés en trois groupes :

• les pores interconnectés : pores communicants à travers le milieu poreux qui servent de chemin pour l’échange de fluides avec l’extérieur. Ils constituent la porosité accessible aux fluides. Ils peuvent être saturés ou partiellement saturés,

• les pores isolés : confinés dans la matrice, ils ne sont pas accessibles aux fluides et ne participent donc pas aux transferts,

• les bras morts : une seule de leur extrémité communique avec l’extérieur.

La structure du milieu poreux apparaît comme très complexe. Pour mieux la décrire, des grandeurs sont définies.

La porosité ε (fraction de volume, %) est le volume des espaces vides (Vv,m3) ramené au volume total ou volume apparent (V,m3) du matériau :

V Vv =

ε Equation I. 9 Ou encore la connectivité χ : χ =nbnn+1 Equation I. 10 avec : nb : nombre de branches

nn : nombre de nœuds

et la tortuosité τ, rapport entre la longueur d’un chemin d’écoulement L (m) et la distance L0 (m) entre les points amont et aval :

0 L

L =

τ Equation I. 11

La continuité, ou la segmentation du réseau capillaire, prend une importance considérable dès que les transferts sont étudiés. Une étude menée par Bentz & Garboczi relie la part de porosité capillaire à la fraction de pores connectés alors induits pour divers rapports E/C [Bentz et al., 1992]. La figure I.A.4 est relative à une pâte de ciment ordinaire à E/C = 0,45.

0 0,25 0,5 0,75 1 0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 Porosité capillaire (%)

Fraction de pores connectés (%)

Figure I.A. 4 : Fraction de pores connectés en fonction de la porosité capillaire d’après [Bentz et al., 1992].

Un autre type de porosité apparaît lors d’ajout de granulats à une pâte de ciment (cas des mortiers et bétons) : l’auréole de transition, qui désigne la zone interfaciale entre les grains et la pâte de ciment. Lors du gâchage, le réarrangement des grains de ciment anhydres autour des

granulats par effet de paroi va modifier la distribution d’eau dans le mélange en accumulant celle-ci près des granulats et créer un gradient de E/C local. Lors des réactions d’hydratation et du durcissement de la pâte, l’eau disparaît et laisse une porosité plus élevée autour des granulats, favorisant la nucléation et germination perpendiculairement à la paroi des plus gros hydrates comme la portlandite et l’ettringite qui s’orientent de façon préférentielle. Ces zones perturbées mesurent jusqu’à quelques dizaines de micromètres (ordre de taille des pores capillaires). Au delà d’un certain seuil de fraction volumique des grains (admis couramment comme de 60% en dosage volumique de granulats pour des auréoles de 20 µm), ces zones de transition peuvent être interconnectées et modifier significativement les propriétés physiques (mécaniques, transferts) des matériaux [Lobet, 2003].

Selon leur nature pétrographique, la porosité même des granulats peut être prise en compte ou non.

Day & Marsh [Day et al., 1988] mènent une discussion sur les divers résultats de porosimétrie en fonction du type de test réalisé : la porosimétrie par intrusion de mercure pour des matériaux cimentaires contenant des additions minérales donne une porosité plus grande que celle obtenue sur les mêmes matériaux par pycnométrie à l’éthanol et hélium. Selon ces auteurs, il n’y a de différences entre les mesures que si l’avancée des réactions pouzzolaniques est vraiment significative.

La pycnométrie à l’hélium ne mesure que la porosité directement accessible, correspondant à la part de la porosité qui participe aux transferts. Les différences de résultats de porosimétrie sont donc attribuées à la part de la microstructure discontinue, soit aux pores bloquants qui résultent du tapissage des parois des gros pores et du rétrécissement des chemins d’accès par les produits des réactions pouzzolaniques.

Les variations notables entre la porosimétrie au mercure et les mesures de la porosité accessible à l’eau par pesées hydrostatiques et séchage (détermination de l’eau évaporable) sont liées à la nature même des fluides. L’eau est un liquide mouillant qui pénètre facilement et notamment entre les interfeuillets des CSH à l’inverse du mercure qui possède une faible tension de surface. L’écart entre les deux mesures est d’autant plus grand que les CSH sont nombreux (cas des matériaux à base de ciment composé).

Les courbes d’intrusion de mercure au cours du temps dans les pâtes à base de ciment composé tendent à être convexes pour une valeur de rayon 10 nm, ce qui traduit le blocage des pores par les produits des réactions pouzzolaniques, encapsulant des volumes de porosité qui ne sont alors plus accessibles au mercure mais aussi à d’autres fluides comme l’alcool et à l’hélium. Cette réflexion souligne l’intérêt de multiplier les déterminations de porosité par des méthodes diversifiées et complémentaires, plus sensible chacune à un certain caractère de la microstructure. Il faut pourtant tenir compte des modifications de microstructure inhérentes à ces techniques et des erreurs qu’elles peuvent induire lors de la caractérisation de porosité : le séchage peut altérer la délicate microstructure et casser les ponts eau ou hydrogène (eau capillaire ou liée). La resaturation à l’eau d’échantillons secs peut initialiser la réhydratation. La resaturation par des fluides non réactifs comme l’éthanol ou l’hélium est ainsi recommandée.

2.

INFLUENCE DE LA PRESENCE D’ADDITIONS MINERALES