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7 Analyse

7.1 Waub

7.1.5 Le rapport à l’apprentissage

Il s’agit ici de cerner les préférences d’apprentissage des élèves, c’est-à-dire les moyens valorisés par l’élève dans son processus d’apprentissage.

7.1.5.1 Avant l’intervention

Pour Waub, l’apprentissage signifie développer de nouvelles compétences, de nouveaux savoir-faire. Les personnes les mieux placées pour l’aider à apprendre s’avèrent être son grand-père, son cousin et ses parents. Il dit que les méthodes utilisées par son grand-père pour lui apprendre à poser un collet sont beaucoup plus efficaces qu’une leçon de mathématiques en classe où l’enseignant explique et où l’élève s’exerce avec des exercices

répétitifs : « Pour les collets par exemple, mon grand-père m’explique comment le faire. Il va le faire tranquillement au début en me l’expliquant. Après ça il va le défaire, il va le refaire… après ça, va falloir que j’essaie de le faire. La première chose que j’ai chassée c’était la perdrix, après ça c’était le lièvre, après ça c’était le caribou, après ça c’était les outardes » (W1). Pour l’apprentissage des jeux vidéos, il en est de même : « Je n’étais pas bon avant à Rambo sur la PS3, pis à force de regarder mon cousin, je suis devenu meilleur. C’ta cause de lui que je suis meilleur. Il me disait quoi faire, il me disait d’aller par là, par là, par là. De faire ça comme ça, comme ça…après j’avais compris, j’étais capable tout seul » (W1). Pour Waub, le résultat est probablement le plus grand motivateur et incitateur de son apprentissage. S’il arrive à progresser dans un jeu par lui-même ou à capturer une proie lors de ses sorties de chasse, l’effort de l’apprentissage et le savoir en lui-même prendra de la valeur à ses yeux.

7.1.5.2 Après l’intervention

Si l’apprentissage signifie toujours le développement de nouvelles compétences pour Waub au terme de l’intervention, les façons d’apprendre de Waub, elles, se sont ouvertes sur de nouveaux horizons dans le cadre scolaire. En effet, il mentionne toujours avec autant d’ardeur qu’il « aimerait ben mieux rester à maison pis aller à la chasse que d’être obligé de venir à l’école » (W2), mais insiste également sur le fait qu’il a beaucoup aimé « faire du français différemment » (W2) et qu’il a « tellement appris d’affaires différentes » (W2). Les méthodes d’apprentissage qu’il considère efficaces d’ailleurs clairement ressorties, plus ou moins consciemment, du deuxième entretien. Un des aspects soulevés fut le changement de lieu où se donne le cours de français accompagné du changement dans l’organisation de la classe : « Dans la tente ! J’ai aimé ça pouvoir m’allonger pis être là pour faire l’école […] On nous permet pas d’apprendre pis d’écouter à l’école en étant couchés dans le sapinage d’habitude, haha ! Pis sinon, quand on a fait les cercles dans la classe, j’avais une chaise spéciale en plus qui tournait…» (W2). Ensuite, il a abordé les impacts positifs sur l’apprentissage dans le fait d’accueillir des invités dans la classe : « La madame qui racontait le conte en innu, c’est comme ma tante. Son fils, il jouait dans mon équipe de hockey. Je dors souvent là-bas. C’était vraiment l’fun qu’elle soit venue nous visiter pis toute, pis qu’elle participe à un cercle. Elle nous a appris plein d’affaires. Je sais que je te

l’ai déjà dit, mais je vais m’ennuyer de faire l’école de même quand tu seras pu là » (W2). Il a également été question du changement de posture de l’enseignant qui a été favorable aux apprentissages pendant l’intervention : « Haha ! C’était drôle quand le prof nous racontait ses affaires à lui. Tsé, qu’il prenne le temps de jaser de même avec nous autres. J’savais pas toutes ces affaires-là qu’il nous racontait, son histoire de pêche là…» (W2). Finalement, l’invitation à la manipulation et à la création collective ainsi que l’activité orale qui nécessitait une implication active des élèves se sont avérées des méthodes d’apprentissage efficaces et positives pour Waub pour lesquelles ils n’avaient que de bons mots.

7.1.5.3 Évolution

Les apprentissages proposés dans le cadre de l’intervention sont venus susciter chez Waub une forme de curiosité. Contrairement aux parties de chasse avec son grand-père ou à ces missions du jeu « Rambo sur la PS3 » (W1), le résultat, ou plutôt la finalité, des CII n’a pas agi comme motivateur puisqu’il demeurait plutôt incertain et méconnu. En effet, celui-ci allait bien au-delà des compétences pédagogiques visées au départ. C’est tout le processus et toute la démarche qui ont donc réveillé l’engouement de Waub et qui sont venus stimuler son rapport à l’apprentissage et la vision que l’école peut jouer dans ses processus d’apprentissage. Sachant qu’il mise normalement sur ce que l’apprentissage lui apporte, il est intéressant de voir que son intérêt pour les apprentissages proposés dans le cadre de l’intervention est né de bien d’autres composantes, notamment de la visite de nouvelles personnes dans la classe de français, du changement de lieu où se donne le cours de français, du changement d’organisation de la classe, du changement de posture de l’enseignant, de l’invitation à la manipulation et à la création collective ainsi que de l’activité orale impliquant activement les élèves. La forme pédagogique utilisée, comportant tous ces changements sans toucher à la finalité de la matière enseignée, a donc permis à Waub d’entrevoir la possibilité de faire des apprentissages à l’école.