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Un regard rétrospectif sur le cadre théorique et conceptuel mobilisé

3. Quelques résultats saillants de notre étude

3.1. Un regard rétrospectif sur le cadre théorique et conceptuel mobilisé

Quelle évaluation pourrions-nous faire de notre cadre théorique ? Ce dernier nous a t-il réellement facilité la compréhension de notre problématique ? Certains auteurs seraient-ils plus pertinents que d’autres ? Quelles remarques pourrions-nous en dégager ? En fait, notre première remarque est l’abondance de sources que nous offre la littérature scientifique lorsque nous réfléchissons sur une thématique donnée. C’est une richesse incroyable. Cela nous rend sensible à la qualité de notre production et nous propulse vers un dépassement de nous-même afin que nos

réflexions contribuent vraiment au progrès et au rayonnement de la recherche scientifique et non le contraire. La seconde remarque est que chacun des auteurs de notre cadre théorique nous fait progresser dans la compréhension de notre problématique en nous faisant respirer, au rythme de nos lectures, les esquisses saveurs de la recherche scientifique. Par exemple, les découvertes sur le concept d’éducation, nous ont amené à poser un nouveau regard sur ce domaine à la fois fascinant et complexe. Notre plus grande surprise est de voir comment dans un même champ disciplinaire, les auteurs, dépendamment de leur positionnement épistémologique, de leur époque, de leur sensibilité, de leur histoire, du contexte socioculturel dans lequel ils évoluent, n’attribuent pas aux concepts les mêmes significations. Le concept d’éducation développé par Paulo Freire et John Dewey en est un exemple éclairant.

Nous sommes persuadés que cette grande diversité de positionnement épistémologique est une richesse pour l’humanité et pour les sciences humaines en particulier. En effet, cette multiplicité d’approches force les chercheurs à ne pas s’enfermer dans leur propre vérité, mais à s’ouvrir à de nouvelles réalités afin d’aboutir à une vérité toujours plus grande. Qu’avons-nous retenu chez Dewey et Freire ? Il est vrai que John Dewey a beaucoup développé la dimension politique de l’éducation mais ce qui nous paraissait le plus important pour notre mémoire, c’était la dimension de l’expérience que l’on retrouve dans son projet éducatif. Sa méthode de l’expérience reposant sur la validation du postulat de continuité nous a éclairé sur la problématique de la transmission des savoirs. En revanche, ce qui nous frappe et qui nous intéresse beaucoup chez Paulo Freire est la dimension dialogique que l’on retrouve au cœur de son projet éducatif : « Notre culture, figée dans les phrases, correspond à notre inexpérience du dialogue170 ». Par rapport aux relations interpersonnelles dans les familles migrantes haïtiennes, nous estimons que le dialogue peut être un des lieux de l’incarnation de l’éducation.

Chez Bernard Charlot, ce qui nous semble le plus intéressant dans sa théorie éducative fondée sur « le rapport au savoir » est le concept : « Les figures de l’apprendre ». Les trois dimensions du savoir qu’il a développées (savoir pratique, savoir relationnel, savoir intellectuel) rejoignent parfaitement notre travail. Dans le cadre des familles migrantes haïtiennes, même si le savoir intellectuel n’est pas toujours présent chez les parents, les savoirs pratiques et relationnels sont déterminants dans leurs expériences quotidiennes. Bernard Charlot nous fait découvrir aussi

combien les savoirs informels sont dévalorisés au profit des savoirs institutionnellement reconnus.

Toujours dans cette perspective éducative, les approches interculturelles de Pierre Dasen mettant en exergue la diversité culturelle des peuples nous donnent de poser un nouveau regard sur la manière de concevoir l’éducation. Ses approches nous éclairent dans nos réflexions sur la transmission. Il en est de même pour Vygotski. En effet, à travers sa théorie historico-culturelle du développement de l’enfant nous avons pu saisir comment se construit l’identité des enfants migrants confrontés à la culture du pays d’accueil. Marie-Claude Blais et Marcel Gauchet quant à eux nous rendent attentif à la question de la transmission et des apprentissages. Enfin, Alexis Spire, à travers ses recherches sur l’immigration en France nous permet de comprendre les subtilités de la migration et son mode de fonctionnement. Il est vrai que ces recherches portent sur une période bien précise, mais cela n’empêche pas qu’elles demeurent pertinentes pour analyser la problématique de l’immigration. Ce qui nous semble très fascinant dans son travail, c’est surtout les entretiens qu’il a menés auprès des agents de la Préfecture de Paris. Il nous aide à comprendre les écarts qui peuvent exister entre les lois régissant le fonctionnement des préfectures et l’interprétation qu’en font les agents. Le plus souvent, dit-il, ces interprétations sont faites selon les sensibilités de chacun.

En somme, à partir de tout ce que nous venons de signaler, nous estimons que certains auteurs tels que Claude Dubar, Erving Goffman et beaucoup d’autres auteurs encore pourraient sans doute apporter de nouveaux éclairages sur la question de l’identité. En effet, nous pensons que la problématique de la construction identitaire constitue un des points forts de notre recherche. L’approfondissement des écrits de Pierre Dasen, de Vygotski, de Freire, de Hanna Malewska Peyre, de Dewey, de Claire et Marc Héber-Surfin nous parait très pertinent pour creuser davantage certains éléments de notre recherche qui demeurent encore un peu sombres. Nos découvertes sur la question de l’identité, les approches interculturelles mériteraient d’être approfondies afin de leur donner un caractère beaucoup plus scientifique. Mais compte tenu de certaines contraintes du master, nous sommes obligé de passer outre. Toutefois, nous reconnaissons que nous avons beaucoup progressé dans la compréhension de notre recherche.