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Les très rares études sur la protection des alliages de titane par application de revêtements aluminoformeurs ont cependant montré le fort potentiel de ces systèmes. Nous allons nous intéresser aux comportements de l’alliage IMI 834 revêtu d’aluminium et d’aluminiure de platine [45].

L’alliage IMI 834 est un alliage élaboré pour résister au fluage. Sa composition chimique est Ti-6Al-4Sn-4Zr-1Nb-0,5Mo-0,4Si [1]. Un revêtement aluminium-platine a été élaboré sur des substrats d’IMI834 de la façon suivante : une sous-couche de platine de 5 µm est appliquée par plaquage électrolytique, puis recuite à 700°C afin d’assurer une bonne adhérence avec l’alliage. Puis une couche d’aluminium est appliquée par pack cémentation d’aluminium durant 2 h à 700°C. Enfin, un recuit de diffusion de 4 h sous argon à 700°C est appliqué pour créer le revêtement Pt-Al proprement dit. Le revêtement d’aluminium seul est obtenu en n’effectuant pas le plaquage de platine et le recuit qui suit.

Des essais d’oxydation cyclique ont été effectués sur des substrats IMI 834 recouverts des revêtements décrits, et nus. Les essais d’oxydation s’effectuent à 800°C sous air, durant 400 h. En début d’oxydation, les échantillons sont chauffés à la température de 800°C durant trois heures, puis refroidis à température ambiante en 1 h, pesés et remis au four. Après 4 cycles de ce type, la prise de masse a été relevée toutes les 10 h, selon le même protocole. La figure 15 présente les courbes de prise de masse obtenues. On constate que le revêtement d’aluminium diminue notablement la prise de masse par rapport à l’alliage nu. Cependant la prise de masse de l’alliage revêtu du revêtement Pt-Al présente des résultats encore bien meilleurs.

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Fig. 15. Courbe de prise de masse de trois échantillons : alliage IMI834 nu, recouvert d’aluminium, recouvert d’aluminiure de platine [45].

Les examens en surface et en coupe des échantillons mettent en évidence la formation d’une couche dense et continue d’alumine à la surface du revêtement Pt-Al. La comparaison avec le revêtement d’aluminium seul montre que l’aluminiure de platine favorise la morphologie continue de cette couche. La couche résiduelle est constituée d’aluminium, avec quelques traces de platine dans sa partie supérieure. Alors qu’on constate la formation d’une couche de diffusion d’oxygène dans le substrat recouvert d’aluminium, la présence d’oxygène dissout dans le titane sous le revêtement Pt-Al n’a pas pu être prouvée. Cela démontre le caractère protecteur de la couche d’alumine formée vis à vis de la diffusion d’oxygène.

Par ailleurs, on doit noter que les coefficients de dilatation thermique du substrat et du revêtement sont proches, ce qui permet d’éviter les problèmes de déformation et d’apparition de contraintes en service.

Au vu de tout ce qui précède, on peut conclure que le platine est essentiel à l’élaboration de revêtements protecteurs aluminoformeurs. Il permet de développer des couches d’alumines plus efficaces en termes de protection contre l’oxydation, ce qui se traduit par une prise de masse nettement plus lente. On peut ajouter que sa présence confère au revêtement une température de fusion suffisante pour supporter des conditions de service souvent difficiles [45].

Les alliages de titane et leur comportement à l’oxydation, les revêtements aluminoformeurs en général et le systèmes Pt-Al en particulier ont été largement étudiés à ce jour. Cependant, les études relatant des essais de revêtements protecteurs sur alliages de titane sont rares, bien que leur nombre

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s’accroisse régulièrement, en raison de la forte demande industrielle dans ce secteur. Afin de poser les bases de nouvelles solutions pour la protection des alliages de titane et d’instaurer un savoir-faire français en la matière, le projet APROSUTIS a été créé, regroupant les principaux industriels intéressés par l’amélioration des propriétés de surface de ces alliages et des laboratoires académiques présentant des idées innovantes dans les domaines de protection des surfaces.

5)

Conclusion

L’alliage Ti6242, employé comme substrat dans cette étude, fait partie de la famille des alliages de titane quasi-α, employés pour leur résistance au fluage à des températures considérées comme étant élevées pour ces matériaux. L’alliage Ti48Al-2Nb-2Cr a été également employé comme substrat de façon sporadique. Ce matériau fait partie de la famille des intermétalliques TiAl, employés pour leur tenue à l’oxydation à haute température.

Ces deux matériaux, à des températures limites de fonctionnement différentes, subissent des problèmes d’oxydation importants dus à des pertes de matière par écaillage des oxydes et/ou à une fragilisation par dissolution d’oxygène. Il en résulte une dégradation des propriétés des pièces qu’ils composent. Les mécanismes qui régissent ces phénomènes ne sont pas toujours faciles à mettre en évidence et à contrôler. Par conséquent, il n’est pas aisé de mettre en uvre des solutions techniques qui éliminent ce comportement problématique. À titre d’exemple, la sensibilité des propriétés mécaniques de ces alliages aux variations de composition ne permet pas l’élaboration d’alliages plus aptes à subir de hautes températures, et oriente plutôt la recherche de solutions vers l’application de revêtements protecteurs.

Plusieurs types de revêtements ont été envisagés à ce jour pour protéger les alliages de titane et les intermétalliques contre l’oxydation dans les gammes de température où ceux-ci s’avèrent vulnérables. On peut citer les céramiques, telles SiO2 ou Al2O3, les couches issues de l’implantation

ionique ou les revêtements métalliques développant la couche d’oxyde protectrice qui fait défaut aux alliages revêtus. Parmi les plus connus de ces systèmes, on trouve les couches de type MCrAlY ou Ti- Cr-Al. Dans la famille des revêtements métalliques, les couches aluminium-platine, dont les performances sont reconnues dans l’application aux superalliages à base nickel, sont très peu représentées.

Certains systèmes Al-Pt sont déjà utilisés dans l’industrie et largement éprouvés pour leur résistance à l’oxydation cyclique à des températures voisines de 1000°C. L’emploi d’aluminium permet la formation d’une couche d’alumine continue limitant la diffusion d’oxygène dans l’alliage. Le platine, présent en quantité moindre (de 10 à 25% massiques environ), permet de limiter la dégradation de la couche d’alumine formée. La relative simplicité, l’efficacité et le caractère auto- cicatrisant de ces systèmes constituent des atouts majeurs. Cependant, si l’élaboration et le comportement de ces systèmes ont fait l’objet de nombreuses descriptions, les mécanismes

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responsables de l’amélioration due au platine ne sont pas définis nettement. Un point majeur semble le piégeage du soufre issu des couches inférieures par formation de PtS durant sa diffusion vers la surface. Les rares études consacrées à l’application de revêtements aluminium-platine aux alliages de titane en tant que protection contre l’oxydation à haute température sont prometteuses.

Les systèmes de revêtements protecteurs aluminium-platine constituent donc une solution pour la protection des alliages de titane contre l’oxydation à des températures relativement élevées. Ce système a fait l’objet de très peu d’études à ce jour en raison de l’incompatibilité des techniques d’élaboration des couches utilisées avec les alliages de titane. Notamment les températures nécessaires aux procédés de pack cémentation pour le dépôt d’aluminium endommageraient la microstructure des alliages de type Ti6242. L’élaboration de ces couches par MOCVD permettrait d’éviter de tels inconvénients. De plus, cette technique permet l’application de revêtements sur des surfaces complexes ou à l’intérieur de porosités. Ce qui constitue un de ses avantages par rapport aux procédés PVD et pack cémentation. C’est cette solution qui sera explorée dans la présente étude. Les aspects mécaniques (coefficients d’expansion thermiques, comportement du système Ti6242+Al-Pt) et économiques n’ont pas été abordés ici. Ceux-ci prendraient place à un stade plus avancé de l’étude de la faisabilité de ces systèmes.

Des moyens d’élaboration adaptés, notamment un réacteur de dépôt MOCVD spécifique, un protocole opératoire particulier et de nombreux moyens de caractérisation seront nécessaires pour la mener à bien. Leur présentation fait l’objet du chapitre suivant.

Chapitre II