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Chapitre 1 : Problématique

1.1 Contexte pratique

1.1.4 Rôles d’enseignants dans l’accueil et l’intégration

Dans la section suivante, les rôles respectifs des enseignants des classes d’accueil et des classes ordinaires seront présentés en appui sur les discours officiels ministériels, afin de les circonscrire dans le contexte de l’intégration d’élèves allophones immigrants.

Aux fins de cette étude, nous considérons trois principaux documents comme constituant le cadre prescrit des rôles des enseignants en matière d’intégration des élèves allophones immigrants et plus largement des élèves issus de l’immigration : soit la Politique

d’intégration scolaire et d’éducation interculturelle (MEQ, 1998), le Référentiel des compétences professionnelles de l’enseignant (MEQ, 2001), le Programme de formation de l’école québécoise (MEQ, 2001b) et dans le contexte de l’enseignement secondaire,

le programme Intégration linguistique, scolaire et sociale (ILSS) destiné aux élèves allophones immigrants nouvellement arrivés scolarisés dans les écoles secondaires du Québec (MEQ, 2006b).

Le Ministère de l’Éducation du Loisir et du Sport, suivant de près les orientations de la politique Au Québec pour bâtir ensemble (MICC, 1990) présentée plus haut, formule des lignes directrices pour l’accueil et l’intégration d’élèves allophones immigrants en milieu scolaire, détaillées dans la Politique d’intégration scolaire et d’éducation interculturelle (MEQ, 1998) et le Plan d’action associé. Trois grands principes d’action y sont décrits parmi lesquels la promotion de l’égalité des chances, la maîtrise du français, langue commune de la vie publique et l’éducation à la citoyenneté démocratique dans un contexte pluraliste (ibid., p.7). En particulier, cette politique souligne que « la

responsabilité de l’intégration des élèves nouvellement arrivées au Québec incombe à l’ensemble du personnel de chaque établissement d’enseignement » (MELS, 1998, p.21).

La famille et la communauté sont également décrites comme étant « des associées » dans le processus d’intégration (MEQ, 1998, p.21). Ainsi, la Politique d’intégration scolaire

et d’éducation interculturelle préconise la mobilisation des ressources de l’ensemble de

la communauté éducative afin de soutenir l’intégration des élèves allophones immigrants.

Afin de promouvoir l’éducation interculturelle, la Politique de 1998 présente cinq principes pour orienter les actions de la « communauté éducative » : considérer l’apprentissage du français comme un processus continu; valoriser le français au sein de la communauté éducative en tant que langue commune de la vie publique et véhicule de culture; promouvoir le patrimoine et les valeurs communes du Québec, notamment l’ouverture à la diversité ethnoculturelle, linguistique et religieuse dans l’ensemble du curriculum et de la vie scolaire; représenter la diversité ethnoculturelle de la société québécoise dans les différents corps d’emploi du monde scolaire; et former le personnel scolaire pour relever les défis éducatifs liés à la diversité (MEQ, 1998, p.26-36).

En somme, une lecture transversale de la Politique d’intégration scolaire et d’éducation

interculturelle (MEQ, 1998) révèle que l’enseignant (en collaboration avec l’équipe-

école, la famille et la communauté), au-delà de son rôle traditionnel de transmission de savoirs, est désormais appelé à agir en tant qu’agent d’intégration auprès des élèves allophones immigrants nouvellement arrivés et agent interculturel auprès de l’ensemble des élèves de l’école.

De plus, le Programme de formation de l’école québécoise prescrit un cadre d’intervention pour l’enseignement et l’apprentissage des élèves allophones immigrants au primaire et au secondaire (MEQ, 2001b). Le volet secondaire de ce programme,

Intégration linguistique, scolaire et sociale (ILSS) (MEQ, 2006b), a été conçu avec

l’objectif de préparer l’élève immigrant à poursuivre sa scolarité en français dans la classe ordinaire. Faisant référence à la politique de 1998, les concepteurs de ce programme rappellent que « la responsabilité incombe à l’ensemble de l’équipe-école » (MEQ, 1998). Par ailleurs, ce programme apporte des précisions sur les rôles spécifiques

de l’enseignant de français langue seconde et ceux des enseignants des classes ordinaires. Nous retrouvons également des objectifs généraux, des compétences et les composantes de celles-ci à développer chez les élèves et certains défis pouvant représenter des obstacles à l’intégration et à la réussite des élèves allophones immigrants.

De manière générale, le programme Intégration linguistique, scolaire et sociale (MEQ, 2006b), prescrit l’atteinte de deux objectifs principaux liés à la langue française et à la culture québécoise pour favoriser l’intégration de l’adolescent allophone immigrant. Le premier objectif est l’acquisition le plus rapidement possibled’une connaissance de la langue de communication interpersonnelle et des formes spécifiques du discours scolaire chez l’élève allophone immigrant. Le second objectif porte sur la compréhension de la culture scolaire et sociale du nouveau milieu, ainsi que le développementdes conduites et des attitudes appropriées pour s’y intégrer harmonieusement chez l’élève allophone immigrant (MEQ, 2006b, p.7). Ce programme éducatif prescrit également le développement de trois compétences chez les élèves allophones immigrants, ces compétences sont décrites comme « intimement reliées », soit : communiquer oralement en français dans des situations variées, lire et écrire des textes variés en français, et s’intégrer au milieu scolaire et à la société québécoise. En particulier, la troisième compétence « s’intégrer au milieu scolaire et à la société québécoise » comprend les composantes suivantes: s’adapter aux pratiques scolaires québécoises, amorcer son appropriation de la réalité québécoise et développer des conduites citoyennes adaptées à la société québécoise (MEQ, 2006b, p.1).

Par rapport au rôle spécifique de l’enseignant de la classe d’accueil, il est précisé dans le programme ILSS qu’il est « le premier interlocuteur francophone de l’élève et son

premier vrai contact avec la culture québécoise » (MEQ, 2006b, p.7). Cet enseignant

est décrit comme servant à la fois de « modèle linguistique et culturel et d’expert pouvant

de «passeur culturel » qui permet à l’élève de comprendre les valeurs socioculturelles véhiculées au Québec et de découvrir la culture francophone (ibid, p.7).

Quant au rôle de l’enseignant de la classe ordinaire, d’après le programme ministériel, ce dernier doit adapter ses interventions à la réalité de l’élève qui poursuit son intégration dans sa classe. Par ailleurs, le programme précise que les enseignants et les autres membres du personnel scolaire doivent aider quotidiennement l’élève immigrant à relever des défis d’ordre psychoaffectif, linguistique, socioscolaire et socioculturel et qu’ils doivent chercher, dans la mesure du possible, la collaboration des parents qui jouent un rôle important dans l’accompagnement de leur enfant vers la réussite scolaire (MEQ, 2006b, p.6).

En somme, la lecture des rôles des enseignants, tels qu’ils sont décrits à travers les documents ministériels (MEQ, 1998; 2001b; 2006b), révèle que l’intégration des élèves allophones immigrants nouvellement arrivés comporte plusieurs dimensions, notamment les dimensions linguistique, socioscolaire, scolaire et sociale et qu’elle nécessite une prise en charge concertée de la part des enseignants des classes d’accueil et des classes ordinaires, de la famille et de la communauté.

Le projet de recherche actuel s’interroge sur les rôles que huit enseignants de classes d’accueil et neuf enseignants de classes ordinaires s’attribuent pour favoriser l’intégration d’élèves allophones immigrants au secondaire.

Selon Armand (2011, p.2-3), peu d’études récentes ont documenté la mise en œuvre des services d’accueil et de francisation au Québec, hormis Le point sur les services d’accueil

et de francisation de l’école publique québécoise (MEQ, 1996). En particulier, aucune

enquête sur le terrain n’avait été réalisée pour l’ensemble du Québec depuis la mise sur pied du programme PASAF (MEQ, 1997) et la parution de la Politique d’intégration

scolaire et d’éducation interculturelle (MEQ, 1998). Ainsi, en réponse à l’absence de

connaissances sur les structures et les pratiques actuelles pour l’accueil et l’intégration des élèves allophones immigrants sur le terrain des écoles québécoises, un projet de recherche visant à dresser le portrait de ces services à l’échelle de la province à travers les « perceptions » de différents acteurs (directeurs, enseignants de classes d’accueil et de classes ordinaires, parents, élèves) a été subventionné par le Ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport (De Koninck et Armand, 2012). Les principaux objectifs de ce projet étaient d’identifier les pratiques actuelles et de les évaluer à partir des perceptions des acteurs scolaires interrogés. C’est dans le cadre de ce projet d’une plus grande envergure que s’inscrit la présente étude.