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Chapitre III - Evolution structurale du Massif de l’Aspromonte et nature des

3.2/ La Formation de Stilo - Capo d’Orlando

3.2.2/ Relation avec la déformation D2 en extension

Les travaux de Cavazza (1989, 1993) sur les séries de la Formation de Stilo - Capo d’Orlando

indiquent que ces sédiments se sont déposés sous la forme de turbidites dans un réseau de

chenaux. La reconstitution des paléocourants indique globalement que les sédiments ont été

transportés depuis les zones démantelées au nord, vers un ou plusieurs bassins en bordure du

continent au sud (Cavazza, 1989, 1993 ; Weltje, 1992). De nombreuses structures tectoniques

synsédimentaires ont été observées au sein de cette formation. Des slumps sont parfois intercalés,

traduisant l’instabilité du soubassement du bassin et de ses bordures au moment du dépôt. Des

fractures ou des failles normales recoupent fréquemment la stratification, parfois même au travers

de blocs ou de galets. Dans l’ensemble, il apparaît que l’ouverture de ces bassins est contrôlée par

une déformation en extension localisée au niveau d’un réseau de failles normales orienté NE-SW.

Lorsqu’il a pu être observé directement le contact basal est sédimentaire. Dans la partie sud,

la Formation de Stilo - Capo d’Orlando repose exclusivement sur l’unité de Stilo.

Cartographiquement, elle ne scelle le contact qu’en de rares endroits où les observations ne

permettent pas d’être catégorique. Plus au nord, comme dans le secteur d’Africo-Vecchio, lorsque

la série semble être déposée directement sur l’unité de l’Aspromonte, on observe presque

systématiquement un niveau de quelques dizaines de centimètres d’épaisseur de brèches d’aspect

tectonique constituée par des éléments de schistes charbonneux ou de phyllades le plus souvent

silicifiées. Ces matériaux rappellent fortement les faciès observés à la base de l’unité de Stilo, juste

au-dessus du détachement dans la partie sud. La nature tectonique de cette brèche n’est pas

clairement établie, cependant son caractère monogénique est troublant. La présence de ces

matériaux habituellement associés à l’unité de Stilo suggère que le dépôt de la Formation de Stilo

Capo - d’Orlando serait au moins en partie directement lié au fonctionnement du détachement.

Cependant, du fait de l’absence de continuité latérale et de repères stratigraphiques précis entre

les différents affleurements, il est impossible d’affirmer que la base observée à un endroit

correspond toujours aux niveaux les plus bas de la série. Par conséquent l’usage de l’âge de la base

de la série pour dater la fin de l’épisode de déformation D2 doit être fait prudemment. Et une

étude systématique de l’âge de la base de la série observée dans certains endroits stratégiques

serait bienvenue. A ce jour les travaux disponibles dans la littérature ne fournissent pas de

résultats assez détaillés pour lever ces incertitudes.

Par ailleurs, à l’est du Monte Jofri (secteur de la fiumara La Verde), on peut à nouveau

observer le contact basal. A cet endroit la Formation de Stilo – Capo d’Orlando repose sur

quelques mètres de phyllades de l’unité de Stilo qui surmontent tectoniquement l’unité de

l’Aspromonte représentée par des pegmatites mylonitiques. La brèche rubéfiée à la base atteste de

la nature sédimentaire du contact. Cependant cette brèche est déformée de la même manière que

les roches de l’unité de Stilo sous-jacentes. Cet affleurement se situe dans une zone où l’unité de

Stilo est d’épaisseur très réduite (quelques dizaines de mètres), et intégralement déformée par le

cisaillement que nous avons associé à D2. Les marqueurs cinématiques observés à la base de la

Formation de Stilo - Capo d’Orlando indiquent grossièrement qu’il s’agit d’une déformation

cisaillante associée au transport du compartiment supérieur vers le NE. Par conséquent il pourrait

s’agir de la même déformation D2, de son prolongement, ou bien d’une réactivation selon les

mêmes directions cinématiques (Fig. III-18).

Figure III-17 : Le contact sédimentaire déformé observé à l’est du Monte Jofri. Unité de Stilo: 1 - phyllades bréchiques ; 2 - phyllades bréchiques rubéfiées, en blanc un niveau finement bréchique lessivé ; Formation de Stilo – Capo d’Orlando : 3 - conglomérats de la base de la série ; 4 - structures de cisaillement. Les mesures associées ont été reportées sur le stéréogramme (Wulff, hém. inf.). Elles indiquent un mouvement du haut de la pile vers le NE.

L’utilisation de l’âge de la base de la Formation de Stilo – Capo d’Orlando comme indicateur

de l’âge de la fin de la déformation D2 reste globalement valide dans la partie sud du massif mais

Chapitre III - Evolution structurale du Massif de l’Aspromonte

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doit être considérée avec prudence. Des données complémentaires sur l’âge de la base de l’unité

et sur les modalités d’ouverture des bassins sédimentaires seraient essentielles.

4/ Conclusions

Le Massif de l’Aspromonte est constitué de trois unités tectonométamorphiques contrastées.

La plus basse, l’unité d’Africo-Polsi est formée en grande partie d’une série volcano-sédimentaire,

métamorphisée dans laquelle les termes les plus élevés seraient datés du Carbonifère. Elle est

surmontée tectoniquement par une écaille de croûte continentale formée majoritairement par un

complexe d’orthogneiss et de paragneiss (unité de l’Aspromonte) qui transporte une série

métamorphique dont les termes les plus élevés correspondent à des niveaux de couverture

sédimentaire datés du Silurien à l’Oligocène inférieur (unité de Stilo). La mise en place de cette

nappe n’est pas clairement datée, elle peut aussi bien être contemporaine d’évènements

hercyniens ou alpins. Les marqueurs structuraux observés au cours de ce travail suggèrent qu’elle

a été transportée du NW vers le SE au dessus de l’unité d’Africo-Polsi (D1).

Figure III-18 : Illustrations des deux directions de transport relatives (1) à la déformation D1 associée à l’empilement des unités de l’Aspromonte et de Stilo sur l’unité d’Africo-Polsi et (2) à la déformation D2 qui affecte l’ensemble de la pile tectonique et entraîne son amincissement.

Cette pile tectonique a été ensuite reprise dans un second épisode de déformation (D2). Le

caractère extensif de cette déformation a été mis en évidence par l’observation d’une faille de

détachement à l’interface entre les unités de l’Aspromonte et de Stilo. Sous ce contact majeur,

cette déformation est localisée au niveau de bandes de cisaillement mylonitiques d’épaisseurs

variées, et le contact chevauchant à la base de l’unité de l’Aspromonte est réactivé. Les marqueurs

cinématiques associés à cette déformation, observés depuis la surface de détachement jusque dans

l’unité d’Africo-Polsi, indiquent systématiquement que le compartiment supérieur a été transporté

du SW vers le NE au cours de la déformation. L’âge de cet épisode d’amincissement crustal

majeur est mal contraint, mais doit être compris entre l’Oligocène inférieur et l’Oligocène

supérieur ou l’Aquitanien selon l’âge que l’on considère pour la base des sédiments transgressifs

de la Formation de Stilo – Capo d’Orlando. Il faut cependant mentionner que cette déformation

semble s’être prolongée pendant ou après le dépôt de ces sédiments.

L’ensemble des observations rapportées ici indiquent que l’architecture actuelle du Massif de

l’Aspromonte est le résultat de deux déformations successives (Fig. III-18), dans deux régimes

tectoniques antagonistes : le premier en raccourcissement entraîne l’empilement des unités

tectoniques, le second en amincissement aboutit à l’amincissement généralisé du Massif. Les deux

chapitres suivants sont consacrés à l’estimation des conditions thermobarométriques et de l’âge

de ces deux déformations.

Chapitre IV

Apports de l’étude des roches

métamorphiques du Massif de