• Aucun résultat trouvé

AIF-mediated caspase-independent necroptosis requires ATM and DNA-PK-induced histone H2AX

2. Mitochondrie et système hématopoïétique

2.2. Rôle de la mitochondrie dans la régulation du système hématopoïétique

2.2.2. Phosphorylation oxydative dans les T

Le métabolisme du lymphocyte T évolue en fonction de son état : naïf, effecteur ou mémoire. Lors de la rencontre avec l’antigène, le lymphocyte T naïf passe à un état activé, hyperproliférant et se différencie en lymphocyte effecteur. Une fois le pathogène éliminé, la plupart des lymphocytes T effecteurs est éliminée mais une faible proportion d’entre eux se différencie en lymphocytes T mémoires (189). Ces derniers ont une durée de vie allongée pour maintenir possible une réponse plus rapide spécifique de cet antigène en cas de réinfection future.

De façon similaire à des cellules non proliférantes, les lymphocytes T naïfs présentent un état métabolique qualifié de quiescent où la glycolyse est faible et le pyruvate qu’elle génère sert à produire de l’ATP via la phosphorylation oxydative ou la β-oxydation des acides gras (Figure 27). La quiescence des cellules naïves est contrôlée par divers mécanismes mais la régulation du métabolisme en fait partie. Les lymphocytes T invalidés pour TSC1, régulateur négatif de mTOR, prolifèrent trop et perdent leur état naïf (175).

Figure 27 : Programmes métaboliques des lymphocytes T

Les lymphocytes T quiescents oxydent le pyruvate dérivé du glucose en même temps que les lipides et acides aminés afin de produire suffisamment d’énergie requise pour la surveillance immunitaire. Suite à l’activation, l’oxydation des lipides est diminuée et la glycolyse augmente avec l’oxydation de la glutamine afin de produire des précurseurs de biosynthèse nécessaires à la croissance cellulaire et la prolifération. A la fin de la réponse immune, les cellules qui survivent deviennent des lymphocytes T mémoires et reviennent à l’oxydation des lipides. Ils présentent une capacité respiratoire augmentée et plus de mitochondries. Selon les sous-populations de T, les profils métaboliques vont aussi varier en accord avec leurs fonctions. Le programme métabolique et ses régulateurs clés sont indiqués pour chaque sous-type T au milieu de la figure.

165 Quand le lymphocyte T rencontre l’antigène spécifique de son TCR, il passe à un état métabolique activé favorisant les voies métaboliques anaboliques. Le lymphocyte T activé repose alors sur une glycolyse aérobie, c’est à dire une conversion du pyruvate en lactate malgré la disponibilité en oxygène pour la phosphorylation oxydative. C’est l’effet Warburg observé dans le cas des tumeurs (190). L’assimilation du glucose et des acides aminés est augmentée grâce à l’expression favorisée par le TCR de transporteurs du glucose et des acides aminés. L’interleukine 2 (IL-2) et le facteur de costimulation CD28 aident au switch glycolytique des T activés en induisant l’activation d’AKT dépendante de PI3K qui conduit à l’activation de mTOR. La β-oxydation des acides gras est inhibée tandis que la phosphorylation oxydative demeure dans un état faiblement actif. L’enzyme GAPDH a un rôle intéressant au carrefour de la glycolyse et l’OXPHOS : elle possède en plus de sa fonction enzymatique dans la glycolyse une fonction immunomodulatrice via sa liaison aux ARNm de cytokines dont elle freine la traduction (191). Quand l’OXPHOS est privilégiée dans un lymphocyte T activé, GAPDH est moins occupée à la glycolyse et se concentre sur ses fonctions immunosuppressives. Le statut d’effecteur requiert donc une activité glycolytique aérobie plus qu’une OXPHOS performante. Cependant la respiration mitochondriale est tout de même importante pour l’activation des T car l’inhibition de l’ATP synthase par l’oligomycine bloque l’expression de marqueurs d’activation et la prolifération des T après liaison du TCR à l’antigène (191). La transition de l’état naïf à l’état mémoire réclame donc soit une production d’ATP mitochondrial soit des produits de la chaine respiratoire comme les ROS. Plusieurs études ont démontré l’importance des ROS dans la prolifération des T activés. Des lymphocytes T dépourvus d’une sous-unité du complexe III, UQCRFS1, montrent des défauts dans la production de ROS dépendante du TCR et des défauts de prolifération (192). Un lien possible entre le TCR et l’activité OXPHOS/production de ROS est l’influx calcique généré par la signalisation du TCR. Entre autres choses, le calcium stimule certaines déshydrogénases du cycle de Krebs ce qui peut conduire à une augmentation de l‘activité OXPHOS et la production de ROS. L’utilisation de lymphocytes T sans BAX et BAK présentant des défauts dans l’homéostasie du calcium en plus de la mort cellulaire a permis d’étayer cette hypothèse (191). Ces lymphocytes T sont en effet incapables de proliférer correctement suite à l’activation du TCR à cause d’un défaut dans la production de ROS. Les voies métaboliques du lymphocyte T sont étroitement reliées aux voies de transduction du signal contrôlées par les récepteurs de surface.

Les lymphocytes T mémoires sont dans un état métabolique proche de celui des lymphocytes naïfs : ils s’appuient sur un métabolisme essentiellement catabolique. Ils possèdent néanmoins une caractéristique bien différente : leur masse mitochondriale est plus importante et leur capacité respiratoire maximale est ainsi augmentée (193). Cette propriété présente l’avantage de pouvoir rapidement générer plus d’énergie en cas de stress ponctuel, via la glycolyse comme l’oxydation des acides gras utilisant aussi

l’OXPHOS. Il a d’ailleurs été montré que suite à l’engagement du TCR, les T mémoires produisent plus d’ATP mitochondrial ce qui favorise leur prolifération rapide. L’IL-15 serait responsable de l’augmentation de la biogenèse mitochondriale dans les T mémoires (Figure 27).

Le passage d’un état effecteur à un état mémoire pourrait être contrôlé par les changements métaboliques subis par les T. L’activation d’AMPK par la metformine augmente la génération de CD8+ mémoires de même que l’inhibition de la voie mTOR par la rapamycine (189). En accord avec ces observations, les lymphocytes T déficients pour l’AMPK n’arrivent pas à produire des CD8+ mémoires après une infection et les souris déficientes pour AMPK ou sa kinase régulatrice LKB1 accumulent des CD8+ activés (194). L’autophagie pourrait participer à ce processus. L’activation de la β-oxydation des acides gras serait elle aussi requise pour cette transition vers l’état mémoire.

Des différences existent également entre les sous-populations de lymphocytes T (Figure 27). Ainsi les T auxiliaires CD4+ dépendent plus de la glycolyse que du métabolisme mitochondrial alors que les T régulateurs s’appuient à la fois sur la glycolyse, l’OXPHOS et l’oxydation des lipides. Les Th17 sont particulièrement dépendants de la glycolyse dont l’inhibition empêche le développement de cette sous-population au profit des Tregs. HIF-1 est un facteur essentiel pour le développement des Th17 en raison de son rôle dans le contrôle de la glycolyse (189). Les Tregs quant à eux reposent plus sur la voie d’oxydation des lipides qui est induite par AMPK et inhibée par HIF-1 (195). Dans le tissu comme dans le sang, le microenvironnement et notamment son influence sur le métabolisme pourrait donc jouer un rôle crucial dans la polarisation des lymphocytes T. Ces différences de métabolisme des sous-populations peuvent être détournées pour des applications thérapeutiques. Par exemple, en atteignant les Th17, l’inhibition de la glycolyse réduit la sévérité d’un modèle murin de sclérose en plaques, l’EAE pour encéphalite auto-immune expérimentale (195). L’inhibition pharmacologique de l’ATP synthase permet d’induire l’apoptose des lymphocytes T alloréactifs donneurs dans la réponse du greffon contre l’hôte (190). Ces lymphocytes alloréactifs ont en effet une phosphorylation oxydative très augmentée et un système antioxydant saturé alors que les lymphocytes T naïfs ont une activité OXPHOS faible ou les T effecteurs expriment beaucoup d’antioxydants.

Encore peu étudié, le métabolisme énergétique d’autres populations immunitaires permettra sans doute des applications thérapeutiques intéressantes. Il a été montré que les cellules dendritiques subissent une augmentation de la glycolyse lors de leur activation via une signalisation TLR (196). Cela pourrait venir d’une inhibition de l’OXPHOS par l’oxyde nitrique généré par les ROS. D’autre part, les lymphocytes B augmentent de façon égale le métabolisme glycolytique et oxydatif lors de leur activation quand les lymphocytes T augmentent plus le métabolisme glycolytique (197). Il y a aujourd’hui néanmoins très peu d’informations concernant ces sous-populations, ce qui mériterait d’être approfondi.

167

2.2.3. Plaquettes

Les plaquettes sont essentielles à la coagulation et l’hémostase mais ont aussi des fonctions dans l’immunité innée et adaptative. Dépourvues de noyau, elles possèdent néanmoins des mitochondries qu’elles utilisent pour la production d’ATP mais aussi d’autres fonctions comme la production de ROS, la transition de perméabilité mitochondriale ou la chute de potentiel mitochondrial. Les plaquettes quiescentes ont recours à la phosphorylation oxydative comme à la glycolyse anaérobie pour leur production énergétique, la première étant responsable de 30 à 40% de cette production (198). L’une compense l’autre si nécessaire lors d’une inhibition d’une voie. La respiration des plaquettes serait très associée à la production d’ATP avec très souvent la sollicitation de la capacité maximale respiratoire. En conditions d’activation, les plaquettes augmentent alors et la glycolyse et la respiration pour répondre à la demande énergétique (199). L’inhibition de la phosphorylation oxydative compromet la sécrétion des granules et l’agrégation plaquettaire. Les ROS interviennent aussi sur la régulation des plaquettes. Leur traitement par des ROS augmente d’une manière générale leur activation. La production de ROS mitochondriaux peut être incitée par une hyperpolarisation mitochondriale conduisant à une fuite d’électrons plus importante par la chaine de phosphorylation oxydative. Ce phénomène est observé dans des conditions d’hyperglycémie et chez des patients diabétiques (198). Les signaux activant les plaquettes tels que le peroxyde d’hydrogène, la thrombine ou le collagène peuvent aussi induire leur apoptose à fortes concentrations. Malgré l’absence de noyau, l’apoptose peut se produire dans les plaquettes via la voie mitochondriale. Le pore de transition mitochondrial jouerait par ailleurs un rôle particulièrement important dans l’élimination des plaquettes car les souris déficientes en CypD ont une réponse très altérée à la thrombine et la rétraction du caillot (199).

La présence de mitochondries dans les plaquettes constitue un outil intéressant lorsqu’il s’agit d’étudier ou de détecter des dysfonctionnements mitochondriaux chez un patient. Elles sont en effet nombreuses et faciles à prélever et pourraient donc être exploitées pour les patients atteints de mitochondriopathies. Cette approche a déjà permis par exemple de montrer que les patients souffrant de la maladie de Parkinson ont une chaine de transport électronique altérée notamment associée à une déficience en complexe I (199).