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La recherche d’un appui structurel dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes

Chapitre II : Les ressources employées en matière de lutte contre la violence à l’égard des femmes au niveau universel

Paragraphe 3 : La mise en place d’initiatives particulières pour conforter les efforts en matière de lutte

A) La recherche d’un appui structurel dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes

L’Organisation des Nations Unies prône la défense des droits des femmes et c’est pourquoi, au sein de sa structure complexe, certaines entités ont été particulièrement dédiées à la promotion de ces droits. Celles-ci exercent un rôle prépondérant dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Il s’agit plus particulièrement de la Commission de la condition de la femme (I) et d’ONU Femmes, l’Entité des Nations Unies pour l’Egalité des sexes et l’autonomisation de la femme (II).

I) La Commission de la condition de la femme

Créée en 1946, la Commission de la condition de la femme relève du Conseil économique et social. Son rôle est de surveiller la progression en matière d’égalité des sexes de par le monde en procédant à l’évaluation de la mise en œuvre de la Plate-forme d’action résultant

RAVETS Quentin| Thèse de doctorat |Décembre 2015

de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes qui s’est tenue en 1995. Elle procède à la formulation de recommandations qui ont pour objet l’adoption de nouvelles mesures en matière de promotion des droits fondamentaux des femmes et de lutte contre les inégalités et la discrimination dans l’ensemble des domaines.

La Commission peut se targuer d’avoir préparé et assuré le suivi de quatre conférences mondiales sur les femmes et élaboré la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et son protocole facultatif ainsi que la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes.

Lors de sa 51ème session, du 26 février au 9 mars 2007, la Commission a adopté des conclusions concertées sur « L’élimination de toutes les formes de discrimination et de

violence à l’égard des petites filles ». Elle y priait instamment les gouvernements de prendre

des mesures en matière de travail des enfants, les appelant plus particulièrement à « [s]ensibiliser davantage les gouvernements et le grand public à la nature et à l’ampleur

des besoins particuliers des filles, surtout des migrantes, employées comme domestiques et celles chargées de corvées ménagères excessives dans leur propre foyer, et élaborer des mesures visant à prévenir leur exploitation économique sur le marché du travail ainsi que les sévices sexuels, et veiller à ce qu’elles aient accès à l’éducation et à la formation

professionnelle, aux services de santé, à l’alimentation, au logement et aux loisirs »450.

Sa 57ième session, qui s’est déroulée du 4 au 15 mars 2013, était consacrée à l’élimination et à la prévention de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles et témoigne d’un élan historique451. Résultat d’intenses négociations entre les Etats membres

de la Commission, les conclusions concertées adoptées à cette occasion452 sont

particulièrement remarquables en ce qu’elles incitent les Etats à « s’abstenir d’invoquer

quelque coutume, tradition ou considération religieuse que ce soit pour se soustraire à

l’obligation qui leur incombe d’éliminer cette violence […] »453, et témoignent d’un

450 Organisation des Nations Unies, Commission de la condition de la femme. Conclusions concertées

sur l’élimination de toutes les formes de discrimination et de violence à l’égard des petites filles,

E/2007/27-E/CN.6/2007/9, 51ème session (26 février – 9 mars 2007), paragraphe 14.6b).

451 En 2003, lors de sa 47ième session, la Commission de la condition de la femme avait échoué à adopter

un projet de conclusions concertées sur les droits fondamentaux de la femme et l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles conformément au Programme d’action de Beijing et aux textes adoptés à l’issue de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, marquant ainsi une absence de consensus parmi les Etats.

Organisation des Nations Unies, Commission de la condition de la femme. Rapport sur les travaux de

la quarante-septième session (3-14 et 25 mars 2003), E/2003/27-E/CN.6/2003/12, paragraphes 59-61.

452 Organisation des Nations Unies, Commission de la condition de la femme. Rapport sur les travaux

de la cinquante-septième session (4-15 mars 2013) - Conclusions concertées sur l’élimination et la prévention de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, E/2013/27-

E/CN.6/2013/11, 2 avril 2013, pp. 1-19.

consensus mondial sur la gravité de la violence qui touche les femmes en tant que violation des droits de l’Homme et de la nécessité d’adopter urgemment une démarche proactive pour lutter contre ce phénomène. Elles visent à combattre toutes les formes de violence454, bien

qu’elles appellent à lutter « à titre prioritaire […] » contre la violence domestique455 du fait

qu’elle est la forme de violence « la plus répandue qui touche indifféremment toutes les

classes sociales, partout dans le monde »456, tout en reconnaissant la vulnérabilité

particulière de certaines femmes, comme les travailleuses migrantes457. Par ailleurs, elles

mettent l’accent sur les mesures de prévention à prendre, notamment en matière de sensibilisation et d’éducation458, tout en soulignant la nécessité de combattre les causes

structurelles et sous-jacentes de la violence459, en luttant contre les inégalités dans les

domaines politique, économique et social, ainsi que les facteurs de risque460. Ce fut en outre

l’occasion d’aborder des questions relatives à la protection des victimes461 telles que l’accès

aux structures d’aide et de conseil, ce qui a permis de mettre en exergue les lacunes existantes et d’encourager la progression des travaux en ces domaines. La mise à mal de l’impunité ressort également comme un point central des conclusions puisqu’il y est fait état du besoin de punir les auteurs de violence462, en mettant notamment un terme aux

« procédures non traditionnelles de règlement des différends obligatoires et forcées […] »463.

La Commission de la condition de la femme a ainsi accompagné l’essor de l’intérêt croissant de l’Organisation des Nations Unies en matière de lutte contre la violence à l’égard des femmes. Plus récemment, afin de conférer une visibilité accrue aux questions touchant les femmes, l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation de la femme a été créée. Cette entité participe également à la lutte contre la violence à l’égard des femmes.

454 Idem, paragraphe 11. 455 Idem, paragraphe A, point d. 456 Idem, paragraphe 12.

457 Idem, paragraphe B, point bbb.

458 Idem, paragraphe B, points kk et ll en particulier, ou encore vv sur le rôle des médias dans la

sensibilisation du public.

459 Idem, paragraphe B.

460 A titre d’exemple, le paragraphe B, point uu, appelle à encourager les programmes et politiques qui

ciblent notamment les enfants et les jeunes, en particulier les femmes, qui ont subi des violences familiales ou sexuelles ou qui ont été témoins de celles-ci, dans le but de les protéger de la survenue de nouvelles violences mais également afin qu’ils ne reproduisent pas le même schéma.

461 Idem, paragraphe C. 462 Idem, paragraphe A point n. 463 Idem, paragraphe A, point f.

RAVETS Quentin| Thèse de doctorat |Décembre 2015

II) La création d’ONU Femmes (Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation de la femme)

C’est en 2010, par la résolution 64/289, intitulée « Cohérence du système des Nations

Unies »464, qu’ONU Femmes a été créé. Cette entité est opérationnelle depuis le 1er

janvier 2011 et regroupe les mandats et fonctions du Bureau de la Conseillère spéciale pour la problématique hommes-femmes et la promotion de la femme ainsi que la Division de la promotion de la femme du Département des affaires économiques et sociales, du Fonds de développement des Nations Unies pour la femme et enfin de l’Institut international de recherche et de formation pour la promotion de la femme465,

unifiant ainsi les structures s’occupant des questions relatives aux femmes et conférant par la même occasion une visibilité institutionnelle et un impact accrus à ces dernières. L’entité vise ainsi à procurer un nouvel élan aux efforts entrepris par les Nations Unies en matière de développement d’opportunités pour les filles et les femmes et de lutte contre la discrimination au niveau mondial.

Les actions d’ONU Femmes sont centrées autour de l’élimination de la discrimination qui affecte les filles et les femmes, de l’autonomisation de ces dernières et de l’égalité entre femmes et hommes. ONU Femmes entretient également des partenariats effectifs avec la société civile. De même, elle s’assure du respect des engagements du système des Nations Unies en matière d’égalité des sexes en exerçant une surveillance des progrès effectués au niveau du système de manière régulière.

ONU Femmes apporte également un soutien actif aux organes

intergouvernementaux, à l’exemple de la Commission de la condition de la femme, dans l’élaboration de normes, politiques et standards. Elle fournit par ailleurs un appui aux Etats membres dans la mise en œuvre de ces standards en leur procurant une aide de nature technique et financière adaptée lorsqu’ils en font la demande. C’est notamment dans ce cadre qu’elle a développé un « Manuel sur les plans nationaux de

lutte contre la violence à l’égard des femmes »466. Ce manuel offre ainsi un modèle de

base en matière de plans d’action nationaux relatifs à la violence contre les femmes, fournissant des recommandations précises auxquelles viennent s’ajouter des commentaires explicatifs et des exemples de bonnes pratiques, tout en reconnaissant la

464 Organisation des Nations Unies, Assemblée générale. Résolution 64/289 sur la cohérence du système

des Nations Unies, adoptée le 2 juillet 2010, A/RES/64/289, 21 juillet 2010. 465 Idem, paragraphe 49.

466 ONU Femmes. Manuel sur les plans nationaux de lutte contre la violence à l’égard des femmes ,

nécessité d’adapter ces plans au contexte local467. Parmi les principes directeurs, le

Manuel encourage notamment les Etats à adopter une approche basée sur les droits de l’Homme dans l’adoption de ces plans, en les invitant notamment à reconnaître au sein de ceux-ci que cette violence est une violation des droits de l’Homme, à définir la violence à l’égard des femmes conformément aux instruments internationaux et à s’assurer de la conformité de ces plans avec les engagements internationaux des Etats en vertu des traités de droits de l’Homme468, ainsi qu’à reconnaître la violence à l’égard

des femmes comme une forme de discrimination sexuelle469. Enfin, il développe

également certains points que les plans d’action nationaux doivent inclure comme la prévention primaire, c’est-à-dire la prévention intervenant avant que la violence n’ait lieu470, ou encore la réaction à tenir face à la violence à travers la mise en place de

mécanismes d’intervention471, et présente également certaines précisions quant à la

mise en œuvre des mesures à prendre472 ainsi qu’en matière d’évaluation, de suivi et

d’élaboration de rapports473.

Outre cet appui structurel, un Rapporteur s’est vu confier un mandat qui s’axe spécifiquement autour de la violence à l’égard des femmes, venant ainsi davantage conforter les efforts entrepris en la matière.