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I- 2.4 Une école aujourd'hui forcée de prendre des mesures : drames et protocoles

2.4.1. Protocoles attentats

A notre époque, les images de violence causées par des événements comme des attentats terroristes, sont accessibles en un clic. Le développement de la technologie permet d’avoir des images filmées en direct, du concret, sans filtre. Une violence disponible pour tous. De plus, lors d’un drame de ce type, les chaînes de télévision font des flash-spéciaux en continu : difficile pour un enfant de ne pas être confronté à ces images. La mort devient alors concrète, réelle. Elle fait peur aux adultes et sa causalité prend un visage humain. L’enfant se pose alors de très nombreuses questions. Il voit des hommes, des femmes et des enfants en détresse, il voit des corps, du sang, des blessés graves et des morts. Il transpose donc cela à sa propre vie, comprenant que la mort peut arriver n’importe où et n’importe quand dans la vie de tous les jours. La tristesse et les réactions des adultes le touchent directement.

Nous l’avons dit, un enfant ne vient pas à l’école en laissant derrière lui ses émotions. Lors des attentats, notamment ceux de 2015, il s’est posé dans les écoles le problème suivant : Comment réagir face aux questions des enfants ? La mort s’introduit comme une invitée indésirable dont on ne sait pas quoi faire. L’institution a réagi, comprenant bien l’enjeu de parler de tout cela avec les enfants, de tenter de leur expliquer l’incompréhensible. C’est ce sur quoi a insisté Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale à ce moment-là, elle savait que l’école allait être en première ligne, en termes de polémiques, mais aussi de questionnements et de réactions extrêmement fortes. Dans sa lettre adressée aux professeurs à la suite de ces événements, Najat Vallaud-Belkacem demande de mettre en place des discussions ouvertes au sein de l’école. Sur le site Eduscol, on trouve des outils d’auto-formations pour aider les professeurs. Les outils principaux comme Savoir accueillir la parole des élèves après un attentat ou encore Liberté de conscience, liberté d’expression : outils pédagogiques pour réfléchir et débattre avec les élèves, sont publiés respectivement le 27 mars 2018 et le 17 janvier 2015. Ils préconisent, entre autres, de faire une évaluation de la discussion avec les élèves, et en cas de besoin, de privilégier les co-interventions avec les personnels sociaux et de santé. L’éducation nationale préconise différents grands « repères » :

30 - Accueillir l’expression de l’émotion des élèves : sans sous-estimer leur capacité à saisir

la gravité des situations, y compris chez les très jeunes enfants. - Rassurer les élèves

- Etre attentif au « niveau de connaissances » que les élèves ont de l’événement. - Respecter la sensibilité des élèves.

- Respecter l’émotion.

- Construire une réflexion problématisée.

- Définir en équipe pédagogique les actions envisagées. - Informer les responsables légaux.

- S’appuyer sur le collectif : un travail en équipe permettant aux adultes de s’entraider. - S’appuyer sur les organisations habituelles de l’école : dissiper les inquiétudes en

gardant une certaine routine.

- Adapter le propos à l’âge des élèves. La ressource Eduscol propose ici deux grandes classes d’âge. Pour l’école maternelle il est dit que : « la référence à l’apaisement, au retour à la normale suffiront à rassurer les élèves […] L’enseignant s’adressera aux élèves en utilisant des formulations générales et simples, notamment en référence aux valeurs fondamentales (le bien ou le mal, le juste ou l’injuste, le respect de la personne etc.) 27» A l’école élémentaire : « Les élèves peuvent avoir intégré le concept de mort et associer aux actes leurs conséquences. L’irréparable étant commis, c’est autour de la réprobation générale, de la force de la Loi, de la protection publique, du rôle de protection qu’ont les adultes à l’égard des enfants que pourraient se développer les échanges avec eux. »

C’est lors d’événements comme ceux-là que l’on remarque que les professeurs des écoles ne peuvent pas rendre leurs classes hermétiques, ils doivent se préparer à être forcés, un jour, à répondre aux interrogations des élèves. L’actualité n’échappe pas aux élèves, c’est notre rôle aussi d’être un médiateur entre les éléments de la vie qu’ils ne comprennent pas, ou qui les effraient, et leur connaissance de la vie. De nombreux témoignages de cette période de notre actualité ont montré la détresse des professeurs des écoles face à ce sujet, ne sachant pas comment expliquer un événement aussi dramatique à leurs élèves. Ce qui illustre encore une fois le manque de formation, mais aussi le reflet de la société qui s’insère dans cette question de la mort. Le fait de ne

27 Eduscol, Ministère de l’Education nationale et de la jeunesse, Savoir accueillir la parole des élèves après un attentat, 27 mars 2018, p.4

31 jamais en parler crée un raz-de-marée. Un événement dont on ne peut pas se détourner nous fait perdre nos moyens. Cette perte de moyens se mêle à notre affectation personnelle. Si l’école avait parlé de la mort au préalable, il semblerait que les professeurs des écoles auraient pu se sentir dans de meilleures conditions pour répondre aux angoisses des élèves. Ils auraient été à l’aise avec la forme. Et les élèves plus familiers au sujet.