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1.3 Description du montage exp´ erimental

1.3.3 Refroidir

A pr´esent que nous avons ´etudi´e la partie technique de la r´ealisation des pi`eges, nous allons suivre le nuage atomique au cours de son refroidissement, suivant les phases successives. L’objectif permanent est l’augmentation du param`etre de d´eg´en´erescence nλdB3, avec n la densit´e et λdB la longueur d’onde de De Broglie.

1.3.3.1 Le pi`ege magn´eto-optique

Le principe du refroidissement dans un pi`ege magn´eto-optique peut ˆetre compris en revenant `a la figure 1.5. L’effet du faisceau contra-propageant est d’autant plus important que le faisceau se rapproche de r´esonance. Or, l’effet Doppler a tendance `

a augmenter la fr´equence vue par l’atome. Comme le faisceau est d´esaccord´e vers le rouge, cela revient donc `a le rapprocher de r´esonance. Et parall`element, cela l’´eloigne de r´esonance pour l’autre transition. Donc plus l’atome a une vitesse ´elev´ee, plus il ´echange de photons, ce qui le ralentit. Cela aussi peut ˆetre exprim´e par le fait que le d´esaccord est δ = δ0−~k ·~v + 2µBB/~ pour un atome allant dans le sens des x croissants.

Vitesse et position jouent donc des rˆoles similaires. Le pi`ege magn´eto-optique confine donc dans les deux espaces, position et vitesse : il pi`ege et refroidit.

Notre premier probl`eme est de parvenir `a capturer les atomes dans le pi`ege. Le pi`ege doit ´evidemment ˆetre dissipatif, sinon tout atome entrant ressortirait. Mais le pi`ege n’est pas infiniment dissipatif : il existe une vitesse limite de capture des atomes, vc. Il faut

donc comparer la vitesse des atomes arrivant dans le pi`ege avec vc. Ici, vc devrait ˆetre de

l’ordre de 130 m/s[86] et a ´et´e exp´erimentalement mesur´ee `a 80 m/s(voir encore le 3.2.1 de la r´ef´erence [86]).

Cette vitesse de capture et, d’une mani`ere g´en´erale, l’efficacit´e du pi`ege magn´eto- optique d´ependent du d´esaccord des faisceaux de pi´egeage. Plus il est faible, plus exi- geant sera le processus de refroidissement et de pi´egeage : la temp´erature finale sera plus basse, mais le volume de pi´egeage aussi diminuera. Mais par dessus tout, un autre facteur nous empˆeche de prendre le d´esaccord aussi petit que possible : il s’agit des collisions assist´ees par la lumi`ere. On a d´ej`a dit aux paragraphes 1.2.2.1 et 1.3.2.1(voir « R´eglages ») qu’elles augmentaient lorsque le faisceau s’approche de la r´esonance avec la transition 23S1 → 23P2, et qu’elle induisent des pertes d’atomes.

Ces deux effets entre en comp´etition dans la mesure o`u l’on veut minimiser le pa- ram`etre de d´eg´en´erescence, nλdB3, ce qui impose `a la fois de diminuer la temp´erature

et d’augmenter la densit´e, donc le nombre d’atomes. Ainsi, alors qu’on trouve un opti- mum de principe pour la temp´erature autour de ∆ = −7Γ 19, avec ∆ le d´esaccord et Γ la largeur de la transition, en pratique on s’´eloigne un peu davantage pour limiter les pertes par ces collisions assist´ees par la lumi`ere. On parvient `a une valeur autour de ∆ = −25Γ[86].

On parvient finalement `a environ 5.108 atomes `a une temp´erature de l’ordre de 1 mK.

1.3.3.2 La m´elasse optique

On peut gagner en temp´erature par rapport au pi`ege magn´eto-optique en le faisant suivre d’une phase de m´elasse optique. Contrairement au pi`ege magn´eto-optique, qui utilise le champ magn´etique pour parvenir `a pi´eger les atomes dans l’espace des po- sitions, la m´elasse optique ne permet de pi´eger que dans l’espace des vitesses. Elle ne constitue donc pas `a proprement parler un pi`ege, mais elle refroidit.

Cette phase de refroidissement est utile pour adapter le nuage au pi`ege magn´etique qui vient ensuite. En effet, ce pi`ege n’a pas une profondeur infinie. On veut donc le charger avec un nuage suffisamment froid. Cela permet aussi d’augmenter la densit´e dans l’espace des phases.

Le principe de la m´elasse est similaire `a celui pr´ec´edemment d´ecrit pour la m´elasse transverse. Les faisceaux sont d´esaccord´es vers le rouge. Les atomes de plus grande vitesse se rapprochent donc de la r´esonance par effet Doppler et, diffusant des photons, sont ralentis.

L’effet du champ magn´etique est lui tr`es diff´erent de ce qu’on vient d’expliquer pour le pi`ege magn´eto-optique. Car la forme du champ magn´etique est aussi tr`es diff´e- rente. Le champ magn´etique restant, parasite, est a priori non-nul au centre du nuage. Comme pr´ec´edemment il conduit `a augmenter le d´esaccord de l’un des faisceaux tout en diminuant le d´esaccord de l’autre. La pression de radiation due aux deux faisceaux contra-propageants est donc d´es´equilibr´ee. Donc s’il subsiste un champ magn´etique r´e- siduel, celui-ci produit une force qui fait d´eriver le nuage des atomes.

On doit maˆıtriser cet effet pour que le nuage d’atomes reste centr´e sur le pi`ege magn´etique. Le cas ´ech´eant, cela permet mˆeme de rattraper un petit d´efaut d’alignement des pi`eges magn´eto-optique et magn´etique. Il est important que le nuage soit bien centr´e sur le pi`ege magn´etique au moment o`u l’on ´etablit le champ du pi`ege, sinon il se met `a osciller. Et comme le pi`ege magn´etique est non-dissipatif, l’oscillation est tr`es longue `a s’amortir. Dans ce cas, c’est finalement le couteau radio-fr´equence (voir 1.3.3.3)

19 en utilisant la formule T = TD  1 +I2I sat + 2∆ Γ 2 Γ

2|∆| de la r´ef´erence [30], avec I

Isat = 7 (voir [86]

qui permet de revenir au repos. Pour ´eviter ces pertes, on ajoute des bobines « de compensation » ( mont´ees en configuration Helmholtz ) avec lesquelles on ajuste le champ magn´etique. Cela garantit l’alignement du nuage sur le pi`ege.

Pour obtenir une m´elasse, on coupe le champ magn´etique du pi`ege et on rapproche de r´esonance les faisceaux. La dur´ee de la m´elasse est optimis´ee pour faire le compromis entre des dur´ees plus longues pour mieux refroidir et des dur´ees plus courtes pour limiter les pertes par collisions assist´ees par la lumi`ere, qui sont augment´ee puisque le faisceau est rapproch´e de r´esonance. Il faut ensuite annuler le champ magn´etique. Il n’est pas tout `a fait nul lorsque le champ du pi`ege est coup´e, car il peut subsister un petit champ parasite dˆu `a l’environnement. De plus, les atomes sont sensibles `a la gravit´e et ils d´erivent donc naturellement vers le bas. Pour compenser l’un et l’autre, on ajoute trois paires de bobines mont´ees en configuration Helmholtz. L’optimisation du courant dans ces bobines se fait en minimisant les pertes lors du transfert dans le pi`ege magn´etique20.

L’optimisation sur le d´esaccord des faisceaux vient de l’observation de la temp´erature du pi`ege magn´etique.

On parvient finalement `a quelques 1.108atomes `a une temp´erature de l’ordre de 300 µK.

1.3.3.3 L’´evaporation radio-fr´equence

Les phases de refroidissement qui utilisent la lumi`ere sont limit´ees ultimement par la temp´erature de recul. En effet les atomes ne sont refroidis que s’ils interagissent avec la lumi`ere. Or, l’´echange de photons implique un ´echange d’impulsion. L’impulsion est quantifi´ee en unit´e de ~~k, ce qui produit donc une agitation minimale ´equivalente `a une temp´erature de Eagitation/kB = (~k)

2 mkB = h2 mλ2k B[26]. On utilise la transition 2 3S 1 →

23P2 de longueur d’onde 1083 nm, donc on est limit´e `a 4, 075 µK. Cette temp´erature

est insuffisante : les temp´eratures de transition pour la condensation de Bose-Einstein sont plutˆot de l’ordre de 1 µK. Utiliser des techniques de refroidissement optique sub- recul[29, 28] serait trop difficile21. Pour continuer le refroidissement, on doit donc utiliser une technique qui ne fasse pas intervenir la lumi`ere. Ce sera le refroidissement ´evaporatif forc´e.

Le couteau radio-fr´equence

L’´evaporation radio-fr´equence se fait dans le pi`ege magn´etique pr´ec´edemment d´ecrit (1.3.2.2). Ce pi`ege est non-dissipatif. On ne peut donc refroidir un atome individuelle- ment. Pour diminuer la temp´erature, et donc dissiper de l’´energie, la thermodynamique nous impose de ne plus nous placer dans le cadre d’un syst`eme ferm´e. Nous allons donc volontairement perdre des atomes. Le principe de l’´evaporation radio-fr´equence est l`a : nous allons agir de sorte `a perdre pr´ef´erentiellement les atomes les plus chauds. Pour ce faire, on diminue progressivement la hauteur du pi`ege magn´etique en utilisant un couteau radio-fr´equence. La figure 1.11 illustre le principe de ce couteau.

Les seuls atomes qui restent dans le pi`ege sont ceux qui ont une ´energie suffisam- ment faible pour ne pas ˆetre ´eject´es. Le couteau radio-fr´equence impose la temp´erature (on note ηkBT = hνRF− 2µBB0). Il n’est donc pas difficile d’avoir une temp´erature

20On trouve des courants quasi-nuls sur les deux axes horizontaux, et un courant de 1, 93 A pour

l’axe vertical. Sur l’axe vertical, les bobines ont 67, 5 cm de circonf´erence et elles ont chacune 36 tours. Cela donne donc un champ magn´etique de 8, 1.10−4T.

21

m = +1

J

m = 0

J

µ

U(x)

x

hn

RF

2m

B 0

B

0

Vmax

Fig. 1.11 – Principe du couteau radio-fr´equence. Illustration pour un pi`ege magn´etique `

a une dimension. L’onde radio-fr´equence couple vers l’´etat non-pi´egeant les atomes qui ont une vitesse suffisante pour atteindre la hauteur Vmax dans le potentiel de pi´egeage.

Vmax= hνRF− 2µBB0.

faible. La difficult´e consiste `a avoir assez d’atomes qui restent dans le pi`ege `a la fin. Le fonctionnement r´eel de l’´evaporation radio-fr´equence est donc plus subtil qu’une simple troncature du potentiel de pi´egeage car celle-ci conduirait `a un nombre final d’atomes ridiculement faible. En termes de densit´e dans l’espace des phases, cela correspond `a un compromis `a trouver entre faible temp´erature et nombre d’atomes ´elev´e.

Thermalisation et emballement

La clef de l’efficacit´e du refroidissement est dans la thermalisation (voir figure 1.12). Id´ealement, le nuage d’atomes devrait rester dans un quasi-´equilibre tout au long du re- froidissement. Ainsi, `a chaque nouvelle troncature du potentiel, les collisions ´elastiques entre atomes reconstruisent une distribution thermique. Si la troncature est suffisam- ment douce, on ne perd alors presque pas d’atomes et le processus am`ene presque tous les atomes `a la temp´erature finale. Imposer une troncature assez douce revient `a impo- ser `a chaque instant un param`etre η assez grand. Cependant, on se limite `a une valeur de l’ordre de 5 `a 7, correspondant `a des pertes d’atomes importantes. Nous n’avons en effet pas int´erˆet `a refroidir trop lentement car il existe une autre cause de pertes : les collisions in´elastiques. Il faut donc trouver un compromis entre les pertes par collisions in´elastiques et les pertes par refroidissement radio-fr´equence. A la fin, malgr´e le grand nombre d’atomes perdus (de l’ordre de 99 %), on a gagn´e en densit´e dans l’espace des phases car la temp´erature a ´enorm´ement diminu´e.

La vitesse de reconstruction de la distribution thermique est donn´ee par le taux de collisions ´elastiques. Pour des collisions `a deux corps, celui-ci est proportionnel `a la densit´e. Ceci nous pousse donc `a charger le pi`ege magn´etique avec un maximum d’atomes. Si l’´echantillon d’atomes est initialement assez dense, alors le refroidissement est efficace, et plus le processus avance, plus la densit´e augmente. En effet, pour des temp´eratures faibles le potentiel de pi´egeage est harmonique. Ceci couple la taille du nuage d’atomes avec la largeur de sa distribution en impulsion via les fr´equences du

fréquence (MHz)

0

100

200

300

di

st

rib

ut

io

n

en

é

ne

rg

ie

(u

.a

.)

n

1

Fig. 1.12 – Principe de l’´evaporation radio-fr´equence. Si les collisions ´elastiques sont suffisantes, elles tendent `a reconstruire en permanence la distribution thermique que tronque le couteau RF. Id´ealement les pertes seraient aussi faibles et la temp´erature finale aussi petite que l’on veut. Si l’on tronque tout de suite `a faibles fr´equences on ne r´ecup`ere (presque) pas d’atomes. En y allant progressivement on d´ecale le pic et donc on r´ecup`ere plus d’atomes.

pi`ege. Plus la temp´erature baisse, `a nombre d’atomes donn´es, plus la densit´e augmente. Ceci permet donc de gagner sur les deux tableaux concernant la densit´e dans l’espace des phases. Ceci permet aussi (et surtout) d’avoir un ´echantillon de plus en plus dense si le refroidissement ´evaporatif est efficace, c’est-`a-dire si la perte d’atomes et assez faible pour ne pas empˆecher cette augmentation de densit´e dans l’espace des phases. Alors on atteint un r´egime d’emballement. Mˆeme avec un nombre d’atomes qui chute rapidement on acc´el`ere la croissance du param`etre de d´eg´en´erescence.

Cons´equences, applications

Ceci a une implication tr`es directe sur la stabilit´e du montage. Si on est tout juste au seuil du r´egime d’emballement, la moindre variation du nombre d’atomes initial a des r´epercutions critiques. Dans notre cas, la sensibilit´e aux conditions initiales n’est pas si grande. On constate cependant qu’une chute de l’ordre de 20 % du nombre d’atomes dans le pi`ege magn´etique conduit quasiment `a la perte pure et simple du condensat. Dans ces conditions, on comprend que l’on cherche `a stabiliser autant que faire se peut toutes les ´etapes du pi´egeage et du refroidissement.

Le couteau radio-fr´equence peut aussi servir `a d´eterminer le champ de biais. Re- venons `a la figure 1.11. Si l’on descend progressivement le couteau en diminuant la fr´equence νRF, on observe des pertes qui viennent de ce que les atomes d’´energie sup´e-

rieure `a Vmaxsont ´eject´es du pi`ege. Puis, lorsqu’on a pass´e le biais, tous les atomes ont

´et´e ´eject´es, et il n’y a plus de pertes. Ceci permet de d´eterminer pr´ecis´ement le champ B0qui autrement serait difficile `a mesurer : le couteau radio-fr´equence est indirectement

biais (jusqu’`a un temps de l’ordre de quelques centaines de millisecondes). Il suffit de le laisser juste au-dessus d’un condensat. D`es que le biais varie, les atomes qui passent au-dessus du couteau sont perdus. On peut observer le flux de ces pertes irr´eguli`eres, qui donne une id´ee de l’amplitude et des fr´equences des fluctuations du biais. Inver- sement, on voit l`a l’importance de la stabilit´e du biais. C’est elle qui d´etermine dans quelle mesure on peut s’approcher d’un condensat pur.

Conclusion

Au total, notre phase d’´evaporation radio-fr´equence dure environ 40 s. Elle consiste `a appliquer l’onde radio-fr´equence en une suite de quatre rampes22de fr´equences, allant de 135 MHz `a quelques MHz. Le nombre d’atomes final est d’environ 105. La temp´erature finale est de l’ordre du µK. Ceci nous donne une densit´e dans l’espace des phases de l’ordre de l’unit´e.