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Cadre Institutionnel et conceptuel

1. Une recherche fondée sur un questionnement heuristique questionnement heuristique

« Apprendre une langue, c'est facile ».

Telle fut notre intime conviction, en tant que plurilingue maîtrisant aisément cinq langues et ce depuis le plus jeune âge. Or, ce n'est qu'en devenant enseignante d'anglais qu’eut lieu la prise de conscience des difficultés d'apprentissage qu'un monolingue doit affronter. Rendre l'enseignement accessible, par une réflexion didactique appropriée, a donc guidé notre pratique professionnelle et fut à l'origine de notre parcours de formatrice en didactique des langues. La sensibilisation, au détour de lectures diverses, au concept de Language Awareness*4

et la découverte d’approches novatrices déclenchèrent un questionnement différent.

1.1. Du Language Awareness aux approches plurielles

Le courant de Language Awareness fut développé par Hawkins en Grande Bretagne dans les années 1980. Il s’agissait de développer des habiletés métalinguistiques5

chez les élèves anglais afin de leur faciliter l’entrée dans l’écrit et l’apprentissage des langues étrangères, en prenant appui sur les langues des élèves issus des minorités linguistiques. Ce concept donna naissance, en France à l’approche ‘Éveil aux langues’* principalement diffusée par deux projets européens, Evlang (acronyme de ‘éveil aux langues’) et Jaling (pour Janua Linguarum ou ‘Porte des langues’). Le projet EvLang, s’appuyant sur les domaines proposés par Hawkins (1984), cherchait à développer à la fois des représentations et attitudes positives ainsi que des aptitudes d’ordre métalinguistique/métacommunicatif. Développer une culture linguistique fut également l’un des objectifs visés par ce projet. L’inscription de

4 La définition suivante est donnée sur le site de l’Association for Language Awareness (consulté le 12.12.12 : http://www.lexically.net/ala/la_defined.htm) : « Language Awareness can be defined as

explicit knowledge about language, and conscious perception and sensitivity in language learning, language teaching and language use ».

5 Nous utiliserons fréquemment le terme ‘métalinguistique’ au sens où l’entend Gombert (1990 : 11) : il s’agit, pour cet auteur, d’ « adopter une attitude réflexive sur les objets langagiers et leur manipulation ».

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l’éveil aux langues dans les curricula scolaires de l’école primaire fut étudiée, par la suite, dans le cadre de Jaling.

Parallèlement, d’autres approches se développèrent : il s’agit de la didactique

intégrée*, de l’intercompréhension entre les langues parentes* et de l’approche interculturelle*. Contrairement à l’éveil aux langues qui pourrait s’appuyer sur un très

grand nombre de langues, la didactique intégrée a pour objectif d’aider l’élève à établir des liens entre un nombre limité de langues, enseignées dans le cursus scolaire. La langue première (L1) ou langue de scolarisation sert de point d’appui pour accéder à la première langue étrangère (L2), puis les deux langues sont supposées faciliter l’accès à une troisième (L3)6, quelle que soit sa nature (Castellotti, 2001a ; Hufeisen & Neuner, 2004). Elle se distingue en cela de l’intercompréhension entre les langues

parentes qui travaille sur les familles de langues et aide l’apprenant, lors d’activités de

compréhension, à tirer avantage de cette proximité linguistique. L’approche d’intercompréhension entre les langues parentes est cependant essentiellement mise en œuvre auprès d’un public adulte (Doyé, 2005 ; Meissner, C., Meissner, F., Klein & Stegmann, 2004). A ces trois approches orientées vers les langues s’ajoute une dernière, appelée approche interculturelle. Dans ce cadre, la langue est considérée comme une composante identitaire et une analyse des pratiques sociales spécifiques suscitées par le contact avec l’étranger est effectuée, de manière à faciliter la communication entre personnes de cultures différentes (Byram, 2003 ; Camilleri-Grima, 2002).

Toutes ces approches furent réunies par Candelier (2008)7

sous l’appellation ‘approches plurielles’*. Il s’agit, pour cet auteur, d’approches « mettant en œuvre des activités impliquant à la fois plusieurs variétés linguistiques et culturelles » (ibid. : 68). Elles se distinguent des approches singulières, dans lesquelles « le seul objet d’attention est une langue ou une culture particulière, prise isolément » (ibid.). Un Cadre de référence pour les approches plurielles (CARAP)* fut développé par Candelier, De Pietro et Facciol (2007) sous l’égide du Centre européen pour les langues vivantes. L’objet du CARAP est d’aider les utilisateurs à identifier les

6 Se reporter aux précisions terminologiques en infra (p.28) pour une définition des termes L1, L2 et L3.

7 Candelier utilise la terminologie « approche plurielle » dès 2003, dans l’ouvrage collectif intitulé

Janua Linguarum – La Porte des Langues – L’introduction de l’éveil aux langues dans le curriculum.

ressources mobilisées par la « compétence à gérer la communication linguistique et culturelle en contexte d’altérité » ainsi que par la « compétence de construction et d’élargissement d’un répertoire linguistique et culturel pluriel » (plaquette CARAP). Il s’agit de deux sous-compétences de la compétence plurilingue et pluriculturelle, notion centrale du Cadre européen commun de référence pour les langues8

* (Conseil

de l’Europe, 2001).

2.1. La compétence plurilingue et pluriculturelle dans le Cadre

Avant d’aborder la compétence plurilingue et pluriculturelle qui est inscrite dans le Cadre, il semble utile de rapidement présenter cet outil. Comme son nom l’indique, il s’agit d’un cadre de référence qui fournit une base pour l’élaboration de programmes, de matériels d’enseignement et d’apprentissage ainsi que pour l’évaluation des compétences en langues étrangères.

Les méthodes d'enseignement de l'anglais en vigueur actuellement s'appuient sur l'approche actionnelle prônée par ledit Cadre. Il s'agit de permettre aux élèves de développer à la fois leurs savoirs, savoir-faire et savoir-être par la mise en œuvre d'activités langagières9

leur permettant d'effectuer des tâches. L’utilisateur doit non seulement développer une compétence communicative ou des compétences considérées comme ‘générales’ (puisqu'on peut y faire appel pour toutes sortes d'activités, y compris langagières (Conseil de l’Europe, 2001 : 15), il doit également être capable de mobiliser sa compétence plurilingue et pluriculturelle*. Le cadre définit la compétence plurilingue et pluriculturelle de la manière suivante :

« On désignera par compétence plurilingue et pluriculturelle, la compétence à communiquer langagièrement et à interagir culturellement d’un acteur social qui possède, à des degrés divers, la maîtrise de plusieurs langues et l’expérience de plusieurs cultures. On considérera qu’il n’y a pas là superposition ou juxtaposition de compétences distinctes, mais bien existence d’une compétence complexe, voire composite, dans laquelle l’utilisateur peut puiser » (Conseil de l’Europe, 2001 : 129).

8 Pour des raisons de facilité de lecture, nous nous référons désormais au Cadre européen de référence pour les langues par le terme ‘Cadre’.

9 Les activités langagières proposées par le Cadre sont la compréhension orale, compréhension écrite, production orale (en continu et en interaction) et production écrite.

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On constate qu’il s’agit d’une compétence composite, à plusieurs facettes, qui s’appuie sur un répertoire langagier en évolution.

Cette compétence s’appuie sur des processus dynamiques, ce qui nous incite « à revoir la discipline L2 en fonction de ses interactions avec les autres langues et cultures des apprenants » (Deyrich, 2007 : 47). Il apparaît donc clairement, dans les textes officiels européens (à travers le Cadre), que l'enseignement de la L2 ne devrait plus se faire de manière isolée, mais devrait davantage s'inscrire dans un parcours de formation linguistique élargi.

1.3. Un parcours de formation linguistique élargi ?

La prise en compte à la fois du courant de Language Awareness, des approches plurielles et des objectifs du Cadre influença notre positionnement de didacticienne de l’anglais : il s'agit désormais d’explorer des approches qui permettraient de « donner du sens à des apprentissages en langues qui restent souvent isolés, compartimentés » (De Goumoëns, Noguerol, Perregaux & Zurbriggen, 2003 : 40). Ne pourrait-on pas davantage relier les approches plurielles aux approches singulières, en se concentrant sur ce qui paraît être leur but commun, c’est-à-dire le développement d’une compétence plurilingue et pluriculturelle ? Les approches plurielles ne pourraient-elles pas, dès lors, devenir un atout pour l’enseignement des langues singulières (pour l’enseignement de l’anglais, dans le cas qui nous intéresse) ?

Lorsqu’on examine le quotidien de la plupart des classes en Limousin, on constate que les approches plurielles n’ont eu que très peu d’écho dans l’enseignement secondaire. Les enseignants de langue, quels qu'ils soient, mettent en œuvre les programmes et les objectifs d’enseignement à atteindre, sans pour autant avoir conscience du nécessaire développement de la compétence plurilingue et pluriculturelle. Les approches plurielles sont, par conséquent, souvent considérées comme une perte de temps, même si les enseignants pensent qu'elles permettent d'ouvrir les élèves à la diversité linguistique10

.

Il semble donc opportun, en tant qu’enseignant/formateur en charge de la formation continue des enseignants d’anglais du second degré, d’explorer les

10 Cette affirmation provient de l'analyse de neuf entretiens exploratoires menés auprès d’enseignants de collège, avant de commencer le présent travail de recherche doctorale.

possibilités d’ancrage disciplinaire de notre questionnement. Il s’agit tout d’abord de vérifier si l’intégration des approches plurielles dans le cursus d’enseignement de l’anglais est envisageable, d’un point de vue curriculaire.

1.4. Point de départ : Synthèse

Le point de départ de cette recherche fut la découverte d’autres types d’approches didactiques spécifiques à l’enseignement des langues. Il s’agit d’approches plurielles qui permettent à la fois de donner du sens aux apprentissages et de répondre à l’objectif du Cadre, qui est celui du développement de la compétence plurilingue et pluriculturelle. Or, nous sommes enseignant/formateur en anglais. Il devient dès lors intéressant d’explorer les possibilités d’intégration d’une telle approche au sein de la didactique de l’anglais.

2. Un questionnement terminologique

Dans la mesure où nous abordons l’enseignement des langues en prenant appui sur des concepts issus des travaux menés sur le plurilinguisme*, une réflexion autour des termes ‘didactique du plurilinguisme’*, L1*, L2* et Ln* ainsi que langue-cible*/langue-source* s’impose.

2.1. Didactique du plurilinguisme

Un flou terminologique entoure le champ de la didactique du plurilinguisme*. Comme le fait remarquer Candelier (2008), un grand nombre de termes renvoient à la mise au contact de plusieurs langues :

« […] on se trouve confronté, sans toujours savoir si ces expressions renvoient à des réalités différentes, à […] enseignement pluriel des langues, enseignement de la pluralité des langues, didactique du plurilinguisme, didactique plurielle des langues, didactique de la pluralité des langues, didactique de la diversité linguistique … et approches plurielles des langues et des cultures. Nous devrions sans doute y ajouter, à la suite de la contribution de Maria Helena Araújo e Sá et Sílvia Melo qui se trouve dans le présent numéro

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des Cahiers de l’Acedle, la didactique des langues, opposée à la didactique de la langue ! ».

Ces termes présentent des caractéristiques communes en ce qu’ils envisagent tous l’enseignement de plusieurs langues et/ou cultures. Le terme ‘didactique du plurilinguisme’ apparaît cependant comme le plus fréquemment utilisé. Moore (2006 : 223) inclut dans la didactique du plurilinguisme l’approche plurilingue, définie par le Cadre (2001 : 11) de la manière suivante :

« l'approche plurilingue met l'accent sur le fait que, au fur et à mesure que l'expérience langagière d'un individu dans son contexte culturel s'étend de la langue familiale à celle du groupe social puis à celle d'autres groupes (que ce soit par apprentissage scolaire ou sur le tas), il/elle ne classe pas ces langues et cultures dans des compartiments séparés mais construit plutôt une compétence communicative à laquelle contribue toute connaissance et toute expérience des langues et dans laquelle les langues sont en corrélation et interagissent » 11.

Nous choisissons cependant d’utiliser l’appellation « approches plurielles »* développé par Candelier (2008 : 68) et non simplement « approches plurilingues » pour plusieurs raisons. Tout d’abord pour des considérations de concision et de clarté. Il semble, en effet, plus simple de souligner le contraste entre les approches singulières* (« dans laquelle le seul objet d’attention est une langue ou une culture particulière, prise isolément » (ibid.)) et les approches plurielles (« mettant en œuvre des activités impliquant à la fois plusieurs variétés linguistiques et culturelles » (ibid.)). Ensuite, comme le fait valoir Candelier, le terme permet d’englober les quatre approches didactiques abordées précédemment (cf. supra p. 28). Nous souhaitons y ajouter notre démarche qui est une approche plurielle au service de la didactique des langues singulières. Elle se caractérise, en outre, par un appui sur des langues inconnues des élèves et une mise en œuvre systématique et régulière. Nous choisissons de la nommer ‘approche plurielle fondée sur des langues inconnues’ (APLI)*12

.

11 Citation extraite de la p. 11 du Cadre européen de référence pour l’enseignement des langues, 2001.

12 Pour des raisons de facilité de lecture, nous appellerons cette approche plurielle fondée sur des langues inconnues ‘APLI’.

2.2. L1, L2, Ln : de quelles langues parle-t-on ?

Les termes L1*, L2* et Ln* sont fréquemment mentionnés dans le cadre de ce travail. Il importe donc d’en préciser la désignation, en explorant quelques éléments de la littérature consacrée à l’acquisition des langues ou au plurilinguisme.

Dès 1969, (Cook, 1969), comme bon nombre d'autres chercheurs, utilise le terme ‘L1’ pour désigner la langue maternelle et ‘L2’ pour désigner toute langue étrangère apprise ultérieurement. Il apparaît donc que la L1 est la première langue parlée par l'enfant. Il précise cette terminologie en caractérisant le locuteur natif comme étant une personne monolingue qui parle encore la langue apprise dans son enfance13

. Il indique cependant que cela n’exclut pas le fait que cet individu puisse être locuteur natif de plus d’une langue, dès lors que l’acquisition fut simultanée pendant l’enfance.

Moore (2001) préfère utiliser le terme de LM qui indique clairement ‘langue maternelle’* et LE pour désigner la langue étrangère, même si par la suite elle établit la correspondance LM = L1 lorsqu'elle cite les travaux de Py (1992). Or, la notion de langue maternelle peut toutefois revêtir plusieurs réalités dans un contexte plurilingue. Comme le constate Castellotti (2001b : 11), il peut s'agir de la « première langue acquise, langue parlée majoritairement en famille, langue identitaire, mais aussi, dans certains cas, langue officielle ou langue de scolarisation, qui peuvent se substituer, pour certains sujets, aux langues antérieurement acquises ». La terminologie anglo-saxonne paraît plus claire : elle oppose ‘a native language’ à ‘a non-native language’, ce qui permet d'éviter l'utilisation de termes sensibles tels que ‘maternelle’ et ‘étrangère’.

La littérature portant sur la recherche en acquisition d'une langue seconde fait apparaître une utilisation fréquente du terme L2 pour désigner la deuxième langue apprise, voire même toute langue supplémentaire. Tous les apprenants d'une langue nouvelle sont étiquetés comme apprenants L2, ce qui témoigne de l'hypothèse fréquemment envisagée selon laquelle l'acquisition d'une L3 ne se distingue pas de celle d'une L2. Ce positionnement est également celui des didacticiens de l’anglais

13 Notre traduction de Cook (2003 : 3) : « Let us first define the native speaker as “a monolingual

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puisque, pour Quivy et Tardieu (2002 : 194), « d’un point de vue didactique, LV1, LV2, LV3 sont toutes des L2 ».

Au regard des utilisations variées des termes L1/L2/L3 dans les recherches mentionnées ci-dessus, il devient nécessaire de préciser la terminologie employée dans ce travail. Dans la mesure où nous sommes dans un contexte d'apprentissage scolaire français, nous utiliserons le terme L1 pour désigner la langue française (langue de scolarisation) utilisée en classe. Il s’agit du « code linguistique, la langue officielle du pays où l’élève apprend une langue 2 » (Quivy et Tardieu, 2002 : 194). Le français est donc « la langue, qui, inculquée par l’école sous son aspect le plus normé, c’est-à-dire l’écrit, constitue le véhicule de transmission de la plupart des savoirs » (L. Dabène, 1994 : 21). De plus, nous avons choisi d’observer les élèves ayant des biographies langagières semblables, si bien que les informateurs ont tous comme langue maternelle le français (qui est donc également la langue de scolarisation) et apprennent l'anglais en tant que L2. Certains d'entre eux apprennent ou apprendront également une deuxième langue étrangère en contexte scolaire appelée alors L3. La terminologie utilisée dans cette recherche est donc celle de l'ordre d'acquisition en milieu scolaire des langues non-maternelles. Dans le cadre de l’approche plurielle qui nous intéresse, des langues inconnues sont présentées aux élèves, sans objectif d’enseignement / apprentissage : nous choisissons, dès lors, de les désigner par le terme global de Ln.

Il importe cependant de distinguer les appellations ‘L2’ et ‘langue seconde’, cette dernière désignant une langue « acquise en immersion, en milieu parfois qualifié de ‘naturel’ » (Deyrich, 2007 : 13-14). La langue seconde n’entre donc pas dans notre perspective de recherche.

2.3. Langue-source et langue-cible : quelle est la source, quelle est la cible ?

L’un des objectifs de ce travail est de décrire la mobilisation des savoirs (en L1 ou L2) pour comprendre ou analyser une langue inconnue (Ln). Nous utiliserons donc régulièrement les notions de langue-source* et de langue-cible*, qu’il convient de préciser.

Quivy et Tardieu, dans le Glossaire de didactique de l’anglais (2002 : 194) définissent la langue-source comme étant la « langue de départ en milieu institutionnel », soit la L1. La langue-cible est alors la « langue étrangère apprise en

milieu institutionnel […]. Or, les études portant sur l’acquisition des langues et le transfert linguistique* (en contexte plurilingue) donnent un sens différent à ces termes. Les termes sont utilisés sans pour autant être clairement définis, que ce soit lorsque les auteurs parlent d’interlangue (Davies, Criper, & Howatt, 1984 ; Selinker, 1972) ou d’acquisition plurilingue (Bardel, 2006 ; Bono, 2007 ; De Angelis, 2005 ; Herdina & Jessner, 2002, pour n’en citer que quelques uns). Si aucun effort de définition n’apparaît, c’est parce que le sens qui leur est attribué relève de la dénomination commune. On peut considérer que le substantif ‘source’ a la fonction sémantique suivante, précisée dans le Dictionnaire des sciences du langage (2011 : 310) : « la source […] est l’entité à partir de laquelle un mouvement abstrait ou concret s’effectue ». Le terme ‘cible’ n’a pas de rôle sémantique en sciences du langage. On peut cependant le rapprocher du rôle de ‘but’ défini en tant que « entité vers laquelle l’action est dirigé (la destination) ou vers laquelle le mouvement abstrait ou concret s’effectue » (ibid. : 310).

Nous utiliserons donc, dans ce travail, le terme de langue-source pour désigner toute langue (L1, L2 voire Ln) qui sert de point d’appui, de ‘source’ à l’alimentation de la réflexion métalinguistique. De même, la langue-cible sera la langue sur laquelle l’attention est portée en tant qu’objet d’apprentissage ou simple objet d’analyse.

2.4. Savoirs et connaissances : deux termes pour un même concept ?

Nous serons amenés, au cours de ce travail, à aborder le concept de savoirs et/ou de connaissances. Or, il existe, en français (mais non en anglais, où les deux termes sont traduits par knowledge) une distinction courante entre ‘savoirs’ et ‘connaissances’.

Pour Perrenoud (1998 : 492),

« les premiers seraient universels, impersonnels, sans propriétaires, sans trace de leur genèse, sans référence à leurs usages sociaux. Les connaissances seraient au contraire la face subjective des savoirs, tels qu’ils existent dans l’esprit humain, contextualisés, personnalisés, voire englués dans l’ensemble de ses structures mentales ».

Nous rejoignons cet auteur lorsqu’il souligne une telle dichotomie. Certaines connaissances peuvent, en effet, être largement partagées alors que d’autres restent « privées, confinées dans l’esprit de leur unique détenteur » (ibid.). De même, les

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savoirs, tout aussi impersonnels qu’ils soient, ne peuvent exister s’ils ne sont portés par des individus. Par conséquent, nous choisissons de ne pas entrer dans le débat terminologique et d’utiliser les termes ‘connaissances’ et ‘savoirs’ à l’anglo-saxonne, c’est-à-dire en tant que synonymes parfaits.

3. Un questionnement autour des didactiques

Dans la mesure où nous souhaitons intégrer les APLI dans une démarche d’enseignement de langues singulières, nous pouvons nous interroger sur le cadre de référence didactique de notre réflexion. Il semble donc utile d’explorer, à partir du concept de didactique*, les ancrages disciplinaires qui peuvent y être associés et dans lesquels notre démarche pourrait s’inscrire. Seront alors examinés le champ de la didactique des langues, les objectifs de la didactique de l’anglais* ainsi que la manière dont les APLI pourraient s’inscrire dans ce champ disciplinaire. Cette exploration devrait nous permettre d’éclairer le positionnement que nous souhaitons adopter.