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Régulation de la libération d’AIF – rôle des calpaïnes, des BH3-only et de BID

AIF-mediated caspase-independent necroptosis requires ATM and DNA-PK-induced histone H2AX

1. Régulation de la libération d’AIF – rôle des calpaïnes, des BH3-only et de BID

Cette partie de mon travail de thèse a démontré l’existence d’un lien entre les calpaïnes et l’activation de BAX via le clivage de BID dans la nécroptose intrinsèque induite par le MNNG. D’autres études avaient préalablement identifié la possibilité d’une protéolyse de BID par les calpaïnes. Des expériences menées par l’équipe de R.A. Gottlieb avait en effet mis en évidence en 2001 le clivage de la protéine BID par la µ-calpaïne (calpaïne I) au niveau du résidu Gly70 lors de l’ischémie/reperfusion d’un cœur de lapin (73). Un peu après, Mandic et collaborateurs démontraient le clivage in vitro de la protéine recombinante humaine BID par la m-calpaïne (calpaïne II) (74). L’élution du fragment clivé avait alors conduit à l’identification du site de clivage entre la Gly70 et l’Arg71. Les fonctions de cette forme de BID clivée par les calpaïnes avaient été vérifiées et confirmaient l’induction de la sortie du cytochrome, donc de la perméabilité mitochondriale. Notre étude n’a pas permis de distinguer quel type de calpaïne, I ou II, permettait le clivage de BID dans la mort induite par le MNNG. Pour valider le rôle des calpaïnes dans ce type de mort, nous avons en effet utilisé des MEFs déficientes pour la sous-unité

catalytique Capn4 commune aux calpaïnes de type I et II. De plus, les mutants non clivables de BID que nous avons créés ne concernent pas une calpaïne plus que l’autre car les deux études précédentes avaient impliqué le même résidu Gly70. Il est de toute façon possible que plusieurs types de calpaïnes soient activés en raison de la forte augmentation de calcium (augmentation que nous commenterons plus loin). BID n’est d’ailleurs pas la seule protéine de la machinerie apoptotique à pouvoir être clivée par ces protéases dépendantes du calcium: c’est le cas de BCL-XL, de la caspase-12 (75), de XIAP et même de BAX (76). Ce dernier s’est avéré non clivé par les calpaïnes dans notre modèle. Cela peut être étonnant et pourrait s’expliquer par la compartimentalisation différente de BAX et BID. Il est aussi probable que la conformation de BAX ou sa séquestration par d’autres protéines ne permette pas l’accès des calpaïnes au site de clivage dans le cas de BAX. Ce site est en effet reconnu par les calpaïnes par sa structure tertiaire/quaternaire et non primaire comme les caspases. La conformation de la protéine joue donc encore plus un rôle primordial dans l’accessibilité aux substrats. Lors de la détermination des mutants non clivables de BID, nous appréhendions une impossibilité de muter simplement ce site de façon similaire au mutant non clivable par les caspases. C’est pourquoi nous avions prévu deux mutants de BID, l’un muté sur la Gly70, l’autre délété pour 4 acides aminés (positions 68 à 71) de cette région. Les deux mutants se sont révélés finalement résistants au clivage par les calpaïnes, peut-être car le remplacement de la Gly70 par une Ala perturbe déjà la structure de cette séquence d’acides aminés. Une autre protéine majeure de la nécroptose intrinsèque est clivée par les calpaïnes : AIF. De nombreux travaux ont démontré l’existence d’un clivage d’AIF par ces protéases lors de la mort cellulaire, clivage qui permet d’éliminer son ancrage à la membrane interne mitochondriale. Ainsi, les calpaïnes permettent à la fois la libération d’AIF dans l’espace intermembranaire mitochondrial via son clivage et la libération de ce même facteur dans le cytosol via l’activation protéolytique de BID et l’activation de BAX qui s’en suit !

Notre étude a par ailleurs écarté BIM et BAD comme régulateurs majeurs de la nécroptose intrinsèque induite par le MNNG. Ces deux BH3-only étaient pourtant susceptibles d’être activées par les JNK kinases (77, 78), enzymes impliquées dans notre modèle d’étude selon Xu et collaborateurs (79). Il semble ainsi que de façon analogue à d’autres types de mort cellulaire, plutôt apoptotiques, les différentes protéines de la famille BH3-only ne sont pas systématiquement activées ensemble. Selon les signaux inducteurs de mort, différentes combinaisons de BH3-only sont impliquées. Par exemple, la déprivation en cytokines active BIM, PUMA, BAD alors que les inhibiteurs de tyrosine kinases utilisés en chimiothérapie font intervenir BIM, BMF et BAD (8). Le dommage à l’ADN conduit fréquemment à l’activation de PUMA et NOXA, via notamment leur régulation par p53. Il aurait pu être intéressant de se pencher sur leurs fonctions dans la nécroptose intrinsèque dans la mesure où nous l’induisons par

111 dommage à l’ADN. De la même manière que BID, PUMA est en plus un activateur potentiel direct de BAX qui peut l’aider à s’insérer dans la membrane mitochondriale (9). Le réseau de protéines de la famille BCL-2 intervenant dans la nécroptose intrinsèque induite par le MNNG est suceptible d’être plus important que celui que nous avons jusqu’ici décrit : BCL-2, BAX et BID. Ces trois derniers sont essentiels car leur suppression perturbe l’excécution de la mort cellulaire. Néanmoins, nous ne pouvons pas exclure la participation d’autres membres dont la redondance avec d’autres protéines ne permet pas la mise en évidence de leur importance.

Nos travaux démontrent aussi la possibilité pour des BH3-only telles que BID de réguler plus que l’apoptose, et notamment la nécroptose. Ce n’est pas le seul membre de cette famille à pouvoir réguler la nécrose car c’est apparemment le cas de BNIP3 et de BMF (80). Il est envisageable que les membres de la famille BCL-2 régulent les voies de mort cellulaire au delà de l’induction perméabilité de la membrane mitochondriale externe MOMP. Elles possèdent en effet d’autres nombreuses fonctions liées à la dynamique mitochondriale et à l’homéostasie du calcium qui pourraient très bien intervenir dans l’exécution de divers types de mort (21). Dans notre modèle en particulier, BID et BAX pourraient favoriser la fission et altérer la formation des crêtes d’une part. Ces changements participeraient ainsi à la libération d’AIF des mitochondries. Il faut noter que le réseau mitochondrial est très fragmenté dans le cas de notre modèle d’étude mais il est difficile de déterminer si ces altérations précèdent ou non l’induction de perméabilité mitochondriale. D’autre part, la formation du PTP à laquelle BID et BAX contribuerait aurait également pour conséquence de favoriser la sortie d’AIF (81). Des études en 2005 et 2008 avaient déjà conduit à l’identification de BID comme régulateur de la sortie d’AIF via l’activation du PTP (82, 83). Nous avions effectué quelques expériences préliminaires pour tester cette hypothèse en ayant recours à des inhibiteurs du PTP comme la cyclosporine A, inhibiteur de la cyclophyline D, et l’acide bongkrékique, inhibiteur de l’ANT. Les résultats obtenus ont conduit à l’exclusion de cette possibilité car aucune inhibition de la perméabilité mitochondriale ou de la mort n’avait pu être constatée. L’utilisation de cellules MEFs invalidées pour la cyclophyline D compléterait cette étude en ce sens et pourrait permettre de préciser, dans la nécroptose intrinsèque induite par le MNNG, les régulateurs de la sortie d’AIF dans le cytosol.

Les protéines de la famille BCL-2 et notamment les BH3-only ont aussi été associées à l’autophagie. Il est tout à fait possible que la nécroptose intrinsèque induite par le MNNG induise des mécanismes d’autophagie et une réponse à un stress énergétique en général. Cette voie de mort s’accompagne en effet d’une chute majeure d’ATP et de NAD. Ces signaux peuvent moduler les voies AMPK-mTOR-autophagie (pour plus de détails sur ces voies, voir le premier chapitre du deuxième tome). Trois études

se sont plus particulièrement focalisées sur le lien entre ces voies de signalisation et l’induction de la mort par le MNNG. En effet, l’hyperactivation de PARP-1 associée à la déplétion énergétique et la production de ROS entraine l’activation d’AMPK, l’inhibition de mTOR et l’activation de l’autophagie (84). Zhou et collaborateurs ont alors démontré en 2013 que l’autophagie induite par AMPK dans ce contexte protégeait la cellule de la mort (85). Des travaux menés par Huang en 2014 ont ensuite montré que les cellules Atg5-/- étaient plus susceptibles à la mort induite par le MNNG (86). Ils suggèrent que des défauts dans le contrôle qualité mitochondrial soient responsables de leur fragilité plus que des défauts dans l’induction de l’autophagie. Il est possible que la signalisation d’autophagie participe donc à l’exécution de la nécroptose. Il serait intéressant d’au moins vérifier l’induction de l’autophagie dans notre modèle expérimental. Dans ce contexte, BID ou d’autres BH3-only pourraient induire l’autophagie d’une façon analogue à ce que feraient BAD et BIK via leur perturbation des associations BCL-xL/Beclin ou BCL-2/Beclin.