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Dans les conditions de température atteintes en service, les phénomènes de diffusion dans les solides ne peuvent plus être négligés et deviennent même un facteur prépondérant de l’évolution des systèmes non homogènes. L’importance de ces phénomènes est encore exacerbée par la présence de films fins, impliquant l’existence de forts gradients de concentration. Avant de nous intéresser à la diffusion des espèces « parasites » (essentiellement le soufre), voyons le comportement du système alliage/films en soi.

Les revêtements d’aluminiure sur superalliage se dégradent au cours du temps, et leur dégradation en atmosphère oxydante s’effectue la plupart du temps selon un scénario identique, illustré par la figure 13 [54]. La consommation d’aluminium par la croissance d’alumine en surface provoque l’apparition dans la couche de structureβ-NiAl d’une phase une phaseγ’-NiAl. On peut voir cette phase apparaître en blanc sur la figure 13-c. Cependant, et c’est là un des effets recherchés du platine [47], celle-ci ne forme pas de couche continue et croît très lentement. Par ailleurs, un forte diffusion de l’aluminium vers l’alliage du substrat apparaît, créant la structure bicouches [β-NiAl + zone d’interdiffusion] visible sur la figure 13-b. La diffusion d’éléments du substrat vers le revêtement à travers la zone d’interdiffusion est aussi un phénomène important dans la dégradation de ces système, car certaine de ces éléments, comme le soufre, peuvent fragiliser l’interface revêtement alumine.

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Fig. 13. Evolution du système (Ni,Pt) Al : a) système intact ; b) après 100 h ; c) après 500 h d’oxydation à 1050°C sous air [47].

Il est donc évident qu’à l’issue de ces 200h, le revêtement n’est plus apte à reformer une couche d’alumine protectrice. C’est pourquoi il est primordial que cette couche adhère de façon persistante au matériau. Comme on le verra plus loin, le platine contribue beaucoup à la préservation de l’intégrité de la couche d’alumine superficielle. Examinons plus en détail les facteurs influant sur la tenue de la couche d’alumine à la surface des revêtements, cette persistance étant aussi critique pour l’efficacité du revêtement que ne le sont sa croissance et sa continuité.

La diffusion de soufre en provenance du substrat ou de l’une des composantes du revêtement (Pt plaqué par voie électrolytique, par exemple) est une des principales causes du décollement des couches d’Al2O3. Il a été montré [66] que cette migration est thermodynamiquement possible avec ou

sans cavités à l’interface métal/oxyde, et y est également néfaste.

La diffusion du tantale en provenance du substrat est aussi très défavorable à la cohésion métal-alumine [66], et neutralise de surcroît les effets favorables d’autres éléments, que l’on verra plus loin.

Il est également envisageable que la croissance préférentielle de l’alumine aux joints de grains induise l’apparition de contraintes non planes, favorisant l’écaillage de la couche ([66], [47]).

Les systèmes de revêtement à gradient de concentration expérimentés se sont montrés assez peu efficaces. En effet, après quelques heures d’exposition à haute température, ils évoluent en

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systèmes multicouches, évolution qui s’accompagne d’apparition de contraintes internes, menant à la création de fissures, endommageant la couche d’alumine et sensibilisant le système à la fatigue [67].

De nombreux éléments ont, contrairement au soufre, une nette influence positive sur l’adhérence du film d’alumine au matériau, et sont connus comme tels depuis longtemps. On peut notamment citer : Y, Hf, Nb, Ce, La, etc. [57, 68, 69]. Ces éléments sont nommés « éléments réactifs » (RE) dans les diverses publications. Nous nous conformerons à cette dénomination pour simplifier la suite du chapitre. Leurs effets, quoi que souvent similaires, semblent relever d’autres mécanismes que ceux du platine. Peut-être est-ce une conséquence de la disparité des concentrations (de l’ordre de 10 à 25% mass. en moyenne de Pt, contre quelques ppm de RE). Ces effets se manifestent à très basse concentration en RE que ceux-ci soient en solution solide ou sous forme de petites particules d’oxyde dispersées dans la matrice [70, 71]). Par exemple : des couches d’alumine plus compactes et adhérentes se forment sur les alliages contenant du niobium.

On doit cependant préciser que ces éléments réactifs présentent pour la plupart un optimum de concentration au-delà duquel leur effet s’estompe et peut même s’inverser. A titre d’exemple, l’yttrium améliore la tenue des couches d’alumine à des concentrations atomiques de 0,1%. Mais en en grande quantité celui-ci s’oxyde en Y2O3, s’intègre à Al2O3 et sert de chemin préférentiel à la diffusion

de l’oxygène. Cette diffusion favorise la croissance locale de l’oxyde, créant comme on l’a vu plus haut des contraintes non planes menant au décollement de la couche d’oxyde. L’excès d’yttrium nuit donc à la stabilité du film d’Al2O3, son effet positif est à peu près limité à sa plage de solubilité dans le

revêtement. Il en va de même pour l’hafnium [72].

On notera que Y a toujours un effet bénéfique sur le système, hors surdoses, alors que certains RE tels que Hf n’induisent pas toujours l’amélioration attendue [70]. Divers mécanismes d’action des RE ont été proposés, souvent assez proches de ceux envisagés pour Pt, mais il n’est pas nécessaire de les détailler ici. La neutralisation du soufre semble être un facteur primordial. Le soufre migrant des couches inférieures vers l’interface revêtement-alumine réagit avec les RE pour former des espèces stables inoffensives pour les couches d’oxyde. Le taux maximal de sulfures tolérable est d’ailleurs fonction de la nature et des concentrations de RE intégrés à l’alliage [68].

Quant à l’effet des RE sur la vitesse de croissance de l’oxyde, il est nul ou accélère légèrement cette croissance, selon les compositions du substrat et du revêtement[68]. Quoi qu’il en soit, l’aspect positif des RE contrebalance largement cet éventuel inconvénient.

Enfin, d’autres paramètres peuvent faire varier l’adhérence de l’oxyde au système ; la liste ne pouvant être exhaustive, nous nous limiterons aux deux suivant :

- La présence d’une pression partielle de vapeur d’eau non négligeable accélère significativement l’écaillage de l’alumine ;

- A haute température, l’interface entre TiAl et Al2O3 présente des phénomènes de diffusion

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exergue la nécessité d’un revêtement, ne serait-ce que pour rétablir la stabilité chimique du système dans les conditions d’emploi.

Les revêtements Pt-Al ont été développés afin de parer à cette dégradation des couches d’oxydes formées. L’effet du platine au sein de ces couches a fait l’objet de nombreuses études à ce jour. Les mécanismes envisagés pour expliquer cette amélioration de l’adhésion de l’alumine sont nombreux.