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Les conditions d'une action en responsabilité civile suite à une

C. Relation entre l'environnement et les autres biens juridiques

1. Par rapport à la propriété

192. D'une manière générale, un grand nombre d'auteurs sont d'avis que le dommage écologique au sens où nous l’entendons dans cette étude289 ne peut exister que par rapport à un bien qui ne fait pas l'objet d'un droit de propriété290. Dans le cas contraire, le système de responsabilité civile ne présente selon eux pas de lacune. Cette opinion ne tient pas suffisamment compte de la différence qui existe entre l'intérêt du propriétaire et l'intérêt écologique. Le premier est un intérêt à caractère économique, qui se traduit par une valeur monétaire susceptible de figurer dans un bilan comptable, alors que le second ne l'est pas. L'évaluation de l'intérêt du propriétaire se fait sur la base de critères économiques qui reflètent les mécanismes du marché (par exemple la valeur vénale d'une parcelle), alors que l'intérêt écologique doit recourir à d'autres critères, la "valeur écologique" d'un bien ne faisant pas l'objet d'un marché (par exemple la qualité de l'air). Cette différence rend une étude approfondie de l'articulation de ces deux biens nécessaire.

193. L'examen des différentes opinions rencontrées en droit des gens, sur un plan européen ainsi que dans les différents systèmes juridiques nationaux permet à GODT de distinguer trois modèles correspondant aux argumentations rencontrées291. Nous nous en inspirerons pour exposer les différentes manières d'envisager l'articulation entre les champs de protection respectifs de l'environnement et de la propriété (a), avant de déterminer celle qu'il convient de conserver pour la suite de ce travail (b). Nous aurons alors à examiner la praticabilité de notre solution sur un plan juridique, notamment en regard de la garantie constitutionnelle de la propriété (c).

a. Différentes constellations possibles

194. D'un point de vue méthodologique, on peut envisager l'articulation entre protection de la propriété et protection de l'environnement sous deux angles différents: on peut admettre d'abord que la protection de l'intérêt écologique est un élément de la protection de la propriété (aa), ou alors que les deux coexistent, indépendamment l'une de l'autre, par rapport au même bien (bb).

289 C'est-à-dire le dommage qui fait suite à une atteinte à l'environnement en tant que tel (cf. N 13).

Cf. également N 225.

290 Entre autres SEIBT, p. 9 s.; SCHULTE, p. 278 ss; GASSNER, p. 370 ss.

291 GODT, p. 93 ss; BRANS, p. 17 ss.

1. Par rapport à la propriété

192. D'une manière générale, un grand nombre d'auteurs sont d'avis que le dommage écologique au sens où nous l’entendons dans cette étude289 ne peut exister que par rapport à un bien qui ne fait pas l'objet d'un droit de propriété290. Dans le cas contraire, le système de responsabilité civile ne présente selon eux pas de lacune. Cette opinion ne tient pas suffisamment compte de la différence qui existe entre l'intérêt du propriétaire et l'intérêt écologique. Le premier est un intérêt à caractère économique, qui se traduit par une valeur monétaire susceptible de figurer dans un bilan comptable, alors que le second ne l'est pas. L'évaluation de l'intérêt du propriétaire se fait sur la base de critères économiques qui reflètent les mécanismes du marché (par exemple la valeur vénale d'une parcelle), alors que l'intérêt écologique doit recourir à d'autres critères, la "valeur écologique" d'un bien ne faisant pas l'objet d'un marché (par exemple la qualité de l'air). Cette différence rend une étude approfondie de l'articulation de ces deux biens nécessaire.

193. L'examen des différentes opinions rencontrées en droit des gens, sur un plan européen ainsi que dans les différents systèmes juridiques nationaux permet à GODT de distinguer trois modèles correspondant aux argumentations rencontrées291. Nous nous en inspirerons pour exposer les différentes manières d'envisager l'articulation entre les champs de protection respectifs de l'environnement et de la propriété (a), avant de déterminer celle qu'il convient de conserver pour la suite de ce travail (b). Nous aurons alors à examiner la praticabilité de notre solution sur un plan juridique, notamment en regard de la garantie constitutionnelle de la propriété (c).

a. Différentes constellations possibles

194. D'un point de vue méthodologique, on peut envisager l'articulation entre protection de la propriété et protection de l'environnement sous deux angles différents: on peut admettre d'abord que la protection de l'intérêt écologique est un élément de la protection de la propriété (aa), ou alors que les deux coexistent, indépendamment l'une de l'autre, par rapport au même bien (bb).

289 C'est-à-dire le dommage qui fait suite à une atteinte à l'environnement en tant que tel (cf. N 13).

Cf. également N 225.

290 Entre autres SEIBT, p. 9 s.; SCHULTE, p. 278 ss; GASSNER, p. 370 ss.

291 GODT, p. 93 ss; BRANS, p. 17 ss.

aa. L'intérêt écologique est un élément de la propriété

195. Pour convaincre que le dommage écologique ne peut concerner que des biens libres de tout droit de propriété, on avance que l'intérêt écologique fait partie de ce droit qui confère à son titulaire une jouissance entière et exclusive de son bien.

196. Les auteurs qui tentent cette démonstration peuvent être répartis en deux groupes, selon qu'ils estiment que la propriété est une donnée variable et que son champ de protection "augmente" en fonction des intérêts écologiques qui interviennent (i), ou au contraire, que l'étendue de la propriété est fixe, déterminée par l'ordre juridique, et qu'elle n'englobe l'intérêt écologique que dans cette mesure (ii).

i. La propriété est une donnée variable

197. Les tenants de cette conception292 posent comme prémisse le parallélisme des intérêts du propriétaire et des intérêts écologiques. Pour ces auteurs, la valeur écologique d'un bien se répercute inévitablement sur la valeur économique et est donc attribuée à son propriétaire. Par exemple, le propriétaire d'un hôtel de montagne profite économiquement de la pureté de l'air; dans une telle hypothèse, l'intérêt écologique s'identifie à un intérêt commercial, de nature économique.

198. La dimension écologique d'un bien-environnement293 est, dans tous les cas, entièrement couverte par la protection de la propriété. Elle intervient donc nécessairement dans la fixation du dommage et de l'indemnité versée au propriétaire. Sur le plan de la responsabilité civile, il ne peut ainsi logique-ment exister de lacune dans la protection que pour les biens ressources naturelles qui ne font pas l'objet d'un droit de propriété.

199. Par exemple, si un champ a été pollué à la suite de pluies acides, seul le propriétaire du champ peut demander la réparation de son dommage. Celle-ci comprend une indemnité pour l'intérêt écologique. Il y a un "dommage écologique" en ce sens que le bien touché est un bien-environnement (le sol), mais ce dommage est entièrement couvert par la protection de la propriété, puisque l'intérêt écologique (la qualité du sol) se répercute sur la valeur économique (plus la qualité du sol est bonne, plus le champ est productif, plus sa valeur économique est grande). La baisse de productivité est prise en compte dans la fixation du dommage et de l'indemnité. L'intérêt protégé en définitive est l'intérêt patrimonial du propriétaire, l'intérêt écologique n'étant qu'indirectement pris en compte.

292 SEIBT, p. 9; SCHULTE, p. 281 s.; GASSNER, p. 370 ss; JETZER/GROSJEAN, p. 55; MÜLLER-CHEN, p. 229 s.

293 Dénomination empruntée à MARTIN.

aa. L'intérêt écologique est un élément de la propriété

195. Pour convaincre que le dommage écologique ne peut concerner que des biens libres de tout droit de propriété, on avance que l'intérêt écologique fait partie de ce droit qui confère à son titulaire une jouissance entière et exclusive de son bien.

196. Les auteurs qui tentent cette démonstration peuvent être répartis en deux groupes, selon qu'ils estiment que la propriété est une donnée variable et que son champ de protection "augmente" en fonction des intérêts écologiques qui interviennent (i), ou au contraire, que l'étendue de la propriété est fixe, déterminée par l'ordre juridique, et qu'elle n'englobe l'intérêt écologique que dans cette mesure (ii).

i. La propriété est une donnée variable

197. Les tenants de cette conception292 posent comme prémisse le parallélisme des intérêts du propriétaire et des intérêts écologiques. Pour ces auteurs, la valeur écologique d'un bien se répercute inévitablement sur la valeur économique et est donc attribuée à son propriétaire. Par exemple, le propriétaire d'un hôtel de montagne profite économiquement de la pureté de l'air; dans une telle hypothèse, l'intérêt écologique s'identifie à un intérêt commercial, de nature économique.

198. La dimension écologique d'un bien-environnement293 est, dans tous les cas, entièrement couverte par la protection de la propriété. Elle intervient donc nécessairement dans la fixation du dommage et de l'indemnité versée au propriétaire. Sur le plan de la responsabilité civile, il ne peut ainsi logique-ment exister de lacune dans la protection que pour les biens ressources naturelles qui ne font pas l'objet d'un droit de propriété.

199. Par exemple, si un champ a été pollué à la suite de pluies acides, seul le propriétaire du champ peut demander la réparation de son dommage. Celle-ci comprend une indemnité pour l'intérêt écologique. Il y a un "dommage écologique" en ce sens que le bien touché est un bien-environnement (le sol), mais ce dommage est entièrement couvert par la protection de la propriété, puisque l'intérêt écologique (la qualité du sol) se répercute sur la valeur économique (plus la qualité du sol est bonne, plus le champ est productif, plus sa valeur économique est grande). La baisse de productivité est prise en compte dans la fixation du dommage et de l'indemnité. L'intérêt protégé en définitive est l'intérêt patrimonial du propriétaire, l'intérêt écologique n'étant qu'indirectement pris en compte.

292 SEIBT, p. 9; SCHULTE, p. 281 s.; GASSNER, p. 370 ss; JETZER/GROSJEAN, p. 55; MÜLLER-CHEN, p. 229 s.

293 Dénomination empruntée à MARTIN.

200. La solution offerte par ce modèle peut être schématisée comme il suit:

L'atteinte concerne… Les prétentions se fondent sur…

… un bien non environnemental (ex: un immeuble locatif)

… la protection de la propriété.

… un bien-environnement faisant l'objet d'un droit de propriété

(ex: un arbre; cf. art. 667 al. 2 CC)

… la protection de la propriété exclusivement.

… un bien-environnement ne faisant pas l'objet d'un droit de propriété

(ex: l'atmosphère)

… la protection de l'intérêt écologique.

Selon cette conception, le dommage écologique est le dommage consécutif à une atteinte à un bien-environnement qui ne fait pas l'objet d'un droit de propriété.

201. Si l'on considère que la propriété englobe l'intérêt écologique, il nous faut alors admettre que le propriétaire, en vertu des pouvoirs qu'il détient sur son bien (usus,fructus et abusus), est libre de porter atteinte à ses fonctions écologiques sans que cela ne puisse ouvrir un droit à réparation. Une restriction de ses pouvoirs nécessiterait l'adoption d'une base légale claire294 ainsi que le versement d'une "pleine indemnité" au propriétaire295, puisqu'elle équivaudrait à une expropriation.

ii. La propriété est une donnée fixe

202. Pour les auteurs qui défendent le caractère défini de la propriété296, celle-ci n'est pas un bien juridique "extensible". Son contenu est strictement défini par l'ordre juridique. Les intérêts écologiques ne peuvent donc pas s'ajouter aux intérêts économiques et ainsi "augmenter" le champ de protection de la propriété. Une atteinte à un bien-environnement représente une atteinte à la propriété dans la mesure de l'étendue de sa protection.

203. Pour savoir si un bien-environnement bénéficie ou non de la protection de la propriété, il faut se référer au critère de son utilisation économique297. S'il fait l'objet d'une utilisation économique, il est protégé par la garantie de la propriété; si ce n'est pas le cas, il est protégé par l'intérêt écologique. Dans

294 Cf. art. 22ter al. 2 aCst.: "Dans la mesure de leurs attributions constitutionnelles, la Confédération et les cantons peuvent, par voie législative et pour des motifs d'intérêts public, prévoir l'expropriation et des restrictions de la propriété."

295 Art. 26 al. 2 Cst.

296 Voir surtout REHBINDER, p. 105 ss.

297 REHBINDER, p. 106.

200. La solution offerte par ce modèle peut être schématisée comme il suit:

L'atteinte concerne… Les prétentions se fondent sur…

… un bien non environnemental (ex: un immeuble locatif)

… la protection de la propriété.

… un bien-environnement faisant l'objet d'un droit de propriété

(ex: un arbre; cf. art. 667 al. 2 CC)

… la protection de la propriété exclusivement.

… un bien-environnement ne faisant pas l'objet d'un droit de propriété

(ex: l'atmosphère)

… la protection de l'intérêt écologique.

Selon cette conception, le dommage écologique est le dommage consécutif à une atteinte à un bien-environnement qui ne fait pas l'objet d'un droit de propriété.

201. Si l'on considère que la propriété englobe l'intérêt écologique, il nous faut alors admettre que le propriétaire, en vertu des pouvoirs qu'il détient sur son bien (usus, fructus et abusus), est libre de porter atteinte à ses fonctions écologiques sans que cela ne puisse ouvrir un droit à réparation. Une restriction de ses pouvoirs nécessiterait l'adoption d'une base légale claire294 ainsi que le versement d'une "pleine indemnité" au propriétaire295, puisqu'elle équivaudrait à une expropriation.

ii. La propriété est une donnée fixe

202. Pour les auteurs qui défendent le caractère défini de la propriété296, celle-ci n'est pas un bien juridique "extensible". Son contenu est strictement défini par l'ordre juridique. Les intérêts écologiques ne peuvent donc pas s'ajouter aux intérêts économiques et ainsi "augmenter" le champ de protection de la propriété. Une atteinte à un bien-environnement représente une atteinte à la propriété dans la mesure de l'étendue de sa protection.

203. Pour savoir si un bien-environnement bénéficie ou non de la protection de la propriété, il faut se référer au critère de son utilisation économique297. S'il fait l'objet d'une utilisation économique, il est protégé par la garantie de la propriété; si ce n'est pas le cas, il est protégé par l'intérêt écologique. Dans

294 Cf. art. 22ter al. 2 aCst.: "Dans la mesure de leurs attributions constitutionnelles, la Confédération et les cantons peuvent, par voie législative et pour des motifs d'intérêts public, prévoir l'expropriation et des restrictions de la propriété."

295 Art. 26 al. 2 Cst.

296 Voir surtout REHBINDER, p. 105 ss.

297 REHBINDER, p. 106.

cette dernière hypothèse, les droits du propriétaire priment pourtant les prétentions découlant de la protection de l'intérêt écologique, et a fortiori les éventuelles prétentions de tiers.

204. Cela signifie donc que le propriétaire d'un bien-environnement objet d'une atteinte obtiendra une indemnité qui ne tiendra compte de l'intérêt écologique que s'il se reflète dans la valeur économique du bien. En vertu des droits absolus dont il dispose sur son bien, il ne courra pas le risque d'une condamnation sur le plan civil s'il porte atteinte à ses fonctions écologiques.

Par rapport à un bien-environnement, un concours de prétentions fondées les unes sur la protection de la propriété, les autres sur celle de l'intérêt écologique, est théoriquement possible, mais irréalisable sur un plan pratique.

205. La solution offerte par ce modèle peut être schématisée comme il suit:

L'atteinte concerne… Les prétentions se fondent sur…

… un bien non environnemental (ex: un immeuble locatif)

… la protection de la propriété.

… un bien-environnement faisant l'objet d'un droit de propriété

(ex: un arbre; cf. art. 667 al. 2 CC)

Si le bien fait l'objet d'un usage commercial:

protection de la propriété

S'il ne fait pas l'objet d'un usage commercial:

protection de l'intérêt écologique

Mais comme l'intérêt du propriétaire prime (en raison de son pouvoir de disposer de son bien), les prétentions découlant de la protection de l'intérêt écologique sont écartées.

… un bien-environnement ne faisant pas l'objet d'un droit de propriété

(ex: l'atmosphère)

… la protection de l'intérêt écologique.

Selon cette conception, le dommage écologique est le dommage consécutif à une atteinte à un bien-environnement qui ne fait pas l'objet d'une utilisation économique.

bb. L'intérêt écologique et la propriété coexistent

206. Une autre manière de concevoir les rapports entre environnement et propriété se trouve principalement dans les systèmes juridiques de tradition romaniste. Selon cette conception, le droit de propriété et l'intérêt écologique existent, ou plutôt coexistent, indépendamment l'un de l'autre. La manière

cette dernière hypothèse, les droits du propriétaire priment pourtant les prétentions découlant de la protection de l'intérêt écologique, et a fortiori les éventuelles prétentions de tiers.

204. Cela signifie donc que le propriétaire d'un bien-environnement objet d'une atteinte obtiendra une indemnité qui ne tiendra compte de l'intérêt écologique que s'il se reflète dans la valeur économique du bien. En vertu des droits absolus dont il dispose sur son bien, il ne courra pas le risque d'une condamnation sur le plan civil s'il porte atteinte à ses fonctions écologiques.

Par rapport à un bien-environnement, un concours de prétentions fondées les unes sur la protection de la propriété, les autres sur celle de l'intérêt écologique, est théoriquement possible, mais irréalisable sur un plan pratique.

205. La solution offerte par ce modèle peut être schématisée comme il suit:

L'atteinte concerne… Les prétentions se fondent sur…

… un bien non environnemental (ex: un immeuble locatif)

… la protection de la propriété.

… un bien-environnement faisant l'objet d'un droit de propriété

(ex: un arbre; cf. art. 667 al. 2 CC)

Si le bien fait l'objet d'un usage commercial:

protection de la propriété

S'il ne fait pas l'objet d'un usage commercial:

protection de l'intérêt écologique

Mais comme l'intérêt du propriétaire prime (en raison de son pouvoir de disposer de son bien), les prétentions découlant de la protection de l'intérêt écologique sont écartées.

… un bien-environnement ne faisant pas l'objet d'un droit de propriété

(ex: l'atmosphère)

… la protection de l'intérêt écologique.

Selon cette conception, le dommage écologique est le dommage consécutif à une atteinte à un bien-environnement qui ne fait pas l'objet d'une utilisation économique.

bb. L'intérêt écologique et la propriété coexistent

206. Une autre manière de concevoir les rapports entre environnement et propriété se trouve principalement dans les systèmes juridiques de tradition romaniste. Selon cette conception, le droit de propriété et l'intérêt écologique existent, ou plutôt coexistent, indépendamment l'un de l'autre. La manière

d'envisager leurs relations est inversée par rapport aux deux modèles précédents, puisque c'est la propriété qui fait partie intégrante de l'environne-ment, et non l'inverse.

207. Si l'on part de cette idée, une atteinte à un bien-environnement peut donner naissance à des prétentions distinctes, les unes fondées sur l'intérêt du propriétaire, les autres sur l'intérêt écologique. Le cas échéant, ces prétentions concourent, sur un pied d'égalité; la légitimation active pour faire valoir en justice les prétentions fondées sur l'intérêt écologique ne revient pas nécessairement au propriétaire. Une plus-value apportée à un bien par des données écologiques reste ainsi un intérêt économique.

208. Par exemple, un hôtel reçoit une clientèle nombreuse durant l'été, du fait de sa situation en bord de mer. Suite à une marée noire provoquée par le naufrage d'un pétrolier, les vacanciers désertent l'établissement et le propriétaire de l'hôtel subit une perte de gain. Il s'agit là d'une atteinte à ses intérêts économiques. Qu'il en obtienne ou non la réparation ne préjuge absolument pas de la possibilité d'obtenir une indemnisation pour l'atteinte aux intérêts écologiques, à savoir l'intérêt à ce que la mer demeure dans le meilleur état possible afin de remplir son rôle notamment d'habitat et de ressource nourricière de la faune marine. La question de savoir qui peut prétendre à cette indemnisation fait l'objet d'un autre chapitre298.

209. La solution offerte par ce modèle peut être schématisée comme il suit:

L'atteinte concerne… Les prétentions se fondent sur…

… un bien non environnemental (ex: un immeuble locatif)

… la protection de la propriété.

… un bien-environnement faisant l'objet d'un droit de propriété

(ex: un arbre; cf. art. 667 al. 2 CC)

Pour l'atteinte aux fonctions économiques du bien:

… la protection de la propriété.

Pour l'atteinte aux fonctions écologiques du bien:

… la protection de l'intérêt écologique.

… un bien-environnement ne faisant pas l'objet d'un droit de propriété

(ex: l'atmosphère)

… la protection de l'intérêt écologique

Selon cette dernière conception, le dommage écologique est le dommage qui résulte d'une atteinte aux fonctions écologiques d'un bien-environnement.

298 Cf. N 698 ss.

d'envisager leurs relations est inversée par rapport aux deux modèles précédents, puisque c'est la propriété qui fait partie intégrante de

d'envisager leurs relations est inversée par rapport aux deux modèles précédents, puisque c'est la propriété qui fait partie intégrante de