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Les essais d’oxydation isotherme constituent un moyen d’investigation relativement simple pour le criblage des échantillons destinés à la protection contre l’oxydation. Néanmoins, comparés aux résultats d’oxydation isotherme, les essais d’oxydation cyclique présentent l’avantage de soumettre l’échantillon à des conditions proches de celles subies en service. Il s’agit d’essais nécessitant, afin d’être représentatifs, des dispositifs expérimentaux dédiés. Il n’existe pas actuellement dans le commerce de dispositif de cyclage thermique avec mesure de prise de masse qui reproduise les rampes de température correspondant aux conditions extrêmes du fonctionnement des parties de turbine. Un tel banc d’essais en cyclage rapide a été construit au CIRIMAT durant l’année 2004 et achevé au printemps 2005. Si cette mise à disposition tardive n’a pas permis d’explorer de manière systématique les performances de nos matériaux dans les conditions d’oxydation cyclique, eux échantillons revêtus de dépôts d’aluminium et de platine co-dépôsés ont pu être testés. De plus, les caractérisations n’ont été que partielles. Notamment la détermination des phases après oxydation n’a pas été possible en raison d’une panne du diffractomètre utilisé. Malgré tout, nous présentons dans cette partie les résultats obtenus. Il est néanmoins à rappeler que ces résultats sont partiels et très incomplets. S’ils permettent d’ébaucher des tendances, ils sont largement insuffisants pour tirer des conclusions définitives.

Figure 98. Courbes de prise de masse de échantillons Ti6242, Cycl1 et Cycl2 en oxydation cyclique. Temps (h) 0 5 10 15 20 25 0,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 Ti6242 Cycl1 Cycl2 Temps (h) 0 5 10 15 20 25 0,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 Ti6242 Cycl1 Cycl2 Prise de masse (m g.cm -2)

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Deux essais d’oxydation cyclique ont été réalisés sur deux demi substrats Ti6242 recouverts d’un revêtement d’aluminium et de platine co-déposés dans les conditions AlPt4 décrites au chapitre III. Un échantillon, noté Cycl1, a été oxydé sur la thermobalance TM05, conçue et réalisée au CIRIMAT [81, 82], permettant une vitesse de montée (et de descente) en température de 50°C par seconde. Les cycles se composent de paliers de 1h à 600°C. Le second, noté Cycl2, a été oxydé sur une thermobalance TAG 24 déjà employée pour les oxydations isothermes, avec rampe de température bien plus lente de 1°C par seconde.

La figure 98 regroupe les résultats de prise de masse par unité de surface en fonction du temps pour les échantillons Cycl1, Cycl2. Les résultats de l’oxydation du Ti6242 nu dans les même conditions que Cycl1 y sont également reportés. Les cycles de prise de masse sont matérialisés par un palier de prise de masse délimité par deux décrochements dus à la variation de la poussée d’Archimède avec la température. Un traitement informatique des données obtenues pour Cycl2 a permis d’éliminer ces décrochements, et de ne conserver que les paliers à 600°C. On observe une prise de masse parabolique de Cycl1 de l’ordre de 0,35 mg.cm-2 après 30 h de cyclage sous air. Par

comparaison, l’échantillon de Ti6242 nu suit un comportement non parabolique et culmine à une valeur proche de 0,64 mg.cm-2 en fin d’expérience. L’échantillon Cycl2 présente une prise de masse

bien moindre, d’environ 0,33 mg.cm-2 après 23h de cyclage sous air synthétique (80% N

2, 20% O2).

La prise de masse durant les 16 premières heures ne semble pas parabolique. Durant les dernières heures de l’essai, une prise de masse important a été observée. Pour des raisons de disponibilité de matériel, seul l’échantillon Cycl1 a été exploité.

Figure 99. a)Surface de l’échantillon Cycl1 ; b)Surface de l’échantillon Cycl2.

Les figures 99-a et 99-b présentent des micrographies MEB de la surface des échantillons Cycl1 et Cycl2, respectivement. Dans les deux clichés, nous observons le développement de cristallites submicroniques correspondant aux oxydes formés en surface. Quoique comparables, les deux morphologies présentent une différence dans la forme des cristallites : aciculaire pour Cycl1 et plutôt vermiculaire pour Cycl2.

2 µm 2 µm

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Figure 100. Vue MEB en mode rétrodiffusé de l’échantillon Cycl1.

La figure 100 présente une micrographie MEB en mode rétrodiffusé de la coupe transverse de l’échantillon Cycl1. L’épaisseur de la couche, environ 1,5 µm, est comparable aux 2 µm observés sur le revêtement AlPt4. La zone sombre séparant le substrat du revêtement est due à la rupture de l’interface revêtement-substrat lors de la préparation de la coupe transverse. Le fait le plus remarquable de cette micrographie est la présence de nombreux grains à forte concentration de platine dispersés dans le revêtement, et non pas à l’interface.

Figure 101. Détail du revêtement de l’échantillon Cycl1.

La figure 101 présente un détail de l’échantillon Cycl1 observé au MET où l’on peut voir le détail des grains de forte concentration en platine. Leur dimension est de l’ordre de quelques dizaines de nanomètres.

100 nm 100 nm

1 µm 1 µm

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Figure 102. Coupe transverse de Cycl1 observée au MET, avec indication des pointés EELS.

La figure 102 présente une micrographie MET de Cycl1. On observe là aussi les grains à forte concentration de platine. Mais cette micrographie dénote surtout une structure en « feuillets » située à la base de la couche à l’interface revêtement-substrat. Des analyses EELS ont été réalisées en différents points du revêtement. Ces points sont représentés sur la figure 102 et numérotés de 1 à 5. La position de ces pointés par rapport à l’interface est reportée au tableau XXVI. Les pointés EELS sont présentés à la fin du paragraphe. Les pics de zirconium et molybdène, éléments de l’alliage Ti6242, sont visibles dans le pointé 1. Dans les pointés suivants, le zirconium est encore un peu visible mais très faible, et le molybdène n’apparaît pas. Le titane est lui aussi très présent dans le pointé 1 et sa présence diminue très vite dans les pointés suivants. Le platine n’apparaît pas dans les pointés 1, 2 et 3. Le pointé 4, effectué dans le revêtement en dehors des grains sombres, met en évidence la présence de platine en quantités modérées. Le pointé 5, effectué sur un des grains sombres du revêtement présente une forte présence de platine. La difficulté de discerner les pics du platine sur les diagrammes EELS en raison de leur forme large et peu prononcée rend sa détection difficile aux faibles concentrations et l’appréciation des variations délicate. Le pic d’aluminium du pointé 1 est très faible, plus important dans les pointés 2 et 3, et fort dans les pointés 4 et 5. Ces deux derniers présentent une forme du pic d’aluminium caractéristique de l’aluminium oxydé, indiquant la présence d’oxyde dans la partie supérieure de la couche. Parallèlement, le pic d’oxygène très faible dans les trois premiers pointés devient significatif dans les deux derniers.

Tableau XXVI. Distance à l’interface des pointés EELS effectués sur l’échantillon Cycl1.

Numéro du pointé Distance à l interface (nm)

1 65 2 180 3 350 4 463 5 620 1 µm 5 4 3 2 1 -1 1 µm 1 µm 5 4 3 2 1 -1

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La répartition du platine dans le revêtement par rapport aux observations faites sur les échantillons oxydés de façon isotherme, suggère un comportement du système très différent en termes de diffusion. Les figures 100 et 102 montrent bien qu’il n’y a pas eu de « filtrage » du platine en nodules de forte concentration le long de l’interface revêtement/alliage, mais uniquement apparition de grains dans l’épaisseur de la couche. Cela tend à prouver que la forte diffusion de l’aluminium à travers cet interface, responsable du « filtrage » durant les essais d’oxydation isotherme, n’a pas eu lieu. L’absence de couche d’interdiffusion observable au MEB confirme qu’aucune diffusion notable de ce type n’est apparue durant l’essai de cyclage.

Au contraire, l’examen des diagrammes EELS, illustré par la figure 103, montre une forte concentration en titane dans le revêtement au niveau de l’interface revêtement-alliage et peu d’aluminium, ainsi que la présence des éléments d’alliage Zr et Mo. On assisterait donc plutôt à la diffusion des éléments du substrat vers le revêtement. Cette diffusion inhabituelle est très peu observée sur les échantillons oxydés de façon isotherme. Les profils SIMS montrent une concentration de titane dans le revêtement faible (excepté pour les échantillons élaborés à partir de TIBA, ce qui n’est pas le cas ici). Ce comportement serait attribuable aux forts gradients de température subis par le système lors de cet essai. La structure en « feuillets » observée à l’interface revêtement-alliage aurait alors elle aussi pour origine ces gradients de température. L’absence d’oxygène en quantité significative dans les diagrammes EELS exclu qu’il s’agisse d’une oxydation en feuillets. La comparaison avec la figure 5 du chapitre confirme ce point. Ces gradients de température seraient responsables d’une accumulation de défauts (dislocations) à la surface de l’alliage, générant de fortes contraintes internes dans cette région. L’accumulation et le relâchement de ces contraintes influent fortement sur les flux de diffusion à travers l’interface. La succession de cycles accumultation-relâchement dans l’alliage durant l’oxydation crée les feuillets observés.

La présence d’aluminium oxydé au sein du revêtement, mise en évidence par les diagrammes EELS 4 et 5, indique que les couches d’alumine formées à la surface du revêtement ne constituent pas une barrière à la diffusion d’oxygène. Des analyses DRX et SIMS devraient permettre de détecter la présence d’oxydes de titane en surface. On pourrait alors déterminer si la diffusion d’oxygène est le fait d’une morphologie discontinue des alumines développées en surface ou de la présence d’oxydes de titane dans la couche d’oxydes.

Les courbes de prise de masse obtenues, illustrées par la figure 98, mettent en évidence une cinétique d’oxydation plus lente de l’échantillon Cycl1 par rapport au Ti6242 nu. Cependant, en l’absence d’un nombre suffisant d’échantillons pour établir une statistique et s’affranchir des erreurs expérimentales, on ne peut pas conclure précisément sur les performances protectrices des revêtements. L’échantillon Cycl2 ne semble pas présenter une cinétique beaucoup plus lente que le Ti6242 nu. Le comportement de la prise de masse ne paraît pas parabolique, ce qui peu aussi dénoter des phénomène d’oxydation complexes à étudier par la suite. Quoi qu’il en soit, il convient de remarquer que a contrario de l’alliage nu, aucun écaillage des couches oxydées n’a pu être observé, et

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ce en dépit de la formation d’oxydes. Ce comportement est bien celui attendu de la part de revêtement aluminium-platine, décrit dans les nombreuses études relatées au chapitre I. Le caractère adhérent des couches oxydées est donc un point très positif, même s’il s’accompagne de phénomènes encore mal compris au niveau de la diffusion et de l’oxydation, mais sans doute contrôlables.

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Figure 103, spectres EELS de l’échantillon Cycl1.