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D. Propriétés de liaison aux substrats de MTM1s recombinantes

Au laboratoire, nous avons analysé la capacité de la myotubularine MTM1 à lier ses substrats. En vue de cette analyse, les protéines MTM1WT, MTM1C375S, MTM1V49F et MTM1R69C ou uniquement les domaines PH-GRAM WT, V49F et R69C (acides aminés 8-112) fusionnées à leurs extrémités N-terminales à l’étiquette GST ont été produites et purifiées à partir de bactéries E.

coli Rosetta™ (BL21 pLysSRARE) transformées par les plasmides pSF10 à 13 (protéines

complètes) ou pJL3 à 5 (domaine PH-GRAM seul). Le plasmide pLysSRARE porte sept gènes codant pour des ARNt et décodant des codons rarement utilisés par E. coli mais plus communs chez les eucaryotes. Ce plasmide permet une meilleure production de protéines eucaryotes dans la bactérie. Les protéines de fusion GST ont été purifiées par chromatographie d’affinité à l’aide de bille Glutathione-sepharose et éluées à l’aide de Glutathione réduite.

DISCUSSION

Il est très intéressant de constater que la levure S. cerevisiae est capable de réguler les quantités de myotubularines humaines. L’expression hétérologue de différents mutants MTM1 révèle une régulation en rapport avec l’activité phosphatase des différentes myotubularines. Je n’ai pu observer aucune différence de stabilité entre les protéines mutantes testées. De plus, cette régulation n’implique pas les processus de dégradation ni via le protéasome ni par le biais d’une protéolyse vacuolaire. Une régulation de la transcription est peu plausible puisque les mêmes différences ont été observées en utilisant deux vecteurs différents portant les cDNA sous le contrôle de deux promoteurs distincts. Il est donc possible que cette régulation intervienne à l’étape de traduction de l’ARNm mature (après épissage). Je n’ai malheureusement pas pu mettre en évidence les mécanismes de cette régulation chez S. cerevisiae.

Par ailleurs, cette régulation n’intervient probablement pas non plus en réponse à une perception des niveaux de PtdIns3P intracellulaires puisqu’il a été montré que les souches ayant des hydrolases vacuolaires défectueuses accumulent 4 à 5 fois plus de PtdIns3P que les souches sauvages en raison d’un défaut de recyclage de PPIn (Wurmser and Emr, 1998). Or malgré cette augmentation en PtdIns3P, les mêmes différences ont été observées dans le mutant des protéases vacuolaires (Figure 43).

membranes sur lesquelles sont fixés différents phosphoinositides en gouttes séparées, d’après la technique du « dot blot ». Ces membranes, appelées PIP arrayTM, présentent les différents phosphoinositides en gamme de concentration (Figure 44). Après blocage dans du TBS-Tween 0,1%+ 3%BSA « fatty acid free », les membranes sont incubées une nuit à 4°C avec les extraits de protéines purifiées à une concentration de 1μg/mL. Puis les membranes sont lavées de la même manière qu’une membrane de Western blot avant de réaliser l’immunodétection anti-GST des protéines GST-MTM1 ou des domaines GST-PH-GRAM sauvages et mutants.

Ces analyses par PIP arrayTM ont été réalisées au laboratoire par Katy FENDER lors de son stage de deuxième année de DUT Génie Biologique. Elle a ainsi pu montrer que le domaine PH-GRAM sauvage de MTM1 est capable de lier principalement le PtdIns3P et le PtdIns4P. Dans une moindre mesure, il fixe également le PtdIns5P et le PtdIns(3,4)P2 mais pas le PtdIns(3,5)P2. Les domaines PH-GRAMV49F et PH-GRAMR69C conservent la capacité de lier le PtdIns3P mais semblent avoir moins d’affinité pour le PtdIns4P (Figure 45). En revanche ni l’un ni l’autre ne lie significativement le PtdIns(3,5)P2.

Figure 44 : Représentation d'une membrane PIP arrayTM et les différents PPIn en concentration décroissantes.

Figure 45 : Analyse de l’affinité des domaines PH-GRAM de MTM1 sauvage ou des mutants V49F et R69C pour les différents PPIn par PIP arrayTM. Les protéines putifiées ont été incubées la nuit à 4°C sur les

Partie II : Résultats et Discussion - Propriétés de liaison aux substrats de MTM1s recombinantes

Concernant les spécificités de liaison avec les PPIn des protéines GST-MTM1 complètes, il apparaît que la protéine GST-MTM1WT est capable de lier certains PPIn que le domaine PH-GRAMWT seul ne lie pas. En effet, GST-MTM1WT lie également le PtdIns(3,5)P2, un des substrats de MTM1. De manière très surprenante, la myotubularine catalytiquement inactive MTM1C375S présente un profil complètement différent de celui de la protéine sauvage. En effet, MTM1C375S lie préférentiellement le PtdIns5P et son affinité pour le PtdIns3P est considérablement diminuée. De plus, MTM1C375S ne lie pas le PtdIns(3,5)P2 de manière significative en comparaison à la protéine sauvage. En revanche, le profil de la protéine mutante MTM1V49F est très similaire à celui de la protéine sauvage malgré la mutation dans son domaine PH-GRAM. Enfin, le mutant MTM1R69C présente une affinité pour le PtdIns(3,5)P2 nettement diminuée par rapport à la protéine sauvage (Figure 46).

Figure 46 : Analyse de l’affinité de la protéine MTM1 sauvage ou des mutants V49F et R69C pour les différents PPIn par PIP arrayTM. Les différentes protéines recombinantes purifiées ont été incubées avec les membranes et

révélées par immunodétection.

DISCUSSION

Les résultats obtenus par Katy FENDER au laboratoire montrent que les affinités des protéines complètes à l’encontre des PPIn sont différentes de celles des domaines PH-GRAM seuls. Par conséquent, le domaine PH-GRAM n’est probablement pas le seul domaine impliqué dans la spécificité de MTM1 mais pourrait agir de concert avec d’autres domaines de MTM1, comme le domaine catalytique ou le motif coiled-coil. Cependant, on ne peut pas exclure la possibilité que la protéine tronquée représentée par son seul domaine PH-GRAM soit structurée/repliée d’une manière différente que lorsque la protéine entière, ce qui pourrait expliquer les différences d’affinité entre le domaine PH-GRAM seul et la protéine complète.

PtdIns(3,5)P2 qu’avec une très faible affinité (Figure 45). Or les analyses réalisées à partir du même plasmide par Tsujita et coll. montrent que le domaine PH-GRAMWT lie fortement et préférentiellement le PtdIns(3,5)P2 en test ELISA (Tsujita et al., 2004) et leur profil obtenu en PIP array est nettement différent de celui obtenu par notre équipe.

Un autre aspect intéressant de ces résultats est l’incapacité du mutant catalytique MTM1C375S et du mutant MTM1R69C a lier le PtdIns(3,5)P2. En effet, dans le premier cas, MTM1C375S est catalytiquement inactif et cette perte d’activité enzymatique semble être étroitement associée à son incapacité à lier ses substrats. Dans le second cas, le mutant MTM1R69C induit chez S. cerevisiae un élargissement vacuolaire très important, caractéristique des myotubularines enzymatiquement actives. Par ailleurs, nos expériences de dosage du PtdIns3P et du PtdIns5P intracellulaire de levures ymr1Δ produisant MTM1R69C démontrent que ce mutant est actif et qu’il déphosphoryle le PtdIns(3,5)P2 en PtdIns5P in vivo dans S. cerevisiae (Figure 4 de l’article). Ces deux données ne corrèlent pas avec l’absence de liaison entre MTM1R69C et le PtdIns(3,5)P2 que nous avons pu observer dans nos analyses in vitro.

Néanmoins, alors que Tsujita et coll. montrent (par dot-blot et par des test d’interaction sur liposomes) que leur domaine PH-GRAMWT lie fortement le PtdIns(3,5)P2, leur domaine PH-GRAMV49F présente une très faible affinité pour ce PPIn. Dans nos mains également, le domaine PH-GRAMV49F ne lie pas de manière claire le PtdIns(3,5)P2. Pourtant la protéine MTM1V49F complète fixe le PtdIns(3,5)P2 et cette observation est en accord à la fois avec l’élargissement vacuolaire observé chez la levure produisant le mutant MTM1V49F et les dosages des PPIn intracellulaires suggérant que cette myotubularine est enzymatiquement active in vivo.

Une particularité qui a attiré mon attention dans notre analyse est la capacité des protéines MTM1 complètes de se lier au PtdIns5P qui n’est pas un substrat des myotubularines. Cette liaison au PtdIns5P est indépendante des différentes mutations analysées puisque MTM1WT, MTM1C375S, MTM1V49F et MTM1R69C fixent ce phosphoinositide. Si cette interaction est intriguante c’est principalement parce-qu’il a été proposé que le PtdIns5P aurait un effet allostérique activateur de l’activité phosphatase de MTM1. Le PtdIns5P serait donc impliqué dans une boucle de rétrocontrôle positive favorisant d’une part l’oligomérisation de MTM1 et stimulant d’autre part la déphosphorylation des substrats PtdIns3P et PtdIns(3,5)P2. En outre, il est possible que la protéine recombinante produite en bactérie ne soit pas repliée exactement de la même manière que dans des cellules eucaryotes en raison de l’absence de chaperonnes spécifiques. Un autre désavantage de la production en bactérie est liée au fait que les protéines GST-MTM1 soient produites avec un rendement très faible et que ces protéines soient associées à des chaperonnes bactériennes (groEL et DnaK).