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4.3 Synthèse à partir de données expérimentales

4.3.2 Résultat

Le méta-modèle par krigeage, paramétré dans la section précédente, est évalué vis-à-vis des besoins de la simulation opérationnelle. En premier lieu, il s’agit de vérifier la vitesse de calcul d’un vecteur de sortie. Cette vitesse de calcul est directement liée à la quantité de données dis-ponibles pour le krigeage : plus la matrice des observations Y est grande, plus l’Equation (2.29) du krigeage implique de calculs. De ce fait, le méta-modèle est chronométré en utilisant la totalité des 17 496 observations disponibles. Dans ces conditions et en considérant la phase de décompres-sion du vecteur de sortie, la signature ultrasonore du défaut s’obtient16 en moins de 1,0 ms, délai compatible avec une inspection simulée en temps réel. En outre, ce modèle complet donne des résultats cohérents. Par exemple, en ne faisant varier qu’un seul paramètre d’entrée, les courbes de la Figure 4.8 — à savoir l’amplitude maximale de la signature ultrasonore du défaut en fonction d’un paramètre d’entrée — peuvent être prédites.

En second lieu, il s’agit de vérifier un peu plus en détail comment le méta-modèle estime la signature ultrasonore d’un TFP qui n’est pas initialement disponible parmi les observations. Qua-litativement, les résultats obtenus en Figure 4.8 lorsqu’un unique paramètre d’entrée varie montre que la régression se comporte de façon régulière. Le méta-modèle n’oscille pas entre les points connus et il passe aussi proche que possible de chacun d’eux. Seules les prédictions d’amplitude en fonction de l’épaisseur de pièce passe par un maximum qui n’a a priori aucun sens physique : il n’existe pas d’épaisseur de pièce pour laquelle l’amplitude de l’écho de défaut est maximale. Les observations réelles semblent elles aussi non physiques puisque la signature du défaut a une amplitude maximale croissante avec l’épaisseur de la pièce. Normalement, une épaisseur de pièce plus importante entraîne un trajet de l’onde plus long et donc une atténuation plus importante. En fait, comme noté précédemment, les pertes d’amplitude ont été compensées lors de l’acquisi-tion par une DAC. Ce gain est réglé expérimentalement en analysant les pertes d’amplitude pour différentes épaisseurs de pièce. Ici, seules trois épaisseurs sont disponibles. Ce nombre réduit de points de référence limite la précision du réglage. Les variations de l’amplitude maximale du dé-faut en fonction de l’épaisseur de la pièce traduisent essentiellement ce manque de précision et se retrouvent dans les prédictions du méta-modèle.

Pour aller plus loin, les capacités de généralisation de ce méta-modèle sont évaluées plus quanti-tativement en éliminant des observations de la base de données et en vérifiant si le méta-modèle est capable de les prédire correctement. Un méta-modèle ayant de bonnes capacités de généralisation est capable de simuler la sortie du système à partir de peu d’observations, un point intéressant lorsque les observations sont expérimentales. Dans le cas étudié, les observations les plus difficiles à collecter sont celles faisant varier le diamètre du défaut ou l’épaisseur de la pièce puisqu’il faut alors fabriquer de nouveaux échantillons. Il est intéressant d’évaluer la possibilité de diminuer le nombre de diamètres différents dans la base de données du méta-modèle. Une étude équivalente pourrait être menée sur l’épaisseur de pièce, mais la base de données compte trop peu d’épaisseurs différentes.

La Figure 4.9 présente un premier cas. Seules les données relatives à l’inspection de deux TFP sont conservées dans la base de données : l’un de diamètre φ “ 9 mm et l’autre de φ “ 16 mm, tout deux pour une épaisseur de pièce de e “ 21,8 mm. Le méta-modèle est ensuite utilisé pour prévoir l’ensemble des signaux relatifs à l’inspection d’un TFP de diamètre φ “ 12 mm à la même épaisseur de pièce. Le C-scan ainsi simulé présente des caractéristiques très proches du C-scan réel. Les imperfections de la géométrie du défaut ainsi que les fluctuations d’amplitude dues au matériau donne l’aspect réaliste recherché pour la simulation opérationnelle. A titre de comparaison, le C-scan issu de la méthode des pinceaux de CIVA semble trop “parfait”. CIVA pourrait rendre compte des perturbations d’amplitude mais il faudrait pouvoir mesurer les paramètres physiques dont elles dépendent. Le méta-modèle permet de les inclure directement à partir des données. Cependant, il faut bien noter que le krigeage ne réplique pas ces perturbations au sens du chapitre précédent. Les fluctuations d’amplitude observables sur la sortie du méta-modèle sont en fait capturées non pas comme un effet aléatoire mais comme une caractéristique déterminée du signal : pour un même paramètre d’entrée, la fluctuation sera toujours la même. La base de données ne contient qu’une seule observation par vecteur d’entrée, dès lors, il est difficile de faire la différence entre

l’observation et l’aléa qui l’affecte. En considérant l’aléa comme déterministe, le méta-modèle donne des signaux réalistes tant que l’opérateur n’y est pas confronté plusieurs fois : si des TFP de même diamètre sont mis côte à côte, il sera étrange de constater qu’ils sont affectés par le bruit de façon parfaitement identique...

D’un point de vue théorique, un méta-modèle dont la sortie réplique les bruits présents dans les données — ici, la texture ultrasonore — est dit en situation de surapprentissage. En d’autres termes, le méta-modèle cherche à capturer toutes les caractéristiques du signal, y compris une part du bruit. Puisque le bruit n’est pas identique d’un paramètre d’entrée à l’autre, le méta-modèle en surapprentissage parviendra très mal à généraliser l’effet des paramètres d’entrée. En Figure 4.9, il semble néanmoins généraliser correctement les données des diamètres φ “ 9 mm et φ “ 16 mm pour prédire les signaux correspondants à un TFP de diamètre φ “ 12 mm. La présence de fluctuations d’amplitude ne facilite pas la comparaison des données réelles et simulés. L’indicateur utilisé ici est l’écart quadratique moyen entre les maxima d’amplitude de l’écho de défaut acquis le long d’un diamètre du TFP. Sur la Figure 4.9a, cet indicateur correspond à l’écart quadratique moyen entre les points de mesure indiqués en rouge et la régression dessinée en trait plein bleu et il vaut 0,03 u.a.. Cet écart est faible au regard de l’amplitude du signal de défaut autour de 0,7 u.a.. Par ailleurs, l’erreur relative maximale entre simulation et réalité de 8 % dans ce cas. Cette bonne capacité à généraliser s’explique par deux aspects. D’une part, les deux diamètres disponibles dans la base de données ne sont pas très différents les uns des autres donc la généralisation se fait sur un intervalle pas trop large. D’autre part, le méta-modèle contient un terme de régularisation — à savoir σ2, le niveau de bruit associé aux observations — qui permet de limiter le surapprentissage en identifiant une partie des fluctuations d’amplitude comme un bruit à ne pas modéliser. Cette régularisation explique notamment l’aspect un peu plus lissé des fluctuations d’amplitude visibles sur le C-scan de la Figure 4.9c.

(a) Signature du défaut

0 10 20 Position px du transducteur [mm] 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 Amplitude max. du défaut [u .a .] φ “ 9 mm φ “ 16 mm Krigeage φ “ 12 mm Référence φ “ 12 mm

(b) C-scan issu de l’expérience

0 20 Position x [mm] 0 20 P osition y [mm ] 0,4 0,6 0,8 Amplitude [u .a .]

(c) C-scan issu du krigeage

0 20 Position x [mm] 0 20 P ositi on y [mm ] 0,4 0,6 0,8 Amplitude [u .a .]

(d) C-scan issu de CIVA

0 20 Position x [mm] 0 20 P ositio n y [mm ] 0,4 0,6 0,8 Amplitude [u .a .]

Figure 4.9 – Krigeage sur des données expérimentales

Deux TFP de diamètres φ “ 9 mm et φ “ 16 mm sont utilisés pour prévoir le comportement d’un TFP de diamètre φ “ 12 mm. La Figure 4.9a compare les amplitudes de l’écho de défaut réelles et estimées par le méta-modèle, l’écart quadratique moyen entre les observations et la régression est de 0,03 u.a.. L’écart relatif maximal entre les deux est de 8 %. Également à titre de comparaison, les C-scans réel, simulé par krigeage et simulé par une approche physique classique — i.e. la méthode des pinceaux de CIVA — sont reportés. Ils permettent d’illustrer l’intérêt d’une approche par données expérimentales : les petites imperfections des défauts sont capturés par le méta-modèle alors qu’elles sont difficiles à intégrer fidèlement dans un modèle physique.

La régularisation permet d’obtenir une généralisation convenable dans le cas de la Figure 4.9 mais qu’en est-il si les deux diamètres connus sont très différents ? En d’autres termes, si le méta-modèle est construit uniquement à partir de signaux issus de l’inspection de deux TFP de diamètres différents φmin et φmax, l’erreur commise sur la prédiction des signaux pour un TFP de diamètre φtest intermédiaire est-elle affectée par l’écart φmax´ φmin? L’expérience menée précédemment avec φmin“ 9 mm, φmax“ 16 mmet φtest“ 12 mmest ré-itérée pour tous les couples de diamètres disponibles dans la base de données. L’ensemble dit d’entraînement contient les signaux acquis pour des défauts de diamètre φminet φmax, tandis que l’ensemble dit de test contient les signaux acquis pour des défauts de diamètres φtestintermédiaires, i.e. φmină φtestă φmax. L’écart constaté entre la simulation et la réalité sur l’ensemble de test est mesuré par l’indicateur défini précédemment, à savoir l’écart quadratique moyen entre les maxima d’amplitude mesurés ou simulés le long d’un diamètre du défaut. L’ensemble des écarts constatés sur les données de test sont reportées en Figure 4.10 en fonction de l’écart de diamètre φmax´ φmin des défauts présents dans les données d’entraînement. Le point rouge correspond par exemple à la configuration montrée en Figure 4.9. Le niveau de bruit qui est tracé illustre l’imprécision de mesure de l’indicateur choisi pour comparer la réalité et la simulation. Ce niveau est estimé en comparant des signaux issus d’un même TFP réel. La courbe du maximum de l’écho de défaut en fonction de la position le long du diamètre du TFP est comparée à la même courbe extraite le long du diamètre perpendiculaire. Pour un défaut parfaitement circulaire, les deux courbes devraient être superposées et leur écart quadratique nul. Il n’en est rien, illustrant que l’indicateur choisi est sujet à des variations même entre des signaux parfaitement réels. Il n’en demeure pas moins qu’une tendance se dégage de ces tests : plus l’écart entre les diamètres de défaut présents dans l’ensemble d’entraînement augmente, plus le méta-modèle commet des erreurs lors de l’estimation de signatures de défaut dont le diamètre est intermédiaire. Cet effet est attendu — surtout si le méta-modèle est en surapprentissage — et il illustre les limitations de la capacité de généralisation du méta-modèle. L’intérêt ici est de quantifier à quel point le méta-modèle est affecté par ce phénomène et ainsi de discuter la quantité de données dont il faut disposer pour le construire.

Pour savoir combien de TFP sont requis pour la construction d’un méta-modèle, il faut définir deux éléments : l’indicateur quantitatif de la précision du méta-modèle et la valeur seuil de cet in-dicateur pour l’application visée. La définition d’un inin-dicateur fiable n’est pas toujours facile, celui proposé ici teste l’une des caractéristiques clefs de l’écho de défaut qu’est son amplitude maximale et son comportement en fonction de la position du traducteur. En revanche, il est sensible aux fluctuations d’amplitude qui viennent perturber la comparaison entre données réelles et données simulées. Ceci étant, cette comparaison reste utilisable. La Figure 4.9 montre une tendance géné-rale : plus l’écart de diamètres d’entraînement est important, plus le méta-modèle est imprécis. Par exemple, pour avoir un écart à la réalité en-deçà de 0,062 u.a., les diamètres de défaut nécessaires dans la base de données du méta-modèle doivent être différents de moins de 2 mm. Par conséquent, le nombre de TFP différents nécessaires pour pouvoir simuler l’effet de ce paramètre d’entrée sur une large gamme est très important. Il faut quand même noter un cas particulier sur cette figure : pour des diamètres d’entraînement φmax´ φmin“ 7 mm, l’erreur commise par le méta-modèle est inférieure à 0,04 u.a., soit une erreur plus faible que pour un écart de diamètres de 2 mm ! Cet effet va à l’encontre de la tendance générale et s’explique par la taille des TFP utilisés lors du test. Dans la base de données disponible, seuls les TFP de diamètre φmin “ 9 mm et φmax “ 16 mm diffèrent de 7 mm or il s’agit du couple de diamètres les plus grands utilisés lors de la construction de la Figure 4.9. Plus le diamètre est grand, moins la signature du défaut est affectée par du bruit et plus la description physique est simple (cf. discussion 4.4.2.2), expliquant que le méta-modèle résultant donne des erreurs plus faibles que dans un cas où l’ensemble d’entraînement contient des défauts de diamètres plus rapprochés mais plus bruités. Ce cas particulier de faible erreur avec un écart de diamètres d’entraînement important n’est sûrement pas transposable à la simulation de petits diamètres. La Figure 4.9 montre ainsi que, pour limiter les erreurs du méta-modèle, il faut collecter une base de données contenant d’autant plus de diamètres différents que l’erreur seuil visée sera faible (un nombre qui peut encore augmenter si les données sont bruitées ou si la physique du système entraîne des variations importantes de sa sortie).

Finalement, ces essais montrent que le méta-modèle par krigeage peut effectivement servir à construire un modèle de défaut rapide et réaliste. Il permet d’assurer une correspondance très étroite avec la réalité sans avoir à connaître très précisément les paramètres physiques qui la décrivent. Ce point est essentiel pour l’approche par signaux augmentés proposée en para-graphe 5.2.2.2. Par contre, la précision du méta-modèle est très liée à la quantité de données

0,00 0,02 0,04 0,06 0,08 0,10 0,12 Erreur quadratique moyenne [u.a.] 0 2