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5.7 Types de rencontre

5.7.4 Rencontre positive vs . rencontre négative

La distinction entre des rencontres bienveillantes ou hostiles fait penser à une autre différenciation, plus générale, mais qui est très importante, notamment celle de la rencontre positive et négative.

Dans la rencontre positive, les personnes se réalisent, c’est-à-dire qu’elles trouvent un fil d’entente, d’intercompréhension et par conséquent elles se rapprochent. Elles créent une relation. Une rencontre positive est celle qui n’oblige personne à simuler, à se cacher derrières les postures ou des figures stylistique afin de ne pas se montrer soi-même. Une telle rencontre apporte des sentiments de réconfort, d’inclusion, etc. Elle n’est pas forcément celle où tout le monde est d’accord, mais celle où chacun peut s’exprimer librement, sans contraintes et la divergence d’opinions est discutée. Une rencontre positive est marquée par la posture de ses participants, c’est-à-dire par « l’ouverture vers » qui ne porte pas de jugement et qui respecte Autrui et ses opinions.

Une rencontre négative est celle dont les personnes s’éloignent. Dans une telle rencontre, les participants au lieu d’être, se créent, s’inventent. Ils ne cherchent pas à partager. L’un des exemples de rencontre négative est une rencontre toxique. Au sein d’elle, les participants soit se rendent dépendant l’un de l’autre ou l’un « exerce » son pouvoir sur l’autre en le détruisant et en lui enlevant ses initiatives et en contraignant sa liberté.

Sur quelle base pouvons-nous juger une rencontre comme positive ou négative ? Comme montre la proposition de Witwicki, cette qualification peut être attribuée en fonction des émotions prédominantes. Ainsi, les rencontres négatives sont ceux qui sont dominées par des sentiments négatifs, c’est-à-dire les sentiments hostiles et les rencontres positives par des sentiments bienveillants.

Une autre base de tels jugements peut être constituée par l’efficacité. Ainsi, nous pouvons considérer qu’une rencontre est positive si elle atteint son objectif.

Et une rencontre est négative si elle ne parvient pas à toucher son but. Quel objectif pouvons-nous avoir dans une rencontre ? Karine Danan, dans son article « Mais que cherchons-nous dans la rencontre de l’autre ? »321 indique deux raisons :

1°) La reconnaissance. Il s’agit d’un processus d’un caractère bilatéral, c’est-à-dire en reconnaissant l’Autre, je reconnais moi-même. Il est comme un miroir dont Je voit Tu et en même temps soi-même.

2°) L’intercompréhension qui est un moment de la complicité où les deux deviennent un, c’est-à-dire sont sur la même longueur d’ondes. Ils parlent de la même voix.

Si nous analysons toutes les approches auxquelles nous nous sommes référés sous cet angle, les rencontres sont toujours positives. La seule proposition qui s’inscrit dans telle grille d’analyse de manière peut-être moins évidente est le cratisme et ses rencontres hostiles. Comme la question de la reconnaissance est évidente, elle décide de la nature de la rencontre. Celle de l’intercompréhension nous laisse davantage dubitative. Puisque la quête de la puissance repose sur le combat. Danan conçoit l’intercompréhension comme la complicité, ce qui est peut-être difficile à imaginer dans l’aspect hostile du cratisme. Sauf si nous considérons le moment à partir duquel les positionnements sont établis comme une forme de l’intercompréhension. Par contre, dans la version bienveillante du cratisme, c’est-à-dire celle caractérisée par des relations positives : l’amitié, l’honneur et la compassion, les deux objectifs sont atteints.

Jacques Cosnier dans son texte « Psychologie des Émotions et des Sentiments »322 cite trois types objectifs que les participants cherchent à satisfaire dans l’interaction :

1°) Les intérêts personnels – il s’agit de deux types de besoin : la protection corporelle et psychologiques, par ex. préserver l’estime de soi, l’idéal du Moi.

321 Karine Danan, « Mais que cherchons-nous dans la rencontre de l'autre ? », Actualités en analyse transactionnelle 4/2011 (N° 140), pp. 80-82.

322 Jacques Cosiner, Psychologie des Emotions et des Sentiments, version 2015. http://icar.univ-lyon2.fr/membres/jcosnier/Emotions_et_sentiments.pdf

À ce niveau deux émotions peuvent se déclencher, notamment la Joie et la Peur.

2°) Les intérêts relationnels – « traduisent les liens fondamentaux, familiaux, amicaux, amoureux qui sont à la base de la cohésion des différents groupes sociaux »323 ; La satisfaction de ces intérêts est liée à la Joie et la Tristesse.

1) Les intérêts sociaux – concernent le respect des normes, de la justice et de tous les autres dispositifs qui « protègent » l’ordre social. La Colère est une émotion liée à ce niveau.

Est-ce qu’une rencontre n’est toujours que positive ou que négative ? Cette catégorisation dépend de l’aspect que nous jugeons. Si nous nous référons aux sentiments, nous apercevons rapidement la nature dynamique et changeante de la rencontre. Adam Wegrzecki dit :

Durant la rencontre, son fondement peut se

transformer, par exemple, l’amitié se

transforme en amour, et la bienveillance initiale – en envie.324

Ainsi, une rencontre positive peut devenir négative et inversement. Si nous jugeons par l’aspect de l’efficacité, une rencontre peut s’avérer positive pour l’un et pas forcément pour l’autre. Ceci est surtout visible dans les exemples de Witwicki des rencontres hostiles. Nous partons du principe que la personne qui se fait dominer ne ressent pas cette rencontre comme étant positive, ce que peut s’expliquer ou se traduire par des sentiments négatifs. Néanmoins, nous ne contestons pas le fait que pour certaines personnes, pour différentes raisons, se trouver dans la position du « dominé » est une configuration souhaitée ou confortable, etc. La question se pose par rapport à la rencontre « impasse ».

323 Jacques Cosiner, op. cit., p. 30. 324 Adam Węgrzecki, op.cit. p. 37.

D’une part, on pourrait la juger comme négative, car elle est dominée par des sentiments hostiles. D’autre part, si nous prenons en compte le résultat, elle devient ni positive ni négative. Si nous analysons une rencontre à l’égard de la réalisation des intérêts, nous pouvons aussi juger son efficacité.

Nous pensons que le jugement concernant la rencontre à laquelle on participe est une chose cruciale. Puisque sur cette base généralement nous décidons si nous continuons ou non la rencontre.

Chapitre 6

LES CONDITIONS « PERSONNELLES » DE LA REUSSITE

DE LA COMMUNICATION

Les analyses de la rencontre à travers les différentes approches nous ont permis de déterminer les points constitutifs d’une rencontre. Notamment, la présence, l’ouverture, la réciprocité et la coopération. Ceux-ci constituent un socle de la rencontre, mais aussi, comme nous allons le montrer, de la communication interpersonnelle. Ainsi, ils deviennent des conditions « personnelles » de la communication. Denis Vernant écrit :

Toute interaction langagière (verbale gestuelle, posturale, etc.) constitue un processus ouvert et créatif au cours duquel locuteur et allocutaire négocient le sens et la référence de leurs énonciations et construisent ensemble une image du monde partagée.325