• Aucun résultat trouvé

AIF-mediated caspase-independent necroptosis requires ATM and DNA-PK-induced histone H2AX

2. Mitochondrie et système hématopoïétique

2.4. AIF et système hématopoïétique

2.4.2. Régulation de la mort des lymphocytes T en périphérie

Une autre partie de leurs résultats s’est focalisée sur le rôle d’AIF dans la mort des lymphocytes T en périphérie. Comme nous l’avons déjà dit précédemment, les lymphocytes T meurent en l’absence de signaux de survie (ACAD) ou après activation (AICD). AIF serait nécessaire au premier type de mort car les blastes obtenus à partir de lymphocytes T Hq sont moins sensibles à la ACAD (225). Les auteurs suggèrent qu’AIF aide dans ce cas à la libération du cytochrome c. Ils ont également étudié l’AICD dans les blastes T Hq et ont à l’inverse observé une sensibilité accrue de ces derniers. Ils l’expliquent par une augmentation de ROS favorisant l’induction de l’AICD. Le traitement des blastes T à un mimétique de SOD, MnTBAP, rétablit une sensibilité à la mort comparable aux WT. Le rôle antioxydant d’AIF est encore avancé par les auteurs pour expliquer ce résultat.

D’autres études suggèrent une implication d’AIF dans l’induction ou l’exécution de la mort cellulaire des lymphocytes T. La protéine Scythe a été identifiée comme facteur interagissant avec AIF pour l’exposition des phosphatidylsérines de lymphocytes T en train de mourir (226). Cela permet

179 l’élimination correcte des cellules mortes par les macrophages. Un autre partenaire d’AIF a été découvert chez les T : l’histidine phosphatase TULA (64). Possédant un domaine SH3, un domaine de liaison à l’ubiquitine et un domaine phosphatase, TULA interagit avec la signalisation des récepteurs à protéine kinase. Une étude a montré son implication dans l’apoptose des T, d’une façon indépendante de la signalisation TCR ou des caspases. TULA interagit avec l’AIF cytosolique où il permet probablement AIF d’interagir avec d’autres partenaires de mort cellulaire.

Au vu de la littérature actuelle sur le rôle d’AIF dans le système hématopoïétique, l’intérêt d’étudier les fonctions de ce facteur apoptotique dans un modèle d’invalidation génique se trouve justifié. Le modèle Hq a en effet mis en évidence l’importance d’AIF dans le développement des T et dans la régulation de la mort en périphérie des T matures. Cependant ce modèle demeure celui d’une diminution et non d’une disparition d’AIF. D’autre part, les travaux accumulés ces dix dernières années dans le domaine de l’immunologie et de l’hématologie ont démontré l’importance capitale du métabolisme mitochondrial dans la régulation de nombreuses sous-populations et de leur différenciation. Nous voyons dans la délétion d’AIF restreinte au système hématopoïétique un moyen d’étudier à la fois les fonctions d’AIF et de comprendre le rôle de l’OXPHOS et du métabolisme mitochondrial en général dans l’hématopoïèse dans un premier temps, dans des lignages spécifiques dans un second temps.

181

10 11 12

Endogenous Aif locus

11 12 NEO FRT FRT LoxP LoxP Targeting vector 10 11 12 NEO FRT FRT LoxP LoxP 10

Targeted Aif locus

11 12

FRT

LoxP LoxP

10

+ FLP

Floxed Aif locus

AIF Fl/Y

Figure 1

CHAPITRE 2: RESULTATS

Avant de pouvoir présenter le travail réalisé dans le cadre de la délétion d’AIF spécifique au système hématopoïétique, je souhaite tout d’abord présenter quelques résultats obtenus dans le modèle de délétion d’AIF de façon ubiquitaire ainsi que les observations recueillies sur les MEFs déficientes pour AIF. Ils confirment en partie la littérature précédente mais apportent aussi des précisions quant à la succession des modifications entrainées par la perte d’AIF. Il est par ailleurs intéressant de vérifier quelles sont les altérations cellulaires dans ce modèle murin inédit avant de considérer leur extrapolation au système hématopoïétique.

La création de la lignée AIF floxée a été rendue possible par l’insertion de deux séquences loxP de part et d’autre de l’exon 11 dans des portions introniques (figure 1). L’excision par la cre recombinase de cet exon conduit à l’introduction d’un codon stop dans le cadre de lecture du gène AIFM1 et à la perte de la protéine AIF. Afin d’assurer la délétion d’AIF de façon ubiquitaire, nous avons croisé des mâles issus de lignée floxée pour AIF avec des femelles de la lignée exprimant la cre recombinasse sous le contrôle du promoteur PGK-cre (227). Cela permet l’excision du gène AIF dès le premier stade embryonnaire et conduit à des altérations du développement embryonnaire.

Figure 1 : Schéma de construction de la souris AIF floxée

Représentation partielle du locus AIF murin lié à l’X et du vecteur cible comportant les séquences LoxP, du locus d’AIF modifié après recombinaison homologue puis du locus excisé de la cassette neo après expression transitoire de la Flp recombinase. L’exon 11 est flanqué de séquences LoxP (triangles gris) et la cassette neo est flanquée de séquences FRT.

La perte d’AIF entraine une létalité embryonnaire des mâles hémizygotes au stade E10.5 en accord avec les modèles réalisés par Joza et collaborateurs (154) ainsi que Brown et collaborateurs (153). Le croisement devant permettre l’obtention à la naissance de 25% de mâles KO pour AIF ne permet en effet d’en observer aucun (figure 2A). L’observation des embryons aux stades précédents E7.5, E8.5 et E9.5 permet de constater une croissance des mâles KO extrêmement réduite à partir de E8.5 au vu de la taille des embryons (figure 2A). Ces derniers possèdent néanmoins 4 membres et une morphologie extérieure apparemment normale excepté la présence d’un tube neural mal refermé.

A B

MWT β-Actine AIF 42 kDa 62 kDa MKO 39 kDa 70 kDa 45 kDa 17 kDa 55 kDa 30 kDa ATP5B COX4I2 UQCRC2 SDHA NDUFA9 NDUFS3 Complexe I Complexe II Complexe III Complexe IV Complexe V

D

Stage Y/+ Expected Observed +/- Y/-Birth 50% 25% 25% 0% 0% x10 x16 500µm x24500 MWT MKO MWT MKO

C

Figure 2

MWT MKO FWT FWT/KO E7.5 E8.5 E9.5 +/+ 25% 25% 50%

Figure 2 : Caractérisation des embryons obtenus par inactivation ubiquitaire d’AIF

(A) Tableau de statistiques attendues et obtenues pour les naissances issues du croisement AIF floxé par PGK-cre recombinase. En dessous, les photos des embryons des quatre génotypes possibles sont présentés à trois stades différents. (B) Analyse western blot de l’expression d’AIF et de différentes sous-unités des complexes respiratoires dans les embryons à E9.5. La charge protéique est contrôlée par la $-actine. (C) Analyse histochimique pour détecter l’activité COX et SDH dans les embryons E9.5 WT et KO. (D) Analyse par microscopie électronique de coupes d’embryons à E9.5. Noter les mitochondries plus courtes et les crêtes irrégulières dans les KO.

183 Une analyse par western blot permet de confimer la perte d’AIF dans ces embryons mais aussi une diminution drastique de l’expression protéique du complexe I et du complexe IV, associée à une diminution du complexe III (figure 2B). Les activités enzymatiques du complexe II et du complexe IV sont mesurées sur coupes histologiques des embryons à E9.5 à l’aide d’un double marquage COX/SDH. Le DAB (3,3’-diaminobenzidine) est utilisé comme donneur d’électrons du complexe IV au niveau de l’activité cytochrome c oxydase et produit un marquage orangé une fois oxydé. Le NBT (nitroblue tetrazolium) est utilisé comme accepteur d’électrons du complexe II au niveau de la succinate déshydrogénase et est de couleur bleue une fois qu’il est réduit. Si les deux complexes ont une activité normale, le marquage est brun foncé comme nous pouvons l’observer sur les coupes d’embryons WT. L’analyse des embryons KO démontre par contre un dysfonctionnement général de la chaine respiratoire car il n’y aucun marquage (figure 2C). Les analyses des mitochondries des tissus embryonnaires par microscopie électronique confirment une altération des mitochondries dans les embryons KO, notamment une taille réduite et des crêtes mitochondriales moins visibles et délimitées (figure 2D). L’ensemble de ces défauts observés sur les embryons déficients pour AIF peut être à l’origine de leur retard de croissance et de leur létalité.

Pour étudier plus facilement les conséquences cellulaires associées à AIF, nous avons par ailleurs développé des MEFs primaires à partir d’embryons porteurs de l’allèle floxé pour AIF et du transgène codant la cre recombinase inductible par le tamoxifène. L’excision du gène AIFM1 et donc la perte d’AIF est alors induite par l’ajout de tamoxifène in vitro et suivie au cours du temps à D4, D8, D12 et D16. L’étude de ces MEFs de D4 à D16 démontre la diminution de la protéine AIF dès deux jours après ajout du tamoxifène (figure 3A). Cette perte est très importante dès 6 jours et considérée totale après 12 jours. La diminution du complexe I de la chaine respiratoire est corrélée à la perte d’AIF mais de façon décalée dans le temps de 6 jours. Les complexes II, III et V ne diminuent pas tandis que le complexe IV voit sa sous-unité COX1 stable et sa sous-unité COX4I2 réduite en même temps que les sous-unités du complexe I. Comme nous l’avons précédemment vu dans l’introduction, les complexes respiratoires I, III et IV s’associent en supercomplexes. Ces entités peuvent être détectées par des techniques d’électophorèse non dénaturantes sur mitochondries purifiées. Cette analyse nous a permis de vérifier que l’absence d’AIF entraine une perte des supercomplexes dès 8 jours après l’ajout de tamoxifène, soit au moment où le complexe I commence à diminuer lui aussi (figure 3B). L’analyse de l’activité enzymatique du complexe I par l’ajout de NADH/NBT sur gel indique que le complexe I libre disparaît et que le peu de complexe I restant est retrouvé essentiellement dans les supercomplexes, surtout la forme I et III2 à 16 jours. Suite à ces résultats, nous avons mesuré la consommation d’oxygène des cellules pour estimer les répercutions fonctionnelles des diminutions de complexes et de

supercomplexes. Comparée aux cellules WT, la mesure de la consommation d’oxygène en conditions non perméabilisées est très diminuée dans les MEFs KO tant à l’état basal qu’à l’état découplé par FCCP de conditions maximales de transfert d’électrons (figure 3C). La perméabilisation des mêmes cellules et l’ajout successif d’inhibiteurs et de substrats adéquats permettent la mesure de la consommation d’oxygène associée à chaque complexe individuellement des autres complexes respiratoires (figure 3D). Cette analyse démontre une forte diminution de l’activité du complexe I, mais aussi du II, du III et du IV. La chaine respiratoire est donc entièrement affectée par la perte d’AIF.

A B

E

kDa ATP5B COX4I2 UQCRC2 SDHA NDUFA9 AIF NDUFS3 C I C II C III C IV C V COX1 62 39 + 4’OHTA (Days) 0 1 2 3 4 6 8 10 12 14 16 18 20 30 70 49 57 17 56 42 kDa NDUFA9 UQCRC2 COX4I2 500 200 Co. 4 8 12 16 + 4-OH TA (Days) 900 1500 SC WBlot C I WBlot C III WBlot C IV C I Activity C I2+ C III2 C I + C III2+C IV C I + C III2 C I SC 0 20 40 60 80 100

Complex I Complex II Complex III Complex IV

Co. D16

C

Uncoupled condition Co. D16 100 80 60 40 20 0 Coupled condition Co. D16 % of activity D16 D12 Co.

D

100 80 60 40 20 0 % of activity % of activity

Figure 3

Figure 3 : Caractérisation des MEFs invalidées pour AIF

(A) Analyse western blot de l’expression d’AIF et des complexes respiratoires des lysats protéiques obtenus à partir de MEFs traitées 4’OHTA. (B) Analyse par western blot de la présence du complexe I sous forme libre et associée en supercomplexes réalisée sur gel natif à partir de mitochondries purifiées. Activité en gel du complexe I dans les mitochondries purifiées perméabilisées. Les bandes observées correspondent à l’activité NADH déshydrogénase. Les complexes III et IV sont aussi détectés par western blot sur gel natif. (C) Mesure de la consommation d’O2 (par une électrode de Clark) couplée ou non à la production d’ATP dans des MEFs non perméabilisées. (D) Activités spécifiques des complexes calculées grâce aux consommations d’O2 obtenues avec le(s) substrat(s) et l’inhibiteur spécifique de chaque complexe. …

185 Ces modifications de l’OXPHOS ne sont pas les seuls changements que nous observons dans les cellules AIF KO. Le réseau mitochondrial est également très affecté. Ainsi l’utilisation de sondes fluorescentes et de la microscopie électronique a permis de visualiser ce réseau au cours du temps : suite à la perte d’AIF, les mitochondries fusionnent excessivement à D12 avant de finalement fissionner et se fragmenter (figure 3E). Comme l’indiquent l’expression du facteur de transcription PGC-1! et l’incorporation de la sonde Mitotracker Green FM, la masse mitochondriale est néanmoins augmentée dès D4 et va continuer de croître jusqu’à D16 (figure 3F, 1er et 2ème graphiques). Finalement, le potentiel mitochondrial créé normalement grâce au gradient de protons provenant de l’activité OXPHOS est diminué de façon croissante de D4 jusqu’à D16 (figure 3F, dernier graphique).

… (E) Analyse par microscopie confocale du réseau mitochondrial grâce à la sonde Mitotracker Red et par microscopie électronique de la morphologie des mitochondries. (F) Mesure de la masse mitochondriale, du potentiel mitochondrial normalisé et de l’expression de PGC-1.

Les dysfonctionnements observés dans les mitochondries déficientes en AIF conduisent à une augmentation des ROS mitochondriaux mesurés avec la sonde spécifique MitoSOX (figure 4A). Les ROS cellulaires mesurés avec la sonde H2DCFDA s’en trouvent également élevés au même moment (figure 4B). Comme on pourrait l’attendre, plus précocement dès 8 jours, nous constatons l’augmentation de la quantité d’ARNm de la superoxide dismutase 2 (SOD2), enzyme détoxifiante de ROS localisée dans la mitochondrie (figure 4C). Le destin des cellules se trouve altéré par la perte d’AIF puisque le pourcentage de cellules en phase S s’effondre jusqu’à atteindre 2% au lieu de 16% (figure 4D). Cela témoigne d’un arrêt important du cycle cellulaire. La viabilité n’est pas pour autant affectée

Figure 4 : Conséquences de la perte d’AIF sur la production de ROS et le destin cellulaire

(A) Mesure de la quantité d’anion superoxyde mitochondrial (sonde MitoSOX) dans les MEFs traitées au 4’OHTA (B) Mesure des ROS intracellulaires par la sonde H2DCFDA (C) Expression de l’ARNm de la superoxyde dismutase 2 (D) Analyse du cycle cellulaire par double marquage Brdu/IP. Deux profils de cytométrie en flux représentatifs sont présentés. Le pourcentage de cellules en phase S est représenté dans un histogramme (E) Analyse de la viabilité des MEFs (AnnexineV-IP-) (F) Evaluation de la sénescence par l’utilisation de substrats fluorescents (C12FDG) ou colorés (X-gal) de la $-galactosidase. Un profil cytométrique, des photos et un histogramme sont présentés.

187 (figure 4E), c’est la sénescence qui suit l’arrêt du cycle cellulaire comme le démontre l’utilisation de substrats fluorescents ou colorés de la β-galactosidase (figure 4F).

En conclusion, la perte d’AIF dans les MEFs entraine de fortes perturbations dans la composition et la fonctionnalité de l’OXPHOS accompagnées de modifications drastiques du réseau mitochondrial. Les quantités de ROS sont augmentées et les cellules cessent de proliférer. Elles n’entrent majoritairement pas en apoptose mais en sénescence. Des travaux sont en cours pour savoir si les tissus embryonnaires subissent les mêmes conséquences en terme de mort, de prolifération et de sénescence. Le modèle que nous avons créé confirme ainsi le lien entre AIF et le complexe I ou les supercomplexes. Il met en évidence les conséquences sur le réseau mitochondrial et la production des ROS qui avaient été décelées dans d’autres modèles comme celui de la délétion d’AIF dans les neurones (111). Il démontre aussi l’impact néfaste que cela peut avoir sur la croissance cellulaire via l’induction de la sénescence après arrêt du cycle cellulaire. Toutes ces observations constituent des bases pour comprendre le travail effectué dans le système hématopoïétique. Il n’en reste pas moins que ce système peut s’avérer différent des embryons et des MEFs en plusieurs points, entre autres pour ce qui est de la manifestation et l’interprétation du stress cellulaire induit par la perte d’AIF. Les cellules hématopoïétiques peuvent effectivement avoir des propriétés métaboliques et mitochondriales assez éloignées des MEFs par exemple.

La délétion d’AIF compromet l’hématopoïèse et le développement thymique