2.3 Pr´eparation d’´echantillons d’´epaisseur nanom´etrique
3.1.3 Rendement/efficacit´e de luminescence
Comme dans les premiers travaux japonais [12], la forte intensit´e de luminescence du hBN
dans l’UV nous a interpell´es. Notre syst`eme de d´etection calibr´e en r´eponse spectrale nous offre
l’acc`es aux intensit´es de luminescence absolues mesur´ees dans la gamme 200-400 nm. Dans cette
partie, nous proposons de quantifier l’efficacit´e de luminescence du cristal HPHT. Nous
pr´e-CHAPITRE 3. PROPRI ´ET ´ES DES CRISTAUX 3D DE hBN
senterons d’abord la proc´edure `a suivre en CL pour estimer l’efficacit´e de luminescence. Nous
exposerons ensuite les r´esultats de deux ´etudes sur l’efficacit´e de luminescence du hBN : en
fonc-tion de la puissance d’excitafonc-tion puis de la profondeur d’excitafonc-tion. Les r´esultats obtenus seront
enfin compar´es `a des mesures identiques r´ealis´ees sur deux mat´eriaux : un ´echantillon diamant
parmi les plus purs qui existent `a l’heure actuelle (Element6
TM- Electronic Grade, impuret´es ≤
ppb) et un ´echantillon d’oxyde de zinc (ZnO) commercial (CrysTec GmbH).
3.1.3.1 Estimation en CL : m´ethode et aspects exp´erimentaux
Excitation par faisceau d’´electrons
L’excitation d’un semi-conducteur par un faisceau d’´electrons donne lieu `a diff´erents
m´eca-nismes d’interaction ´electron-mati`ere de type ´elastique ou in´elastique d´ecrits dans les chapitres
pr´ec´edents. L’´energie de l’´electron incident qV de l’ordre du keV est tr`es grande par rapport `a
l’´energie du gap E
gde l’ordre de l’eV. Chaque ´electron incident produit un grand nombre de
paires ´electron-trou qui s’accumulent respectivement au minimum de la bande de conduction et
au maximum de la bande de valence, avant de se recombiner. Le nombre de paires ´electron-trou
(dans notre cas, li´ees sous forme d’excitons) cr´e´ees en moyenne par ´electron incident absorb´e
vautV/<E>avec <E>l’´energie n´ecessaire pour former une paire ´electron-trou d’´energieE
g. Il
a ´et´e montr´e qu’elle est directement li´ee `a l’´energie de bande interdite du semi-conducteur [163],
on utilisera ici la relation<E>∼ 3E
gavec E
g=6.4 eV pour le hBN.
Le taux de g´en´eration d’excitons par unit´e de temps dans le cristal (exprim´e en nombre
d’excitons.s
−1), not´eG, s’´ecrit de la mani`ere suivante [164] :
G= V i(1−f)
< E > e (3.1)
o`u V est la tension d’acc´el´eration des ´electrons incidents, i le courant de faisceau, e la charge
´el´ementaire etf le coefficient de r´etrodiffusion (la fraction d’´electrons perdus par r´etrodiffusion).
f est faible pour des ´el´ements l´egers comme le bore et l’azote, nous l’avons estim´e de l’ordre de
5% dans hBN avec des simulations Monte-Carlo (Casino 2.42).
En cathodoluminescence dans un microscope ´electronique, le faisceau incident est focalis´e et
le taux de g´en´eration s’´etale en profondeur. Les trajectoires ´electroniques dessinent une forme de
poire (voir Figure 3.14a). La distribution spatiale de l’excitation se d´eduit des pertes d’´energie
des ´electrons dans le mat´eriau, calculables en Monte-Carlo. La Figure 3.14b pr´esente les
pro-fils d’´energie d´epos´ee par les ´electrons incidents en fonction de leur tension d’acc´el´eration. Ces
courbes ont ´et´e obtenues par simulations Monte-Carlo `a l’aide du logiciel libre Casino 2.42.
La profondeur de p´en´etration maximale des ´electrons dans le hBN est appel´ee profondeur
d’arrˆet (not´eeR
P) : on peut constater sur la Figure3.14bqu’elle varie de 30 nm `a 10µm environ
entre 1 et 30 kV respectivement. Il existe des relations empiriques [165] qui donnent la profondeur
d’arrˆet avec une pr´ecision raisonnable pour les trois mat´eriaux analys´es :
R
P(diamant) = 0,0192V
1,67 R
P(ZnO) = 0,0158V
1,67 R
P(hBN) = 0,0358V
1,670 nm 128 nm 192 nm 256 nm 0 nm 94 nm 188 nm -94 nm -188 nm 64 nm 4 kV 200 e
-(a)
0 . 0 1 0 . 1 1 1 0 0 1 0 2 0 3 0 4 0 5 0 D e p o s it e d e n e rg y (e V /n m ) 1 kV 2 3 4 5 7.5 10 15 20 25 30Penetration depth (µm)
0.001(b)
Figure 3.14 – a) Trajectoires dans hBN de 200 ´electrons acc´el´er´es `a 4 kV dans hBN simul´es en
Monte-Carlo. b) Profil moyen de l’´energie d´epos´ee par 10
6´electrons dans hBN en fonction de leur acc´el´eration.
R´esultats obtenus avec Casino 2.42.
Dans la suite, ces param`etres d’excitation (taux de g´en´erationGet profil d’´energie d´epos´ee)
seront d´eterminants dans l’analyse des propri´et´es optiques de rendement de luminescence des
mat´eriaux hBN.
Recombinaisons radiatives
Vu comme un syst`eme `a deux niveaux (illustr´e sur le sch´ema de la Figure 3.15), le flux de
photon ´emis `a l’int´erieur du cristal par recombinaison radiative des excitons, not´ef lux(E
ex) est
proportionnel au nombreN d’excitons produits et inversement proportionnel `a leur dur´ee de vie
radiativeτ
rad:
f lux(E
ex) = N
τ
rad(3.2)
τ
r a dτ
i0
E
fE
G
E t a t f o n d a m e n t a l
Figure3.15 – Sch´ema simplifi´e du
diagramme ´energ´etique d’un syst`eme
`a deux niveaux.
L’´evolution de la population d’excitons N au cours du temps s’´ecrit :
dN
dt =G−
N
τ
rad−
N
τ
i(3.3)
en distinguant le temps de d´eclin radiatif, par annihilation des excitons, de l’ensemble des autres
processus de recombinaison (non-radiatives ou radiatives `a plus basse ´energie via des d´efauts
profonds par exemple) avec la probabilit´e 1/τ
i. La dur´ee de vieτ (temps de d´eclin) des excitons
CHAPITRE 3. PROPRI ´ET ´ES DES CRISTAUX 3D DE hBN
s’´ecrit alors :
1
τ =
1
τ
rad+
X
i1
τ
i(3.4)
En r´egime permanent (sous excitation continue dans nos exp´eriences CL), N = Gτ, l’intensit´e
radiative peut alors s’´ecrire :
f lux(E
ex) = Gτ
τ
rad(3.5)
Facteurs correctifs
L’analyse de l’intensit´e mesur´ee sur le d´etecteur fait intervenir de nombreux param`etres et
´ev`enements que peut rencontrer un photon ´emis au cœur du mat´eriau lors de son trajet jusqu’au
d´etecteur. L’intensit´e CL mesur´ee s’exprime par la relation suivante [166] :
I
mes(E
ex) = Gτ
τ
rad.(Ω/4π)F
AF
RF
I(3.6)
avec Ω l’angle solide de collection du miroir parabolique ; F
Aest un facteur d’att´enuation
as-soci´e aux effets de r´eabsorption du photon avant qu’il ne regagne la surface de l’´echantillon ;
F
Run facteur correctif des effets de r´eflexion interne de la lumi`ere lorsqu’elle atteint la surface
de l’´echantillon ;F
Iinclut la fonction de r´eponse spectrale du syst`eme de d´etection ainsi que la
r´eflectivit´e des miroirs utilis´es (parabolique, sph´erique et plan) et la transmission du hublot en
sortie de la chambre du microscope.
On estime l’efficacit´e (ou le rendement) de luminescence ´egale `aτ /τ
raden faisant le rapport
I
mes(E
ex)/(G(Ω/4π)F
AF
RF
I).
Ce calcul fait donc intervenir des param`etres pr´ecis´es dans ce qui suit :
—
La valeur de l’angle solide de collection fournie par le constructeur : Ω = 3.9 steradians
soitΩ/4π= environ 18% de la lumi`ere (on suppose l’´emission isotrope).
—
Le facteur de r´eflexion interne F
Rest calcul´e d’apr`es la relation ´etablie par Reimer [167]
pour n
hBN=2.6±0.3 [168] `a la longueur d’onde de 215 nm de recombinaison des excitons
dans hBN. Ce qui donne F
R=3.08%. Notons que la valeur de l’indice de r´efraction n n’a
´et´e mesur´ee que dans un seul article sur des mat´eriaux de qualit´e probablement inf´erieure
`
a celle du cristal HPHT. Ceci m´eriterait d’ˆetre confirm´e.
—
Le terme F
Icorrespond aux valeurs ´etablies lors de notre proc´edure de calibration de la
fonction de r´eponse spectrale du monochromateur et des d´etecteurs d´ecrite en2.2.2.3. On
consid`ere ´egalement des r´eflectivit´es de 95% pour les miroirs sph´erique et plan du syst`eme
d’injection, une r´eflectivit´e de 90% pour le miroir parabolique et une transmission du hublot
de 95%.
—
On n´eglige le terme F
A, car le coefficient d’absorption de hBN est faible `a 215 nm (le
maximum de la courbe d’absorption est atteint `a 204 nm).
3.1.3.2 Intensit´e de luminescence en fonction de la puissance
Dans ce paragraphe, l’intensit´e de luminescence est ´etudi´ee en faisant varier la puissance
d’excitation (P=V.i). Ceci est r´ealis´e en ajustant le courant de faisceau ipour une tension fix´ee
(5 kV). La d´emarche est analogue aux exp´eriences de photoluminescence en fonction de la
puis-sance laser, du moment que l’´energie du laser est sup´erieure au gap. La Figure 3.16pr´esente les
r´esultats obtenus sur deux sources hBN et compar´es aux mesures effectu´ees durant la th`ese de
G. Sakr [169] sur l’´echantillon diamant.
La Figure3.16a montre l’´evolution de l’intensit´e CL (I
CL) ´emise en fonction du courant de
faisceau i, int´egr´ee sur les raies S (on rappelle que la luminescence est domin´ee par les raies S
-5.71-5.93 eV) `a partir des spectres corrig´es de la r´eponse spectrale du syst`eme de d´etection. Elle a
´et´e mesur´ee sur le cristal HPHT et sur une cristallite de la poudre Saint-Gobain dans les mˆemes
conditions d’acquisition. De mani`ere inattendue, on observe dans les deux cas une croissance
sous lin´eaire de l’intensit´e avec la puissance d’excitation. Les fits obtenus par une fonction de
puissance ai
bdonnent une valeur de l’exposant b´egale `a 0.56 pour la source du NIMS (en bon
accord avec Watanabeet al. [12], cf. Figure1.15a) et 0.85 pour l’´echantillon Saint-Gobain en de¸c`a
de la valeur attendue pour la recombinaison d’excitons libres de type Wannier (b=1). Les raisons
de cette sous-lin´earit´e nous sont encore inconnues. Ceci indique par ailleurs que l’efficacit´e de
luminescence du hBN diminue plus on travaille `a fort courant (donc forte puissance) d’excitation.
La Figure 3.16b montre l’´evolution de la luminescence excitonique du diamant. On retrouve ici
une valeur de l’exposantb=1.18 en accord avec la litt´erature.
0 . 0 1 0 . 1 1 1 0 1 0 0 1 0 5 1 0 6 1 0 7 1 0 8 1 0 9 N I M S S a i n t - G o b a i n ICL (p h o to n s /s ) B e a m c u r r e n t ( n A )
i
0 . 5 6i
0 . 8 5(a) hBN
0 . 0 1 0 . 1 1 1 0 1 0 0 1 0 7 1 0 8 1 0 9 1 01 0 1 01 1 ICL (p h o to n s /s ) E x c i t a t i o n C u r r e n t ( n A )i
1 . 1 8(b) Diamant
Figure 3.16 – a) Intensit´e CL totale mesur´ee sur la gamme 5.71-5.93 eV (209-217 nm) en fonction du
courant de faisceauipour le cristal HPHT (carr´e) et une cristallite de la source Saint-Gobain (croix). `A
la suite de chaque s´erie d’acquisitions une mesure a ´et´e reproduite pour v´erifier l’absence de d´egradation
sous faisceau (blanc). V=5 kV, T=10K. b) R´esultats obtenus sur un ´echantillon diamant (Element6
TM-Electronic Grade). V=30 kV, T=40K. Tir´e des r´esultats de [169]. En rouge, les courbes de fit obtenues
avec une fonction de puissancey=ai
b.
Notons que des effets d’´echauffement local se manifestent `a forte densit´e d’excitation : nous
avons observ´e un ´elargissement des raies S3 et S4 pour les fortes valeurs de courant (i=20.3 et 34.2
nA). Cet ´elargissement, r´eversible (d’apr`es la mesure effectu´ee ensuite `a plus bas courant), est
probablement reli´e `a une ´el´evation de la temp´erature de l’´echantillon. Except´e ceci, nous n’avons
CHAPITRE 3. PROPRI ´ET ´ES DES CRISTAUX 3D DE hBN
relev´e aucune modification du spectre et v´erifi´e que l’exp´erience est r´eversible (point blanc) ce
qui indique que l’utilisation de fortes densit´es de courant ne d´egrade pas l’´echantillon HPHT.
Pour l’´echantillon Saint-Gobain, la d´egradation sous faisceau est couramment observ´ee, elle se
manifeste par une diminution du signal excitonique. Les exp´eriences r´eversibles qui sont
pr´esen-t´ees en Figure3.16aont ´et´e r´ealis´ees toujours dans la mˆeme zone, apr`es un temps de stabilisation.
En r´esum´e, cette analyse a montr´e que l’´evolution de l’intensit´e CL ´emise en fonction de la
puissance d’excitation est sous-lin´eaire dans le hBN contrairement aux autres semi-conducteurs.
Cette d´ependance diff`ere de mani`ere significative entre le cristal HPHT et la poudre
Saint-Gobain. L’interpr´etation de ces r´esultats, encore incompl`ete, semble indiquer une influence de
la densit´e d’excitation et des processus de diffusion comme cela a ´et´e observ´e dans certains
semi-conducteurs [170].
Ce r´esultat complique n´eanmoins l’analyse de l’efficacit´e de luminescence qui suppose une
luminescence proportionnelle `a la puissance d’excitation (Eq 3.6). Pour l’´etude qui suit, nous
avons donc veill´e `a maintenir la puissance d’excitation constante.
3.1.3.3 Rendement de luminescence en fonction de la profondeur d’excitation
Nous avons entrepris une s´erie de mesures sur le cristal HPHT visant `a sonder l’´evolution de
l’efficacit´e de luminescence en fonction de la profondeur d’excitation. Cette derni`ere est vari´ee
grˆace `a la tension d’acc´el´erationV des ´electrons incidents. La Figure3.17amontre l’´evolution de
l’intensit´e des ´emissions excitoniques du hBN en fonction de V obtenue en int´egrant l’intensit´e
des raies S entre 5.71-5.93 eV. Pr´ecisons que suite `a l’exp´erience pr´ec´edente (partie3.1.3.2), nous
avons pris soin d’ajuster, pour chaque tension V, le courant de faisceaui de fa¸con `a travailler `a
puissance constante (et donc avec un taux de g´en´eration Gconstant).
0 5 1 0 1 5 2 0 2 5 3 0 0 . 0 0 . 5 1 . 0 1 . 5 2 . 0 2 . 5 C L i n te n s it y ( × 1 0 8ph o to n s /s )
Voltage (kV)
P=1µW
T=10K
(a)
0 2 4 6 8 1 0 0 . 0 1 0 . 1 1 1 0 1 0 0 L u m in e s c e n c e e ff ic ie n c y (% )ZnO
hBN
Diamond
Penetration depth (µm)
T=10K
(b)
Figure 3.17 – a) ´Evolution de l’intensit´e des ´emissions intrins`eques de luminescence (mesur´ees sur la
gamme (5.71-5.93 eV) en fonction de l’´energie d’acc´el´eration des ´electrons incidents. b) ´Evolution de
l’effi-cacit´e de luminescence (EL) mesur´ee sur hBN en fonction de la profondeur d’arrˆet (R
P) `a un monocristal
de ZnO (CrysTec GmbH) et de diamant (Element6
TM- Electronic Grade) `a partir des r´esultats de la
th`ese de G. Sakr [169]. Pour hBN : P=1µW, pour diamant : P=6.3µW, pour ZnO : P=0.4µW. T=10K.
Ces mesures montrent que l’intensit´e des ´emissions intrins`eques du hBN varie de mani`ere
significative (d’un ordre de grandeur environ) avec l’´energie du faisceau incident pour des tensions
entre 3 et 30 kV. Nous l’avons vu dans la partie 3.1.3.1, le volume de g´en´eration des porteurs
s’´etale en profondeur plus on augmente la tension d’acc´el´eration des ´electrons.
Pour mieux visualiser ce r´esultat, nous avons trac´e sur la Figure3.17bl’efficacit´e de
lumines-cence en fonction de la profondeur d’arrˆet R
Pdes ´electrons (d´etermin´ee `a partir de la relation
donn´ee en3.1.3.1) pour trois mat´eriaux : le hBN, le diamant et le ZnO.
On observe pour le hBN et le diamant, une diminution de l’efficacit´e de luminescence aux
faibles profondeurs d’excitation (<2µm). `A plus forte profondeur d’excitation, elle devient
quasi-constante. L’effet de surface observ´e `a basse tension est bien connu dans les semi-conducteurs
sp
3, o`u les liaisons pendantes `a la surface introduisent des canaux de recombinaison non-radiative
efficaces. Cet effet est pris en compte dans la dur´ee de vieτ qui est r´eduite en surface [171] :
1
τ =
1
τ
v+
1
τ
s(3.7)
o`uτ
sest la dur´ee de vie en surface,τ
vest la dur´ee de vie au cœur du mat´eriau, loin des interfaces.
Lorsque l’on augmente l’´energie des ´electrons incidents, l’excitation du mat´eriau se fait de plus
en plus loin de la surface, le terme 1/τ
sdevient peu `a peu n´egligeable. `A forte tension, le temps
de vie des porteurs atteint sa valeur ’bulk’ au cœur du mat´eriau. L’efficacit´e de luminescence
atteint alors une valeur stationnaire que l’on appelle rendement quantique interne, not´e
η
int. Le terme ”interne” signifie ici que les pertes par recombinaison non radiative des excitons
en surface du cristal sont consid´er´ees n´egligeables.
On peut noter que les effets de surface semblent plus prononc´es dans le cristal hBN que dans
le diamant
1. Les effets de surface dans les cristaux en hybridation sp
2sont mal connus, et sans
doute tr`es diff´erents des liaisons pendantes des semi-conducteurs sp
3. Dans notre cas, il faut
mentionner l’utilisation d’une fine couche d’or (quelques nm) d´epos´ee en surface afin d’´eviter
l’accumulation de charges dans l’isolant hBN au cours des exp´eriences. Nous reviendrons sur
les effets de surface qui deviendront pr´epond´erants dans le cas des feuillets exfoli´es d’´epaisseur
nanom´etrique au Chapitre 4.
Hormis les effets de surface, l’information principale r´ev´el´ee par cette ´etude concerne la
va-leur ´elev´ee du rendement quantique interne du hBN inattendue dans un semi-conducteur `a gap
indirect o`u l’intervention des phonons est cens´ee limiter fondamentalement l’efficacit´e de
lumi-nescence. C’est ce r´esultat qui a pouss´e Watanabe et al. [12] `a interpr´eter la luminescence du
hBN comme ´etant issue de transitions directes
2. On remarque notamment que le rendement
quantique interne, mesur´e `a basse temp´erature, atteint 10 `a 20% dans hBN soit deux ordres de
grandeur sup´erieur `a celui observ´e dans le diamant, situ´e entre 0.1 et 0.2%. Ceci est d’autant
plus surprenant que la concentration en d´efauts structuraux dans le cristal HPHT (voir
para-graphe 3.1.1.2) est sans aucun doute sup´erieure `a celle dans le diamant ´etudi´e (de l’ordre de 10
5dislocations/cm
2). La puret´e du cristal HPHT est au mieux de 10
17impuret´es/cm
3[57] alors que
celle du diamant choisi `a titre de comparaison est inf´erieure `a 10
14impuret´es/cm
3.
Des valeurs aussi ´elev´ees que celle obtenue pour hBN sont plus g´en´eralement observ´ees pour
des recombinaisons sans phonon dans les mat´eriaux `a gap direct comme c’est le cas dans le ZnO.
Les valeurs d’efficacit´e de luminescence que nous avons mesur´ees sur l’´echantillon de ZnO sont
1. Dans le cas du ZnO, nous n’avons pu exciter le mat´eriau au-del`a de 1 µm de profondeur (pour des raisons
exp´erimentales) et ainsi d´etecter l’influence des effets de surface.
2. L’´emission stimul´ee propre aux transitions directes,iesans assistance de phonon, a ´et´e observ´ee avec cette
source de hBN [38].
CHAPITRE 3. PROPRI ´ET ´ES DES CRISTAUX 3D DE hBN
situ´ees entre 10 et 50%. Ces r´esultats sont en bon accord avec les travaux de Hauser et al. [172]
qui ont mesur´e par PL `a 10K autour de 10% d’efficacit´e de luminescence pour le ZnO en utilisant
un dispositif de sph`ere int´egrante avec une excitation par faisceau laser (He-Cd)
1. Contrairement
au hBN et au diamant, le rendement de luminescence de ZnO ne plafonne pas pour les fortes
profondeurs. Ceci est dˆu au ph´enom`ene de r´eabsorption de la luminescence lorsqu’elle est g´en´er´ee
profond´ement dans un cristal o`u l’absorption est forte `a l’´energie de luminescence [169]. Dans le
cas de ZnO donc, le maximum de 50% est donc une borne inf´erieure du rendement quantique
interne. Le ph´enom`ene de r´eabsorption n’a pas lieu dans le hBN et le diamant `a cause du fort
”Stokes shift”. On peut donc acc´eder `a la valeur deη
int.
En r´esum´e, l’analyse du rendement de luminescence en fonction de la profondeur dans le hBN
nous a permis de r´ev´eler l’influence marqu´ee des processus de recombinaison en surface encore
peu ´etudi´es dans les mat´eriaux sp
2. Cette ´etude se poursuivra dans le chapitre 4 consacr´e aux
cristaux 2D de faible ´epaisseur. Les valeurs du rendement de luminescence interne du hBN ont
pu ˆetre compar´ees avec celles mesur´ees sur deux autres cristaux aux propri´et´es mieux connues
que sont le diamant et l’oxyde de zinc. Le Tableau3.1pr´esente les propri´et´es g´en´erales des trois
mat´eriaux ´etudi´es ainsi que le rendement de luminescence interne (η
int) d´etermin´e au cours de
cette ´etude. La valeur du rendement pour le hBN se rapproche plus de celle du ZnO dont le gap
est direct. Ce r´esultat est en contradiction avec les premiers calculs th´eoriques mais ´egalement
avec les r´ecentes ´etudes exp´erimentales apparues dans la litt´erature.
Single crystal Purity (at./cm
3) Electronic Gap E
g(eV) E
X(meV) η
int(%)
ZnO ∼10
17Direct 3.37 60 (exp.) >50
hBN >10
17Indirect 6.4 700 (th.) 10-20
Diamant <10
14Indirect 5.35 80 (exp.) 0.1-0.2
Tableau3.1 – R´esum´e des propri´et´es des trois semi-conducteurs analys´es en cathodoluminescence (hBN,
Diamant et ZnO) `a basse temp´erature. T=10K.
Pour conclure cette partie, nous avons pr´esent´e les diff´erentes ´etapes de notre proc´edure
per-mettant d’estimer l’efficacit´e de luminescence intrins`eque du hBN `a partir des spectres obtenus
en CL. Nous avons pu observer l’influence des param`etres d’excitation (courant, tension) sur
l’intensit´e de luminescence ce qui nous a amen´e `a travailler avec une puissance d’excitation (V i)
constante. Enfin, l’´evolution du rendement de luminescence en fonction de la profondeur
d’ex-citation a d’abord montr´e d’importants effets de recombinaison de surface dans le hBN. Cette
´etude a ´et´e men´ee en parall`ele sur deux autres cristaux de diamant et de ZnO suivant la mˆeme
d´emarche ´etablie pour le hBN. La comparaison des valeurs du rendement de luminescence interne
observ´ee dans les trois mat´eriaux ´etudi´es laisse `a penser que la luminescence intrins`eque du hBN
est issue d’une transition directe (sans assistance de phonons), son efficacit´e de luminescence
´etant beaucoup plus proche de celle du ZnO (gap direct) que celle du diamant (gap indirect).
Le d´ebat sur la nature de la transition excitonique impliqu´ee en luminescence comme en
absorption n’est pas encore tranch´e. La tr`es forte ´energie de liaison pr´edite th´eoriquement pour
les excitons dans hBN remet en cause le paradigme de Wannier. Les calculs th´eoriques dans hBN
1. Notons que dans le cas de la PL excit´ee `a 325 nm, le volume de g´en´eration des excitons est localis´e plus
proche de la surface (<100 nm) qu’en CL.
et les TMDCs, les r´esultats exp´erimentaux obtenus pour les nanotubes de carbone montrent tous
que l’hypoth`ese de Wannier n’est pas tenable dans les mat´eriaux en hybridation sp
2.
L’origine du d´ecalage en ´energie observ´e entre le maximum d’absorption et la gamme
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Propriétés optiques et structurales du nitrure de bore en hybridation sp² : des cristaux massifs aux feuillets atomiques
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