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Partie B : Sollicitations in situ des bétons dans un stockage profond

1. DECALCIFICATION/HYDROLYSE DES MATERIAUX CIMENTAIRES

1.2. DECALCIFICATION DE LA PATE DE CIMENT

Les réactions d’équilibre solide/liquide des hydrates sont présentées dans une première sous partie, à température ambiante tout d’abord. L’effet de la température sur ces réactions sera ensuite abordé pour analyser le comportement de la matrice cimentaire lors de lixiviation en température. Une deuxième sous partie présente la mise en équation du mécanisme de décalcification/hydrolyse puis le modèle de zonation de l’épaisseur dégradée de la pâte de ciment proposé par Adenot au cours de ses travaux [Adenot, 1992] est finalement rappelé dans une troisième sous partie.

1.2.1. HYDROLYSE DES HYDRATES DE LA PATE DE CIMENT

1.2.1.1. A température ambiante

Adenot [Adenot, 1992] suit la concentration ionique d’une solution agressive (eau pure) renouvelée au cours du temps au contact d’une pâte de ciment. Il observe une composition restant à peu près constante, très riche en calcium et contenant des traces de silicates, de

sulfates et de sodium. Les fortes teneurs en calcium laissent prétendre à une lixiviation quasi- exclusive du calcium.

Les équations régissant la dissolution des principaux hydrates de la pâte de ciment sont exposées ici :

• Dissolution de l’hydroxyde de calcium :

Ca(OH)2 + 2 H+←⎯→ Ca²+ + 2 H2O Equation I. 13

La disparition de l’hydroxyde de calcium s’accompagne de la chute du pH de la solution interstitielle qui était tamponné autour de celui de stabilité de cette espèce (12,5). De plus, dans cet intervalle de pH la portlandite assurait le contrôle de la teneur en calcium de la solution (voir courbe d’équilibre Casolide/Caliquide, figure I.A.2). En l’absence de portlandite le contrôle de la teneur en calcium (et silice) de la solution et du pH dans l’intervalle 10,5 < pH < 12,4 est assuré par les CSH.

• Les dissolutions des CSH naturels (tobermorite, jennite et afwillite à haute température) peuvent s’écrire de manière simple puisque les formules des ces hydrates sont connues :

Tobermorite : Ca5Si6O22H10 +2H2O+10H+ ↔5Ca2+ +6H4SiO4 Equation I. 14 Jennite : Ca9Si6O32H22 +18H+ ↔9Ca2+ +6H4SiO4 +8H2O Equation I. 15 Afwillite : Ca Si O H H Ca H4SiO4 H2O Equation I. 16

2 6

10 2

3 +6 + ↔3 + +2 +2

Les CSH présents dans la pâte de ciment hydratée se décalcifient graduellement en présence d’eau. Cette dissolution est de nature non congruente et fortement influencée par le pH de la solution et le rapport C/S des CSH ([Rahman et al., 1999]), ([Harris et al., 2002]). Une description précise de ce mécanisme applicable à tous les CSH se révèle impossible dans l’état actuel des connaissances.

Globalement, la dissolution partielle des CSH s’énonce :

(CSH) ←⎯→ (C(1-x)SH(1-2x)) + x Ca²+ + 2x HO- Equation I. 17

alors qu’une dissolution complète s’écrirait : (CSH) ←⎯→ S C Ca²+ + H2SiO4²- + 2 [ S C -1] HO- + nHO- Equation I. 18 avec : S C

: rapport molaire oxyde de calcium/oxyde de silicium

n : nombre de moles d’eau liées aux CSH • Dissolution des sulfoaluminates de calcium :

AFm : 3CaO.CaSO4.Al2O3.12H2O + 12H+ ←⎯→ 4 Ca²+ + SO4²- + 2.Al3+ + 18 H2O

Equation I. 19 AFt : 3CaO.3CaSO4.Al2O3.32H20 + 12 H+←⎯→6 Ca²++ 3 SO4²-+ 2 Al3++ 38 H2O

Ces espèces déterminent la teneur en ions sulfates de la solution interstitielle.

Le diagramme suivant (figure I.B.1) représente les différents domaines de pH de stabilité des hydrates à température ambiante.

9,5 10 10,5 11 11,5 12 12,5 13 bru cite (M g(O H)2) gélh énit e hyd ratée tober morite (C/S=0, 83)

ettringite C3ASH 4 CSH (C/ S = 1,25) jennit e / afw illite ( C/S=1 ,5) mono sulfo-alum inate hydrog rena t C4A H13 port landi te (C a(OH )2) pH d q . 1,00E-04 1,00E-03 1,00E-02 1,00E-01 co n c. sa t. (m o l/l)

pH d'équilibre [Ca]ou [Mg] sat

Figure I.B. 1 : Domaines d’équilibres pH des hydrates à température ambiante d’après [Bourbon, 2002].

Il est à noter que toutes ces phases solides sont à l’équilibre avec des ions hydroxyles, leur présence est donc favorisée par un pH basique.

Lors de l’attaque par l’eau pure, le pH de la solution interstitielle diminue et le premier hydrate dissout, le plus soluble donc, est l’hydroxyde de calcium, dès que le pH franchit la barrière de 12,5.

Par définition, le front de dissolution de la portlandite délimite l’interface entre le matériau sain et la matrice dégradée. Les autres principaux hydrates de la pâte de ciment hydraté ont des domaines de stabilité de pH qui se regroupent entre 10,5 et 12,5.

Remarquons que les pH de stabilité des CSH diminuent avec leur rapport C/S. Etant donné le gradient de concentration qui existe entre la solution interstitielle dans le cœur sain de l’échantillon et le milieu agressif extérieur, la décalcification des CSH est progressive. Cet aspect est mis en évidence par Adenot par des profils de teneur solide en calcium et silicium par microsonde électronique dans des échantillons de pâte attaquée par de l’eau pure [Adenot, 1992].

Les CSH sont moins solubles que la portlandite. Par conséquent, la portlandite tendra à équilibrer le gradient en calcium établi entre la solution peu chargée et la pâte en passant en solution, tant que ce composé est disponible dans la matrice cimentaire, puis la régulation de l’équilibre se fera par les CSH.

Les équations de dissolution des hydrates de la pâte de ciment traduisent un équilibre chimique et thermodynamique entre les ions de la solution porale et de la phase solide de la matrice cimentaire. Pour les CSH, cette courbe d’équilibre fonction de la concentration en calcium liquide fixe le rapport C/S (figure I.B.2).

0 5 10 15 20 25 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3

Ra pp ort CaO/Si O2 solid e

Ca 2+ e n s o lu ti o n ( m m o l/ l) Chen et al. (2004) - 22°C Tay lor (1950) - 17°C Flint & Wells (1934) - 30°c

Greenberg and Chang (1965) - 25°C Kalous ek (1952) - 25°C

C -S-H (c /s v ariable: max - 0. 8)

Gel de s ilice

(SiO2 amorphe) C-S -H ( c/s m ax) + CH

Figure I.B. 2 : Equilibre et solubilité des CSH : digramme reliant le rapport molaire

CaO/SiO2 en fonction de la concentration de calcium en solution d’après [Andra, 2005].

Dans une pâte à base de ciment pur, la solution porale contient des alcalins (Na+, K+) et la teneur en Ca2+ est contrôlée par la portlandite à une valeur voisine de 2 mmol.l-1. En absence d’alcalins, si le système CaO-SiO2-H2O est uniquement considéré, l’hydroxyde de calcium et

les CSH (rapport C/S maximum = 1,65) coexistent pour une concentration [Ca2+] = 22 mmol.l-1 à 25°C, équivalente à un pH de 12,5. Lorsque la concentration en calcium diminue, le rapport C/S chute de 2,5 à 1,5 associée à la dissolution de la portlandite. Ensuite, ce rapport évolue lentement (1 < C/S < 1,65) jusqu’à une valeur de 1 traduisant la décalcification progressive des CSH et des phases aluminates.

La teneur en calcium en l’absence de portlandite est donc fixée par les CSH.

En dessous d’une concentration critique de la solution porale en ions calcium de 2 mmol.l-1 (correspondantà un pH = 11), seuls les CSH se dissolvent, le rapport C/S est d’environ 1 et la structure des CSH est proche de celle de la tobermorite. En deçà d’une concentration de 1 mmol.l-1 (C/S = 0,3 et pH = 9), ces hydrates sont considérés comme totalement décalcifiés [Adenot, 1992].

Les phases sulfoaluminates, et plus particulièrement l’ettringite, sont les hydrates les plus stables du système considéré ici pour décrire la pâte de ciment hydraté. Gabrisova et al. [Gabrisova et al., 1991] déterminent un pH de dissolution de 11,6 pour l’AFm et de 10,7 pour l’AFt.

A un pH inférieur à 10, seul le gypse et le sulfate d’aluminium restent stables.

Les valeurs d’équilibre en pH sont à compléter avec les constantes de dissociation Ke, les produits de solubilité Ks et les enthalpies de réaction ∆H°r rapportées dans le tableau I.B.1, afin

de considérer tous les paramètres influant sur la dégradation. Ces différentes grandeurs sont explicitées en annexe (cf. Annexe 1).

CSH