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1.5 Plan du manuscrit

2.1.2 Refroidissement interne en rotation

L’application principale de la technique du refroidissement par canaux perturbés internes est le refroidissement des rotors des turbines de turbomoteurs. Le rotor étant en rota- tion entre 30 et 50 000 tours par minute. Cette rotation induit des forces qui modifient significativement l’écoulement par rapport au cas statique.

Figure 2.2 – Schéma illustrant la convention choisie pour l’orientation du canal dans le système de coordonnées.

Pour la suite, il a été choisi que l’axe principal du canal se trouve selon l’axe x, l’axe y étant normal à la paroi des perturbateurs et l’axe z correspondant à l’axe de rotation du canal, Fig. 2.2. Dans ce cadre, la mise en rotation de l’écoulement induit l’ajout de deux nouvelles forces s’exerçant sur le fluide :

• La force de Coriolis : Elle est appliquée perpendiculairement au vecteur vitesse U et au vecteur de rotation Ω. Cette force aura donc tendance à courber la trajectoire des particules dans le repère tournant par rapport à la direction principale de la vitesse de la particule et de l’angle entre cette vitesse et le vecteur rotation. L’amplitude de cette courbure dépend de la magnitude de la force de Coriolis et la vitesse. Il est à noter que si la force de Coriolis est perpendiculaire au vecteur vitesse, aucun travail n’est créé et donc aucune énergie n’est fournie à l’écoulement. Cette force induit un gradient de pression normal aux parois en pression/dépression dont l’expression est,

Bp

By « ´2ρΩu. (2.2)

• La force centrifuge : Contrairement à la force de Coriolis, la force centrifuge ne dépend pas de la vitesse de l’écoulement, mais uniquement de la distance r par rapport à l’axe de rotation. Ainsi n’importe quelle particule n’étant pas sur l’axe de rotation ressentira la force centrifuge dont l’amplitude vaut :

}fce} “ ρΩ 2

Cette fois, comme la force centrifuge ne dépend pas de la vitesse, la création de tra- vail est possible et donc de l’énergie peut être transférée ou extraite de l’écoulement via un gradient de pression. La force centrifuge est souvent utilisée pour augmenter la pression d’un fluide (compresseur radial) ou encore afin de séparer les espèces à densités différentes dans un mélange. Cette force induit un gradient de pression le long de l’axe principal du canal dont l’expression est,

Bp

Br “ ρrΩ

2

. (2.4)

Il faut noter que deux sens de rotation sont possibles. Par convention, lorsque Ω est positif, le canal tourne dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Par la suite ce sens de rotation sera appelé rotation positive. A l’inverse, la rotation négative correspond à un Ω négatif et donc à une rotation dans le sens des aiguilles d’une montre. Lorsque le canal est en rotation, un coté en pression et un autre en dépression apparaissent du fait du gradient de pression induit par la force de Coriolis (Eq. 2.2). Indépendamment du sens de rotation, la paroi en dépression est toujours sur le coté d’attaque et la paroi en pression sur le coté de fuite, Fig. 2.2.

Pour comparer différents écoulements tournants, l’utilisation de grandeurs adimen- sionnées spécifiques est nécessaire. En ce qui concerne la vitesse de rotation, le nombre de rotation Ro est communément utilisé,

Ro“ ΩDh Ub

, (2.5)

avec Ω le taux de rotation en rs´1s, D

h le diamètre hydraulique du canal en rms et Ub la

vitesse débitante en rm{ss.

Lorsque le canal en rotation est soumis à un gradient de température, par le biais d’une paroi chauffante par exemple, cet écoulement est soumis à de la flottabilité. Afin de classer et comparer les écoulements de ce type, le nombre de flottabilité Bo est utilisé,

Bo“ Ro2 r

Dh

pTw´ Tfq

Tf

avec r le rayon en rms, Twla température de la paroi du canal en rKs et Tf la température

du fluide débitant en rKs. Ainsi le terme pTw´ Tfq{Tf représente le ratio de densité entre

l’écoulement débitant et la paroi.

La section précédente a souligné la topologie de l’écoulement dans un canal perturbé statique mais lorsque le canal est en rotation, les forces de Coriolis et centrifuges appa- raissent, ce qui impacte directement l’écoulement :

• La force de Coriolis affecte la stabilité de la couche de cisaillement.

• L’accélération centrifuge lorsqu’elle est associée à un gradient de température pro- duit une flottabilité radiale sur les zones proches paroi, ce qui induit une déformation du profil de vitesse.

L’ajout de perturbateurs pour maximiser les transferts thermique complexifie encore l’écoulement des ces canaux parturbés. L’ensemble de ses caractéristiques est résumé par la Fig. 2.3 de Coletti et al. [25]. Les perturbateurs engendrent différentes recirculations ainsi que des écoulements secondaires proches parois. La force de Coriolis induit des structures secondaires plus importantes dans le canal, proches des parois latérales.

Figure 2.3 – Schéma de l’écoulement dans un canal avec perturbateurs sous l’effet des forces de Coriolis et centrifuges [25].

Les effets de flottabilités sont identifiés comme jouant surtout un rôle au niveau du coté en pression (trailing side, Fig. 2.3) du canal. La couche de fluide proche paroi est poussée en amont de l’écoulement, c’est-à-dire à contre courant et induit une grande zone de re-circulation occupant tout l’espace inter-perturbateurs. Ces résultats sont cohérents avec les résultats numériques trouvés par Sewall & Tafti [159]. Coletti et al. ont également confirmé qu’il existe un sens de rotation stabilisant et un sens de rotation déstabilisant l’écoulement dans la zone des perturbateurs [27]. Effectivement, l’écoulement est stabilisé sur le coté en dépression et déstabilisé sur le coté en pression comme dans un canal lisse.

Ainsi l’écoulement proche perturbateur est stabilisé/déstabilisé dans les cas en rotation négative/positive. Plus précisément, le cas stabilisant coïncide avec une décroissance de l’intensité turbulente proche des perturbateurs alors qu’au contraire, le sens déstabilisant l’augmente dans cette région.

D’un point de vue numérique, les SGE réalisées par Fransen [52] montrent un très bon accord avec les résultats expérimentaux dans le cas statique et stabilisant. De légères différences apparaissent dans le cas déstabilisant, Fig. 2.4. En complément à ces SGE, la turbulence dans des canaux perturbés a été finement étudiée par Narasimhamurthy [127] via des simulations DNS (Direct Numerical Simulation) montrant que les propriété de la turbulence dans la région proche perturbateur est grandement affectée par la rotation.

Figure 2.4 – Comparaison de profils de vitesse moyen sur le plan de symétrie provenant de SGE (lignes) et PIV (symboles) : Rotation déstabilisante (a), sans rotation (b) et rotation stabilisante (c)[52].

Les effets de la rotation sur les transferts thermiques et les pertes de pression dans des canaux perturbés ont été également étudiées expérimentalement dans un premier temps. Li et al. [103] ont montré que le nombre de Nusselt et donc l’efficacité du transfert ther- mique augmente avec la vitesse de rotation, Fig. 2.5. Il est notable de souligner que la thermique d’un canal lisse est plus affectée par la rotation qu’un canal avec perturba- teurs. Ce comportement est différent pour les frottements. Dans le cas d’un canal lisse,

les frottements augmentent doucement avec la vitesse de rotation jusqu’à Ro “ 0.32, après quoi ils augmentent beaucoup plus significativement à plus haute vitesse de ro- tation. A l’inverse, si le canal est équipé de perturbateurs, le frottement et donc les pertes de charge diminuent jusqu’à Ro “ 0.5 pour ensuite augmenter rapidement comme résumé en Fig. 2.5. Il est donc clair qu’un ratio transfert thermique perte de pression optimum apparait pour Ro “ 0.5 dans le cas d’un canal avec perturbateurs, peu importe l’orientation du perturbateur.

Figure 2.5 – Évolution de l’efficacité des transferts thermiques et des pertes de charges en fonction de la vitesse de rotation avec Nus et fs les valeurs sur la cas statique [103].

Des géométries plus complexes que des canaux droits à section rectangulaire ont égale- ment été étudiées dans la littérature. Effectivement dans des cas industriels, les canaux font souvent plusieurs passages à l’intérieur de la pale et donc ce canal comporte un ou plusieurs virages en U. Différents auteurs ont voulu étudier ces virages en U car ils en- gendrent des pertes de charge singulières non négligeables. Pour cette raison, Verstraete et al. [170] ont voulu optimiser la forme du virage en U. Parallèlement, Furlani et al. [53] ont fourni des mesures sur un canal triangulaire représentatif d’un canal refroidissant le bord d’attaque. Elfert et al. [45] ont utilisé un système PIV pour étudier les écoulements secondaires dans un canal trapézoïdal à deux passages et Mucignat et al. [124] ont étudié l’écoulement dans des canaux de refroidissement de bord de fuite moderne.

En résumé, l’écoulement dans des canaux perturbés est très complexe. Cet écoulement dépend des nombreux paramètres géométriques du canal et des perturbateurs, tout en évoluant le long du canal. Les perturbateurs génèrent des décollements et rattachements de l’écoulement, augmentant la turbulence et l’efficacité des transferts thermiques mais également les pertes de charge. La mise en rotation du canal ajoute encore un niveau de difficulté avec des phénomènes de déstabilisation/stabilisation ainsi que l’apparition de flottabilité lorsque l’écoulement est aussi soumis à un gradient de température. La physique fine de ces écoulements sera abordée plus en détail au début des chapitres 3 et

4 pour les canaux respectivement statiques et en rotation.