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C - La régulation insuffisante des charges des CHU

Les charges des CHU, qui s’établissaient à 29,1 Md€ en 2016, ont progressé de 17,3 % entre 2011 et 2016. Cette progression est plus faible que celle enregistrée pour les produits (17,8 %) mais cette tendance n’a pas été suffisante pour combler le décalage qui existait antérieurement à l’année 2011 entre les recettes et les dépenses des établissements.

1 - La prépondérance des dépenses de personnel

La nomenclature comptable regroupe les charges des établissements de santé en quatre titres : les charges de personnel (titre 1), les charges médicales (titre 2), les charges hôtelières et générales (titre 3) et les charges à caractère comptable et financier (titre 4). En 2016, les établissements qui présentent les charges les plus importantes sont l’APHP (7,51 Md€), les HCL (1,75 Md€) et l’APHM (1,37 Md€). À l’inverse, les charges les plus faibles sont comptabilisées dans les CHU de Guadeloupe (341,4 M€), Nîmes (451,3 M€) et Reims (488,3 M€).

La répartition des charges des CHU entre les sous-ensembles qui les composent n’a pas varié depuis 2011. Près de 60 % des dépenses sont ainsi consacrées au personnel (16,8 Md€ sur 29,1 Md€ de charges totales en 2016). Les autres charges, et notamment celles du titre 2 (6,9 Md€ en 2016), sont liées aux dépenses de médicaments et de dispositifs médicaux (5,4 M€), de petit matériel médical, d’entretien des matériels médicaux et des locations à caractère médical.

129 Le troisième plan national consacré aux maladies rares a été rendu public en juillet 2018.

Tableau n° 29 : familles de charges des CHU en 2011 et 2016 (en Md€)

Charges 2011 2016 Progression

(Md€)

Titre 1 personnel 14,7 ( 59,2 %) 16,8 ( 57,7 %) 2,1

Titre 2 charges médicales 5 (20,1 %) 7 ( 24 %) 2

Titre 3 charges hôtelières et générales 1,9 ( 7,7 %) 2,5 ( 8,6 %) 0,6

Titre 4 autres charges 3,2 ( 13 %) 2,8 ( 9,7 %) -0,4

Total des charges 24,8 29,1 4,3

Source : ATIH, calculs Cour des comptes

La progression des dépenses de personnel a connu un ralentissement progressif entre 2011 et 2016. En application du plan ONDAM, la montée en charge de l’ambulatoire et la réorganisation des prises en charge en faveur des alternatives à l’hospitalisation, ont conduit les CHU à réaliser des réductions d’effectifs en retravaillant les plannings et le fonctionnement des unités de soins. Les évolutions sont cependant fortement contrastées entre les CHU. En 2016, 14 CHU ont enregistré une hausse des dépenses de personnel supérieure à 1,7 %, c’est-à-dire plus élevée que celle de la moyenne de ces établissements. Les CHU de Clermont Ferrand, Dijon, Nancy et La Martinique présentaient notamment une progression supérieure à 3 %.

a) La progression importante des charges de personnel médical

Les charges de personnel non médical des CHU représentent en moyenne 68 % des charges de personnel et les charges de personnel médical 23 %. Cette tendance s’observe dans tous les CHU.

Les écarts les plus forts à la moyenne sont observés dans les CHU de Besançon et de Caen dans lesquels ce ratio est de 65 % et dans les CHU de Guadeloupe et de La Réunion pour lesquels les charges de personnel non médical représentent 72 % et 71 % des charges de titre 1.

Tableau n° 30 : évolution des dépenses de personnel non médical et médical des CHU (en M€)

2012 2013 2014 2015 2016 Écart Évolution Personnel non médical 10 879 11 190 11 494 11 645 11 764 885 +8,14 %

Évolution 2,86 % 2,71 % 1,32 % 1,02 %

Personnel médical 3 445 3 506 3 640 3 764 3 899 455 +13,21 %

Évolution 1,79 % 3,82 % 3,40 % 3,60 %

Source : DGOS130, calculs Cour des comptes

La hausse des charges de personnel non médical a été plus contenue (+8,14 %) que celles du personnel médical (+13,21 %), ce qui peut s’expliquer par le caractère stratégique des recrutements médicaux dans des établissements assurant en plus des missions de soin, une mission de formation et de recherche.

130 La DGOS indique que les données ne sont pas disponibles pour l’année 2011.

b) Des facteurs externes qui expliquent une partie de l’augmentation des coûts salariaux dans les CHU

En dépit de la poursuite des mesures d’économies, l’année 2017 présente un montant de charges de personnel de 17,2 Md€, soit une hausse de 2,1 % (+ 362,8 M€) nettement supérieure à celle constatée en 2015 et 2016 (+1,7 %).

Cette augmentation est en décalage avec l’objectif national de hausse de dépenses de personnel fixé à 1,5 % pour les établissements publics de santé en 2017. Elle s’explique en partie par la poursuite de la mise en œuvre du programme national en faveur des mesures salariales qui a conduit à l’augmentation du point d’indice en février 2017 (après celle intervenue en juillet 2016) et à la revalorisation des carrières des fonctionnaires. Ces mesures représentent une progression de 1,4 % de la masse salariale des CHU en 2017, c’est-à-dire 65 % de la progression réalisée effectivement (soit 235,7 M€ sur 362,8 M€).

Les incidences du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) Le protocole pour la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR) conclu le 17 juillet 2015 a débuté en 2016 et doit s’achever en 2020. Ce plan d’action détermine de nouveaux principes pour les axes de la rémunération dans la fonction publique.

L’objectif est de mieux reconnaître les qualifications, de diversifier les recrutements de fonctionnaires et de garantir une meilleure valorisation des carrières.

Le coût prévisionnel de la mise en œuvre de cet accord pour la fonction publique hospitalière est estimé à 351 M€ en 2017, 536 M€ en 2018, 621 M€ en 2019 et 773 M€ en 2020131.

Par ailleurs, d’autres dispositifs pesant sur les charges de personnel ont dû être pris en compte et mis en œuvre par les établissements publics de santé, certaines mesures ayant des incidences spécifiques pour les CHU :

- le plan attractivité des carrières médicales ;

- la hausse du numerus clausus pour les internes et les étudiants en médecine ;

- l’évolution des modalités de rémunération des gardes et astreintes des internes et des étudiants ; - le dispositif de titularisation des personnels contractuels.

Enfin, les établissements publics de santé doivent faire face au coût annuel de la progression de leurs agents dans les grilles de rémunération132 (GVT) qui représente en moyenne une augmentation de 0,4 % à 0,5 % des dépenses de personnel dans les CHU c’est-à-dire 68,8 M€ en 2017.

Dans ces conditions, la limitation de la progression de la masse salariale à hauteur de 1,5 % aurait dû conduire les CHU à accentuer les réductions d’effectifs et les non remplacements des fins de contrats et des départs en retraite en travaillant particulièrement leurs organisations. Force est de constater que le contrôle budgétaire exercé par les ARS lors de l’approbation des états prévisionnels des recettes et des dépenses (EPRD), des PGFP et des comptes financiers n’est pas allé dans ce sens.

131 Cour des comptes, La situation et les perspectives des finances publiques. La Documentation française, novembre 2012, juin 2017, disponible sur www.ccomptes.fr.

132 Cette incidence se mesure à travers le « glissement vieillesse technicité », GVT.

2 - Des charges médicales dont l’augmentation est essentiellement liée au coût de certains traitements nouveaux

Avec un montant de près de 7 Md€, les charges médicales représentent le deuxième poste de dépenses dans les CHU, soit 24 % des 29,1 Md€ de dépenses de l’année 2016. Elles ont progressé de 1,9 M€ depuis 2011 (soit une évolution de 39,1%).

Le poste principal de dépenses dans le titre 2 des CHU est celui des médicaments et dispositifs médicaux qui représente 5,4 Md€ en 2016, dont 3,4 Md€ pour les médicaments. Les hausse du titre 2 sont donc essentiellement liées à l’importance de ce poste de dépense qui a progressé de 1,4 Md€ depuis 2011, ce qui représente 73 % de la hausse des charges médicales observée depuis six ans.

Tableau n° 31 : évolution des charges médicales des CHU entre 2011 et 2016 (en M€)

2011 2012 2013 2014 2015 2016 Écart

T2 charges médicales 5 016 5 360 5 519 6 541 6 666 6 979 1 963

Évolution 6,87 % 2,97 % 18,51 % 1,91 % 4,70 % 39,14 %

Source : ATIH, calcul Cour des comptes

La forte évolution (39,1%) des charges médicales se concentre sur l’année 2014 qui enregistre une hausse de plus de 1 Md€, soit 53 % de la progression cumulée depuis 2011. Cette hausse exceptionnelle était notamment liée à l’introduction de médicaments innovants de lutte contre l’hépatite C. Le coût très élevé de ces traitements (41 000 € pour 12 semaines) n’a été régulé à la baisse qu’à partir de l’année 2015, comme cela a déjà été noté par la Cour des comptes133.

Cette situation propre à l’année 2014 a concerné l’ensemble des CHU. En isolant les comptes de l’APHP (dont les charges de titre 2 représentaient 1,7 Md€ en 2014 soit une hausse de 25% en une année), l’augmentation des charges médicales des autres CHU était de 16,4 % en 2014. De la même manière, la hausse observée sur l’année 2016 (+4,7 %) est en partie liée à l’introduction de nouveaux traitements de lutte contre le cancer dont le surcoût a été estimé à 230 M€ pour les établissements de santé134, sachant que ces traitements sont essentiellement réalisés dans les CHU et les CLCC.

3 - Des dépenses générales et hôtelières insuffisamment contenues

Avec un montant de près de 2,5 Md€, les charges générales représentent le troisième poste de dépenses dans les CHU, soit 8,5 % des 29,1 Md€ de dépenses de l’année 2016. Elles ont progressé de 498 M€ depuis 2011 (+ 24,92 %). Par comparaison, les charges générales des CH dont le budget était supérieur à 70 M€ s’élevaient à 2,1 Md€ en 2016 (soit une augmentation de 17 % depuis 2011). La progression des prix des matières premières et de l’énergie contribue à expliquer ces évolutions.

133 Cour des comptes, « La fixation du prix des médicaments : des résultats significatifs, des enjeux toujours majeurs d’efficience et de soutenabilité, un cadre d’action à fortement rééquilibrer », RALFSS 2017, p 357. La documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.

134 Annexe 7 du PLFSS 2017, p 10.

Tableau n° 32 : évolution des charges générales des CHU entre 2011 et 2016 (en M€)

2011 2012 2013 2014 2015 2016 Écart T3 charges générales 1 997 2 134 2 204 2 253 2 332 2 495 498

Évolution 6,86 % 3,27 % 2,21 % 3,50 % 7,01 % 24,92 %

Source : ATIH, calcul Cour des comptes

Si les achats de produits courants stockés et non stockés des CHU135 apparaissent bien maîtrisés (leur montant en 2016 est identique à celui de 2012 à 764 M€), les prestations extérieures136 et la sous-traitance apparaissent moins bien maîtrisées, passant de 1,1 Md€ en 2011 à 1,28 Md€ en 2016, soit une augmentation de 13 %.

En complément des mutualisations d’achats déjà engagées, la mise en place des fonctions d’achat communes aux GH, accompagnée par les ARS, doit avoir pour objet principal de mieux maîtriser ces coûts.

II - Des marges de manœuvre financières

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