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L’OMS (1993) définit la qualité de vie comme la perception qu’a un individu de sa place dans l’existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lequel il vit et en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. Par ailleurs, l’OMS (2006) indique que la qualité de vie est un large champ conceptuel, englobant de

manière complexe la santé physique de la personne, son état psychologique, son niveau d'indépendance, ses relations sociales, ses croyances personnelles et sa relation avec les spécificités de son environnement. Ces notions de la qualité́ de vie renvoient à l'approche de Maslow (1954) décrivant les conditions de la vie optimale pour chaque individu par référence à une pyramide des besoins (De Coster, 1999). La pyramide des besoins fait apparaître des besoins physiologiques et psychologiques (Maslow, 1954). Selon Maslow (Nicolaieff, 2008) l'accomplissement de ces besoins assure la satisfaction de l'individu et rend sa vie significative. Selon cette approche, la qualité́ de vie est le degré de capacité de l'environnement à fournir les ressources nécessaires pour satisfaire les besoins de l'individu (Lecomte, 1997).

L'approche de Maslow permet de tenir compte des éléments tant objectifs que subjectifs qui couvrent plusieurs dimensions de la vie des personnes âgées immigrantes. On peut mentionner la santé physique, le bien-être psychosocial, le fonctionnement, l'indépendance, le contrôle de la vie et des circonstances matérielles et l'environnement externe (Bowling, 2005). Cet approche a été réaffirmé par l’OMS en 2006, tout en ajoutant que les croyances personnelles de l’individu sont les éléments qui déterminent le plus souvent la qualité de vie et le bien-être de la personne concernée. À ce propos, une étude menée en Suède montre que la qualité de vie est plutôt un concept dynamique pour de nombreuses raisons. Il peut changer de sens dépendamment de ce que les gens dans leur vie réelle considèrent comme important à un moment donné (Carr & Higginson, 2001).

2. La théorie des déterminants sociaux de la santé

Pour être plus précis sur les significations des résultats de notre étude, nous nous appuyons directement sur la théorie des déterminants sociaux de la santé (figure 1). Cette théorie évalue l’influence des éléments de l’intégration socioéconomique sur la santé des immigrants ainsi que sur leur qualité de vie. Cela concerne des éléments liés à l’inclusion (accès à l’emploi, revenu, participation sociale, accès à l’éducation) et d’autres liés à l’exclusion (chômage, pauvreté, besoins, discrimination, disparités de revenu). De plus, ce cadre développé par Dahlgren et Whitehead en 1991 offre un aspect culturellement sensible et pertinent, ce qui le rend cohérent pour notre étude (Durst, 2005; Mikkonen & Raphael, 2010).

Afin de mieux expliquer ce modèle théorique, Krieger (2001) a subdivisé en 3 catégories les théories des déterminants sociaux de la santé qui ne sont pas mutuellement exclusives. Il s’agit : a) des approches psychosociales qui mettent l’accent sur l’idée que ce sont les expériences et les perceptions des personnes au sein des sociétés inéquitables qui mènent au stress et à la mauvaise santé; b) de la production sociale de la maladie qui se soucie d’abord des déterminants politiques et économiques de la santé et de la maladie et qui pour comprendre les liens entre les inégalités sociales et la santé doivent s’intéresser davantage aux causes structurelles (ex. : le revenu) plutôt qu’aux perceptions de l’inégalité; c) de la théorie écosociale et d’autres approches multi-niveaux qui intègrent les facteurs sociaux et biologiques au sein d’une dynamique historique et écologique afin de mieux cerner les déterminants de la distribution populationnelle de la maladie et des inégalités de santé.

Figure 1 : Modèle de l’influence des déterminants de la santé

Source : Dahlgren, G. et M. Whitehead (1991). Policies and Strategies to Promote Social Equity in Health. Stockholm : Institute for Futures Studies.

Selon Mikkonen et Raphael (2010), le modèle de déterminants sociaux de la santé utilisé en 2002 par l’Université York se révèle particulièrement utile pour comprendre pourquoi certains Canadiens se portent mieux que d’autres. Ce modèle qui détaille celui développé par Dahlgren & Whitehead (1991) comporte 14 déterminants sociaux de la santé, à savoir: le chômage et la sécurité d’emploi, l’emploi et les conditions de travail, le filet de sécurité

sociale, l’insécurité alimentaire, la petite enfance, le revenu et la répartition du revenu, le sexe, l’éducation, l’exclusion sociale, le handicap, le logement, la race, les services de santé et le statut d’Autochtone (Raphael, 2009)

Il appert que chacun de ces déterminants sociaux de la santé influence la santé physique et mentale de la population canadienne. Cette incidence se révèle beaucoup plus considérable que les autres aspects pouvant affecter la qualité de vie, comme le tabagisme ou l’alcoolisme (Raphael, 2009). Selon Mikkonen & Raphael (2010), des éléments probants qui consistent en la compréhension des structures sociales et des rapports de force ont permis, en outre, de démontrer que l’injustice sociale tue à grande échelle. Par exemple, les personnes aux prises avec des conditions de vie sociale et matérielle défavorables souffrent d’un haut niveau de stress physiologique et psychologique. Les expériences stressantes découlent du fait de devoir composer avec des situations de précarité financière et d’emploi, une piètre qualité du logement, de l’insécurité alimentaire, des conditions de travail inadéquates, et diverses formes de discrimination fondées sur le statut social comme l’âge, la race ou le fait d’être une personne immigrante, etc. Selon Mikkonen et Raphael, l’absence d’un réseau de soutien, l’isolement social et la méfiance de la part des autres viennent accroître davantage le stress. Cette réflexion apporte un éclairage sur les facteurs qui freinent ou qui compromettent l’intégration socioéconomique des PAIA. Elle permet de plus aux intervenants qui travaillent auprès de cette population de mieux tenir compte de la particularité des besoins et des conditions de vie de cette population, de pouvoir lutter contre les inégalités et plus particulièrement contre les iniquités sur le plan de la santé (Dahlgren & Whitehead, 1991).

Pour Mikkonen et Raphael (2010), le revenu s’avère le plus important des déterminants sociaux de la santé et son niveau détermine les conditions de vie en général. Ces auteurs affirment qu’au Canada, le niveau de revenu détermine la qualité d’autres déterminants sociaux de la santé, comme la sécurité alimentaire, le logement et les autres conditions de base pour la santé. Globalement, l’approche des déterminants sociaux de la santé nous aide à mieux comprendre les difficultés vécues par les PAIA qui seront interrogées en interprétant les données recueillies à la lumière de celle-ci.

3. La théorie d'exclusion et d’inclusion socioéconomique

Même si dans leurs premières formulations dans les années 1990, les concepts d’exclusion et d’inclusion ont été critiqués (Paugam, 1996), ils sont maintenant largement utilisés dans les travaux récents sur la migration et le vieillissement comme notions pivots pour analyser la pauvreté et ses effets négatifs, ainsi que les inégalités vécues spécifiquement par les personnes âgées et par les immigrants (Freiler, 2001; Kneale, 2012; Podnieks, 2006). La pauvreté des personnes âgées et immigrantes est en grande partie causée par une exclusion de la part des institutions publiques, privées et civiques. Toutefois, bien que cette exclusion soit créée et maintenue par de puissants groupes d’intérêt, des recherches empiriques ont établi des liens entre la pauvreté chronique et le statut d’être un immigrant récent et âgé (Da & Garcia, 2010; Elgersma, 2010)

La théorie de l’inclusion et de l’exclusion socioéconomique de Shookner (2002) a été utilisée dans cette recherche parce qu’elle est l’un des cadres les plus utilisés en santé publique pour décrire, évaluer et expliquer les besoins en intégration socioéconomique des immigrants (figure 2). Cette théorie nous permettra de décrire scientifiquement les expériences vécues par les PAIA en matière d’intégration socioéconomique parce que les critères d’inclusion et d’exclusion développés par Shookner ont été validés empiriquement dans plusieurs recherches dans le domaine de la santé depuis 2002.

Éléments d'exclusion Éléments d'inclusion

› pauvreté › chômage › emploi atypique

› revenu insuffisant pour les besoins essentiels et participation à la société › inclusion de la stigmatisation › embarras › inégalité › disparités de revenu › privation › insécurité › dévaluation de soins › analphabétisme

› manque d'accès à l'éducation

› un revenu suffisant pour les besoins de base et la participation dans la société › éradication de la pauvreté › emploi › capacité de développement personnel › sécurité personnelle, › développement durable › réduire les disparités › valeur et soutien aux aidants naturels

Figure 2 : Modèle d’exclusion et d’inclusion socioéconomique

Source: Shookner, M. (2002). An inclusion lens: Workbook for looking at social and economic exclusion and inclusion.

Inclusion et