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Répondre aux contestations intérieures et se conformer aux exigences internationales

SECTION I. LA DÉCENTRALISATION : UN INSTRUMENT DE DÉTENTE POLITIQUE

1. Répondre aux contestations intérieures et se conformer aux exigences internationales

«Quand nous, FRELIMO et État, nous trouvons dans une situation de crise, on

redécouvre les vertus de la

décentralisation»85.

Avec les indépendances de l´Angola et du Mozambique, la nécessite de construire une société unifiée (la nation), guidée par une seule idéologie politique et dirigée exclusivement par le parti-Etat, était prônée par les mouvements de libération (Ici, le MPLA et le FRELIMO). C'était pour eux le choix politique incontournable pour la suivie de ces nouveaux pays où les divisions ethniques et le régionalisme avaient permis la colonisation. Cela justifiait aisément l'instauration d'un centralisme politique et administratif, comme l´a affirmé en son temps Agostinho Neto, première présidente du MPLA86.

Cependant, l´idéologie centraliste n´a pas gagné tous les membres de ces partis. Elle a donné parfois lieu à des divisions entre les membres, comme celle qui distinguait les membres «révolutionnaires» et «réactionnaires», selon, entre autres, leur adhésion ou non au projet révolutionnaire basé sur la doctrine marxiste-léniniste, comme nous l’explique Luis de BRITO, par rapport au Mozambique87.

Les dits «réactionnaires» étaient ceux qui contestaient entre autres la centralisation du pouvoir prônée par la doctrine marxiste-léniniste, défendant ainsi une certaine décentralisation politique et administrative.

Si les contestations de ces membres à la centralisation du pouvoir est justifiée par certains auteurs comme Zeferino CAPOCO par la difficulté, pour la plupart des membres, d´assimiler la philosophie marxiste-socialiste sur laquelle reposait cette

85 Aguiar MAZULA Ministre FRELIMO de l´administration de l´État (1990- 1994) cité par WEIMAR, B.: Para uma estratégia de descentralização em Moçambique-Mantendo a falta de clareza?: conjunturas críticas, caminhos, resultados. In WEIMAR, Bernard (dir.) : Moçambique descentralisar o centralismo - economia politica, recursos e resultados. IESE, Maputo, 2012. p.84.

86 NETO, António Agostinho: Textos Políticos Escolhidos. Luanda, 1985, p. 190.

87DE BRITO, Luis : Le FRELIMO et la construction de L'Etat national au Mozambique. Le sens de la référence au marxisme (1962-1983). Thèse de doctorat soutenue à l´Université de Paris VIII – Vincennes, 1991.p. 299.

option politique88, elles sont vues aussi comme une forme de revendication du pouvoir et d´autonomie par les élites locales de ces partis, en particulier des cadres des partis non originaires de la capitale du pays (Luanda et Maputo, respectivement) ou des régions qui lui sont proches, restées marginalisées pendant les premières années de l'indépendance, comme le croit Luis de BRITO8990.

On voit alors, dans les réunions de ces partis, les congrès notamment, des demandes de décentralisation formulées par des membres, comme celle de Batista Cosmé, un membre du FRELIMO, pendant le IV congrès de ce parti. Il revendiquait la décentralisation politique et administrative comme moyen de sortir le pays du marasme économique et social, dans lequel il se trouvait91.

Ainsi, on voit sortir dans les congrès du MPLA et du FRELIMO, notamment, le III (1990) et le IV (1983), respectivement, des délibérations, même si elles demeurent timides, en faveur de la décentralisation politique et administrative92 93.

Une opposition ferme à l´idéologie centraliste des anciens partis-uniques venait des anciennes guérillas (L´UNITA et le RENAMO). Ces dernières justifiaient leur combat militaire contre l´Etat-parti comme une lutte contre le régime marxiste-léniniste, pour l´instauration d'une démocratie libérale et la construction d´une société inclusive, comme le démontrent des auteurs comme Zeferino CAPOCO et Christian GEFFRAY, respectivement94 95.

Alors, pour en finir avec ces contestations, matérialisées par des guerres civiles, les partis uniques ont non seulement libéralisé la vie politique et sociale dans ces pays,

88CAPOCO, Zeferino: O Nacionalismo e o Estado: Um estudo sobre a História política de Angola (1961-1991). Thèse de Doctorat soutenu à l´Université Catholique portugaise. 2013. p. 202.

89 DE BRITO, Luis : Op.cit. p. 320.

90 D´ailleurs, il faut dire qu´en 1992 le MPLA réalise son IIIe congrès extraordinaire avec comme thème «L´unification de la famille MPLA».

91 FRELIMO: Intervenções dos deputados. Colecção IV Congresso. Maputo. pp. 87-88. Cité par SERRA, Carlos M. : Estado, pluralismo jurídico e Recursos Naturais. Escolar Editora, 2014, p.241.

92MPLA: Relatório do III Congresso do MPLA, 1990. Cité par FEIJÓ, Carlos : O Poder Local em Angola. in Problemas Actuais de Direito Público Angolano – Contributos para a sua Compreensão, Princípia, Cascais, 2001, p. 144.

93FRELIMO: Colecção IV Congresso. Maputo. Cité par SERRA, Carlos M. : Estado, pluralismo jurídico e Recursos Naturais. Escolar Editora, 2014, p.241.

94CAPOCO, Zeferino: Op. Cit. p. 198.

95GEFFRAY, Christian : La Cause des armes au Mozambique: Anthropologie d’une guerre civile. Karthala, Paris, 1990.

mais aussi accepté la décentralisation comme principe politique et administratif de ces pays.

On trouve ainsi, entre autres, dans les délibérations du IIIe congrès du MPLA (1990) et le Ve du FRELIMO (1989), une position de ces partis en faveur de la décentralisation. Cette position a été matérialisée ensuite par l´adoption de Lois prévoyant la décentralisation comme principe d´organisation politique et administrative de ces pays. C’est le cas notamment de la Loi constitutionnelle angolaise nº 23/92 du 16 septembre 1992 et la Constitution mozambicaine du 30 novembre 1990.

La libéralisation de la vie politique et l´introduction de la décentralisation dans ces pays est aussi le fruit des compromis internationaux.

Avec l´adhésion aux institutions de Bretton Woods en 1984, pour le Mozambique, et en 1989, pour l´Angola, ces pays ont dû accepter les exigences de libération économique et par conséquent politique. Cela impliquait une décentralisation politique, administrative et économique, selon la conception de ces institutions financières, comme l´affirme Yves FAURÉ, en parlant du Mozambique96.

Il faut aussi ajouter à l´adhésion de ces pays aux institutions de Bretton Woods la signature des accords internationaux visant à mettre fin aux guerres civiles. Ce fut aussi un facteur d´influence pour la libéralisation politique et l’émergence de l´idée de décentralisation dans les anciens partis uniques.

Ce fut le cas de la signature, en 1984, des accords de nkomati entre le gouvernement mozambicain et sud-africain, pour rétablir le bon voisinage et en finir avec l´appui des sud-africains à la guérilla du RENAMO et de la signature des accords de New York, en 1988, entre le gouvernement angolais (appuyé par CUBA) et le gouvernement sud-africain (qui appuyait l´UNITA) qui poussa vers l'ouverture politique dans ce pays et donc à l´espérance de l´introduction de la décentralisation, comme l´affirme Carlos FEIJÓ97.

Ainsi, même si l´influence directe des accords internationaux dans le discours en faveur de la décentralisation des anciens partis uniques reste à démontrer, comme

96 FAURÉ, Yves : Op.cit., p. 306.

l´affirme Yves FAURÉ98, le fait que la signature de ces accords a été suivie d’actes concrets des anciens partis uniques en faveur de la décentralisation, telles les réformes légales (l´adoption des nouvelles Constitutions ou Lois constitutionnelles) et institutionnelles.

Enfin, on peut dire que le discours en faveur de la décentralisation qui est aujourd´hui celui des anciens partis uniques, en Angola et au Mozambique, est influencé par une volonté de répondre aux oppositions à la centralisation du pouvoir, à l’intérieur de ces pays, et à l´environnement international qui est, d´une certaine façon, hostile à la centralisation du pouvoir. Mais il ne signifie pas une «véritable» conversion de ces partis aux idées décentralisatrices.

2. Garder le contrôle du pouvoir, avec et après les changements

La phrase mythique « pour que tout reste comme avant, il faut que tout change », a été prononcée par le jeune Tancrède dans le célèbre roman «le Guépard» de Giuseppe Tomasi di Lampedusa qui raconte la transition entre un ordre ancien et un nouvel ordre dans l´Italie du XIX siècle. Elle a été reprise par René Otayek pour expliquer aussi la vision politique de la décentralisation des anciens partis uniques en Afrique99. Elle sert aussi pour expliquer la vision politique de la de décentralisation des anciens partis uniques, en Angola et au Mozambique.

Le discours décentralisateur des anciens partis uniques est centré sur l´idée d’une décentralisation instrument pour garder le pouvoir devant la transition politique inévitable dans ces pays. Pour cela ces partis utiliseraient principalement des expédients légaux.

Avec la transition politique qui exige, entre autres, l´instauration de la décentralisation comme mode d´organisation politique, les anciens partis uniques ne la conçoivent pas comme une véritable libéralisation politique. Au contraire, pour ces partis la décentralisation ne doit servir pour eux qu’à apaiser les critiques de la centralisation, mais sans mettre en cause leur pouvoir hégémonique.

En ce sens, Christine MESSIANT écrivait au sujet de l´Angola qu´on était devant une, «Reconversion d´un pouvoir dictatorial de parti unique en pouvoir hégémonique autoritaire adapté au multipartisme, mais dans lequel la démocratie et la légalité sont à la fois utilisées et ignorées, contournées et violées, à l´intérieur de et par un système politique réel, une économie politique qui (…) assure la domination d´une oligarchie [les membres du parti unique]…»100.

99OTAYEK, Rene: Op.cit. p. 132.

100MESSIANT, Christine : à propos de transitions démocratiques. Notes comparatives et préalables à l’analyse du cas Angolais. Africana Studia, Revista International de estudos africanos. Porto, Centro de Estudos Africanos, 1999. pp. 61-95.

Cette vision instrumentaliste de la transition démocratique, et par conséquent de la décentralisation, donnée par Christine MESSIANT est d´une certaine façon partagée par Luis DE BRITO pour ce qui est du Mozambique. Selon lui, même avec l´ouverture politique,

«Il n´y a pas eu de concessions politiques ni de partage du pouvoir avec l´opposition. Au contraire, la question de la décentralisation illustre la façon dont le FRELIMO a su consolider son pouvoir sur tout le territoire national»101. Cette non adhésion sincère des anciens partis à l´idée décentralisatrice est démontrée par la confusion des concepts qu’ils font quand ils parlent de décentralisation là où il n’y a que simple déconcentration administrative102. Pour eux, la décentralisation ne serait pas nécessairement le transfert du pouvoir central à des entités autonomes. Elle peut être obtenue par des mécanismes comme le renforcement des organes locaux de l´État. Cela leur permet d’éviter des entités locales véritablement autonomes du pouvoir central et qui échapperaient à leur contrôle103.

Cette hésitation des anciens partis uniques par rapport à la décentralisation est aussi illustrée au Mozambique où la décentralisation a déjà commencé à être mise en place. Cela consiste à diminuer la circonscription territoriale des collectivités locales et créer dans les circonscriptions territoriales, où sont déjà établies des collectivités locales, un représentant de l´Etat. Ce dernier se voit attribuer des compétences qui devraient être, à priori, attribuées aux collectivités locales. Cette situation se retrouve principalement dans les collectivités locales aux mains de l´opposition politique. Elle vise évidemment à empêcher ´opposition de prendre effectivement le pouvoir local, comme le démontre Egidio CHAMAITE pour la Municipalité de Beira, deuxième ville du pays aux mains de l´opposition politique104.

101DE BRITO, Luis : Mozambique, quelle démocratie après la guerre? Politique africaine nº117, Karthala, 2010, p.12

102FAURE, Yves : Op.cit. p.301.

103 WEIMAR, Bernard et all: A economia do Political Settlement em Moçambique:Contexto e implicações da Descentralização. In WEIMAR, Bernard (Org.): Moçambique descentralisar o centralismo : economia politica, recursos e resultados. IESE, Maputo, 2012, p. 68.

104CHAMAITE, Egídio: Problemática da delimitação dos municípios em Moçambique: Questões administrativas ou factores políticos? – O Caso do Município da Beira (2003-2008). Mémoire de maitrise, Universidade Eduardo Mondlane, 2010.

On trouverait encore l´illustration de cette hésitation des anciens partis uniques dans la consécration du principe de gradualisme dans cette mise en œuvre de la décentralisation, comme le croit Domingos do ROSARIO105, en analysant le cas mozambicain.

Le gradualisme comme principe directeur de la décentralisation serait un moyen de contrôler la décentralisation pour l´ancien parti unique. Cela est démontré dans les circonstances qui ont dicté son adoption au Mozambique.

Pas prévu au début de la décentralisation au Mozambique, approuvé par la Loi.3/94 du 13 Septembre [Loi des districts municipaux] qui crée des entités locales autonomes dans tous les districts du pays, le gradualisme a été introduit trois ans après dans la Loi 2/97 du 18 Février. Ce fut après que le FRELIMO ait constaté que l´application de la Loi 3/94 risquait de «faire tomber» dans les mains du RENAMO une bonne moitié du pays. Celui-ci avait beaucoup d´influence politique dans les zones rurales, là où autrefois il était fort militairement, alors que le FRELIMO s’imposait plutôt dans les zones urbaines, comme l´avaient montré les élections nationales de 1994106107. Si cette circonstance particulière explique l'instauration du gradualisme au Mozambique, la logique du gradualisme peut bien aussi s'appliquer en Angola108 pour ce qui concerne son adoption par la Constitution Angolaise de 2010. La logique du contrôle hégémonique du pouvoir est aussi celle du MPLA, le parti dominant au pouvoir en Angola qui a contrôlé et déterminé l´adoption de la nouvelle Constitution angolaise. Ainsi, la décentralisation restera ajournée par les anciens partis uniques aussi longtemps qu´elle constituera une menace à leur pouvoir hégémonique. Cela va contre les attentes des anciennes guérillas qui y voient au contraire une opportunité politique.

105DO ROSÁRIO, Domingos Manuel : Les mairies des "autres" : une analyse politique, socio-historique et culturelle des trajectoires locales. Le cas d'Angoche, de l'Île de Mozambique et de Nacala Porto. Thèse soutenue à l’Université Montesquieu-Bordeaux IV, 2009.

106 ibidem. p.379.

107 Pour utiliser les mots de Michel Cahen, nous avons " RENAMO contre FRELIMO: la brousse contre la ville". CAHEN, Michel : Resistência Nacional Moçambicana- de la victoire à la déroute? Pluripartisme sans pluralisme et hégémonie sans stabilité. Revue Européenne d’analyse des Sociétés politiques, nº17, 2009.p.11.

108ORRE,Aslak :Autarquias em Angola: Qual o problema do “gradualismo”?

Sous-section II. La décentralisation : le chemin pour le pouvoir

Didier PLECARD écrivait par rapport à l´Angola que,

«La guerre est indissociable de la formation de l´Etat postcolonial […] parce que la poursuite de la guerre après l´indépendance a marqué profondément l´économie politique des pouvoirs»109.

Cette affirmation, qui s'applique aussi au Mozambique, montrait combien la lutte militaire entre les anciens partis uniques au pouvoir (MPLA et FRELIMO) et les anciennes guérillas (UNITA E RENAMO) a dicté et dicte encore l´organisation de l´espace politique, dans ces deux pays.

Si le discours politique sur la décentralisation reste très influencé par les idées des anciens partis uniques sur la décentralisation, il est aussi influencé par les idées des anciennes guérillas dont l'importance politique demeure indéniable.

Certes, après la fin de la guerre, l´importance politique de chacune de ces anciennes guérillas n´aurait pas aujourd´hui la même intensité110. Cela se traduit bien dans leur position politique et institutionnelle111, dans chacun de ces pays. Mais le système politique reste un système bipolarisé dans ces deux pays, dominé par les rapports des forces entre ces anciens ennemis militaires, aujourd´hui adversaires politiques. Cette bipolarisation politique doit être comprise, comme nous explique Luis DE BRITO en se référant au Mozambique, comme «le prolongement du conflit armé en temps de paix et non comme le résultat d´un jeu politique ouvert et démocratique»112.

109PÉCLARD, Didier : Les chemins de la «reconversion autoritaire» en Angola. Politique Africaine. Nº110, Karthala, 2008.p.06

110Ce que fait qu´en Angola où il y a eu une victoire militaire du MPLA sur l´UNITA, le MPLA soit plus

en position de "dicter les règles de la transition vers la paix et de contrôler strictement le processus de «démocratisation» qui l´accompagne" comme l´affirme Didier Péclard. Ibidem, p. 12.

111Par exemple, alors, que le RENAMO représente presque 30% des membres à l´Assemblée nationale, l´UNITA représente 18%, avant les dernières élections de 2014 au Mozambique et 2017, en Angola.

En d´autres termes, c´est plus l´importance politique construite durant les guerres que l´existence de véritables projets qui donnent leur importance politique à ces anciennes guérillas.

Quoi qu´il en soit, la place politique de ces anciennes guérillas devenues, aujourd´hui, principaux partis d´opposition est indéniable. Cela en fait des acteurs politiques incontournables pour ce qui est du processus de changement politique, social et administratif. Ils le sont donc aussi pour ce qui est de la décentralisation.

La question de la décentralisation passerait, dans ces pays, par la prise en compte du discours de ces anciennes guérillas, aujourd´hui acteurs politiques majeurs.

Les guerres civiles qui ont ravagé l´Angola 2002) et le Mozambique (1975-1992), sont l´une des principales similitudes entre ces deux pays. L´une des principales causes qu´on leur attribuait était d´en finir avec le marxisme-léninisme et la centralisation du pouvoir des anciens partis uniques dès l'indépendance113114, en établissant une décentralisation comme mode d´organisation politique et administrative. Ainsi la décentralisation est-elle, pour ces anciennes guérillas un «casus belli».

Cette lutte pour la décentralisation de ces anciennes guérillas est justifiée aussi par la capacité qu´ils lui attribuent de changer la distribution du pouvoir dans ces pays. La décentralisation permettrait, selon eux, de partager le pouvoir toujours «confisqué» par les anciens partis uniques, dans ces pays.

En d´autres termes, une analyse des positions et actions politiques de ces anciennes guérillas révèlerait aussi une vision instrumentaliste de la décentralisation. Elle n'est à leurs yeux qu'une opportunité d´accès au pouvoir. D´ailleurs, on pourrait dire à leur égard, qu´en matière de décentralisation, «The enemy as model», pour utiliser une expression de Michel CAHEN115.

113 CAPOCO, Zeferino: Op. Cit.; GEFFRAY, Christian: Op. Cit.

114Pour certains auteurs la guerre civile au Mozambique n´était qu´une guerre d´agression perpétré par le régime raciste de l´Afrique du Sud et par l´ancien Rhodésie du Sud, actuellement, Zimbabwe. DE BRITO, Luis : Le FRELIMO et la construction de L'Etat national au Mozambique. Le sens de la référence au marxisme (1962-1983). p.04.

115CAHEN, Michel: «The enemy as model». Patronage as a Crisis Factor in Constructing Opposition in Mozambique. OXPO - Oxford Sciences Po Research group - http://oxpo.politics.ox.ac.uk.

La posture des anciennes guérillas face à la décentralisation peuvent se justifierait par le fait qu´ils ont, comme les anciens partis uniques, une idée autoritaire et centraliste du pouvoir. Ils ne veulent pas véritablement en finir avec la centralisation du pouvoir mais prendre la place des anciens partis uniques. D´ailleurs, à propos de l´UNITA, Christine Messiant disait,

«La direction de l’UNITA est convaincue qu’elle-même représente le peuple [pas une partie] ce qui fait qu’il n’est pas étonnant non plus que l’UNITA n’ait pas défendu le fédéralisme [une forme aussi de décentraliser le pouvoir]»116.

L´instrumentalisation des revendications décentralisatrices par les anciennes guérillas serait démontrable par son indifférence ou mutisme dans les moments clés de la vie politique de ces pays, où la décentralisation pouvait être demandée avec plus de vigueur, notamment lors des accords de paix et révisions constitutionnelles. Cela amène même à se demander si la décentralisation était, véritablement ce «casus belli».

Ainsi, décentraliser viserait aussi répondre aux revendications des anciennes guérillas, qui se sont battues ou se battent, «manu militari» pour elle. Cela s´avérait être le seul chemin vers le pouvoir politique tant souhaité par elles (1). Néanmoins, on déplore le manque d´action de ces guérillas dans les moments clés de la vie politique de ces pays pour l´établissement de la décentralisation, ce qui confirme leur vision instrumentaliste de la décentralisation (2).

116MESSIANT, Christine: Angola, les voies de l’ethnisation de la décomposition « transition à la démocratie ou arche à la guerre ? Op. Cit., p.190.