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Approches numériques

1.7 Point sur le vocabulaire du CND ultrasons

2.1.2 Approches numériques

La résolution numérique de l’équation de propagation (2.1) change radicalement de perspec-tive par rapport à la résolution analytique présentée ci-avant. Là où l’approche analytique cherche directement une solution générale, l’approche numérique se borne à répliquer le comportement local de la matière. Concrètement, l’approche numérique découpe d’abord l’espace et le temps en

2. Les fronts d’onde sont normalement sphériques mais à une distance suffisante (quelques longueurs d’onde), ils peuvent souvent être localement approchés par un front d’onde plan.

éléments infinitésimaux. L’équation aux dérivées partielles permet ensuite de prévoir le compor-tement de ces éléments infinitésimaux. Enfin, l’effet macroscopique de l’excitation est estimé en propageant son effet d’élément en élément. Ainsi décrite, la proximité de l’approche numérique avec les mécanismes physiques réellement à l’œuvre est évidente. Cette approche jouit ainsi d’une grande généricité et permet de limiter le nombre d’hypothèses à considérer. Par contre, elle de-mande une grande quantité de calculs notamment parce que tous les éléments infinitésimaux sont indispensables dès lors qu’ils sont positionnés sur un trajet possible entre la source et le point d’observation.

Cette section entre un peu plus dans les détails d’implémentation que la précédente introduction aux méthodes semi-analytiques. Il s’avère que ces détails sont requis en Section 2.2.1 pour étudier les bases réduites, une technique permettant de simplifier les calculs des approches numériques.

2.1.2.1. Différences finies dans le domaine temporel (FDTD)

La méthode des différences finies dans le domaine temporel (FDTD) s’élabore simplement à partir du développement de Taylor et d’une relaxation par troncature de l’aspect “infinitésimal”. Pour une fonction quelconque f : R ÞÑ R, la dérivée s’exprime ainsi :

df pxq dx f px ` hq ´ f pxq h ` ohÑ0phq (2.3) de même d2f pxq dx2 “f px ` hq ´ 2f pxq ` f px ´ hq h2 ` o hÑ0ph2q (2.4)

En tronquant les relations précédentes, la valeur de la dérivée s’exprime directement à partir de la fonction et ainsi les équations aux dérivées partielles s’approximent par un système d’équations algébriques. Dans ce cadre, l’espace est discrétisé par une grille régulière dont le pas ∆x est suffisamment petit pour être assimilé au terme h des relations (2.3) et (2.4). La solution est mise sous forme d’un vecteur U regroupant toutes les valeurs prises par ~u sur les nœuds de la grille. Les opérateurs de dérivation spatiale sont ensuite approximés par la combinaison des éléments de U, par exemple, en deux dimensions dans le plan pOxyq :

B2~u Bx2 i, j «Ui`∆x, j´ 2Ui, j` Ui´∆x, j ∆x2 (2.5) B2~u BxBy i, j

«Ui`∆x, j`∆y´ Ui`∆x, j´∆y´ Ui´∆x, j`∆y` Ui´∆x, j´∆y

4∆x∆y (2.6)

avec : i, j indice selon l’axe x et selon l’axe y. Ce double indice ne correspond pas à une matrice mais bien à un vecteur dont les éléments s’identifient par une position en x et en y. Selon la convention d’ordre dans le vecteur U, la conversion en un indice unique varie.

Ui`∆x, j`∆y composante du vecteur U, i.e. valeur du déplacement selon l’une des directions principales.

Finalement, l’effet des opérateurs différentiels en espace est résumé dans une matrice D. La discrétisation en temps permet alors d’exprimer l’équation (2.1) sous forme entièrement algébrique avec F l’excitation appliquée :

:

U “ DU ` F (2.7)

Ut`∆t“ 2Ut´ Ut´∆t` ∆t2`DUt

` F˘ (2.8)

Ainsi, le comportement du matériau peut être simulé en appliquant la relation (2.8) de façon itérative. Des formulations alternatives peuvent être obtenues en utilisant des schémas de discrétisa-tion différents3, des approximations d’ordres plus élevés [61] ou encore en considérent des schémas temporels différents [62]. Ces améliorations permettent notamment d’assurer la convergence (donc

3. Par exemple, dans l’approximation d’une dérivée première, il est possible de soustraire le nœud courant au nœud suivant (schéma décentré à droite), le nœud courant au nœud précédent (schéma décentré à gauche) ou encore les nœuds précédent et suivant (schéma centré).

la consistance et la stabilité). Différentes méthodes basées sur la FDTD sont appliquées à la résolu-tion de l’équarésolu-tion de propagarésolu-tion des ondes dans les matériaux composites. Par exemple, un code FDTD basé sur le le schéma de Virieux [63] a été développé par Airbus, une méthode assez proche qualifié d’Elastodynamic Finite Integration Technique (EFIT) est utilisée par le NASA Langley Research Center [64][65].

Un point important qui concerne plus généralement toutes les méthodes numériques est le choix de la zone à discrétiser. La plupart des inspections de CND concernent une zone restreinte d’une grande pièce. Considérer la pièce entière dans les calculs FDTD entraînerait des coûts en mémoire et en temps de calcul bien trop importants. Il est nécessaire de délimiter une frontière artificielle autour de la zone d’intérêt. Se pose alors la question des conditions aux limites à appliquer sur cette frontière : puisqu’elle est fictive, il ne faut surtout pas que les ondes s’y réfléchissent. Diverses solutions ont été proposées avec notamment les conditions de frontières absorbantes (ABC) [66] ou les couches parfaitement adaptées (PML) [67]. Ces dernières offrent des performances supé-rieures d’absorption sous tous les angles d’incidence mais elles nécessitent d’ajouter des nœuds en périphérie de la zone de calcul.

2.1.2.2. Éléments finis

La technique des éléments finis s’enracine dans une base théorique — résumée en Annexe A — un peu plus complexe que la FDTD mais elle permet de considérer des maillages plus divers que les seules grilles régulières. Les éléments considérés peuvent être plus petits dans les zones où la solution variera brusquement, ou encore, ils peuvent épouser fidèlement les frontières physiques. Ces atouts ont notamment contribué à l’adoption de cette approche par des logiciels profession-nels de simulation en mécanique des solides tels qu’AbaqusTM de Dassault Systèmes R, COMSOL Multiphysics R ou les logiciels Autodesk.

Comme toutes les méthodes numériques, les éléments finis visent à approcher l’équation aux dérivées partielles par un système d’équations algébriques. Pour ce faire, la technique s’appuie sur une décomposition de la solution sur un ensemble de fonctions de base ϕ (cf. Annexe A). Chacune de ces fonctions est associée à un nœud du maillage. Dans le cas de l’élasticité linéaire, l’équation discrétisée prend la forme suivante :

M :U ` KU “ F (2.9)

avec : U représentation de la solution ~u sur la base des fonctions ϕ ;

M matrice des masses dépendant de la densité du matériau et de sa géométrie ;

K matrice des rigidités dépendant du comportement mécanique du matériau et de sa géométrie ;

F vecteur traduisant l’excitation mécanique.

Les composantes de ces matrices sont calculées pour le cas général de l’élasticité linéaire dans [68] : KIJ“ ¡ VI Bxi cijklJ Bxj dV (2.10) MIJ“ ¡ V ρϕIϕJ dV (2.11) FI “ ¡ V ϕIfext dV (2.12)

avec : ϕI fonction de base associée au nœud I du maillage.

Le choix des fonctions de base ϕ est un élément clef de l’implémentation. La plupart du temps, des fonctions chapeaux sont utilisées, leur support disjoint permet d’obtenir des matrices creuses. En d’autres termes, l’espace est découpé en éléments et, à chaque point de ce maillage, seules une fonction de base ainsi que ses plus proches voisines sont non nulles. De cette manière, les intégrales (2.10) et (2.11) s’annulent dès lors que les fonctions de base ne sont pas spatiale-ment contigües et les matrices résultantes contiennent de nombreux coefficients nuls. D’ailleurs, la

construction des matrices M et K passe souvent par un calcul préalable de matrices élémentaires restreintes à un élément puis par leur assemblage pour décrire la globalité du système à simu-ler. Concernant les fonctions de base, il faut aussi souligner que la solution de la simulation est construite comme une combinaison linéaire des ces fonctions : les fonctions de base peuvent donc être vues comme des fonctions d’interpolation de la solution entre les points du maillage. Le choix de ces fonctions impose ainsi l’ordre de l’interpolation donnant des éléments linéaires, quadra-tiques, etc. ayant une influence sur la quantité d’éléments à considérer. Un élément d’ordre élevé est capable d’interpoler plus efficacement sur une zone plus étendue et nécessite donc un maillage moins dense. Par exemple, une approche par éléments finis d’ordre élevé couplée à une décompo-sition de domaine a été développée pour les ultrasons dans CIVA pour diminuer efficacement les temps de calcul [69].

En ce qui concerne l’aspect temporel, l’équation finale (2.9) des éléments finis ressemble à l’équation (2.7) obtenue pour la FDTD. Le traitement de la dérivée temporelle peut ainsi être fait de façon équivalente [62].

2.1.2.3. Volumes finis

Il convient d’ajouter la technique des volumes finis parmi les méthodes numériques les plus usitées pour discrétiser des équations aux dérivées partielles. Cette approche a émergé dans le domaine de la dynamique des fluides où elle est maintenant très répandue [70]. Elle est au cœur des logiciels tels qu’ANSYS R Fluent R, CDadapco R StarCCM+ R ou encore OpenFoam R. Elle est appréciée pour la possibilité de gérer des maillages non réguliers comme la méthode des éléments finis et sa formulation est particulièrement adaptée aux équations de conservation.

L’approche par volumes finis s’exprime à partir de la forme intégrale de l’équation (2.1). Si les hypothèses simplificatrices du paragraphe précédent sont prises, l’équation mise sous la forme d’une loi de conservation [71] devient :

ij S ρB 2~u Bt2 dS “ ¿ Γ ~ ∇C66∇~~u ` pC11´ C66q ~∇~u ı ~ dΓ (2.13)

L’évolution temporelle de ~u sur un domaine donné s’explique donc par le bilan des flux ”

C66∇~~u ` pC11´ C66q ~∇~u ı

entrant et sortant par les frontières de ce domaine. En décomposant la zone de calcul en surfaces élémentaires sur laquelle ~u “ ~ui, ce bilan des flux peut être fait localement, frontière après frontière. La valeur des flux élémentaires est approchée par un dévelop-pement de Taylor au premier ordre des gradients de ~u, exactement comme pour l’approche FDTD. L’ensemble des bilans ainsi obtenus et exprimés en fonction des valeurs ~ui constitue la discrétisa-tion par volumes finis du problème. La discrétisadiscrétisa-tion temporelle s’obtient de façon équivalente aux deux méthodes précédemment expliquées.