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Contrairement à la plupart des résultats publiés [92], les films obtenus dans les conditions Pt1, soit à une température de 300°C, ne présentent pas d’orientation préférentielle ainsi que le montre de diagramme de diffraction RX de la figure 29. Les pics de faible intensité visibles ainsi que les

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épaulements de certains pics sont dus au signal du substrat. Ces films présentent un état de surface lisse [90]. Leur rugosité, mesurée par AFM, n’est que de Ra = 10,5 nm, sur un substrat d’une rugosité initiale de Ra = 4,3 nm. La figure 30 montre la surface d’un film reconstruite à partir d’une mesure AFM. 2 theta 20 40 60 80 100 intensité 0 100 200 300 400 500

Figure 29. Diagramme de diffraction RX d’un dépôt de platine sur substrat Ti6242.

Figure 30. Reconstruction par AFM de la surface d’un film de platine.

La mesure du taux de contamination en carbone par microsonde de Castaing indique une concentration massique inférieure à la limite de détection de l’appareil, soit 1% environ. Cette grande pureté des films de platine déposés par MOCVD de Me3(MeCp)Pt en atmosphère réductrice est

attestée par plusieurs publications [88, 93-96]. L’épaisseur de platine déposée en 120 minutes est

JCPDS N° 40802 (111)

(200)

(220) (311)

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d’environ 300 nm, soit une vitesse de croissance de 2,5 nm.min-1. La figure 31 montre la photo MET

d’une section transverse d’un dépôt de platine surmonté d’aluminium.

Figure 31. Vue MET d’une coupe transverse d’un empilement Al/Pt.

Le diagramme de diffraction de l’échantillon Pt2 (Fig. 32) montre une orientation préférentielle selon (111), conformément au comportement déjà observé dans d’autres publications [92] et l’épaisseur déterminée par microsonde électronique est de 14 nm. L’échantillon Pt3, déposé à 200°C, montre lui aussi une orientation préférentielle selon (111), et s’est écaillé en fin de manipulation. L’épaisseur mesurée à l’aide de la microsonde électronique et confirmée par photo MEB d’écailles est de 380 nm.

Figure 32. Diagramme DRX de l’échantillon Pt 2.

Lors du dépôt Pt4, réalisé à 200°C, après 120 min de dépôt, le film de platine s’est largement écaillé. L’échantillon a montré une orientation préférentielle selon (111) lui aussi. Des photos MEB

500 nm

Al

Pt

500 nm

Al

Pt

2 theta 20 40 60 80 100 120 0 100 200 300 400 (111) (100) (220) (311) (222) (400) (331)

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corrélées par des mesures d’épaisseur à la microsonde de Castaing ont indiqué une épaisseur de 2 µm environ, soit une vitesse de croissance de 19 nm.min-1. En se basant sur la valeur maximale possible

du débit de précurseur entraîné, c’est à dire sur les données du tableau I, le rendement minimal calculé pour ce dépôt est d’environ 54%. Cette valeur très élevée par rapport aux rendements classiques de la MOCVD -ordinairement de l’ordre de 10%- peut s’expliquer par l’effet autocatalytique constaté à de nombreuses reprises pour ces dépôts [89, 97 ].

En effet, le mécanisme proposé par Xue et col. pour la décomposition de Me3(MeCp)Pt suppose

que l’adsorption du précurseur s’effectue en premier lieu par le ligand méthylpentahapto- cyclopentadienyle Me(η5Cp), parallèlement à la surface [98]. Dans un premier temps, l’interaction

avec la surface est probablement due à l’attaque électrophile des groupements -OH de surface, menant à une hydrogénation du cycle, libérant une molécule de méthylcyclopentane [89 , 96]. L’atome de platine se lie alors à la surface, et les trois ligands méthyle s’hydrogènent à leur tour. Cette dernière réaction d’hydrogénation semble être une étape limitante du mécanisme de décomposition [96]. Tant que les atomes de platine déposés en surface ne forment pas de clusters de taille suffisante pour qu’apparaissent les propriétés catalytiques du platine, on observe une période d’induction [96]. Une fois cette période passée, la phase autocatalytique s’initie. Cet effet autocatalytique peut s’expliquer par deux phénomènes. D’abord l’adsorption initiale du précurseur à la surface du substrat. Au lieu de subir une attaque électrophile par des radicaux –OH, le cycle se lie à un atome de platine de la surface de la même façon qu’il est lié à l’atome de platine de la molécule [98]. Cette double coordination peut faciliter le transfert du reste de la molécule à la surface, via des états intermédiaires de moindre hapticité. Une fois le triméthylplatine greffé à la surface, l’hydrogénation des groupements méthyle s’effectue d’autant plus facilement que le platine est un catalyseur Fischer-Tropsch. Les métaux de type Fischer-Tropsch catalysent l’hydrogénolyse de CO en hydrocarbures et eau, et par extension la méthanation des composés carbonés, grâce à la chimisorption dissociative de l’hydrogène en surface [99]. Des décompositions du cycle plus avancées peuvent même être envisagées, par analogie avec les dépôts de Nickel à partir de NiCp2 en présence de H2. En effet, Brissoneau a mis en évidence ces

décompositions par des suivis spectrométriques in situ des molécules issues de la décomposition du ligand (η5Cp) lors du dépôt de Ni par NiCp

2 [100]. Le nickel est, comme le platine, un excellent

catalyseur. On peut donc supposer que des réactions similaires peuvent avoir lieu sur le platine. Par ailleurs des mesures de désorption effectuées sur des surface de platine (111) ont montré que à partir de 207°C, (η5Cp) se décompose en hydrocarbures du type (CH)

n par rupture du cycle et

déshydrogénation [98]. Ces mécanismes de décomposition et d’hydrogénation rapide des composés carbonés expliquent sans doute le faible taux de pollution en carbone des films obtenus.

La faible vitesse de croissance à 300°C et l’absence de régime autocatalytique ont été expliqués par une déplétion de la phase gazeuse dans des expériences employant des fours à parois chaudes, ou par un appauvrissement de la couche limite en précurseur dû au régime d’écoulement [92]. Il ne saurait être question de déplétion ici, et les simulations numériques ne laissent pas entrevoir de

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différence majeure d’écoulement entre 200°C et 300°C. On peut envisager qu’à 300°C, l’énergie d’activation de désorption du ligand Me(η5Cp) devienne inférieure à l’énergie d’activation de la

réaction de décomposition du précurseur. En conséquence, le taux de collage diminue, diminuant l’apport de précurseur à la surface, ce qui limite radicalement la vitesse de croissance ([100], p. 85). La faible épaisseur obtenue en 30 minutes tend à mettre en évidence une période d’induction assez longue, en accord avec les expériences menées par ailleurs [89].

L’étude des dépôts de platine a montré la grande pureté et la morphologie dense et homogène des couches obtenues. Divers phénomènes de variation de la texturation et de la vitesse de croissance mis en lumière ont montré une chimie de surface sensible aux variations de température. L’existence d’une période d’induction montre aussi l’influence de la nature du substrat. Mais la principale information fournie par ces observations reste le mode de croissance autocatalytique, avec pour conséquence principale de subordonner la vitesse de croissance du film au débit de précurseur dans le réacteur. Vu les faibles quantités de précurseur disponibles (produit livré par lot de 2g), l’influence du niveau du composé dans l’évaporateur s’avère fondamentale, et le suivi de la consommation nécessaire pour garantir des épaisseurs reproductibles lors des dépôts à 200°C. En effet, la relation (8), utilisée ici pour le calcul de la quantité de précurseur entraînée, repose sur l’hypothèse que le gaz vecteur passant à travers le bulleur se trouve complètement saturé en précurseur à sa sortie. En réalité, la saturation n’est pas complète, et dépend de plusieurs paramètres, tels que le temps de résidence du gaz au sein du précurseur liquide, de la géométrie du bulleur, de la température du gaz, de la nature du précurseur (tension de surface, facilité des échanges gaz-liquide). Tous ces paramètres donnent lieu à un débit de précurseur inférieur à celui estimé et surtout expliquent la dépendance de ce débit vis-à-vis de la quantité de précurseur contenue dans le bulleur.

Les couches de platines décrites peuvent maintenant être employées en tant que sous-couche pour les dépôts d’aluminium. Leur morphologie s’avère continue, uniforme sur le substrat, et leur épaisseur est maîtrisée. Nous allons maintenant nous intéresser aux dépôts d’aluminium, d’abord seul, afin d‘appréhender le comportement de ce métal que l’on sait a priori assez difficile à obtenir en couches continues [105]. Cette partie de l’étude comprendra une première phase nécessaire à obtenir une uniformité acceptable du dépôt sur le substrat, avant de passer à la réalisation des revêtements Al- Pt eux-même. D’abord sous forme de dépôts séquentiels, puis de co-dépôts.

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2) Dépôts d’Aluminium et Platine, précurseur : TIBA

Le Triisobutylaluminium (Figure 33) fait partie des précurseurs les plus employés pour le dépôt d’aluminium dans l’industrie microélectronique (par exemple [101], [102]). Il s’agit d’un des composés les plus stables de la famille des alkylaluminium (grâce à l’effet « écran » de ses ligands ramifiés), ainsi que le plus utilisé.

Figure 33. Molécule de TIBA [103].

Il se présente sous la forme d’un liquide incolore, pyrophorique, explosif au contact de l’eau, et toxique (CAS n° [100-99-2]). Sa manipulation s’effectue en boîte à gants. Sa pression de vapeur saturante est donnée par la relation (9) [103]:

)

92

,

83

(

1710,3

121

,

7

)

log(

=

bulleur vap

T

P

(9)

Où Tbulleur est la température du précurseur (K) à l’intérieur du bulleur, et Pvapsa pression de vapeur

saturante (torr). Ainsi sa pression de vapeur saturante à température ambiante est voisine de 0,1 torr. Il ne présente pas de forme polymérisée en phase vapeur. Le TIBA est utilisé depuis les années 50 en tant que catalyseur de polymérisation (travaux de Ziegler et Natta [104]). À la même époque, la création de films d’aluminium pur (>99% at) produits par sa pyrolyse a été mise en évidence, mais ce n’est que dans les années 80 que ceux-ci se sont imposés dans l’industrie grâce à leur bonne qualité. Cependant, la morphologie des films obtenue est très rugueuse et désordonnée.

Ce procédé de dépôt d’aluminium a fait l’objet de nombreuses études en vue de son amélioration. Enfin, le TIBA s’avère être un des rares précurseurs d’aluminium à être commercialisé en pureté technique à 95%, contrairement aux autres composés organométalliques d’aluminium disponibles seulement pour des application en microélectronique et donc à des puretés supérieures à 99 %. L’application à des revêtements protecteurs ne justifie pas le surcoût important induit par la purification à 99%. A titre d’exemple, chez un même fournisseur de composés organométalliques, le triéthylaluminium (CAS N°[97-93-8]) à 93% est vendu 110 € les 100 g, alors que le même composé à 99,99% + est vendu 3623 € les 100 g, soit 33 fois plus cher. Le TIBA n’est vendu qu’à 95% chez ce même fournisseur au prix de 140 € les 100 g, ce qui en fait un précurseur à la pureté et au prix acceptables.

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L’objectif de notre étude est la formation de couches développant des barrières de protection à l’oxydation en conditions d’oxydation, pour cela une microstructure continue est primordiale. Aussi l’essentiel de l’étude portera sur la morphologie des couches déposées, les caractérisations spectroscopiques n’intervenant que pour appuyer les résultats obtenus. Les épaisseurs visées pour cette application sont comprises entre 5 et 10 µm.