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RÔLE DES EMPLOYEURS

conséquences de la maladie mentale et de

POUR STRESS PROFESSIONNEL

6.5 RÔLE DES EMPLOYEURS

Les employeurs ont tout à fait intérêt à s’attaquer à la maladie mentale et à la toxicomanie en milieu de travail. Dans l’économie planétaire, l’information et l’innovation sont devenues les clés de la réussite concurrentielle. Or, l’utilisation de ces clés exige des travailleurs qualifiés, motivés et fiables. Le capital humain – la motivation, le savoir, les points de vue, le jugement, la capacité de communiquer, d’échanger des idées et d’entretenir des liens – est le moteur de l’économie planétaire. Bref, c’est le rendement mental qui fait tourner l’économie mondiale.301 D’après Bill Wilkerson, cofondateur et directeur général de la Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health :

… il incombe aux entreprises de protéger leurs investissements stratégiques dans leurs ressources humaines – leur actif vital – et donc, vu la définition du rendement mental de l’économie dans laquelle nous devons rivaliser, dans la santé émotive et mentale des employés.302

Le Comité a entendu à maintes reprises que, vu le fardeau qu’imposent la maladie mentale et la toxicomanie sur la société et les travailleurs et vu le coût croissant de l’invalidité professionnelle, les employeurs doivent mieux faire connaître les maladies mentales et la toxicomanie dans leurs organisations; ils doivent également accorder plus d’attention à l’amélioration de l’accès aux services de traitement et de rétablissement des travailleurs, par l’entremise de leurs PAE. Les employeurs doivent également insister davantage sur la

300 Dr Sunil V. Patel, président, AMC, mémoire au Comité, 31 mars 2004, p. 3.

301 Bill Wilkerson (6 février 2002), p. 6.

302 Bill Wilkerson (6 février 2002), p. 8.

133 Aperçu des politiques et programmes souplesse du travail et sur les mesures d’adaptation à l’intention des personnes qui souffrent d’une maladie mentale.

Certes, le Comité n’a cessé de répéter que les employeurs se doivent d’accomplir tout ce qui est énuméré au paragraphe précédent, mais aucun témoin ne nous a donné une idée de la difficulté de la tâche ni de son coût.

Le Comité ne peut donc qu’espérer qu’à la faveur des consultations publiques nationales qui devraient suivre le dépôt de son document sur les enjeux et les options, en novembre

2004, il recueillera des avis sur la façon dont les employeurs pourront effectivement mettre en œuvre les changements suggérés aux paragraphes précédents et sur les coûts à envisager.

Tout comme ce fut le cas pour ses rapports antérieurs qui ont recommandé la réforme du système de soins de santé ACTIFS, le Comité est déterminé à ce que son rapport final sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie, qui sera publié en novembre 2005, renfermera des recommandations qui seront à la fois pragmatiques et applicables, plutôt qu’un simple énoncé de pieuses intentions.

6.5.1 Les programmes d’aide aux employés Les PAE sont des programmes

d’employeur visant à atténuer et à contribuer à éliminer divers problèmes en milieu de travail. La source de ces problèmes peut être personnelle (problèmes juridiques,

diagnostic, d’aiguillage et de traitement. Le personnel de ces programmes possède habituellement un diplôme dans une discipline reliée à la santé mentale ou aux services sociaux (travail social, psychologie, psychiatrie, counselling et/ou thérapie de couple ou familiale). Certains services peuvent aussi être sous-traités à des personnes possédant d’autres titres de compétence et qualifications.

Les services des PAE sont offerts dans des organisations privées et publiques et habituellement administrés en totale indépendance des autres programmes de l’organisation.

La confidentialité est la pierre angulaire d’un PAE efficace. L’anonymat des clients, la

Comme on a évalué récemment qu’environ 75 p.

100 des nouveaux emplois dans l’économie exigent une capacité cognitive, non pas une capacité physique, et que les gens ne travaillent plus autant avec leur dos qu’avec leur cerveau, cet aspect de l’incapacité mentale a davantage d’importance qu’il y a quelques années.

[Rod Phillips, président et directeur général, Les Consultants Warren Shepell (18:8)]

Les programmes d’aide aux employés, les PAE, jouent un rôle dans le système actuel pour ce qui est de la façon dont les programmes de santé mentale sont offerts au Canada. Essentiellement, ils offrent aux employés des services d’évaluation professionnelle, du counselling à court terme et des services d’aiguillage. Dans la plupart des cas, les PAE au Canada visent les employés et leurs personnes à charge, tout comme les autres régimes d’avantages sociaux des employés ou tout autre régime d’assurance-médicaments.

[Rod Phillips, président et directeur général, Les Consultants Warren Shepell (18:8)]

Aperçu des politiques et programmes 134

confidentialité des entrevues, la tenue, le transfert et la destruction des dossiers sont assujettis aux lois fédérales et provinciales applicables, qui régissent la conduite des conseillers. En règle générale, l’information ne peut être divulguée par un conseiller de PAE uniquement lorsque le client a donné par écrit un consentement informé stipulant quelle information sera communiquée et à qui.

Le Comité a appris que de 60 à 80 p. 100 des Canadiens qui travaillent dans une moyenne ou une grande entreprise (plus de 500 employés) ont accès à une forme quelconque de PAE.

D’après Rod Phillips, président et directeur général de Les Consultants Warren Shepell, les PAE sont très efficaces; ils sont devenus la principale porte qui donne un premier accès des travailleurs canadiens à des soins en santé mentale et des services de traitement de la toxicomanie :

Dans de nombreux cas, d’après notre expérience, environ 85 p. 100 des gens que nous voyons au cours d’une année reçoivent un traitement suffisant dans le cadre des programmes d’aide aux employés et ne nécessitent aucun autre traitement. Environ 15 p. 100 des gens sont ensuite aiguillés vers des programmes communautaires ou vers le régime de soins de santé public.303

Les PAE insistent aussi fortement sur la prévention. Une grande partie du travail effectué avec les employeurs porte sur le mieux-être et d’autres programmes qui appuient un cadre de travail sain favorisant une bonne santé mentale.

Watson Wyatt Worldwide a recommandé que les employeurs sans PAE envisagent de mettre en place de tels programmes pour combattre la maladie mentale et toxicomanie, ainsi que divers autres problèmes. Ces experts-conseils ont fait remarquer que certains assureurs offrent des réductions des primes d’assurance-invalidité aux petits employeurs qui établissent un PAE, habituellement par l’entremise d’un fournisseur recommandé.304

Pour les organisations qui ont déjà mis en place un PAE, Watson Wyatt Worldwide recommandait que leurs programmes soient examinés et révisés au besoin afin de mieux répondre aux besoins des employés souffrant d’une maladie mentale et/ou de toxicomanie.

Les éléments particuliers à examiner devraient comprendre la nécessité de rapports utiles, les normes de rendement et la rétroaction des utilisateurs. Des examens internes visant à comparer le recours au PAE et les données sur l’absentéisme devraient être effectués par les services d’exploitation afin de déterminer les « pratiques exemplaires » internes qui peuvent être répandues dans l’ensemble de l’organisation. Enfin, Watson Wyatt Worldwide recommandait que les services offerts par le PAE de l’organisation soient communiqués régulièrement aux employés.305

Ash Bender et ses collègues (2002) ont prévenu que les PAE ne sont efficaces que lorsque les milieux de travail dans lesquels ils sont implantés encouragent activement des milieux de travail en santé. Autrement dit, il est très important que les employeurs soient bien informés

303 Rod Phillips (18:9).

304 Watson Wyatt Worldwide, Addressing Mental Health in the Workplace, juin 2003.

305 Ibid.

135 Aperçu des politiques et programmes des maladies mentales et de la toxicomanie, afin de lutter efficacement contre la stigmatisation et la discrimination dans leur organisation et d’établir des milieux de travail sains.306

Une autre préoccupation soulevée par Bender et al. portait sur le nombre de séances de traitement thérapeutique offertes aux clients des PAE. D’après des données non scientifiques, ces séances auraient diminué considérablement et seraient passées de sept à moins de trois par personne au cours des dix dernières années. Les auteurs concluaient que la probabilité est faible de résoudre efficacement des problèmes graves d’usage de substance ou de maladie mentale par des traitements thérapeutiques.307 Cette préoccupation exige une attention particulière.

6.5.2 Les mesures d’adaptation

La solution va nécessairement passer par l’implication des milieux de travail. Nous ne pouvons pas considérer les milieux de travail comme une école, comme un hôpital.

C’est une entité en soi, c’est une famille en soi avec ses règles et son art d’agir et nous ne pourrons pas le faire sans eux.

[Jean-Yves Savoie, président, Conseil consultatif, Institut de la santé publique et des populations, IRSC (18:6)]

Les mesures d’adaptation désignent « une ou plusieurs modifications du milieu de travail ou des procédures du milieu de travail qui permettent à une personne ayant des besoins spéciaux d’effectuer une tâche308 ». Alors que les personnes ayant une incapacité physique ont peut-être besoin d’une aide physique ou de changements structuraux du lieu de travail, les personnes ayant un trouble mental ont le plus souvent besoin de mesures d’adaptation sociale et organisationnelle. Ces modifications sont généralement des changements dans la façon dont les choses sont traditionnellement effectuées dans un lieu de travail particulier.

Permettre par exemple à quelqu’un ayant une maladie mentale de travailler à des heures flexibles lui permet d’accéder à l’emploi, de la même façon qu’une rampe d’accès permet à une personne handicapée de se déplacer en fauteuil roulant. Ces mesures ne sont pas un traitement préférentiel. Elles signifient simplement un traitement équitable des personnes handicapées.309

D’après l’Association des psychiatres du Canada, les mesures d’adaptation devraient être axées sur des mécanismes positifs qui favorisent l’égalité d’emploi. Elles comprendraient les mesures suivantes :

306 Ash Bender et al., Mental Health and Substance Use at Work : Perspectives from Research and Implications for Leaders, document de travail préparé pour la Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health, 14 novembre 2002.

307 Ibid.

308 Lana M. Frado, La diversité ça marche : l’accommodation en milieu de travail pour les personnes ayant une maladie mentale, Association canadienne pour la santé mentale, 1993, p. 7.

http://www.cmha.ca/english/routes/images/diversity_works_french.pdf

309 Lana M. Frado (1993), p. 9.

Aperçu des politiques et programmes 136

• Créer un environnement où les mesures d’adaptation sont établies en fonction des besoins individuels de chaque employé.

• Respecter le désir de confidentialité de l’employé et déterminer précisément la nature et l’ampleur de la confidentialité.

• Être disposé à se concerter pour résoudre les problèmes.

• Rendre toutes les mesures volontaires pour l’employé et être prêt à examiner les plans périodiquement pour s’adapter à l’évolution des besoins.

• Appliquer les politiques classiques avec souplesse.

• Définir concrètement et précisément les mesures d’adaptation à prendre. Ce serait une bonne idée de les mettre par écrit.310

Une étude semble indiquer que le coût des mesures d’adaptation relatives à un employé souffrant de maladie mentale est assez bas – la plupart coûtent bien moins de 500 $. Pour les employés qui reçoivent un traitement efficace, l’employeur économisera de 5 000 $ à 10 000 $ par employé par année en coûts de médicaments sur ordonnance, de congés de maladie et de remplacement du salaire moyen. Les employés diagnostiqués dépressifs qui prennent les médicaments pertinents feront épargner à leur employeur les coûts d’une moyenne de 11 jours par année d’absentéisme.311

Une autre étude a révélé que, sur une période de dix ans, 240 personnes ayant une maladie mentale grave ont pu garder un emploi rémunérateur en grande partie grâce à des programmes de réintégration du travail. Ces personnes ont touché 5 millions de dollars de revenus, versé 1,3 million de dollars d’impôts et fait épargner au gouvernement un montant estimatif de 700 000 $ en frais d’aide sociale. Le résultat net a été une hausse de 2 millions de dollars de la richesse collective.312

Pour sa part, la Global Business and Economic Roundtable on Addiction and Mental Health croit que les employeurs doivent offrir un environnement qui favorise la promotion d’une bonne santé mentale, la sensibilisation à la maladie mentale et à la toxicomanie, le dépistage précoce de la maladie mentale et de la toxicomanie, et l’intégration des employés souffrant d’un trouble mental ainsi que les mesures d’adaptation connexes. À cet égard, la table ronde a publié un plan d’action en 12 étapes pour lutter contre la maladie mentale et la toxicomanie, résumé au tableau 6.3.

310 Association des psychiatres du Canada, op. cit.

311 Mental Health Works (2003), op. cit.

312 Gaston Harnois et Phyllis Gabriel (2000), op. cit., p. 47.

137 Aperçu des politiques et programmes TABLEAU 6.3

PLAN D’ACTION EN 12 ÉTAPES POUR LUTTER CONTRE LA MALADIE

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