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Partie B : Sollicitations in situ des bétons dans un stockage profond

CSH Composé Portlandite

4. MODIFICATIONS DES PROPRIETES DE TRANSFERT PAR DECALCIFICATION/HYDROLYSE

4.2. MODIFICATIONS DES PROPRIETES DE TRANSFERT

4.2.1. PERMEABILITE AU GAZ

Nous n’avons pas relevé dans la littérature de mesures concluantes de perméabilité au gaz réalisées sur des matériaux cimentaires dégradés.

4.2.2. PERMEABILITE AU LIQUIDE

Ce type de caractérisation pose des problèmes expérimentaux si le fluide utilisé est de l’eau car le phénomène de décalcification/hydrolyse pourrait se poursuivre pendant la mesure si celle-ci est trop longue, ce qui revient pratiquement à une épaisseur dégradée trop faible.

Loosveldt [Loosveldt, 2002] utilise de l’éthanol pour évaluer la perméabilité liquide de mortiers à base de ciment ordinaire et de sable siliceux, de rapport E/C = 0,4, dégradés par une solution de nitrate d’ammonium. La perméabilité du matériau sain est de 13,7.10-18 m² alors que celle de la zone dégradée est de 36.10-18 m², ce qui représente une augmentation de 163%. Ces résultats sont à considérer prudemment car les mesures montrent une très grande dispersion des valeurs. Leur moyenne est présentée ici à titre indicatif.

4.2.3. DIFFUSIVITE

Dans ce tableau (tableau I.B.12) regroupant des résultats de mesure de coefficients de diffusion sur des matériaux dégradés par lixiviation simple ou par nitrate d’ammonium, Dem désigne le

coefficient de diffusion global du mortier et Depm celui de la pâte dans le mortier, valeur

corrigée par la dilution due à la substitution en additions et calculée d’après la formulation. Nous nous attachons à exposer des résultats mesurés expérimentalement et non issus de modélisation, le but étant de déterminer la gamme de variations des coefficients de diffusion obtenus expérimentalement, selon les matériaux et leur état de dégradation, pour pouvoir par la suite les confronter à nos propres résultats.

DeHTO désigne dans le tableau I.B.12 le coefficient de diffusion de l’eau tritiée et DeCl- celui des

De (m².s-1)

Matériau et mode opératoire Caractérisation de la

dégradation Zone saine Zone dégradée

Référence Pâte E/C = 0,4

Dégradation à l’eau pure DeHTO Ep = 1 mm 2,73.10-12 6,56.10-12 Ep = 0,8 mm (3 mois) Dem =1,72.10-12 soit Depm =3,17.10-12 Ep = 1,1 mm (6 mois) Dem =2,28.10-12 soit Depm =4,76.10-12 Mortier E/C = 0,4 sable siliceux, S/C = 2 Dégradation à l’eau pure DeHTO Ep = 1,6 mm (12 mois) Dem =1,70.10-12 soit Depm =3,55.10-12 Dem =4,45.10-12 soit Depm =9,29.10-12 [Bourdette, 1994]

Mortier CEM I, E/C = 0,4 sable siliceux, S/C = 2 Dégradation à l’eau pure DeHTO

Taux de décalcification de 39% après 7 mois

1,7.10-12

2,7.10-12 Mortier CEM I, E/C = 0,4

sable siliceux, S/C = 2 Dégradation [NH4NO3] = 6 mol.l-1 DeHTO Taux de décalcification de 79% après 4 jours 1,7.10-12 9,9.10-12 [Tognazzi, 1998] Ep = 1 mm 3,510-12

Pâte CEM I, E/C=0,2 Dégradation à l’eau pure

DeHTO Ep = 1,33 mm

2,0.10-12

5,610-12

Ep = 0,4 mm 9,2. 10-13

Pâte CEM I, E/C=0,2 30% de fumée de silice Dégradation à l’eau pure DeHTO

Ep = 0,58 mm

1.10-14

25. 10-13

[Matte et al., 1999]

Pâte CEM V/A, E/C = 0,38 Dégradation à l’eau pure à 25°C DeCl-

Porosité : 22% saine 37% dégradée

2,2.10-13 50.10-13 [Peycelon et al., 2004a]

La diffusivité d’un matériau est liée à sa microstructure, non seulement de façon quantitative (volume total poreux) mais aussi qualitative (taille des pores, tortuosité et connectivité) (cf. Partie A, §2). L’évolution de la porosité par la décalcification/hydrolyse est à l’origine des modifications des coefficients de diffusivité.

Les coefficients de diffusion à l’eau tritiée obtenus par Matte et al. [Matte et al., 1999] de pâtes altérées par l’eau pure indiquent que le processus de décalcification affecte plus la diffusivité des matériaux contenant de la fumée de silice, bien que l’épaisseur dégradée en fonction du temps soit moindre. Les auteurs attribuent ces observations au phénomène de percolation : à l’état sain, la connectivité des pores de la pâte contenant des additions est inférieure au seuil de percolation. La décalcification crée des chemins de percolation. Ces résultats sont corroborés par les temps nécessaires de mise en régime stationnaire de la diffusivité dans les matériaux. L’augmentation de la fraction porale connectée due à la dissolution de la portlandite et son impact sur le coefficient de diffusion a été modélisée par Bentz et al. [Bentz et al., 1992] en appliquant la théorie de la percolation à la microstructure modifiée de matériaux à base de ciment ordinaire. Après avoir déterminé la fraction volumique critique d’hydroxyde de calcium combinée avec l’espace interstitiel capillaire (la portlandite représente 20 à 25% des hydrates), le modèle calcule l’augmentation du coefficient de diffusion, soit le rapport entre le coefficient intrinsèque du matériau pour un certain taux de dissolution de la portlandite et le coefficient intrinsèque du matériau sain. Pour une pâte de ciment ordinaire à E/C = 0,4, le coefficient de diffusion est multiplié par de 1,3 si 10% de la portlandite est dissout, par 26 pour 75% et par 46 si la dissolution de cet hydrate est totale. La de pâtes contenant 5 et 10% de fumée de silice est examiné pour un E/L de 0,45. La fumée de silice diminue la teneur en hydroxyde de calcium susceptible d’être lixiviée. Plus la substitution en fumée de silice est importante, plus la fraction capillaire crée par la lixiviation est faible et le seuil de percolation tend à être abaissé. La porosité créée dans les gels de CSH décalcifiés est trop fine et disparate pour être connectée et former des chemins de percolation.

Peycelon et al. [Peycelon et al., 2004a] relient la porosité de la zone altérée et le coefficient de diffusion pour deux pâtes de ciment en fonction de la dégradation des deux matériaux (représentée par la teneur en calcium de la phase solide résiduelle d’après la concentration de la phase liquide déduite de la courbe Casolide/Caliquide).

L’essentiel de l’ouverture de porosité impliquant les évolutions des propriétés diffusives est lié à la dissolution des phases solides contenant du calcium : pour les matériaux à base de ciment CEM I, donc riches en portlandite, la dissolution de celle-ci se traduit par une importante ouverture de porosité non seulement car ce composé constitue 22% de la pâte de ciment hydraté, mais aussi car la taille des cristaux est importante. Dès que la concentration de la solution porale en calcium atteint 2 mmol.l-1, la courbe d’équilibre Casolide/Caliquide montre une rupture brutale de pente : le rapport C/S des CSH chute rapidement traduisant la dissolution partielle de ces composés. La décalcification des CSH crée une ouverture de pores de diamètres inférieurs à 3 nm. La diffusion reste faible dans les pores de cette taille, d’autant plus si le matériau est fortement dégradé et possédant donc une importante porosité où la diffusion est privilégiée. L’ouverture des pores dans les gels de CSH ayant peu d’effet sur la diffusivité, les auteurs négligent sa part dans la diffusion globale à travers les hydrates décalcifiés.

Les valeurs expérimentales mesurées sur la pâte de CEM I valident cette modélisation mais pas celles déterminées pour la pâte de CEM V/A, contenant des cendres volantes et des laitiers de hauts fourneaux. La modélisation de la diffusivité de ce matériau dégradé impose la prise en considération de deux zones de diffusion différentes dans l’épaisseur altérée et donc de deux coefficients de diffusion. La première zone est déterminée pour la fraction solide à l’équilibre

avec une solution de concentration en calcium comprise dans l’intervalle 22.10-2 mmol.l-1. Le coefficient de diffusion est alors lié à la dissolution de la portlandite et de l’ettringite. Il n’est pas très différent de celui de la zone saine (environ trois fois supérieures).

Le coefficient de diffusion de la deuxième zone superficielle très dégradée (type gel) à l’équilibre avec une solution de concentration en calcium inférieure à 2 mmol.l-1, comportant des CSH de rapport C/S inférieur à 1, est cent fois supérieur à celui de la zone saine.