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La révision du montant des clauses pénales, réponse aux excès d’antan

Dans le document L'immixtion du juge dans les contrats (Page 40-42)

La clause pénale est évoquée par différents articles du Code civil. Notamment dans l’article 1226 qui en donne une définition « c’est la stipulation par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution. »

Toutefois, cette définition est imparfaite, la clause pénale ne sanctionne pas que le défaut d’inexécution, mais aussi le retard dans l’exécution. Ainsi la clause pénale peut avoir un caractère compensatoire ou moratoire.

Ainsi grâce à ces clauses, les dommages et intérêts sont forfaitaires, les parties se mettent d’accord sur le montant dès la conclusion du contrat. Ce caractère confère à la clause pénale un caractère comminatoire. Pour certains auteurs, cette clause est la manifestation qu’il existe dans le droit français des dommages et intérêts punitifs.

Des excès dans la fixation du montant des clauses pénales ont fini par provoquer une crise de cette dernière, poussant le législateur à intervenir.

En cas de clause limitative de responsabilité, le créancier ne peut obtenir réparation qu’à hauteur du préjudice réellement subi. Alors, que le caractère forfaitaire de la clause pénale permet au créancier d’obtenir le montant prévu à la conclusion du contrat, peu importe l’importance du dommage. La clause pénale s’impose, quoiqu’il se produise, aux parties, au contrat, et au juge.

Cette restriction au pouvoir modérateur du juge ne se retrouvait pas dans l’Ancien droit. Les tribunaux pouvaient réduire une clause pénale qu’ils jugeaient excessive. Le Code civil de 1804, dans son article 1152, en a décidé autrement.

Toutefois, une porte semblait être laissée ouverte pour permettre un contrôle du juge. L’article 1231 du Code civil accordait au juge le pouvoir de modifier le montant « lorsque l’obligation principale a été exécutée en partie. » Comme le précise, Monsieur Terré52, « seulement cela n’a pas empêché les contractants de stipuler l’indivisibilité des obligations

et par la même d’écarter, à l’avance, l’application de l’article 1231, auquel la jurisprudence n’avait pas reconnu un caractère impératif53. »

La réforme attendue arriva le 9 Juillet 1975. L’alinéa 2 de l’article 1152 dispose que « Néanmoins, le juge peut même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire est réputée non écrite. » L’article 1231 ajoute « Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la peine convenue peut, même d’office être diminuée par le juge à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’article 1152. » Ce dernier pouvoir réservé, au juge connait une limite. Le magistrat ne pourra appliquer cet article lorsque les parties ont elles-mêmes prévu une diminution de la peine à proportion de l’intérêt que l’exécution de l’engagement aura procuré au créancier54.

Cette révision, dans l’esprit du texte, a été prévue comme devant rester exceptionnelle. En effet, vu que c’est une entorse au principe obligatoire, cela n’est possible que si la peine est manifestement excessive ou dérisoire et que la clause peut être qualifiée de clause pénale.

La révision, étant exceptionnelle, les juges se doivent de motiver cette révision, selon une jurisprudence constante55. L’absence de révision étant, quant à elle, le principe, le juge qui refuse de réviser la clause n’a pas à s’en expliquer.

Trois hypothèses de révision sont possibles, à la baisse, à la hausse, ou dans le cas où l’inexécution n’a été que partielle.

En cas de révision à la baisse, le forfait était manifestement excessif. La révision est demandée par le débiteur, l’auteur de l’inexécution. Jamais la Cour de cassation n’a interdit de faire cette demande à celui qui a commis une faute lourde ou dolosive. Cependant, il semblerait que certains juges du fond refusent de réviser le montant quand l’inexécution est volontaire.

Le problème, en pratique, correspond à la détermination de l’excès. Il faudrait comparer le forfait et le préjudice réellement subi. Dans ce cas, la révision risquerait d’intervenir dès la présence d’un décalage, et cela supprimerait l’utilité de la clause pénale. Pourtant la Cour de cassation en 1986 56a admis que les juges du fond aient pu réduire la clause au strict montant du préjudice. D’autres ont admis que le paiement de la clause soit rejeté si l’inexécution ne pose aucun préjudice au créancier.57 La Cour ne semble pas

52

Terré F., Simler P., Lequette Y., Droit civil : Les obligations, 10 éd., Précis Dalloz.

53

Cass. Civ, 4 Juin 1860 54

Cass. Com, 21 Juillet 1980, n° 79-10597, Bull.Com, n°309 55 Cass. Ch. Mixte, 20 janv. 1978, n° 76-11611, Bull.Mixte, n°1, p.1

56

Cass. Com, 8 juillet 1986, n° 84-15655, Bull. Com., IV, n°147 57

favorable à l’idée de peine privée, et à tendance, à ramener la clause pénale dans le giron de la responsabilité civile.

La révision peut aussi intervenir lorsque la peine est manifestement dérisoire.58 C’est un cas où la clause pénale s’apparente à une clause limitative de responsabilité. Son efficacité peut être remise en question. Outre le jeu de 1152 du code civil, la jurisprudence admet l’assimilation des deux clauses pour admettre que cette clause pénale dérisoire soit écartée en cas de faute lourde ou dolosive.

En ce qui concerne l’inexécution partielle, l’article 1231 du code civil s’applique directement, «lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la peine convenue peut, même d’office, être diminuée par le juge à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier.»

Sur le principe, cette possibilité de révision accordée par la loi au juge a été bien accueillie par les auteurs. Les excès dans la fixation du prix devaient être évités, et l’intervention du législateur semblait la seule solution pour donner une légitimité à cette atteinte directe à la force obligatoire du contrat. Surtout que, en pratique, l’intangibilité du

contrat reste le principe, et la révision l’exception.

Pourtant, les juges ont semblé profiter de cette occasion pour amener encore plus d’équité dans les contrats. Ainsi, en jouant sur la qualification de clause pénale, ils ont pu réviser plusieurs types de clauses qui, au premier regard, sont loin d’avoir un caractère comminatoire. Les auteurs, sur ce point, critiquent fortement cette extension du domaine de la loi.

Les juges n’ont pas toujours pu se reposer sur une loi pour réviser le montant d’une clause. Il en est, par exemple, ainsi avec l’indemnité d’immobilisation. Faute de rentrer dans le champ de la clause pénale, les magistrats ont du se tourner vers d’autres techniques pour ajuster son montant, notamment, en se référant à la volonté des parties.

Paragraphe II. La révision de l’indemnité d’immobilisation comme

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