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Résiliation aux torts réciproques des deux parties

Dans le document La fin du contrat de franchise (Page 146-149)

§ 1 Le prononcé de la résiliation judiciaire

B. Résiliation aux torts réciproques des deux parties

135. Existence de fautes réciproques. Il arrive, dans certaines hypothèses, que l’anéantissement du contrat de franchise résulte non de la seule défaillance du franchisé ou celle du franchiseur, mais de leur défaillance commune. Le franchisé et le franchiseur ont contribué tous les deux par leurs fautes à l’inexécution du contrat. En pareille hypothèse, le juge doit prononcer la résiliation ou la résolution du contrat de franchise aux torts partagés ou aux torts réciproques des parties475.

474 Cass. com., 24 mai 1994, pourvoi n° 92-17007.

475 V. D. TALLON, La résolution du contrat aux torts réciproques, in Mélanges. Charles Freyria, Ester

1994, p. 231. V, également, C. ANDRE, Le fait du créancier contractuel, L.G.D.J 2002, préface G. Viney, n° 252, p. 159, et spéc., n°558, p.167.

Chaque partie défaillante sera tenue de répondre de sa part de responsabilité dans l’échec du contrat de franchise.

136. Illustration. Par un arrêt du 21 octobre 1997, la Chambre commerciale a approuvé la Cour d’appel de Paris d’avoir prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts réciproques des deux parties476. Dans cet arrêt, la Cour de cassation a considéré que les juges du fond relevaient que chacune des parties avait participé par sa faute à l’inexécution du contrat. Pour le franchiseur, il y avait un retard dans la livraison des marchandises et dans la fourniture de produits de mauvaise qualité. Alors que pour le franchisé, celui-ci avait manqué à son obligation de paiement de marchandises livrées et la violation de la clause d’exclusivité.

Il en est de même dans un arrêt du 30 janvier 2002477. En l’occurrence, un contrat de franchise stipulait une clause résolutoire selon laquelle en cas de manquement contractuel par le franchisé, le contrat serait résilié de plein droit. Suite à la violation par le franchisé de son obligation d’exclusivité et de non-concurrence, le franchiseur a résilié le contrat conformément à la stipulation prévue. Or, les juges du fond l’ont condamné pour résiliation fautive et ont prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts réciproques. Dans cet arrêt, les juges du fond ont, en effet, constaté qu’il y avait des manquements de la part des deux parties. Du côté du franchisé, ils ont relevé qu’il y avait violation à la fois de l’obligation d’exclusivité territoriale et de l’obligation de non-concurrence. Le franchisé avait ouvert un second établissement dans la même ville avec une activité identique à celle de l’établissement principal pour vendre des articles similaires du franchiseur sans marque apparente. Du côté du franchiseur, les juges relevaient qu’il avait commis une faute en informant ses fournisseurs, avant l’envoi d’une mise en demeure au franchisé, que celui-ci ne faisait plus partie de la chaîne et qu’il ne devait plus bénéficier des avantages spécifiques du réseau.

476 Cass. com., 21 octobre 1997, pourvoi n° 95-15-664. 477

Ainsi, il apparaît, à travers cette jurisprudence, que les juges tiennent compte de ce que chacune des parties a bien exécuté ses engagements et qu’elle n’a pas, par sa faute, participé à l’inexécution du contrat. Ils n’hésitent pas à prononcer la résiliation ou la résolution du contrat de franchise aux torts réciproques quand ils constatent qu’il y a une relation de cause à d’effet entre les manquements du franchisé et du franchiseur et l’inexécution du contrat.

137. Nécessité de la détermination de la part de responsabilité. Il faut cependant souligner que les torts réciproques ne sont pas nécessairement des torts équivalents ou des torts égaux. La faute du franchiseur peut être plus ou moins grave que celle commise par le franchisé. L’inverse est vrai. La défaillance du franchiseur peut être moins importante que celle du franchisé. Pour des raisons d’équité, le juge, qui est saisi d’une action en résiliation ou en résolution, ne doit pas donc prononcer sèchement celle- ci aux torts réciproques des parties dès lors qu’il constate simplement que chacune d’elles a manqué à ses obligations. Il doit détermine la part de responsabilité incombant à chacune d’elles.

Autrement dit, le juge est tenu de mesurer le préjudice que fait subir l’une à l’autre. Il lui incombe de rechercher si les manquements respectifs du franchiseur et du franchisé à leurs obligations contractuelles ont causé à chacun d’eux un égal préjudice de nature à entraîner la compensation totale entre les dommages et intérêts auxquels ils peuvent réciproquement prétendre. Mais il ne saurait renvoyer le franchiseur et le franchisé dos à dos en estimant que les torts sont partagés, supposés égaux et donc se compensent, sinon sa décision serait censurée par la Cour de cassation478.

478

Ex. Cass. com.,5 décembre 2000 ; Dr. et pat. 2001, n°93, obs. P. CHAUVEL. Dans cet arrêt concernant un contrat de concession, la Chambre commerciale a cassé l’arrêt d’appel en décidant ainsi :

« Attendu que pour rejeter la demande de la société Software en paiement d’une certaine somme, l’arrêt retient que les parties qui ont participé par leur attitude fautive à la rupture du contrat, doivent être déboutées de leurs demandes respectives ; Attendu qu’en se déterminant ainsi , sans rechercher si les manquements respectifs des parties à leurs obligations contractuelles avaient causés à chacune d’elles un égal préjudice de nature à entraîner la compensation totale des sommes auxquelles elles pouvaient prétendre réciproquement, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».

138. Justification. Cette attitude de la Cour de cassation vis-à-vis des arrêts qui se contentent de prononcer la résiliation du contrat de franchise aux torts réciproques des parties sans pour autant déterminer la part de la responsabilité de chacune d’elles est pleinement justifiée479. D’une part, elle est conforme à l’équité. En effet, il n’est pas, nous semble-t-il, juste de traiter de manière égale un contractant ayant manqué gravement à ses obligations et un autre dont le manquement n’est qu’une réaction provoquée par le premier, et qui n’a pas, le plus souvent, le même degré de gravité. D’autre part, une telle solution a l’avantage de faire obstacle aux manoeuvres du franchiseur ou du franchisé malhonnête qui, en vue de se dégager du contrat peu avantageux sans être obligé de payer une indemnité à son partenaire, cherche, par tout les moyens, à inciter son cocontractant à manquer à ses obligations. Toutefois, il convient de noter qu’une fois que le juge prononce la résiliation du contrat, celle-ci entraîne l’anéantissement du rapport contractuel liant le franchiseur au franchisé.

Dans le document La fin du contrat de franchise (Page 146-149)

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